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15/07/2020 | FRANCE | N°19MA00001

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre, 15 juillet 2020, 19MA00001


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Moulin à huile de Bédarrides - Henri Bellon et fils a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du 10 mars 2016 par laquelle le président du conseil régional Provence-Alpes-Côte d'Azur a refusé de lui verser une subvention du fonds européen agricole pour le développement rural.

Par un jugement n° 1605822 du 5 novembre 2018, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :
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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société à responsabilité limitée (SARL) Moulin à huile de Bédarrides - Henri Bellon et fils a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du 10 mars 2016 par laquelle le président du conseil régional Provence-Alpes-Côte d'Azur a refusé de lui verser une subvention du fonds européen agricole pour le développement rural.

Par un jugement n° 1605822 du 5 novembre 2018, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 2 janvier 2019 et le 26 août 2019, la SARL Moulin à huile de Bédarrides - Henri Bellon et fils représentée par Me E..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille n° 1605822 du 5 novembre 2018 ;

2°) d'annuler la décision du 10 mars 2016 par laquelle le président du conseil régional Provence-Alpes-Côte d'Azur a refusé de lui verser une subvention du fonds européen agricole pour le développement rural ;

3°) de mettre à la charge de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- sa demande est recevable, en l'absence d'accusé de réception délivré par la région à sa demande du 2 novembre 2014 ;

- la substitution de motifs est irrégulière, en ce que, elle n'a pu présenter ses observations et il n'est pas établi que la région aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur le motif substitué ; la substitution de motifs est irrecevable, et elle a informé la région le 2 novembre 2014 de la modification du programme de travaux ;

- la signataire de la décision était incompétente ;

- la procédure contradictoire n'a pas été respectée ;

- le mémoire en défense de la région en première instance n'était pas recevable le président de la région n'ayant pas reçu d'habilitation pour ce faire ;

- l'article 9 de la convention du 3 novembre 2011 ne peut fonder le rejet de la demande de subvention ;

- les subventions accordées au titre du fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER) et par la région ne sont pas interdépendantes ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 avril 2019, la région Provence-Alpes-Côte d'Azur représentée par Me A... conclut au rejet de la requête et à ce que la SARL Moulin à huile de Bédarrides - Henri Bellon et fils lui verse la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient à titre principal que la requête est irrecevable et à titre subsidiaire que les moyens invoqués par la SARL Moulin à huile de Bédarrides - Henri Bellon et fils ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- les conclusions de Mme Boyer, rapporteur public,

- et les observations de Me D... substituant Me E..., représentant la SARL Moulin à huile de Bédarrides - Henri Bellon et fils et de Me G... substituant Me A... représentant la région Provence-Alpes-Côte d'Azur.

Une note en délibéré présentée pour la région Provence-Alpes-Côte d'Azur a été enregistrée le 1er juillet 2020.

Considérant ce qui suit :

1. La SARL Moulin à huile de Bédarrides - Henri Bellon et fils a adressé le 29 juillet 2009 une demande de subvention aux services de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur. Par une délibération du 31 mai 2010, la commission permanente du conseil régional a attribué à la société requérante une aide d'un montant de 104 136 euros au titre de son programme régional et par délibération du 23 septembre 2011 une aide du même montant au titre du FEADER. Par une décision du 3 novembre 2011, le président du conseil régional Provence-Alpes-Côte d'Azur a attribué à la société requérante une aide au titre du fonds européen agricole pour le développement rural. Une convention a été passée le même jour entre la région et la société qui fixe les conditions d'octroi et de versement de cette aide. La société requérante a vainement sollicité le versement d'un acompte. Par un courrier en date du 2 novembre 2014, reçu le 13 novembre une nouvelle demande de versement a été adressée aux services de la région. Du silence de l'administration est née le 13 janvier 2015, une décision implicite de rejet. Le 10 mars 2016 une décision formalisée de refus et d'abrogation de l'attribution de l'aide dont il s'agit, a été prise par ces mêmes services, elle a été notifiée aux intéressés. La SARL Moulin à huile de Bédarrides - Henri Bellon et fils a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du 10 mars 2016 par laquelle le président du conseil régional Provence-Alpes-Côte d'Azur a refusé de lui verser une subvention du fonds européen agricole pour le développement rural, le tribunal par un jugement n° 1605822 du 5 novembre 2018 rejeté sa demande. C'est de ce jugement dont elle relève appel.

