Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C... B... a demandé au tribunal administratif de Nice de prononcer, à titre principal, la décharge totale des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre des années 2008 et 2009 et mis en recouvrement le 22 décembre 2014, et, subsidiairement, la décharge partielle de ces droits pour un montant de 24 144 euros en application de la méthode de la marge forfaitaire.
Par un jugement n° 1600722 du 21 décembre 2018, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 15 février 2019, Mme B... représentée par Me D..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice n° 1600722 du 21 décembre 2018 ;
2°) de prononcer, à titre principal, la décharge totale des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre des années 2008 et 2009 et mis en recouvrement le 22 décembre 2014, et, subsidiairement, la décharge partielle de ces droits pour un montant de 24 144 euros en application de la méthode de la marge forfaitaire ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la procédure d'imposition est irrégulière, l'administration a refusé de saisir la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires, alors que le lige est relatif à la détermination du montant du chiffre d'affaires taxable à la taxe sur la valeur ajoutée ;
- elle peut bénéficier de la marge forfaitaire prévue par le III de l'article 297 A du code général des impôts car l'application de cette marge est de droit, ne nécessite aucune option expresse et qu'elle démontre avoir entrepris des opérations de promotion des oeuvres et des artistes.
Par un mémoire en défense, enregistré le 24 mai 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens invoqués par Mme B... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A...,
- et les conclusions de Mme Boyer, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B... qui exerce une activité de galeriste à Saint Paul de Vence, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2010 à l'issue de laquelle l'administration a remis en cause l'application du taux réduit de la taxe sur la valeur ajoutée. Des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée au titre des années 2008 et 2009 ont été mis en recouvrement le 15 décembre 2014. Mme B... a demandé au tribunal administratif de Nice de prononcer, à titre principal, la décharge totale des droits supplémentaires de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre des années 2008 et 2009 et, subsidiairement, la décharge partielle de ces droits pour un montant de 24 144 euros en application de la méthode " de la marge forfaitaire ", et par jugement n° 1600722 du 21 décembre 2018, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande. C'est de ce jugement dont elle relève appel.
Sur la régularité de la procédure d'imposition :
2. Aux termes de l'article L. 59 A du livre des procédures fiscales : " La commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires intervient lorsque le désaccord porte : / 1° Sur le montant du résultat industriel et commercial, non commercial, agricole ou du chiffre d'affaires, déterminé selon un mode réel d'imposition (...) ". Il résulte de cette disposition que la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires n'est compétente que lorsque le désaccord porte sur le montant du chiffre d'affaires hors taxe déterminé selon un mode réel d'imposition. En outre, elle n'est compétente que pour connaître des questions de fait, qu'il s'agisse de la matérialité des faits eux-mêmes ou de l'appréciation qu'il convient de porter sur les faits, eu égard, notamment à la situation réelle de l'entreprise ou aux pratiques du commerce ou de l'industrie auxquelles celle-ci appartient.
3. Il résulte de l'instruction que le désaccord entre l'administration fiscale et la requérante est relatif à l'application du régime de la marge forfaitaire de 30 % sur le prix de vente fixé par le III de l'article 297 A du code général des impôts. La question de l'application du régime de marge forfaitaire est une question de droit dont la compétence échappe à la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires. Par suite, le moyen tiré de ce que le litige n'a pas été soumis à cette instance, en dépit de la demande exprimée par la requérante, doit être écarté.
Sur le bien-fondé de l'imposition :
4. Aux termes de l'article 278 septies du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à la période d'imposition en litige : " La taxe sur la valeur ajoutée est perçue au taux de 5,5 % : (...) 2° Sur les livraisons d'oeuvres d'art effectuées par leur auteur ou ses ayants droit ; 3° Sur les livraisons d'oeuvres d'art effectuées à titre occasionnel par les personnes qui les ont utilisées pour les besoins de leurs exploitations et chez qui elles ont ouvert droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée ; (...) ". Aux termes de l'article 297 A du code général des impôts : " I. 1° La base d'imposition des livraisons par un assujetti revendeur de biens d'occasion, d'oeuvres d'art, d'objets de collection ou d'antiquité qui lui ont été livrés par un non redevable de la taxe sur la valeur ajoutée ou par une personne qui n'est pas autorisée à facturer la taxe sur la valeur ajoutée au titre de cette livraison est constituée de la différence entre le prix de vente et le prix d'achat (...) / III. Pour les livraisons d'oeuvres d'art, lorsqu'il n'est pas possible de déterminer avec précision le prix d'achat payé par un assujetti revendeur au vendeur ou lorsque ce prix n'est pas significatif, la base d'imposition peut être constituée par une fraction du prix de vente égale à 30 %. ".
