Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. E... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du 18 mars 2014 par laquelle le recteur de l'académie d'Aix-Marseille a rejeté sa demande tendant à l'octroi d'une bourse d'enseignement supérieur sur critères sociaux au titre de l'année universitaire 2011-2012 et de lui enjoindre, sous astreinte, à lui verser le montant de cette bourse.
Par une ordonnance n° 1403431 du 15 novembre 2018, la présidente de la 9ème chambre du tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande, en application des dispositions de l'article R. 222-1, 7°, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et des mémoires enregistrés le 13 mai 2019 et le 20 décembre 2019, M. E... A..., représenté par Me Belarbi puis Me Akacha, demande à la Cour :
1°) d'annuler cette ordonnance ;
2°) d'annuler la décision du 18 mars 2014 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'ordonnance attaquée est irrégulière au regard de l'article 25 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- la décision attaquée est insuffisamment motivée au regard des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration ;
- elle ne peut être légalement fondée sur la circulaire n° 2011-0011 du 28 juin 2011 qui est postérieure à sa demande déposée le 5 juin 2011 ;
- l'annulation définitive, par des jugements n° 1106757 et n° 1107013 du 23 janvier 2014, des décisions des 22 août 2011 et 5 septembre 2011 lui refusant le bénéfice de la bourse litigieuse, a créé à son profit un droit acquis au versement de cette bourse ;
- la décision contestée est tardive au regard du principe de sécurité juridique ;
- elle méconnaît enfin la circulaire du 28 juin 2011.
Le mémoire présenté par M. E... A..., sans avocat, le 25 février 2020, n'a pas été communiqué, sur le fondement de l'article R. 611-1 du code de justice administrative.
Par un mémoire, enregistré le 27 février 2020, le recteur de l'académie d'Aix-Marseille demande à la Cour de rejeter la requête.
Il soutient que :
- le moyen de légalité externe tiré de l'insuffisante motivation de la décision attaquée, qui se rattache à une cause juridique nouvelle qui n'avait pas été invoquée en première instance, est irrecevable ;
- les autres moyens de la requête ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 31 mai 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 1er juillet 2022 à midi en application de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.
Par courrier du 5 juillet 2022, Me Akacha a informé la Cour que M. E... A... l'avait dessaisie et avait sollicité la désignation d'un nouvel avocat auprès du bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Marseille.
Par une ordonnance du 8 septembre 2022 l'instruction a été rouverte sur le fondement de l'article R. 613-4 du code de justice administrative et par une seconde ordonnance du même jour une nouvelle date de clôture a été fixée au 6 octobre 2022 à midi.
Par courrier du 19 décembre 2022, la Cour a communiqué à M. E... A... la copie de la décision du bâtonnier du barreau de Marseille du 7 juillet 2022 refusant de lui désigner un nouvel avocat et lui a accordé un délai de deux mois, en application de la décision CE 22 juillet 2020 n° 425 348 M. B..., pour justifier, soit avoir obtenu le concours d'un avocat, soit avoir contesté devant le juge judiciaire le refus de désignation du bâtonnier.
Par courrier du 3 mars 2023, M. E... A... a informé la Cour qu'il avait demandé l'aide juridictionnelle dans le cadre de sa contestation du refus du bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Marseille de lui désigner un avocat.
Le 20 septembre 2023, le Premier président de la cour d'appel d'Aix-en-Provence a rejeté la contestation de M. E... A... du rejet de sa demande d'aide juridictionnelle du 11 avril 2023.
Par une mesure d'instruction du 7 décembre 2023 la Cour a sur le fondement de l'article R. 613-1-1 du code de justice administrative, demandé à M. E... A..., de justifier, dans un délai de huit jours, avoir obtenu le concours d'un avocat ou avoir contesté devant le juge judiciaire le refus du bâtonnier de l'ordre des avocats du barreau de Marseille de lui désigner d'office un nouvel avocat, et l'a informé que passé ce délai son dossier pourrait être audiencé.