Sur la fin de non-recevoir :

2. Pour être regardée comme " confirmative " une décision doit avoir le même objet qu'une précédente décision devenue définitive. La décision en litige a bien le même objet que la décision implicite née le 13 janvier 2015. En revanche, il ne résulte pas de l'instruction qu'un accusé réception mentionnant les voies et délais de recours ait été adressé à la société à la suite de sa demande du 2 novembre 2014. Ce n'est donc que l'écoulement d'un délai raisonnable qui peut conférer au rejet implicite du 13 janvier 2015 un caractère définitif, sous réserve qu'il soit établi que l'intéressé en ait eu connaissance. Or il ne résulte pas de l'instruction que cette dernière condition puisse être regardée comme remplie. Par suite, le défendeur n'est pas fondé à soutenir que la décision du 13 janvier 2015 doit être regardée comme définitive. Il suit de là que la décision en litige ne peut être regardée comme la confirmant simplement. En conséquence la fin de non-recevoir correspondante doit être écartée.

Sur la régularité du jugement entrepris :

3. L'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision. Il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif. Dans l'affirmative il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué.

4. Il ne résulte pas des écritures produites devant les premiers juges que l'administration leur ait demandé procéder à une substitution de motif. En s'y livrant à sa seule initiative le premier juge a entaché son jugement d'irrégularité. La requérante est donc fondée d'une part à en demander l'annulation et d'autre part à ce que sa demande soit évoquée par la Cour.

Sur les conclusions de la demande :

5. L'article 6 de la convention du 3 novembre 2011 stipule : " en cas de non-respect des engagements, le Président du conseil régional prend une décision de déchéance partielle ou totale des droits (part Région, part Feder) ". Ainsi contrairement à ce qui est soutenu le président du conseil régional était bien compétent pour prendre la décision contestée du 10 mars 2016.

6. Mme F... C..., signataire de la décision du 10 mars 2016, se prévaut d'une délégation de signature du président de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur en qualité de directrice des affaires européennes et chef de la mission de pilotage des fonds européens, en date du 28 janvier 2016 qui serait parvenue en préfecture des Bouches-du-Rhône le 1er février 2016 et aurait été publiée à cette même date dans le recueil des actes administratifs de la région. En appel il est soutenu que cette délégation ne permettait pas à sa bénéficiaire de signer les décisions prononçant la déchéance d'une subvention. En défense la délégation en cause n'est pas produite. La Région se borne à invoquer le caractère non décisionnel de l'acte en litige. Pour les motifs développés au point 3 de l'arrêt, cet argument sera écarté. Par suite, la requérante est fondée à soutenir que Mme C... n'a pas justifié de sa compétence pour signer la décision en litige. Ainsi la décision du 10 mars 2016 doit être annulée sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens des écritures.

Sur les frais liés au litige :

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la requérante qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces mêmes dispositions et de mettre à la charge de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur une somme de 1 500 euros à verser à la SARL Moulin à huile de Bédarrides - Henri Bellon et fils.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1605822 du 5 novembre 2018 du tribunal administratif de Marseille est annulé.

Article 2 : La décision du 10 mars 2016 est annulée.

Article 3 : La région Provence-Alpes-Côte d'Azur versera une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative à la SARL Moulin à huile de Bédarrides - Henri Bellon et fils.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à La SARL Moulin à huile de Bédarrides - Henri Bellon et fils et à la région Provence-Alpes-Côte d'Azur.

Délibéré après l'audience du 30 juin 2020, où siégeaient :

- M. Antonetti, président,

- M. Barthez, président assesseur,

- M. B..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 15 juillet 2020.

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N° 19MA00001


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA00001
Date de la décision : 15/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

15-08 Communautés européennes et Union européenne. Litiges relatifs au versement d`aides de l'Union européenne.


Composition du Tribunal
Président : M. ANTONETTI
Rapporteur ?: M. André MAURY
Rapporteur public ?: Mme BOYER
Avocat(s) : SCP D'AVOCATS GUIBERT et FERNANDEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 29/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-07-15;19ma00001 ?
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