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24/10/2019 | FRANCE | N°19MA04356

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, Juge des référés, 24 octobre 2019, 19MA04356


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet du Gard a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nîmes, sur le fondement des dispositions de l'article L. 554-1 du code de justice administrative, d'ordonner la suspension du permis de construire tacite délivré à M. D... C... pour la construction d'une maison individuelle sur un terrain situé chemin du Font de Sorbier sur le territoire de la commune de Clarensac.

Par une ordonnance n° 1902752 du 4 septembre 2019, le juge des référés du tribunal administratif de Nîme

s a suspendu l'exécution de ce permis de construire tacite.

Procédure devant la Co...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet du Gard a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nîmes, sur le fondement des dispositions de l'article L. 554-1 du code de justice administrative, d'ordonner la suspension du permis de construire tacite délivré à M. D... C... pour la construction d'une maison individuelle sur un terrain situé chemin du Font de Sorbier sur le territoire de la commune de Clarensac.

Par une ordonnance n° 1902752 du 4 septembre 2019, le juge des référés du tribunal administratif de Nîmes a suspendu l'exécution de ce permis de construire tacite.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 20 septembre 2019, M. C..., représenté par la SELARL A...-Tardivel, demande à la Cour :

1°) d'annuler cette ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Nîmes du 4 septembre 2019 ;

2°) statuant en référé, de rejeter la demande présentée par le préfet du Gard devant le tribunal administratif de Nîmes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat et de la commune de Clarensac le versement de la somme de 1 500 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le déféré qui a été exercé à la demande de la commune, n'est pas recevable ;

- le déféré est irrecevable pour tardiveté, que ce soit au regard de la date de naissance de l'autorisation tacite ou en vertu de la jurisprudence Czabaj ;

- les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ne pourraient pas justifier un refus de permis de construire ;

- le terrain d'assiette du projet ne se situe pas hors des parties urbanisées de la commune au sens du code de l'urbanisme.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 octobre 2019, la commune de Clarensac, représentée par la SELAS Charrel et associés, déclare s'en remettre à la sagesse de la cour.

Elle soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

La requête a été communiquée à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales qui n'a pas produit de mémoire.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la Cour a désigné M. Vanhullebus, président, en application de l'article L. 511-2 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir présenté son rapport et entendu au cours de l'audience publique du 23 octobre 2019 les observations de Me A..., représentant M. C..., et de Me B..., représentant la commune de Clarensac.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... a déposé, le 7 juillet 2017, une demande de permis de construire une maison individuelle sur un terrain situé chemin du Font de Sorbier à Clarensac. L'intéressé est devenu titulaire d'une autorisation tacite à l'expiration du délai d'instruction, le 7 septembre 2017. Le juge des référés du tribunal administratif de Nîmes, saisi par le préfet du Gard sur le fondement des dispositions de l'article L. 554-1 du code de justice administrative, a suspendu le permis de construire par une ordonnance du 4 septembre 2019 dont M. C... fait appel.

2. Aux termes de l'article L. 554-1 du code de justice administrative : " Les demandes de suspension assortissant les requêtes du représentant de l'Etat dirigées contre les actes des communes sont régies par le 3e alinéa de l'article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales ci-après reproduit : " Art. L. 2131-6, alinéa 3.-Le représentant de l'Etat peut assortir son recours d'une demande de suspension. Il est fait droit à cette demande si l'un des moyens invoqués paraît, en l'état de l'instruction, propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de l'acte attaqué. Il est statué dans un délai d'un mois. " (...) ".

3. Il résulte des dispositions précitées de l'article L. 242-1 du code des relations entre le public et l'administration que l'administration dispose d'un délai de quatre mois suivant la prise d'une décision créatrice de droits pour retirer cette décision. Lorsqu'une décision créatrice de droits est retirée et que ce retrait est annulé, la décision initiale est rétablie à compter de la date de lecture de la décision juridictionnelle prononçant cette annulation. Une telle annulation n'a, en revanche, pas pour effet d'ouvrir un nouveau délai de quatre mois pour retirer la décision initiale, alors même que celle-ci comporterait des irrégularités pouvant en justifier légalement le retrait.

4. Toutefois, lorsqu'une décision créatrice de droits a été retirée dans le délai de recours contentieux puis rétablie à la suite de l'annulation juridictionnelle de son retrait, le délai de recours contentieux court à nouveau à l'égard des tiers à compter de la date à laquelle la décision créatrice de droits ainsi rétablie fait à nouveau l'objet des formalités de publicité qui lui étaient applicables ou, si de telles formalités ne sont pas exigées, à compter de la date de notification du jugement d'annulation.

5. Lorsque la décision créatrice de droits remise en vigueur du fait de l'annulation de son retrait par le juge a pour auteur l'une des autorités mentionnées à l'article L. 2131-2 du code général des collectivités territoriales, il appartient à cette autorité de transmettre cette décision au représentant de l'Etat dans le département dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement d'annulation. Le préfet dispose alors de la possibilité de déférer au tribunal administratif la décision ainsi remise en vigueur du fait de cette annulation s'il l'estime contraire à la légalité, dans les conditions prévues à l'article L. 2131-6 du même code.