Les mémoires présentés par M. E... A... le 7 décembre 2023 et le 25 janvier 2024 après la clôture de l'instruction n'ont pas été communiqués.
Par des mémoires, enregistrés les 7 décembre 2023, 25 janvier 2024 et 26 janvier 2024, après la clôture de l'instruction, M. C... A... a indiqué intervenir volontairement à la procédure, sur le fondement de l'article R. 631-1 du code de justice administrative, au soutien de la demande de son fils M. E... A..., et a précisé avoir déposé le même jour une demande d'aide juridictionnelle auprès du tribunal judiciaire de Marseille à cet effet.
M. E... A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle établi près le tribunal judiciaire de Marseille du 22 février 2019.
Par une décision du 26 janvier 2024, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Marseille a rejeté la demande d'aide juridictionnelle présentée par M. C... A....
Par une ordonnance du 30 janvier 2024 qui vise les mémoires enregistrés les 25 et 29 janvier 2024 par M. E... A... et M. C... A..., la présidente de la Cour a décidé qu'il n'y avait pas lieu de statuer sur la demande de récusation du président Alexandre Badie présentée par M. E... A... et a rejeté, comme irrecevable, la demande de récusation du président Renaud Thielé.
La présidente de la Cour a désigné M. Renaud Thielé, président assesseur de la 6ème chambre pour présider, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'éducation ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le décret du 9 janvier 1925 instituant un régime unique pour l'attribution des bourses nationales dans les enseignements publics du deuxième degré et leur extension à l'enseignement supérieur ;
- la circulaire n° 2011-013 du 28 juin 2011 relative aux modalités d'attribution des bourses d'enseignement supérieur sur critères sociaux pour l'année 2011-2012 et ses annexes ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Isabelle Gougot, rapporteure,
- et les conclusions de M. François Point, rapporteur public.
MM. E... et Jean François Denis A..., présents au début de l'audience publique sans être assistés d'un avocat, s'étant opposés à l'appel de leur affaire, et ayant refusé à trois reprises de s'asseoir à l'invitation du président, ont été expulsés de la salle d'audience.
Considérant ce qui suit :
1. M. E... A... a été inscrit en première année de droit à l'université Aix-Marseille, pour les années universitaires 2009-2010 et 2010-2011, au titre desquelles il a bénéficié d'une bourse d'enseignement supérieur sur critères sociaux. Ayant souhaité se réinscrire dans le même cursus pour l'année universitaire 2011-2012, il a à nouveau sollicité le bénéfice d'une telle bourse. Mais par deux décisions des 22 août 2011 et 5 septembre 2011, le directeur du centre des œuvres universitaires et scolaires (CROUS) de l'académie d'Aix-Marseille a rejeté sa demande. Par des jugements n° 1106757 et n° 1107013 du 23 janvier 2014 devenus définitifs, le tribunal administratif de Marseille a annulé ces décisions en raison de leur motivation insuffisante. Dans le cadre du réexamen de la demande, par une décision du 18 mars 2014, le recteur de l'académie d'Aix-Marseille a de nouveau rejeté la demande de bourse présentée par M. E... A.... Ce dernier relève appel de l'ordonnance n° 1403431 du 15 novembre 2018 par laquelle la présidente de la 9ème chambre du tribunal administratif de Marseille a, en application des dispositions de l'article R. 222-1 7° du code de justice administrative, rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.
Sur l'intervention volontaire de M. C... A... :
2. Aux termes de l'article R. 632-1 du code de justice administrative : " L'intervention est formée par mémoire distinct. / (...) Le président de la formation de jugement ou le président de la chambre chargée de l'instruction ordonne, s'il y a lieu, que ce mémoire en intervention soit communiqué aux parties et fixe le délai imparti à celles-ci pour y répondre./ Néanmoins, le jugement de l'affaire principale qui est instruite ne peut être retardé par une intervention. ".
