Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Sous le n° 1900136, M. B... C... D... et Mme H... C... D... ont demandé au tribunal administratif de Bastia d'annuler l'arrêté du 6 décembre 2018 par lequel le maire de Loreto-di-Tallano a délivré au nom de l'Etat un permis de construire modificatif à Mme G... F... épouse E... pour des travaux portant sur une construction existante sur un terrain cadastré section A n° 342 et de mettre à la charge de l'Etat et de Mme F... épouse E... une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Sous le numéro 1900532, M. B... C... D... et Mme H... C... D... ont demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 3 avril 2019 par lequel le maire de Loreto-di-Tallano a délivré au nom de l'Etat un permis de construire à Mme G... F... épouse E... pour des travaux portant sur la rénovation et la surélévation d'une construction existante sur un terrain cadastré section A n° 342 et de mettre à la charge de l'Etat et de Mme F... une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1900136 et 1900532 du 3 novembre 2020, le tribunal administratif de Bastia a annulé l'arrêté du 6 décembre 2018, rejeté le surplus des conclusions des parties présentées dans l'instance n° 1900136 et rejeté les conclusions présentées sous le numéro 1900532.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, des pièces et mémoires complémentaires enregistrés les 16 décembre 2020, 13 janvier 2021, 30 novembre 2022 et 13 janvier 2023, ce dernier mémoire n'ayant pas été communiqué, M. B... I... et Mme H... C... D..., représentés par Me Gaschy, demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1900136 et 1900532 du tribunal administratif de Bastia du 3 novembre 2020 en tant qu'il a rejeté leurs conclusions aux fins d'annulation de l'arrêté du 3 avril 2019 ainsi que les conclusions présentées au titre des frais d'instance et a mis à leur charge la somme de 1 500 euros ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat et de Mme F... épouse E... le paiement de la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et le paiement des entiers dépens.
Ils soutiennent que :
- ils ont intérêt pour agir ;
- l'autorité de la chose jugée par jugement du tribunal administratif de Bastia du 6 décembre 2018 a été méconnue ;
- les travaux devant être réalisés sur un mur mitoyen du leur, leur accord préalable était requis ;
- Mme F... est à l'origine de manœuvres dolosives afférentes à la parcelle cadastrée A 343 ;
- les règles de prospect prévues par les dispositions des articles R. 111-17 ou, à titre subsidiaire, R. 111-16 du code de l'urbanisme ont été méconnues.
Par un mémoire enregistré le 18 avril 2021, la commune de Loreto-di-Tallano, représentée par Me Blondio-Mondoloni, demande à la Cour :
1°) de rejeter la requête des consorts C... D... ;
2°) de mettre à la charge des consorts C... D... le paiement de la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens de la requête sont infondés.
Par un mémoire enregistré le 10 juin 2022, Mme G... F... épouse E..., représentée par Me Leandri, demande à la Cour :
1°) de rejeter la requête des consorts C... D... ;
2°) de mettre à la charge des consorts C... D... le paiement de la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les consorts C... D... n'ont pas d'intérêt pour agir ;
- les moyens de la requête sont infondés.
Par un mémoire en défense enregistré le 16 décembre 2022, le ministre de la transition écologique et de la cohésion de territoires demande à la Cour de rejeter la requête des consorts C... D....
