Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... F... a demandé au tribunal administratif de Nîmes de condamner la commune de Caseneuve à lui verser une somme globale de 7 915 500 euros à titre de dommages et intérêts.
Par un jugement n° 1600858 du 27 mars 2018, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés les 25 mai et 26 juin 2018 et les 12 février et 20 mars 2019, M. F..., représenté par la SELARL JL Avocats, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nîmes du 27 mars 2018 ;
2°) de condamner la commune de Caseneuve à lui verser une somme globale de 7 915 500 euros à titre de dommages et intérêts ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Caseneuve une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le principe du contradictoire a été méconnu devant le tribunal dès lors que l'ensemble des écritures produites ne lui ont pas été communiquées et que ses dernières écritures n'ont pas été prises en compte par la juridiction ;
- le jugement est insuffisamment motivé ;
- le tribunal a entaché sa décision d'erreur de droit et d'erreur dans la qualification juridique des faits ;
- la responsabilité de la commune de Caseneuve est engagée du fait de l'illégalité de cinq refus de permis de construire qu'elle lui a opposés le 12 novembre 2009 pour la construction de cinq hangars avec panneaux photovoltaïques en toitures et d'un refus de permis de construire quatre hangars agricoles le 9 décembre 2009, ces six décisions ayant été annulées par arrêts de la cour d'appel de Lyon du 29 avril 2014 ;
- il subit un préjudice financier direct et certain de 7 911 000 euros de perte du bénéfice escompté sur la revente de l'énergie qu'il entendait produire grâce à ces constructions outre 4 500 euros de frais engagés pour le montage de son projet.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 24 janvier et 7 mars 2019, la commune de Caseneuve, représentée par la SCP Jakubowicz Mallet-Guy et Associés, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. F... d'une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que les moyens soulevés par M. F... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme C...,
- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,
- et les observations de Me B..., représentant M. F..., et de Me D..., représentant la commune de Caseneuve.
Considérant ce qui suit :
1. Le maire de Caseneuve a, par cinq arrêtés du 12 novembre 2009, refusé de délivrer à M. F..., des permis de construire cinq hangars à usage d'écuries, de stockage de fourrage et de manège couvert avec panneaux photovoltaïques en toitures, puis, par arrêté du 19 décembre 2009, un permis de construire quatre hangars agricoles et une habitation. Par deux arrêts définitifs du 29 avril 2014 la Cour administrative d'appel de Lyon a annulé les arrêtés du 12 novembre 2009 et celui du 19 décembre 2009 en tant qu'il porte refus d'autorisation d'édifier des hangars agricoles. M. F... fait appel du jugement du 27 mars 2018 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à la condamnation de la commune de Caseneuve à lui verser une somme globale de 7 915 500 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait de l'illégalité de ces six décisions.
Sur la régularité du jugement :
2. En premier lieu, d'une part, il ressort des pièces du dossier que le mémoire en défense du 15 janvier 2018 de la commune de Caseneuve a été communiqué au requérant contrairement à ce qu'il soutient. D'autre part, le mémoire en réplique produit par M. F... le 12 février 2018, soit trois jours après la clôture d'instruction, et qui n'a pas été communiqué, ne contenait ni l'exposé d'une circonstance de fait dont il n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction et que le juge ne pouvait ignorer sans fonder sa décision sur des faits matériellement inexacts ni d'une circonstance de droit nouvelle ou que le juge devait relever d'office. Il suit de là que l'appelant n'est pas fondé à soutenir que le tribunal a méconnu le principe du contradictoire.
3. En deuxième lieu, les premiers juges qui n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments de M. F... ont suffisamment répondu au point 5 de leur décision au moyen tiré de ce qu'il aurait été en mesure de remplir, avant l'entrée en vigueur de l'arrêté tarifaire du 12 janvier 2010, des conditions réglementairement fixées pour bénéficier de l'obligation d'achat au tarif défini par l'arrêté tarifaire du 26 juillet 2006.
4. En dernier lieu, hormis dans le cas où le juge de première instance a méconnu les règles de compétence, de forme ou de procédure qui s'imposaient à lui et a ainsi entaché son jugement d'une irrégularité, il appartient au juge d'appel non d'apprécier le bien-fondé des motifs par lesquels le juge de première instance s'est prononcé sur les moyens qui lui étaient soumis mais de se prononcer directement sur les moyens dirigés contre la décision administrative attaquée dont il est saisi dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel. M. F... ne peut donc utilement soutenir que le tribunal a entaché sa décision d'erreurs de droit et de qualification juridique des faits pour demander l'annulation du jugement attaqué.
Sur les conclusions indemnitaires :
5. En refusant illégalement de délivrer à M. F... les permis de construire qu'il sollicitait, le maire de Caseneuve a commis une faute de nature à engager la responsabilité de la commune.
6. Toutefois, l'actionnaire ou le gérant d'une société à l'égard de laquelle une personne publique a commis une faute de nature à engager sa responsabilité ne peut prétendre à une indemnisation que s'il justifie d'un préjudice personnel, distinct du préjudice dont la société pourrait obtenir réparation et directement imputable à la faute commise.
7. En l'espèce, il résulte de l'instruction que M. F... est le gérant et également détenteur de 99 % des parts de la SARL Les Laudons, immatriculée au registre du commerce et des sociétés le 21 septembre 2009, à laquelle il revenait la revente de l'électricité solaire produite grâce à l'installation de panneaux photovoltaïques en toitures des constructions précitées à un tarif réglementé. Par suite, le requérant, et alors au demeurant que le projet a été réalisé en 2017 suite à la délivrance le 15 juillet 2014 de permis pour la réalisation de quatre hangars couverts avec panneaux photovoltaïques en toitures, n'est pas fondé à demander la condamnation de la commune de Caseneuve à lui verser à titre de dommages et intérêts une somme de 7 911 000 euros correspondant à la perte des bénéfices escomptés sur vingt ans.
8. Par ailleurs, si le requérant a engagé des frais à hauteur de 3 000 euros pour évaluer le préjudice lié à la perte des bénéfices escomptés par la SARL les Laudons, il a inutilement exposé ces frais dès lors qu'il appartenait à la seule société de procéder au chiffrage de son bénéfice.
9. Enfin, s'agissant de la somme de 1 500 euros sollicitée par M. F... au titre des frais qu'il a exposés pour la constitution de la SARL Les Laudons, il ne résulte pas de l'instruction que ladite société n'aurait aucune activité et que, par suite, ces frais auraient été exposés en pure perte.
10. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'ordonner une expertise, que M. F... n'est pas fondé à se plaindre de ce que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Caseneuve, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, verse à M. F... la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de l'appelant une quelconque somme au titre de ces mêmes dispositions.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. F... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Caseneuve au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... F... et à la commune de Caseneuve.
Délibéré après l'audience du 13 avril 2021, où siégeaient :
- M. Chazan, président,
- Mme C..., présidente assesseure,
- Mme E..., première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 juin 2021.
N° 18MA02473 2