3. L'intervention présentée par M. C... A..., père de l'appelant, au soutien de ce dernier, a été enregistrée le 7 décembre 2023, après la clôture de l'instruction intervenue le 6 octobre 2022. Le jugement de l'affaire principale, qui est instruite, ne pouvant être retardé par une intervention, il n'y a pas lieu de rouvrir l'instruction pour prendre en compte cette intervention.
Sur la régularité de l'ordonnance du 15 novembre 2018 :
4. D'une part, aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " ... les présidents de formation de jugement des tribunaux (...) peuvent, par ordonnance : (...) 7° Rejeter, après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire, les requêtes ne comportant que des moyens de légalité externe manifestement infondés, des moyens irrecevables, des moyens inopérants ou des moyens qui ne sont assortis que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ou ne sont manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé. (...) ".
5. D'autre part, la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique prévoit, en son article 2, que les personnes physiques dont les ressources sont insuffisantes pour faire valoir leurs droits en justice peuvent bénéficier d'une aide juridictionnelle et, en son article 25, que le bénéficiaire de l'aide juridictionnelle a droit à l'assistance d'un avocat choisi par lui ou, à défaut, désigné par le bâtonnier de l'ordre des avocats. Il résulte des articles 76 et 77 du décret du 19 décembre 1991 portant application de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique que si la personne qui demande l'aide juridictionnelle ne produit pas de document attestant l'acceptation d'un avocat choisi par lui, l'avocat peut être désigné sur-le-champ par le représentant de la profession qui siège au bureau d'aide juridictionnelle, à condition qu'il ait reçu délégation du bâtonnier à cet effet.
6. Afin d'assurer le bénéfice effectif du droit qu'un requérant tire de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, lorsque l'avocat désigné au titre de l'aide juridictionnelle s'est borné à se constituer et à annoncer la production d'un mémoire en défense, mais qu'il n'a ni produit ce mémoire annoncé, ni ne s'est approprié le mémoire que son client avait présenté sans son ministère, il appartient au juge, avant de statuer, de le mettre en demeure d'accomplir, dans un délai déterminé, les diligences qui lui incombent et de porter cette carence à la connaissance de l'intimé, afin de le mettre en mesure, le cas échéant, de choisir un autre représentant.
7. Il ressort des pièces du dossier de première instance, que la demande introductive d'instance de M. E... A... enregistrée le 7 mai 2014 a été présentée sans ministère d'avocat. Par des mémoires enregistrés les 20 et 24 janvier 2017, M. A... a, par ailleurs, informé le tribunal du dépôt le 6 septembre 2016 d'une demande d'aide juridictionnelle et sollicité un renvoi d'audience afin de permettre à l'avocat désigné pour le représenter de déposer un mémoire dans ses intérêts. Par décision du 25 novembre 2016, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Marseille a accordé l'aide juridictionnelle totale à M. E... A... pour la même instance. Enfin, par lettre du 13 février 2017, le tribunal a mis en demeure l'avocat désigné par le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Marseille pour représenter M. E... A..., d'accomplir, dans les trente jours, les diligences qui lui incombaient, ce dont il s'est toutefois abstenu.
8. Si l'ordonnance attaquée mentionne que M. E... A... a été informé par courrier du 14 février 2017 de la carence de son conseil désigné, M. E... A... conteste avoir reçu ce courrier, qui a été envoyé en pli simple sans accusé de réception. En l'absence au dossier de toute preuve de réception de ce courrier, le requérant est donc fondé à soutenir que l'ordonnance a été prise au terme d'une procédure irrégulière et à en demander l'annulation.