Il soutient que les moyens de la requête sont infondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Vincent, présidente assesseure,
- et les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 12 mars 2018, le maire de Loreto-di-Tallano a délivré au nom de l'Etat à Mme G... F... un permis de construire ayant pour objet la rénovation et la surélévation d'une maison individuelle sur un terrain cadastré section A n° 342. Par un jugement n° 1800511 du 6 décembre 2018, le tribunal administratif de Bastia, saisi par M. et Mme C... D..., a annulé cet arrêté du 12 mars 2018. Mme F... épouse E... avait toutefois sollicité, avant la lecture du jugement mentionné ci-dessus, un permis de construire modificatif ayant pour objet la modification de l'emprise de la terrasse et de la passerelle prévues par le projet au vu duquel le permis du 12 mars 2018 lui avait été délivré. Par un arrêté du 6 décembre 2018, le maire de Loreto-di-Tallano a délivré au nom de l'Etat à Mme F... épouse E... le permis de construire modificatif qu'elle avait ainsi sollicité. Par la requête enregistrée sous le numéro 1900136, M. et Mme C... D... ont demandé au tribunal administratif de Bastia d'annuler ce dernier arrêté. Mme F... épouse E... a ensuite demandé à nouveau la délivrance d'un permis de construire pour la rénovation et la surélévation de la même construction et, par un arrêté du 3 avril 2019, le maire de Loreto-di-Tallano lui a délivré au nom de l'Etat le nouveau permis de construire qu'elle avait ainsi sollicité. Par la requête enregistrée sous le numéro 1900532, M. et Mme C... D... ont demandé au tribunal administratif de Bastia d'annuler cet arrêté du 3 avril 2019. Par jugement du 3 novembre 2020, le tribunal administratif de Bastia a annulé l'arrêté du 6 décembre 2018, rejeté le surplus des conclusions des parties présentées dans l'instance n° 1900136 et rejeté les conclusions présentées sous le numéro 1900532. M. et Mme C... relèvent appel de ce jugement en tant qu'il a rejeté leurs conclusions dirigées contre l'arrêté du 3 avril 2019.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. En premier lieu, si les requérants font valoir que le permis de construire du 3 avril 2019 a été délivré à Mme F... en méconnaissance de l'autorité de la chose jugée par le tribunal administratif de Bastia le 6 décembre 2018, lequel avait annulé le permis de construire délivré le 12 mars 2018, il ressort des dossiers de demandes de permis de construire déposés les 1er février 2018 et 18 février 2019 que les deux projets étaient différents en ce qu'avait été supprimée une passerelle, une terrasse, ainsi qu'un débord de toiture sur le côté ouest du bâtiment. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que l'autorité de la chose jugée aurait été méconnue.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme : " Les demandes de permis de construire, d'aménager ou de démolir et les déclarations préalables sont adressées par pli recommandé avec demande d'avis de réception ou déposées à la mairie de la commune dans laquelle les travaux sont envisagés : a) Soit par le ou les propriétaires du ou des terrains, leur mandataire ou par une ou plusieurs personnes attestant être autorisées par eux à exécuter les travaux ; b) Soit, en cas d'indivision, par un ou plusieurs co-indivisaires ou leur mandataire (...) ". Par ailleurs, aux termes de l'article R. 431-5 du même code : " (...) La demande comporte également l'attestation du ou des demandeurs qu'ils remplissent les conditions définies à l'article R.423-1 pour déposer une demande de permis ". Une demande de permis de construire concernant un mur séparatif de propriété peut, alors même que les travaux en cause pourraient être contestés par les autres propriétaires devant le juge judiciaire sur le fondement des articles 653 et suivants du code civil, être présentée par un seul co-indivisaire. En conséquence, sous réserve de la fraude, dès lors que le pétitionnaire fournit l'attestation, prévue à l'article R. 431-5 du code de l'urbanisme, selon laquelle il remplit les conditions définies à l'article R. 423-1 pour déposer une demande de permis, il doit être regardé comme ayant qualité pour présenter cette demande, sans que l'autorité administrative puisse exiger de lui la production d'un document établissant soit qu'il est seul propriétaire du mur mitoyen, soit qu'il a l'accord de l'autre copropriétaire de ce mur.
4. Si, ainsi que le soutiennent les requérants, les travaux de surélévation envisagés par le permis de construire du 3 avril 2019 vont nécessairement porter sur le mur mitoyen séparant la maison sise sur la parcelle A 340 qui appartient aux consorts C... D... et le grenier de la maison sise sur la parcelle A 342 qui appartient en propre à Mme F..., il résulte de ce qui a été dit au point 2 que leur accord préalable n'était toutefois pas requis.
