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25/04/2022 | FRANCE | N°21MA03609

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre, 25 avril 2022, 21MA03609


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler, d'une part, la décision du 5 juillet 2016 par laquelle l'inspecteur du travail a autorisé la société SERAMM à le licencier pour motif disciplinaire, d'autre part, la décision implicite de rejet née du silence gardé par la ministre du travail sur son recours hiérarchique contre cette décision.

Par un jugement n° 1700943 du 2 juillet 2019, le tribunal administratif de Marseille a annulé ces deux décisions.

Par un arr

t n° 19MA04116 du 15 juillet 2020, la cour administrative d'appel de Marseille a, sur ap...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler, d'une part, la décision du 5 juillet 2016 par laquelle l'inspecteur du travail a autorisé la société SERAMM à le licencier pour motif disciplinaire, d'autre part, la décision implicite de rejet née du silence gardé par la ministre du travail sur son recours hiérarchique contre cette décision.

Par un jugement n° 1700943 du 2 juillet 2019, le tribunal administratif de Marseille a annulé ces deux décisions.

Par un arrêt n° 19MA04116 du 15 juillet 2020, la cour administrative d'appel de Marseille a, sur appel de la société SERAMM, d'une part, annulé ce jugement et, d'autre part, rejeté la demande présentée par M. D... devant le tribunal administratif de Marseille.

Par une décision n° 444464 du 30 juillet 2021, le Conseil d'Etat statuant au contentieux a, sur pourvoi de M. D... du 15 septembre 2020, annulé cet arrêt et renvoyé l'affaire devant la cour administrative d'appel de Marseille.

Procédure devant la Cour après renvoi :

Par des mémoires enregistrés les 22 septembre et 19 octobre 2021, la société SERAMM, représentée par la SELARL Lusis avocats, demande à la Cour :

1°) d'infirmer le jugement rendu le 2 juillet 2019 par le tribunal administratif de Marseille ;

2°) de confirmer la décision de l'inspecteur du travail du 5 juillet 2016 accordant l'autorisation de procéder au licenciement de M. D... ;

3°) de confirmer la décision implicite de rejet de la ministre du travail, de l'emploi et du dialogue social née le 7 janvier 2017, faisant suite au recours hiérarchique exercé par M. D... le 6 septembre 2016 ;

4°) de confirmer, par suite du renvoi du Conseil d'Etat, la décision rendue le 15 juillet 2020 ;

5°) de mettre à la charge de M. D... une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'inspecteur du travail a compétemment édicté la décision autorisant le licenciement de M. D... ;

- cet inspecteur n'a pas méconnu le principe du contradictoire ;

- les faits commis par M. D... sont constitutifs d'une faute d'une gravité suffisante justifiant son licenciement.

Par un mémoire enregistré le 5 octobre 2021 sous le n° 21MA03609, M. D..., représenté par Me Gavaudan, demande à la Cour :

1°) de confirmer le jugement rendu le 2 juillet 2019 par le tribunal administratif de Marseille ;

2°) de mettre à la charge de la société SERAMM une somme de 10 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le signataire de la décision ne justifie pas de sa compétence ;

- le principe du contradictoire n'a pas été respecté au cours de l'enquête de l'inspecteur du travail ;

- la décision est entachée d'une erreur manifeste quant à l'appréciation des faits invoqués à l'appui de la demande de licenciement ;

- la société SERAMM reprend des griefs qui n'ont pas été retenus par l'inspecteur du travail dans la décision contestée ;

- les faits reprochés du 15 avril 2016 ne sont pas avérés ;

- les faits reprochés du 20 avril 2016 ne présentent pas de caractère de gravité ;

- le service n'a pas été désorganisé les 14, 15 et 20 avril 2016.

Par un mémoire enregistré le 14 janvier 2022, la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion conclut au rejet de la requête.

Elle fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Par ordonnance du 10 décembre 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 13 janvier 2022.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- le code de justice administrative

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A... Prieto, rapporteur,

- les conclusions de M. B... Thielé, rapporteur public,

- et les observations de Me Sanchez pour la société SERAMM.

