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24/10/1989 | FRANCE | N°89NC00372;89NC00373

France | France, Cour administrative d'appel de Nancy, Pleniere, 24 octobre 1989, 89NC00372 et 89NC00373


Vu 1°) la requête sommaire et le mémoire ampliatif enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 17 novembre 1986 et 16 mars 1987 sous le n° 83149 et au greffe de la Cour administrative le 2 janvier 1989 sous le n° 89NC00372, présentés pour la Chambre de Commerce et d'Industrie de LILLE-ROUBAIX-TOURCOING dont le siège est à LILLE, Palais de la Bourse, tendant à ce que la Cour :
- annule le jugement en date du 26 juin 1986 par lequel le tribunal administratif de LILLE a rejeté partiellement sa demande tendant à la condamnation conjointe et solidaire de l'Etat

et de la Compagnie des Signaux et d'Entreprises Electriques à l...

Vu 1°) la requête sommaire et le mémoire ampliatif enregistrés au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 17 novembre 1986 et 16 mars 1987 sous le n° 83149 et au greffe de la Cour administrative le 2 janvier 1989 sous le n° 89NC00372, présentés pour la Chambre de Commerce et d'Industrie de LILLE-ROUBAIX-TOURCOING dont le siège est à LILLE, Palais de la Bourse, tendant à ce que la Cour :
- annule le jugement en date du 26 juin 1986 par lequel le tribunal administratif de LILLE a rejeté partiellement sa demande tendant à la condamnation conjointe et solidaire de l'Etat et de la Compagnie des Signaux et d'Entreprises Electriques à lui payer la somme de 845 810,12 F avec intérêts de droit à compter du jour de la requête, à raison des désordres qui affectent les candélabres de la zone industrielle de SECLIN ;
- condamne les CSEE et l'Etat à payer la somme de 845 810,12 F avec intérêts de droit à compter du jour de la demande et capitalisation de ces intérêts ;
2°) la requête sommaire et les observations rectificatives enregistrées au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat les 05 janvier 1987 et 25 mai 1987 sous le n° 84175 et au greffe de la Cour administrative d'appel le 02 janvier 1989 sous le n° 89NC00373, présentées pour la SA Compagnie de Signaux et d'Entreprises Electriques dont le siège social est à Paris 15e, 17 place Pernet, tendant à ce que la Cour :
- annule le jugement en date du 26 juin 1986 par lequel, le tribunal administratif de LILLE l'a condamnée à payer la somme de 236 625,44 F à la Chambre de Commerce et d'Industrie de LILLE-ROUBAIX-TOURCOING à raison des désordres affectant les candélabres de la seconde tranche des travaux exécutés sur la zone industrielle de SECLIN ;
- rejette la demande présentée par la Chambre de Commerce et d'Industrie ;
Vu les ordonnances du 1er décembre 1988 par lesquelles le Président de la 4ème sous-section de la section du contentieux du Conseil d'Etat a transmis les dossiers à la Cour administrative d'appel ;
Vu le jugement attaqué ;
Vu les autres pièces des dossiers ;
Vu le code des marchés publics ;
Vu le code des communes ;
Vu le code des tribunaux administratifs et des cours administratives d'appel ;
Vu la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 et les décrets n° 88-707 du 9 mai 1988 et le décret n° 88-906 du 2 septembre 1988 ;
Les parties ayant été dûment averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience du 10 octobre 1989 :
- le rapport de M. LAPORTE, Conseiller ;
- les observations de Me WAQUET, avocat de la C.C.I. de LILLE-ROUBAIX-TOURCOING, et de Me de la VARDE, avocat de la C.S.E.E. ;
- et les conclusions de Mme FRAYSSE, Commissaire du Gouvernement ;

