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17/03/2022 | FRANCE | N°20MA01910

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre, 17 mars 2022, 20MA01910


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Bastia de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels il a été assujetti au titre des années 2012 et 2014.

Par un jugement n° 18000279 du 31 mars 2020, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 28 mai 2020, M. C

..., représenté par Me Cervetti, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 31 mars 2020 d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Bastia de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels il a été assujetti au titre des années 2012 et 2014.

Par un jugement n° 18000279 du 31 mars 2020, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 28 mai 2020, M. C..., représenté par Me Cervetti, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 31 mars 2020 du tribunal administratif de Bastia ;

2°) de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux ainsi que des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels il a été assujetti au titre des années 2012 à 2014 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il n'est pas justifié de la compétence de l'auteur de la décision rejetant sa réclamation préalable ;

- cette décision est insuffisamment motivée au regard des articles 1 et 3 de la loi du 11 juillet 1979 ;

- c'est à tort que l'administration a déterminé ses revenus au cours des années en cause sur la seule base des factures acquittées pour la société " Société Insulaire de Construction " (SIC), celles-ci ayant été jugées comme faussement rédigées par le tribunal correctionnel d'Ajaccio dans sa décision du 8 juin 2018 devenue définitive ;

- de même, c'est à tort qu'elle s'est basée sur ces factures pour retenir un taux de taxe sur la valeur ajoutée à 19,6% ;

- il n'est pas résident fiscal français au sens de l'article 4 B du code général des impôts.

Par un mémoire en défense, enregistré le 1er octobre 2020, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Par une ordonnance en date du 3 janvier 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 3 janvier 2022.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la cour a désigné Mme Massé-Degois, présidente-assesseure de la 2ème chambre, pour présider, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Sanson,

- et les conclusions de M. Gautron, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., qui exerce une activité de maçonnerie et de gros œuvre du bâtiment sous le statut d'entrepreneur individuel, a fait l'objet d'un examen de sa situation fiscale personnelle à l'issue duquel l'administration fiscale l'a assujetti à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux et à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre des années 2012 à 2014. M. C... relève appel du jugement du 31 mars 2020 par lequel le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, de ces impositions.

Sur les conclusions à fin de décharge :

2. Les moyens tirés de l'incompétence de l'auteur de l'acte et de l'insuffisance de motivation dirigés contre la décision de rejet de la réclamation du 21 décembre 2017 doivent être écartés par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, au point 3 du jugement attaqué qui les a rejetés pour inopérance.

En ce qui concerne les rappels de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) :

3. D'une part, en vertu des dispositions de l'article 66 et 67 du livre des procédures fiscales, sont taxées d'office les personnes qui n'ont pas déposé dans le délai légal les déclarations qu'elles sont tenues de souscrire en leur qualité de redevable des taxes sur le chiffre d'affaire.

4. D'autre part, selon l'article 283 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à la taxe en litige, toute personne qui mentionne la taxe sur la valeur ajoutée sur une facture est redevable de la taxe du seul fait de sa facturation. En outre, en vertu de l'article 297 du même code, dans sa rédaction applicable à la taxe en litige, la taxe sur la valeur ajoutée est perçue dans les départements de Corse, pour ce qui concerne les travaux immobiliers, au taux de 8% pour les années 2012 et 2013.

5. Il résulte de l'instruction que par un jugement du 8 juin 2018, le tribunal correctionnel d'Ajaccio a condamné pénalement le gérant de la société par actions simplifiées (SAS) " Société insulaire de construction " (SIC), qui a sous-traité au requérant des missions de gros œuvre et de maçonnerie au cours des trois années en cause, pour avoir établi " de fausses factures à en-tête de M. C..., et fait usage desdits faux en les remettant à M. C... afin qu'il les présente aux services fiscaux ". Il résulte des constatations de faits du juge pénal, qui constituent le support nécessaire de sa décision et sont revêtus, en tant que tels, de l'autorité absolue de la chose jugée, qu'aucune de ces factures ne revêt un caractère authentique. Ainsi, l'administration ne pouvait, pour taxer d'office le chiffre d'affaire de M. C... au taux de 19,6% au lieu de celui de 8% légalement applicable aux années 2012 et 2013 en vertu de l'article 297 précité, se fonder sur la circonstance qu'il s'agissait du taux mentionné sur les factures afférentes à la somme taxée. Il s'ensuit que le chiffre d'affaire du requérant doit être taxé au taux de 8%, pour 2012, soit 26 155 euros, et pour 2013, soit 11 255 euros, et qu'il y a lieu, en conséquence, de le décharger des rappels de taxe sur la valeur ajoutée litigieux à hauteur, respectivement, de 31 709 euros et de 4 583 euros.

En ce qui concerne le bien-fondé des impositions sur le revenu :

6. En premier lieu, l'article 4A du code général des impôts dispose " Les personnes qui ont en France leur domicile fiscal sont passibles de l'impôt sur le revenu en raison de l'ensemble de leurs revenus. / Celles dont le domicile fiscal est situé hors de France sont passibles de cet impôt en raison de leurs seuls revenus de source française. "

7. La circonstance, à la supposer établie, que M. C... n'avait pas en France sa résidence fiscale au cours des années en litige est en tout état de cause sans incidence sur l'imposition à laquelle il restait assujetti au titre de ses revenus des années 2012 à 2014 de source française en application du second alinéa de l'article 4 A du code général des impôts.

