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15/06/2021 | FRANCE | N°20MA02914

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9eme chambre - formation a 3, 15 juin 2021, 20MA02914


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL " En Fer et Création " a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 30 janvier 2018 par laquelle le maire de Lavérune a accordé un permis de construire à la SCI Julie en vue de l'aménagement d'un restaurant à l'intérieur d'un showroom existant, de la création d'une annexe et d'une terrasse pour le restaurant, ensemble la décision rejetant implicitement son recours gracieux du 29 mars 2018.

Par un jugement n° 1803152 du 18 juin 2020, le tribunal administratif

de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL " En Fer et Création " a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 30 janvier 2018 par laquelle le maire de Lavérune a accordé un permis de construire à la SCI Julie en vue de l'aménagement d'un restaurant à l'intérieur d'un showroom existant, de la création d'une annexe et d'une terrasse pour le restaurant, ensemble la décision rejetant implicitement son recours gracieux du 29 mars 2018.

Par un jugement n° 1803152 du 18 juin 2020, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 13 août 2020, La SARL " En fer et Création ", représentée par Me C... B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 18 juin 2020 ;

2°) à titre principal, de renvoyer le dossier devant une juridiction de première instance ou évoquer le dossier et, à titre subsidiaire, d'annuler l'arrêté du 30 janvier 2018 du maire de Lavérune, ensemble la décision rejetant implicitement le recours gracieux du 29 mars 2018 ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Lavérune une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- sa requête est recevable dès lors que sa qualité de voisine immédiate du projet lui donne intérêt pour agir contre les décisions attaquées ;

- le signataire de l'arrêté en litige n'était pas compétent ;

- le dossier de permis est incomplet en ce que d'une part le projet architectural est insuffisant en méconnaissance de l'article R. 431-8 du code de l'urbanisme et incomplet au regard de l'article R 431-10 du même code, en ce que d'autre part la notice explicative fait une description très sommaire de l'environnement du terrain et des éléments paysagers existants ; le projet n'indique pas davantage le parti retenu pour assurer l'insertion dans son environnement ; enfin, le dossier est taisant sur le traitement réservé aux espaces libres et les plantations à conserver ou à créer et enfin en ce que le dossier est incomplet car il ne contient pas de document graphique permettant d'apprécier l'insertion du projet par rapport aux constructions avoisinantes ni permettant de situer le terrain dans son environnement proche et lointain ;

- l'arrêté méconnait l'article 12 UE du règlement du plan local d'urbanisme de Lavérune ;

- l'arrêté méconnait l'article 13 UE du règlement du plan local d'urbanisme;

- l'arrêté méconnait l'article R 111-2 du code de l'urbanisme.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 octobre 2020, la commune de Lavérune, représentée par la SCP Territoire Avocats conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la SARL " En Fer et Création " d'une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- la requête de la SARL " En Fer et Création " est irrecevable dès lors qu'elle ne présente pas d'intérêt à agir lui donnant qualité pour contester le permis délivré ;

- les moyens soulevés par la SARL " En Fer et Création " ne sont pas fondés.

Un mémoire présenté par la SARL " En Fer et Création a été enregistré le 22 janvier 2021, postérieurement à la clôture d'instruction, et n'a pas été communiqué en application de l'article R. 611-1 du code de justice administrative.

La requête a été communiquée à la SARL Julie qui n'a pas produit de mémoire.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,

- et les observations de Me B..., représentant la Sarl En Fer et Création, et de Me E..., représentant la commune de Lavérune.

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 30 janvier 2018, le maire de la commune de Lavérune a délivré à la SCI Julie un permis de construire en vue de l'aménagement d'un restaurant à l'intérieur d'un showroom existant, de la création d'une annexe et d'une terrasse pour un restaurant situé rue de l'industrie à Lavérune. La SARL " En Fer et Création " fait appel du jugement du 18 juin 2020 par laquelle le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté, ensemble la décision rejetant implicitement son recours gracieux formé le 29 mars 2018.

Sur la fin de non-recevoir opposée à la requête devant le tribunal :

2. Aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation ".

3. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire, de démolir ou d'aménager, de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celuici. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction.

4. S'il est constant que la SARL " En Fer et Création " occupe régulièrement le hangar directement voisin du projet en litige, elle ne dispose, en vertu du bail commercial la liant à la SCI Julie portant seulement sur le terrain d'assiette du bâtiment, d'aucun droit quelconque à l'usage de la cour avant du local, donnant sur la rue de l'industrie, qu'elle utilise de manière exclusive depuis plusieurs années. Toutefois d'une part, le déplacement de deux mètres du mur en gabion délimitant ladite cour extérieure, en modifiant sa configuration, aura nécessairement un impact sur le déroulement des opérations de chargement et déchargement des outils, matériels et créations de la société, ainsi que sur les modalités de stationnement de ses véhicules utilitaires, la circonstance que la société requérante utilise d'autres places de stationnement devant le local qu'elle occupe étant sans incidence. D'autre part, la création du restaurant, pouvant accueillir soixante couverts environ, comprenant la construction d'une terrasse extérieure sous pergola non close de 73 m² donnant sur la rue de l'industrie, aura pour effet d'augmenter la circulation automobile au sein de la zone et de réduire les possibilités de stationnement sur la voie publique alors même que le projet comporte la création de 10 places de stationnement. Il en résulte que le projet en litige sera susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation et de jouissance du bien que la société requérante occupe régulièrement.

5. Dès lors, la SARL " En Fer et Création ", qui justifie d'un intérêt lui donnant qualité pour agir contre le permis de construire litigieux, est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa requête comme irrecevable sur le fondement des dispositions de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme. Par suite le jugement attaqué du 18 juin 2020 doit être annulé.

6. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif de Montpellier pour qu'il statue à nouveau sur la demande de la SARL " En Fer et Création ".

Sur les frais liés au litige :

7. Les dispositions de l'article L. 7611 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de SARL " En Fer et Création ", qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la commune de Lavérune une somme de 2 000 euros au titre des frais d'instance.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 18 juin 2020 est annulé.

Article 2 : L'affaire est renvoyée devant le tribunal administratif de Montpellier.

Article 3 : La commune de Lavérune versera une somme de 2 000 euros à la SARL En Fer et Création au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions présentées par la commune de Lavérune au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL " En Fer et Création ", à la commune de Lavérune et à la SCI Julie.

Délibéré après l'audience du 1er juin 2021, où siégeaient :

- M. Chazan, président,

- Mme A..., présidente assesseure,

- Mme D..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 juin 2021.

N° 20MA02914 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9eme chambre - formation a 3
Numéro d'arrêt : 20MA02914
Date de la décision : 15/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Exces de pouvoir

Analyses

68-06-01-02 Urbanisme et aménagement du territoire. Règles de procédure contentieuse spéciales. Introduction de l'instance. Intérêt à agir.


Composition du Tribunal
Président : M. CHAZAN
Rapporteur ?: Mme Frederique SIMON
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : SCP MARGALL. D'ALBENAS

Origine de la décision
Date de l'import : 22/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2021-06-15;20ma02914 ?
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