5. En troisième lieu, les requérants font valoir que Mme F... aurait exercé une manœuvre dolosive pour créer une place de stationnement supplémentaire sur la parcelle cadastrée A 343. Toutefois, il est constant que cette parcelle d'une superficie totale de 18a 98ca, qui constitue un bien non délimité, appartient de manière indivise aux requérants et à Mme F..., laquelle n'a par suite, commis aucune manœuvre frauduleuse.
6. En quatrième lieu, aux termes de l'article R. 111-16 du code de l'urbanisme : " Lorsque le bâtiment est édifié en bordure d'une voie publique, la distance comptée horizontalement de tout point de l'immeuble au point le plus proche de l'alignement opposé doit être au moins égale à la différence d'altitude entre ces deux points. Lorsqu'il existe une obligation de construire au retrait de l'alignement, la limite de ce retrait se substitue à l'alignement. Il en sera de même pour les constructions élevées en bordure des voies privées, la largeur effective de la voie privée étant assimilée à la largeur réglementaire des voies publiques. / Toutefois une implantation de la construction à l'alignement ou dans le prolongement des constructions existantes peut être imposée ". Par ailleurs, aux termes de l'article R. 111-17 du même code : " A moins que le bâtiment à construire ne jouxte la limite parcellaire, la distance comptée horizontalement de tout point de ce bâtiment au point de la limite parcellaire qui en est le plus rapproché doit être au moins égale à la moitié de la différence d'altitude entre ces deux points, sans pouvoir être inférieure à trois mètres ".
7. D'une part, il ressort des plans produits par les parties que le bâtiment litigieux est situé, sur sa façade ouest, en limite parcellaire avec la parcelle cadastrée A 126 et non en bordure d'une voie publique ou privée. S'il ressort desdits plans qu'un chemin communal ouvert à la circulation est situé à proximité de cette construction, il n'est toutefois pas situé en bordure de celle-ci. Par suite, les dispositions de l'article R. 111-16 du code de l'urbanisme ne sont, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, pas applicables, seules les dispositions de l'article R. 111-17 du même code devant trouver à s'appliquer.
8. D'autre part, il résulte du plan de coupe établi par l'architecte de la pétitionnaire dans le cadre de sa demande du 18 février 2019 que la différence d'altimétrie entre la limite parcellaire (95,50 m) et le terrain de la construction (88,85m) est de 6,65 m. A... hauteur de la construction, soit 10,52 m, doit donc être ramenée à 3,87 m. Par suite, en application des dispositions précitées de l'article R. 111-17 du code de l'urbanisme, la distance entre tout point de la construction et le point le plus proche de la limite parcellaire à l'ouest doit être de 3 m, soit la distance minimale. Si les consorts C... D... se prévalent d'un constat d'huissier établi le 13 mai 2019 dont il résulterait que la distance entre l'immeuble cadastré A 342 et la limite parcellaire est de 2 mètres, celui-ci, qui ne détaille pas les points à partir desquels ont été prises les mesures, est trop imprécis pour permettre de contredire utilement le plan de l'architecte faisant état, à la suite de la suppression sur la façade ouest d'une passerelle, d'une terrasse et d'un débord de toiture, d'une distance de 3,02 m. Par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les dispositions précitées auraient été méconnues.
9. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir soulevée par Mme F..., que M. et Mme C... D... ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia a rejeté leurs conclusions dirigées contre l'arrêté du 3 avril 2019.
Sur les frais d'instance :
10. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de rejeter les conclusions présentées par chacune des parties en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. et Mme C... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Loreto-di-Tallano et Mme F... fondées sur les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... D..., à Mme H... C... D..., au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, à Mme G... F... épouse E... et à la commune de Loreto-di-Tallano.
Copie en sera adressée au préfet de la Corse-du-Sud.
Délibéré après l'audience du 27 mars 2023, où siégeaient :
- M. Bocquet, président,
- Mme Vincent, présidente-assesseure,
- M. Mérenne, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 12 avril 2023.
N° 20MA0465102