9. Il y a lieu, pour la Cour, d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Marseille.
Sur la légalité de la décision du 18 mars 2014 :
10. En premier lieu, la décision attaquée vise les textes applicables et notamment la circulaire ministérielle n° 2011-0013 du 28 juin 2011 relative aux modalités d'attribution des bourses d'enseignement supérieur sur critères sociaux selon laquelle il ne peut être accordé un troisième droit à bourse que si l'étudiant a validé au moins soixante crédits, deux semestres ou une année ou est admis par son établissement d'inscription à passer en année supérieure, quel que soit le nombre de crédits, de semestres ou d'années d'études précédemment validées, dans la limite des droits ouverts pour chaque cursus. Elle précise que l'intéressé, qui a été inscrit successivement en 2009-2010 et en 2010-2011 en première année de droit à Marseille, s'est ensuite réinscrit en première année de droit à la rentrée 2011-2012. Elle ajoute que du fait de son triplement en première année de droit, M. E... A... ne remplit pas les critères requis pour l'obtention d'un troisième droit à bourse au titre de l'année 2011-2012. La décision contestée comporte donc les éléments de droit et de fait sur lesquels elle se fonde. Le requérant n'est par conséquent pas fondé à soutenir qu'elle méconnaît les dispositions des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration.
11. En deuxième lieu, les critères d'attribution des bourses d'enseignement supérieur sur critères sociaux sont exclusivement fixés, pour l'année universitaire 2011-2012, par la circulaire du 28 juin 2011 susvisée, qui n'est entachée d'aucune rétroactivité dès lors qu'elle s'applique à des situations juridiquement constituées postérieurement à son entrée en vigueur. Ni la circonstance que la demande de bourse présentée par M. E... A... ait été présentée le 5 juin 2011, avant l'édiction de la circulaire, ni la circonstance que le recteur a été amené à statuer à nouveau sur cette demande après l'annulation de sa première décision de refus, ne sont de nature à faire obstacle à l'application de ce texte.
12. En troisième lieu, l'annulation définitive, évoquée au point 1, par les jugements du 23 janvier 2014, des décisions des 22 août 2011 et 5 septembre 2011 lui refusant le bénéfice de la bourse litigieuse, a été prononcée pour un motif de légalité externe et n'a créé au profit de M. E... A... aucun droit acquis au versement de cette bourse. L'autorité administrative pouvait par suite, dans le cadre d'un nouvel examen de sa demande, à nouveau en refuser l'octroi.
13. En quatrième lieu, le requérant ne peut utilement, à l'appui de sa contestation de la seconde décision de refus qui lui a été opposée après l'annulation du premier refus, faire valoir qu'en statuant plus de deux ans et demie après sa demande, l'autorité administrative aurait méconnu le principe de sécurité juridique.
14. En cinquième lieu, aux termes de la circulaire n° 2011-0013 du 26 juin 2011 relative aux modalités d'attribution des bourses d'enseignement supérieur sur critères sociaux pour l'année 2011-2012 : " 1.1 conditions d'attribution : Le 3e droit ne peut être accordé que si l'étudiant a validé au moins 60 crédits, 2 semestres ou une année. ". Si le requérant soutient qu'il avait validé sa première année de droit en 2011-2012 et qu'il demandait une bourse pour sa deuxième année de droit au titre de l'année 2011-2012, le recteur le conteste et M. E... A... n'apporte aucun élément au soutien de son allégation.
15. Il résulte de ce qui précède que M. E... A... n'est pas fondé à soutenir que la décision du 18 mars 2014 est illégale. Ses conclusions à fin d'annulation de cette décision, ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par suite, qu'être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : L'ordonnance n° 1403431 du 15 novembre 2018 de la présidente de la 9ème chambre du tribunal administratif de Marseille est annulée.
Article 2 : La demande de première instance, et le surplus des conclusions d'appel de M. E... A... est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... A... et au centre des œuvres universitaires et scolaires de l'académie d'Aix-Marseille.
Copie en sera adressée à M. C... A... et au rectorat de l'académie d'Aix-Marseille.
Délibéré après l'audience du 29 janvier 2024, à laquelle siégeaient :
- M. Renaud Thielé, président assesseur, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- Mme Isabelle Gougot, première conseillère,
- Mme Isabelle Ruiz, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 12 février 2024.
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N° 19MA02117