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08/07/2020 | FRANCE | N°20MA01919

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, Juge des référés, 08 juillet 2020, 20MA01919


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une ordonnance n° 2003372 en date du 18 mai 2020, la juge des référés du tribunal administratif de Marseille a prononcé la suspension de l'exécution d'une part de l'article 1er de la délibération n° 20191205-005 du 5 décembre 2019 du conseil municipal de la commune de Cuges-les-Pins, en tant qu'il porte sur l'apurement des comptes 1312, 1332, 1331, 1318 et 1313 et sur l'apurement, entre 2008 et 2018, du compte 1311 du budget principal et d'autre part de l'article 2 de la même délibération n° 20191

205-005.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregist...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une ordonnance n° 2003372 en date du 18 mai 2020, la juge des référés du tribunal administratif de Marseille a prononcé la suspension de l'exécution d'une part de l'article 1er de la délibération n° 20191205-005 du 5 décembre 2019 du conseil municipal de la commune de Cuges-les-Pins, en tant qu'il porte sur l'apurement des comptes 1312, 1332, 1331, 1318 et 1313 et sur l'apurement, entre 2008 et 2018, du compte 1311 du budget principal et d'autre part de l'article 2 de la même délibération n° 20191205-005.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés respectivement les 28 mai et 3 juillet 2020 sous le n° 20MA01919, la commune de Cuges-les-Pins représentée par Me E..., demande :

1°) d'annuler cette ordonnance du 18 mai 2020 ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est recevable ;

- le premier juge s'est borné à faire uniquement état de la méthode de régularisation conseillée alors même que l'instruction prévoit la possibilité de recourir à un mode de régularisation approprié suivant la situation financière de la collectivité ;

- le mode de régularisation approprié a été retenu à la demande du comptable public et validé par lui ;

- la direction générale des finances publiques a été saisie à travers le chef de poste de la trésorerie d'Aubagne ;

- en tout état de cause, l'instruction ne précise pas que l'avis serait conforme ou qu'un défaut de sollicitation serait de nature à priver la collectivité de retenir le mode de régularisation approprié ;

- le préfet n'a d'ailleurs pas indiqué les raisons du rejet du mode de régularisation retenu ;

- la délibération en litige se fonde sur la circulaire du 12 juin 2014 et respecte le rapport de la chambre régionale des comptes qui a demandé les régularisations.

Par des mémoires, enregistrés les 15 juin et 7 juillet 2020, le préfet de la région Provence-Alpes-Côte- d'Azur, préfet des Bouches-du-Rhône conclut au rejet de la requête ;

Il soutient que :

- la requête est irrecevable dès lors qu'aucune délégation du conseil municipal n'a été consentie au maire ; qu'en outre, la délibération produite du 18 juin 2020 ne peut venir de manière rétroactive autoriser le maire à agir ;

- les moyens retenus par le premier juge sont fondés ;

- il n'est pas établi que le comptable public ait donné son accord pour déroger au droit commun des régularisations ;

- la commune n'a pas sollicité auprès de son comptable ou de la direction générale des finances publiques un mode de régularisation approprié.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- la décision de la présidente de la cour administrative d'appel de Marseille donnant délégation à M. C..., premier vice-président, président de la 5ème chambre, pour juger les référés.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- l'arrêté du 8 septembre 2014 portant homologation des règlements n° 2014-1 du 14 janvier 2014, n° 2014-2 du 6 février 2014, n° 2014-3 du 5 juin 2014 et n° 2014-4 du 5 juin 2014 de l'Autorité des normes comptables ;

- l'arrêté du 20 décembre 2018 relatif à l'instruction budgétaire et comptable M. 14 applicable aux communes et aux établissements publics communaux et intercommunaux ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique du 8 juillet 2020 à 14h :

- le rapport de M. C..., juge des référés,

- les observations de Me A... substituant Me E... représentant la commune de Cuges-les-Pins et celles de M. F..., directeur général des services de la commune de Cuges-les-Pins ;

- les observations respectives de M. D..., consultant juridique de la mission contentieux interministériel de la préfecture des Bouches du Rhône, de Mme G..., chef du bureau des finances locales et de l'intercommunalité de la direction de la citoyenneté, de la légalité et de l'environnement de la préfecture des Bouches-du-Rhône et de M. B..., adjoint au chef de division du secteur public local de la DRFIP PACA. La clôture de l'instruction a été prononcée au terme de l'audience à 14h30.