5. L'administration expose que lors de la vérification de comptabilité il a été constaté que le prix d'achat auprès de l'artiste de chaque oeuvre a été fixé avec précision, et que la marge unique de 50 % sur le prix d'achat a été déterminée en accord avec l'artiste. La faculté prévue par le III de l'article 297 A du code général des impôts ne s'applique que lorsqu'il n'est pas possible de déterminer avec précision le prix d'achat payé par un assujetti revendeur au vendeur ou lorsque ce prix n'est pas significatif et que dans ces conditions il serait impossible donc de faire application du 1° du I de cette disposition puisque le prix d'achat ne pourrait pas être déterminé. Ainsi, la requérante n'est pas fondée à s'en prévaloir.
6. La requérante n'est pas fondée à se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de l'instruction référencée BOI-TVA-SECT-90-40 paragraphe n° 180 et suivants : " 180. Les livraisons d'oeuvres d'art peuvent être soumises à la TVA selon le régime de la marge forfaitaire de 30 % lorsqu'il n'est pas possible de déterminer avec précision le prix d'achat payé par un assujetti-revendeur au vendeur ou lorsque ce prix n'est pas significatif (CGI, art. 297 A, III). Il est précisé que ces opérations peuvent également être soumises au régime de la marge réelle (BOI-TVA-SECT-90-20 au II-A § 170 et suiv.) ou imposées sur le prix de vente total (BOI-TVA-SECT-90-20 au II-D § 490). 190. Très fréquemment, pour les ventes d'oeuvres d'art, il n'est pas possible de déterminer exactement le prix d'achat payé par l'assujetti-revendeur à son fournisseur. Les galeries sont souvent liées aux artistes par des contrats prévoyant en contrepartie de la fourniture régulière d'oeuvres d'art de leur création la prise en charge de dépenses courantes ou la réalisation d'actions de promotion. Les actions de promotion concernent aussi d'autres artistes que ceux liés par contrat ou des courants artistiques et d'une manière générale, des oeuvres appartenant au patrimoine culturel. Or, toutes ces dépenses engagées par les négociants sont constitutives du prix d'achat des oeuvres, Mais elles sont cependant difficiles à chiffrer avec suffisamment d'exactitude pour permettre le calcul de la marge. (...) 210. Les acheteurs-revendeurs peuvent appliquer la marge forfaitaire aux biens définis au II-A-3-b § 200, s'ils réalisent des actions de promotion, ou s'ils disposent de stocks anciens. Pour bénéficier de cette mesure, le négociant doit justifier d'actions de promotion. Celles-ci se traduisent notamment par la participation à des foires, manifestations, expositions temporaires ou permanentes effectuées en France ou à l'étranger. Elles peuvent concerner des oeuvres d'un même artiste (mort ou vivant), des oeuvres appartenant à un courant (par exemple, impressionnisme) ou des oeuvres regroupées autour d'un même thème. La preuve de l'organisation d'opérations de promotion peut être faite par tout moyen : - cartons d'invitation, affiches, publicité dans la presse ; - vernissages ; - éditions de catalogues ; - contrat liant le négociant en oeuvres d'art à l'artiste ; - correspondances échangées entre l'artiste ou ses ayants droit et le négociant en oeuvres d'art ; (...) ". Le paragraphe n° 180 de cette doctrine ne comporte aucune interprétation différente de la loi dont il est fait application. S'agissant du paragraphe 190, la requérante produit en pièces 7 à 10 des documents qui en eux-mêmes sont insuffisants pour établir que les frais engagés pour ces évènements étaient d'un montant suffisamment important pour considérer que ces dépenses ont exercé une influence significative sur le prix d'achat des oeuvres. Ainsi, la requérante ne rentre pas dans les prévisions de la doctrine qu'elle invoque. Pour l'application du paragraphe 210 de cette doctrine, les éléments produits par la requérante ne permettent ni d'établir le montant des ventes réalisées lors de ces actions de promotions qui seules pourraient bénéficier de la doctrine invoquée, ni que l'ensemble de ses ventes auraient eu lieu lors de ces actions de promotions. Par suite, elle n'est pas fondée à se prévaloir de cette doctrine.
7. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande. Par voie de conséquence doivent être rejetées ses conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B... et au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal Sud-Est Outre-mer.
Délibéré après l'audience du 30 juin 2020, où siégeaient :
- M. Antonetti, président,
- M. Barthez, président assesseur,
- M. A..., premier conseiller.
Lu en audience publique, le 15 juillet 2020.
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N° 19MA00758