Considérant que la requête n° 89NC00373, présentée par la Compagnie de Signaux et d'Entreprises Electriques (C.S.E.E.), et la requête n° 89NC00372, présentée par la Chambre de Commerce et d'Industrie de LILLE-ROUBAIX-TOURCOING, sont relatives à un même litige ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par une seule décision ;
Considérant qu'à la suite d'une demande de la Chambre de Commerce et d'Industrie de LILLE-ROUBAIX-TOURCOING tendant à obtenir, sur le fondement de la garantie décennale et subsidiairement sur le fondement de la responsabilité contractuelle, la réparation du préjudice résultant pour elle des désordres affectant les candélabres installés sur la zone industrielle de la commune de SECLIN pour l'éclairage public de ce quartier, le tribunal administratif de LILLE a, par jugement du 26 juin 1986, d'une part, rejeté la demande en tant qu'elle concernait la première tranche des travaux d'installation des réverbères et qu'elle tendait à la mise en cause de la responsabilité de l'Etat, maître d'oeuvre des aménagements de voiries et réseaux et, d'autre part, condamné sur le fondement de la garantie décennale la Compagnie de Signaux et d'Entreprises Electriques à payer une indemnité de 236 625,44 F pour le remplacement des candélabres de la 2ème tranche de travaux ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
Considérant que si la Chambre de Commerce et d'Industrie soutient que les premiers juges ont omis de statuer sur les conclusions présentées subsidiairement et tendant à la mise en cause de la responsabilité contractuelle des constructeurs, il résulte des énonciations du jugement attaqué qu'en accueillant ses conclusions fondées sur la garantie décennale, le tribunal a implicitement mais nécessairement écarté sa demande fondée sur la responsabilité contractuelle éventuellement encourue ; qu'ainsi, le tribunal n'a pas entaché son jugement d'un vice de nature à en entraîner l'annulation ; que dès lors, la Chambre de Commerce et d'Industrie n'est pas fondée à contester la régularité du jugement attaqué en date du 26 juin 1986 ;
Sur la recevabilité de la requête :

Considérant que par un jugement en date du 06 novembre 1980, devenu définitif, le tribunal administratif de LILLE a rejeté la requête présentée par la Ville de SECLIN tendant à la condamnation conjointe et solidaire de la Chambre de Commerce et d'Industrie de LILLE-ROUBAIX-TOURCOING, de la Compagnie de Signaux et d'Entreprises Electriques et de l'Etat au motif que la ville n'avait pas qualité pour agir ; que la Chambre de Commerce et d'Industrie ayant présenté, le 24 décembre 1981, une requête tendant à la condamnation conjointe et solidaire de la Compagnie de Signaux et d'Entreprises Electriques et de l'Etat, la Compagnie de Signaux et d'Entreprises Electriques a contesté la recevabilité de cette demande au motif que la Chambre de Commerce et d'Industrie n'avait pas qualité pour agir ; que le tribunal a écarté ce moyen en opposant l'exception tirée de l'autorité de la chose jugée par le jugement du 06 novembre 1980 aux termes duquel la Chambre de Commerce et d'Industrie, qui s'était comportée en maître de l'ouvrage lors des travaux d'installation des candélabres, avait conservé cette qualité et était recevable à introduire l'action en responsabilité décennale à l'encontre des constructeurs ;
Considérant que le jugement du 06 novembre 1980 a été rendu dans une instance engagée par la ville de SECLIN ; que la Chambre de Commerce et d'Industrie, alors codéfendeur avec la Compagnie de Signaux et d'Entreprises Electriques et l'Etat, a, par la requête sur laquelle le tribunal administratif a statué par le jugement actuellement attaqué, intenté une action contre la Compagnie de Signaux et d'Entreprises Electriques et l'Etat ; qu'ainsi, les parties n'agissant plus dans cette nouvelle procédure en la même qualité que dans l'instance précédente, le tribunal administratif s'est fondé à tort sur l'autorité de la chose jugée par son jugement du 06 novembre 1980 pour déclarer recevable ladite requête ;
Considérant toutefois qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par les parties devant le tribunal administratif de LILLE ;
Considérant qu'il résulte de l'instruction que, par une délibération du conseil municipal en date du 16 avril 1966, la commune de SECLIN a confié à la Chambre de Commerce de LILLE le soin "en tant que maître d'oeuvre" de conclure tous contrats, actes et conventions nécessaires à la réalisation d'une zone industrielle sur le territoire de la commune de SECLIN ; qu'ainsi, la Chambre de Commerce et d'Industrie est intervenue en qualité de maître d'ouvrage délégué ; qu'elle a obtenu le concours technique des Ponts et Chaussées le 09 octobre 1969 ; qu'en sa qualité de maître d'ouvrage délégué et à défaut de clause contraire, la mission de la Chambre de Commerce devait s'achever aux dates des réceptions définitives des travaux ; qu'à compter de ces dates, seul le propriétaire des ouvrages avait qualité pour invoquer la garantie décennale qui pèse sur les constructeurs en application des principes dont s'inspirent les articles 1792 et 2270 du code civil :