8. En second lieu, aux termes de l'article L. 73 du livre des procédures fiscales : " Peuvent être évalués d'office : / 1° Le bénéfice imposable des contribuables qui perçoivent des revenus provenant d'entreprises industrielles, commerciales ou artisanales (...) lorsque la déclaration annuelle prévue à l'article 53 A du code général des impôts n'a pas été déposée dans le délai légal ; (...) / Les dispositions de l'article L. 68 sont applicables dans les cas d'évaluation d'office prévus aux 1° et 2° ". Aux termes de cet article L. 68, dans sa rédaction applicable au présent litige : " La procédure de taxation d'office prévue aux 2° et 5° de l'article L. 66 n'est applicable que si le contribuable n'a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une mise en demeure (...) ".

9. L'administration fiscale soutient, sans être contredite sur ce point, avoir évalué d'office les bénéfices industriels et commerciaux réalisés par M. C..., au titre des années 2012 à 2014, après l'avoir vainement mis en demeure de déposer les déclarations afférentes à son activité. Il résulte de l'instruction qu'elle a déterminé le chiffre d'affaire de l'intéressé sur la base des factures établies au nom de la société SIC. Or, et ainsi qu'il a été exposé au point 5, l'administration fiscale ne pouvait se fonder sur ces documents pour déterminer les revenus perçus par M. C... au cours des années en cause, mais sur les seuls virements effectués par cette société sur le compte bancaire de l'intéressé en contrepartie des prestations qu'il a accomplies pour son propre compte. Il résulte de l'instruction que le montant cumulé de ces virements bancaires s'est élevé, pour les années 2012, 2013 et 2014, aux sommes respectives de 353 087,53 euros, 151 939,55 euros et 181 000 euros.

10. En revanche, en se bornant à soutenir sans aucunement étayer ses allégations à cet égard, que ces sommes lui auraient été versées à charge pour lui d'en assurer la répartition entre les différents artisans portugais qui intervenaient sur le chantier et participaient à l'exécution de ces missions de sous-traitance, M. A... ne démontre pas que l'administration aurait sous-évalué le montant de ses charges personnelles. Il y a lieu, par suite, de maintenir les taux de charge retenus par l'administration, soit 26,33%, 28,38% et 27,84% respectivement pour les années 2012, 2013 et 2014 et, par suite, d'établir aux sommes respectives de 260 120 euros, 108 819 euros et 130 610 euros le montant du bénéfice industriel et commercial du requérant au titre de ces années.

11. Il s'ensuit que les bases d'imposition de M. C... doivent être réduites de 46 670 euros, 7 844 euros et 21 036 euros au titre, respectivement, des années 2012, 2013 et 2014.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est fondé à demander la réformation du jugement attaqué dans la seule mesure des réductions de rappel de taxe sur la valeur ajoutée prononcées au point 5 et des réductions de bases d'imposition prononcées au point 11.

Sur les frais liés au litige :

13. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros à verser à M. C... au titre des frais qu'il a exposés et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La base d'imposition de M. C... à l'impôt sur le revenu est réduite au titre de l'année 2012 de la somme de 46 670 euros.

Article 2 : La base d'imposition de M. C... à l'impôt sur le revenu est réduite au titre de l'année 2013 de la somme de 7 844 euros.

Article 3 : La base d'imposition de M. C... à l'impôt sur le revenu est réduite au titre de l'année 2014 de la somme de 21 036 euros.

Article 4 : Dans la limite de la réduction de bases prononcée aux articles 1er, 2 et 3 du présent arrêt, M. C... est déchargé de la cotisation d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre des années 2012 à 2014 ainsi que des pénalités correspondantes.

Article 5 : M. C... est déchargé, à hauteur de 31 709 euros, du rappel de taxe sur la valeur ajoutée auquel il a été assujetti au titre de la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2012 et des pénalités correspondantes.

Article 6 : M. C... est déchargé, à hauteur de 4 583 euros, du rappel de taxe sur la valeur ajoutée auquel il a été assujetti au titre de la période du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2013 et des pénalités correspondantes.

Article 7 : Le jugement du tribunal administratif de Bastia du 31 décembre 2020 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 8 : L'Etat versera à M. A... une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 9 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 10 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est.

Délibéré après l'audience du 3 mars 2022, où siégeaient :

- Mme Massé-Degois, présidente-assesseure, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- M. Mahmouti, premier conseiller,

- M. Sanson, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 17 mars 2022.

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N° 20MA01910

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20MA01910
Date de la décision : 17/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Bénéfices industriels et commerciaux - Détermination du bénéfice net.

Contributions et taxes - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées - Taxe sur la valeur ajoutée - Calcul de la taxe - Taux.


Composition du Tribunal
Président : Mme MASSE-DEGOIS
Rapporteur ?: M. Pierre SANSON
Rapporteur public ?: M. GAUTRON
Avocat(s) : CERVETTI

Origine de la décision
Date de l'import : 05/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2022-03-17;20ma01910 ?
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