Considérant ce qui suit :

1. Par une délibération n° 20191205-005 en date du 5 décembre 2019, le conseil municipal de la commune de Cuges-les-Pins a approuvé dans son article 1er l'apurement des comptes 1311, 1312, 1313, 1318, 1331, 1332, 1335, 1338 du budget principal et dans son article 2 les amortissements de l'exercice de 2019 des subventions du compte 1313. Sur déféré du préfet des Bouches du Rhône, le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a prononcé par une ordonnance n°2003372 en date du 18 mai 2020 la suspension de l'exécution d'une part de l'article 1er de la délibération du 5 décembre 2019 en tant qu'il porte sur l'apurement des comptes 1312, 1332, 1331, 1318 et 1313 et sur l'apurement, entre 2008 et 2018, du compte 1311 du budget principal et d'autre part de l'article 2 de la même délibération. La commune de Cuges-les-Pins relève appel de cette ordonnance.

2. Aux termes de l'article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales, auquel renvoie l'article L. 554-1 du code de justice administrative : " Le représentant de l'Etat dans le département défère au tribunal administratif les actes mentionnés à l'article L. 2131-2 qu'il estime contraires à la légalité dans les deux mois suivant leur transmission. / (...) / Le représentant de l'Etat peut assortir son recours d'une demande de suspension. Il est fait droit à cette demande si l'un des moyens invoqués paraît, en l'état de l'instruction, propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de l'acte attaqué.. (...) ".

3. Selon le point 5.2.3. du tome 2 de l'instruction budgétaire et comptable M. 14 applicable aux communes, relatif aux réductions ou annulations de recettes concernant un exercice clos, " Le document rectificatif, représenté matériellement par un mandat, est imputé : - si la rectification se rapporte à une recette d'investissement, à l'article budgétaire mouvementé lors de l'émission du titre initial ; (...) / Dans la comptabilité générale tenue par le comptable, la prise en charge du mandat portant réduction ou annulation est portée : /- au débit du compte crédité à l'origine si la rectification se rapporte à une recette d'investissement (...) ". Par ailleurs, il résulte des principes comptables exposés par le Conseil de normalisation des comptes publics dans son avis n° 2012-05 relatif, notamment, aux corrections d'erreurs comptables, qu'une erreur d'un exercice antérieur doit être corrigée de manière rétrospective, cette correction ne figurant donc pas dans le résultat de l'exercice au cours duquel l'erreur a été découverte. Une telle correction doit demeurer sans incidence sur le résultat de l'exercice au cours duquel cette erreur a été découverte et corrigée. Ces principes ont été rappelés par instruction conjointe du ministre de l'intérieur et du ministre des finances et des comptes publics en date du 12 juin 2014, qui précise qu'" une erreur d'un exercice antérieur est corrigée de manière rétrospective ; elle ne peut donc pas figurer dans le résultat de l'exercice au cours duquel l'erreur a été découverte. La correction d'erreur est neutre sur le résultat de l'exercice. Le CNoCP propose la correction des erreurs sur exercices antérieurs en situation nette, c'est-à-dire au sein du passif de haut de bilan (sans passage par le compte de résultat- section de fonctionnement) ". Enfin, l'article 934-1 du plan comptable général, homologué par arrêté du 8 septembre 2014 prévoit : " Au sein des capitaux propres, la situation nette est établie après affectation du résultat de l'exercice. Elle exclut les subventions d'investissement et les provisions réglementées ".