Considérant que les réceptions provisoires des travaux ont été prononcées sans réserves le 19 mars 1969 pour la première tranche de travaux et le 21 janvier 1971 pour la seconde tranche ; que les opérations de réception définitive ont eu lieu notamment en présence des représentants de la Chambre de Commerce et d'Industrie de SECLIN respectivement le 16 novembre 1971 et le 26 mai 1972 ; que les procès-verbaux de réception définitive ont été signés sans réserve par l'ingénieur subdivisionnaire assurant la maîtrise d'oeuvre ; que si la Chambre de Commerce et d'Industrie fait valoir en appel que son représentant n'a pas signé ces procès-verbaux de réception définitive, l'absence de signature n'est pas en elle-même révélatrice d'un refus de qui aurait été expressément opposé ; qu'il ne résulte de l'instruction ni que la Chambre de Commerce et d'Industrie ait émis des réserves expresses à ces dates, ni qu'elle ait entrepris des démarches auprès des constructeurs en vue de remédier sans délai aux désordres qui, selon elle, auraient justifié un refus de signature ; que, dans ces conditions, les réceptions définitives des travaux doivent être regardées comme acquises sans réserves aux dates des 16 novembre 1971 et 26 mai 1972 ; que la Chambre de Commerce et d'Industrie dont la mission s'est achevée à ces dates n'avait dès lors pas qualité pour agir, devant le tribunal administratif, sur le fondement de la garantie décennale, à l'encontre du constructeur ; que, par suite, sa demande n'était pas recevable ;
Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la Compagnie de Signaux et d'Entreprises Electriques est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de LILLE a accueilli les conclusions présentées par la Chambre de Commerce et d'Industrie de LILLE-ROUBAIX-TOURCOING et l'a condamnée à payer à cet établissement public la somme de 236 625,44 F ; qu'il y a lieu, par suite, de rejeter la requête de la Chambre de Commerce et d'Industrie de LILLE-ROUBAIX-TOURCOING ;
Article 1 : Le jugement du tribunal administratif de LILLE en date du 26 juin 1986 est annulé.
Article 2 : La requête présentée par la Chambre de Commerce et d'Industrie de LILLE-ROUBAIX-TOURCOING devant le tribunal administratif de LILLE est rejetée.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la Chambre de Commerce et d'Industrie de LILLE-ROUBAIX-TOURCOING, à la Compagnie de Signaux et d'Entreprises Electriques et au ministre de l'Equipement, du Logement, des Transports et de la Mer.


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nancy
Formation : Pleniere
Numéro d'arrêt : 89NC00372;89NC00373
Date de la décision : 24/10/1989
Sens de l'arrêt : Annulation
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

- RJ1 MARCHES ET CONTRATS ADMINISTRATIFS - RAPPORTS ENTRE L'ARCHITECTE - L'ENTREPRENEUR ET LE MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE DES CONSTRUCTEURS A L'EGARD DU MAITRE DE L'OUVRAGE - RESPONSABILITE DECENNALE - QUALITE POUR LA METTRE EN JEU - Absence - Maître d'ouvrage délégué (1).

39-06-01-04-01 Par une délibération du conseil municipal, la commune de Seclin a confié à la chambre de commerce de Lille le soin "en tant que maître d'oeuvre" de conclure tous contrats, actes et conventions nécessaires à la réalisation d'une zone industrielle sur le territoire de la commmune. La chambre de commerce et d'industrie est ainsi intervenue en qualité de maître d'ouvrage délégué. En cette qualité et à défaut de clause contraire, la mission de la chambre de commerce devait s'achever aux dates des réceptions définitives des travaux. A compter de ces dates, seul le propriétaire des ouvrages avait qualité pour invoquer la garantie décennale qui pèse sur les constructeurs.

- RJ2 PROCEDURE - JUGEMENTS - CHOSE JUGEE - CHOSE JUGEE PAR LA JURIDICTION ADMINISTRATIVE - ABSENCE - Défaut d'identité des parties - Identité de qualité (2).

54-06-06-01-01 Par premier jugement devenu définitif, le tribunal administratif a rejeté la requête de la commune de Seclin tendant à la condamnation conjointe et solidaire de la chambre de commerce de Lille-Roubaix-Tourcoing, de la Compagnie des signaux et d'entreprises électriques, et de l'Etat, au motif que la commune n'avait pas qualité pour agir. Saisi ensuite d'une requête de la chambre de commerce et d'industrie de Lille-Roubaix-Tourcoing tendant à la condamnation de la Compagnie des signaux et d'entreprises électriques et de l'Etat, le tribunal administratif ne pouvait, par le jugement attaqué rendu sur cette seconde requête, écarter la fin de non recevoir opposée par la Compagnie en se fondant sur l'autorité de la chose jugée par son premier jugement, dès lors que les parties n'ont pas agi, dans cette nouvelle procédure, en la même qualité que dans l'instance précédente.


Références :

Code civil 1792, 2270

1.

Cf. CE, 1982-03-05, Ministre de l'éducation c/ Ringuez, p. 103. 2.

Rappr. CE, 1948-05-21, Ministre des travaux publics c/ commune de Thun-L'Evêque, p. 228


Composition du Tribunal
Président : M. Jacquin-Pentillon
Rapporteur ?: M. Laporte
Rapporteur public ?: Mme Fraysse

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nancy;arret;1989-10-24;89nc00372 ?
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