Considérant ce qui suit :

1. M. D... était employé par la société de Service d'assainissement de Marseille Métropole (SERAMM) depuis le 1er septembre 1983 où il occupait en dernier lieu les fonctions d'adjoint au responsable d'activité d'entretien et exploitation des équipements électromécanique et électronique. Il était détenteur d'un mandat de délégué du personnel titulaire depuis le 20 février 2014 et de représentant syndical au comité d'entreprise depuis le 18 avril 2016. A la suite de la réception, le 7 avril 2016, d'une lettre anonyme faisant état de l'utilisation, par M. D..., des moyens de la société à des fins personnelles, particulièrement du véhicule de fonction, mais aussi de l'utilisation de ces moyens dans le cadre d'un chantier de rénovation de son habitation, l'employeur a procédé à des investigations aux abords du domicile de l'intéressé. Ayant relevé des faits répréhensibles, la société SERAMM a saisi l'inspecteur du travail d'une demande d'autorisation de licencier M. D... pour motif disciplinaire. Par décision du 5 juillet 2016, l'inspecteur du travail de l'unité de contrôle " Le port - Euromed " au sein de l'unité départementale des Bouches-du-Rhône à la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) de Provence-Alpes-Côte d'Azur a accordé cette autorisation. M. D... a formé un recours hiérarchique auprès de la ministre du travail contre cette décision. Une décision implicite de rejet est née du silence par elle gardé sur ce recours. Par un jugement du 2 juillet 2019, le tribunal administratif de Marseille, saisi par M. D..., a annulé ces deux décisions. La société SERAMM relève appel de ce jugement.

2. En vertu des dispositions du code du travail, les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des salariés qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle. Lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé. Dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail, et le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. Les fautes reprochées à M. D..., relatives à l'utilisation ponctuelle, avec un autre salarié, d'un véhicule de service en vue d'un usage à des fins personnelles le 15 avril 2016 et à un retard d'une heure à sa prise de service le 20 avril 2016 sont établies et aggravées par les fonctions et responsabilités d'encadrement de M. D....

4. Il ressort toutefois des pièces du dossier que l'intéressé n'a fait l'objet d'aucun avertissement préalable permettant d'établir le caractère répété du retard et des manquements mentionnés qui, du fait de leur importance, auraient constitué une faute d'une gravité suffisante justifiant un licenciement pour faute. En outre, M. D..., qui bénéficie d'une ancienneté dans l'entreprise de trente-trois ans, n'a fait l'objet d'aucune poursuite disciplinaire antérieure. Dans ces conditions, la gravité des faits n'est pas établie et la ministre du travail a commis une erreur d'appréciation en confirmant la décision de l'inspecteur du travail du 5 juillet 2016.

5. Il résulte de tout ce qui précède que la société SERAMM n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a annulé d'une part, la décision du 5 juillet 2016 par laquelle l'inspecteur du travail a autorisé la société SERAMM à le licencier pour motif disciplinaire, d'autre part, la décision implicite de rejet née du silence gardé par la ministre du travail sur son recours hiérarchique contre cette décision.

Sur les frais liés au litige :

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. D..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, tout ou partie de la somme que la société SERAMM demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de M. D... présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la société SERAMM est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de M. D... présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société SERAMM, à M. C... D... et à la ministre du travail, de l'emploi et de l'insertion.

Délibéré après l'audience du 4 avril 2022, où siégeaient :

- M. Guy Fédou, président,

- M. A... Prieto, premier conseiller,

- M. François Point, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 25 avril 2022.

N° 21MA03609 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21MA03609
Date de la décision : 25/04/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07-01-01-02 Travail et emploi. - Licenciements. - Autorisation administrative - Salariés protégés. - Bénéfice de la protection. - Délégués du personnel.


Composition du Tribunal
Président : M. FEDOU
Rapporteur ?: M. Gilles PRIETO
Rapporteur public ?: M. THIELÉ
Avocat(s) : CABINET D'AVOCATS BLANC NICOLAI

Origine de la décision
Date de l'import : 30/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-04-25;21ma03609 ?
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