4. Comme relevé à juste titre par le premier juge, il résulte de l'examen de la délibération contestée que la méthode d'apurement des comptes 1311, 1312, 1332, 1331, 1318 et 1313 figurant respectivement aux paragraphes 3 à 8a de la délibération n° 20191205-005, et la méthode de révision du plan d'amortissement des subventions perçues entre 2008 et 2018 sur le compte 1313, prévue par le paragraphe 8b de cette même délibération passent par l'émission de titres de recettes à hauteur de 421 574,92 euros en opérations d'ordre budgétaire, sur le compte 777 " Quote-part des subventions d'investissement transférée au compte de résultat ", sur l'exercice 2019. Ces régularisations ainsi adoptées, faute d'être cantonnées à des opérations de haut du bilan, restant neutres sur le résultat, ont un impact direct sur les produits de la collectivité, et donc sur son résultat, conduisant à une majoration budgétaire supérieure à 400 000 euros.

5. La commune de Cuges-les-Pins fait valoir que le choix du mode de régularisation approprié s'inscrit dans un processus nécessaire qui fait suite au dernier rapport de la chambre régionale des comptes et qui a été validé par la trésorerie principale d'Aubagne. Cependant, en application de la note du ministre de l'intérieur et du ministre des finances et des comptes publics en date du 12 juin 2014 portant sur la mise en oeuvre de l'avis du conseil de normalisation des comptes publics n° 2012-05 du 18 octobre 2012, le mode de régularisation approprié doit être sollicité auprès de la direction générale des finances publiques laquelle doit prendre l'avis de la direction générale des collectivités locales. Il ne ressort pas du dossier que cette formalité ait été respectée. Ainsi, aucune pièce n'établit que la direction générale des finances publiques, qui n'est pas représentée par le chef de poste de la trésorerie d'Aubagne, ait été sollicitée ni, par voie de conséquence que la direction générale des collectivités locales ait rendu un avis. En tout état de cause, le message électronique invoqué en date du 26 septembre 2019 du chef de poste de la trésorerie d'Aubagne adressé au directeur général des services de la commune ayant pour unique objet " annexe fiabilisation des comptes " et se bornant à indiquer " c'est bon pour la trésorerie, nous n'avons plus de remarques " ne peut être regardé ni comme un accord sur le mode de régularisation choisi, ni comme valant respect de la formalité substantielle constituée par l'intervention de la direction générale des finances publiques et de la direction générale des collectivités locales.

6. Il s'ensuit qu'en l'état de l'instruction, les moyens tirés de la méconnaissance des prescriptions de l'instruction budgétaire et comptable M. 14 applicable aux communes, relatives aux réductions ou annulations de recettes concernant un exercice clos, et de la méconnaissance des principes comptables devant présider aux corrections d'erreurs comptables portant sur des exercices antérieurs, sont de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de la délibération attaquée portant sur l'apurement des comptes 1312, 1332, 1331, 1318 et 1313 et sur l'apurement du compte 1311 entre 2008 et 2018 du budget principal de la commune de Cuges-les-Pins ainsi que sur les amortissements de l'exercice de 2019 des subventions du compte 1313.

7. Il résulte de ce qui précède et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur la recevabilité de l'appel, que la commune de Cuges-les-Pins n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Marseille a suspendu l'exécution, d'une part, de l'article 1er de la délibération n° 20191205-005 du 5 décembre 2019 du conseil municipal de la commune de Cuges-les-Pins, en tant qu'il porte sur l'apurement des comptes 1312, 1332, 1331, 1318 et 1313 et sur l'apurement, entre 2008 et 2018, du compte 1311 du budget principal de la commune de Cuges-les-Pins et, d'autre part, de l'article 2 de la même délibération n° 20191205-005.

8. Les conclusions de la commune de Cuges-les-Pins tendant à l'application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative ne peuvent être que rejetées.

ORDONNE

Article 1 : La requête de la commune de Cuges-les-Pins est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à la commune de Cuges-les-Pins et au préfet des Bouches-du-Rhône.

Fait à Marseille, le 8 juillet 2020.

2

N° 20MA01919


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 20MA01919
Date de la décision : 08/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

54-035-02 Procédure. Procédures instituées par la loi du 30 juin 2000. Référé suspension (art. L. 521-1 du code de justice administrative).


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Philippe BOCQUET
Avocat(s) : SELARL GRIMALDI - MOLINA et ASSOCIÉS - AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-07-08;20ma01919 ?
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