6. Par un jugement n° 1800236 du 18 décembre 2018, le tribunal administratif de Nîmes a considéré que l'arrêté du 5 janvier 2018 par lequel le maire de la commune de Clarensac avait refusé le permis de construire demandé par M. C... emportait retrait de l'autorisation tacite dont celui-ci était titulaire depuis le 7 septembre 2017. Le tribunal en a prononcé l'annulation aux motifs que ce retrait était intervenu au-delà du délai de trois mois fixé à l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme et sans respect de la procédure contradictoire exigée par les dispositions de l'article L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration. Par courrier reçu en préfecture le 3 avril 2019, le maire a transmis le certificat de permis de construire tacite et le jugement du tribunal au représentant de l'Etat en l'invitant à déférer cette autorisation. Le préfet a demandé au maire, par un courrier reçu le 23 avril 2019 par la commune de Clarensac, d'inviter M. C... à solliciter le retrait du permis de construire tacite dont il était titulaire et l'a informé qu'il défèrerait cette autorisation tacite en l'absence de réponse de sa part. Eu égard aux termes dans lesquels il est rédigé, ce courrier doit être regardé comme constituant un recours gracieux dirigé contre le permis de construire tacite, sans qu'y fasse obstacle la circonstance que le délai de trois mois fixé par l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme serait arrivé à son terme. L'autorisation tacite n'ayant pas été retirée, le préfet du Gard a saisi le tribunal administratif de Nîmes, le 9 août 2019, d'une demande d'annulation de cette décision administrative.

7. Il résulte de ce qui a été indiqué aux points 3 à 5 que M. C... ne peut utilement se prévaloir de ce que le dossier complet de la demande de permis de construire qu'il a déposée le 7 juillet 2017 a été transmis par la commune le 10 juillet 2017 au préfet qui a émis un avis le 4 août 2017, pour soutenir que le délai de recours ouvert au représentant de l'Etat dans le département a couru à compter du 7 septembre 2017, date à laquelle le requérant est devenu titulaire d'une autorisation tacite.

8. Il résulte du principe de sécurité juridique que le destinataire d'une décision administrative individuelle qui a reçu notification de cette décision ou en a eu connaissance dans des conditions telles que le délai de recours contentieux ne lui est pas opposable doit, s'il entend obtenir l'annulation ou la réformation de cette décision, saisir le juge dans un délai raisonnable, qui ne saurait, en règle générale et sauf circonstances particulières, excéder un an. Toutefois, eu égard aux conditions, rappelées au point 5, dans lesquelles le représentant de l'Etat dans le département peut déférer au tribunal administratif la décision créatrice de droits remise en vigueur du fait de l'annulation de son retrait par le juge, s'il l'estime contraire à la légalité, M. C... n'est pas fondé à soutenir que le déféré tendant à l'annulation du permis de construire tacite aurait dû être présenté par le préfet du Gard dans le délai d'un an à compter de la date à laquelle la commune de Clarensac lui a transmis pour avis le dossier complet de la demande de permis ou de la date à laquelle est née l'autorisation tacite.

9. En prévoyant que l'autorité compétente délivre un certificat de permis tacite sur simple demande du demandeur, les dispositions de l'article R. 424-13 du code de l'urbanisme ne font pas interdiction au maire de délivrer un tel certificat de sa propre initiative, notamment pour satisfaire à l'exigence rappelée au point 5. Il suit de là que la circonstance que le maire de la commune de Clarensac ait délivré un certificat de permis de construire tacite le 27 mars 2019 en l'absence de toute demande de M. C... est sans incidence sur la recevabilité du déféré.

10. Eu égard aux missions que l'article 72 de la Constitution confie au représentant de l'Etat, la circonstance que le préfet défère au juge administratif un acte de l'une des autorités mentionnées à l'article L. 2131-2 du code général des collectivités territoriales à la demande de l'auteur de cet acte est sans incidence sur la recevabilité du déféré.

11. Il résulte de ce qui a été indiqué aux points 3 à 10 que M. C... n'est pas fondé à soutenir que la demande d'annulation présentée par le préfet du Gard devant le tribunal administratif de Nîmes serait irrecevable ni qu'aucun des moyens invoqués dans sa demande de suspension ne serait, par suite, propre à créer un doute sérieux quant à la légalité du permis de construire tacite.

12. En l'état de l'instruction, les moyens invoqués par le préfet du Gard et tirés de ce que le permis de construire tacite a été délivré en méconnaissance des dispositions de l'article L. 111-3 et R. 111-2 du code de l'urbanisme paraissent de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité du permis de construire tacite.

13. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Nîmes a suspendu l'exécution du permis de construire tacite né le 7 septembre 2017.

14. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat et la commune de Clarensac, qui n'ont pas la qualité de partie perdante, versent à M. C... une somme que celui-ci réclame au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

ORDONNE

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à M. D... C..., à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales et à la commune de Clarensac.

Copie en sera transmise au préfet du Gard.

Fait à Marseille, le 24 octobre 2019.

2

N° 19MA04356


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 19MA04356
Date de la décision : 24/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Collectivités territoriales - Dispositions générales - Contrôle de la légalité des actes des autorités locales - Déféré préfectoral - Délai du déféré.

Collectivités territoriales - Dispositions générales - Contrôle de la légalité des actes des autorités locales - Déféré assorti d'une demande de sursis à exécution.

Procédure - Introduction de l'instance - Délais - Point de départ des délais - Circonstances diverses déterminant le point de départ des délais.

Procédure - Introduction de l'instance - Délais - Interruption et prolongation des délais - Interruption par un recours administratif préalable.

Procédure - Procédures de référé autres que celles instituées par la loi du 30 juin 2000 - Sursis à exécution d'une décision administrative - Conditions d'octroi du sursis - Moyens sérieux.

Procédure - Procédures de référé autres que celles instituées par la loi du 30 juin 2000 - Sursis à exécution d'une décision administrative - Suspension provisoire d'une décision administrative.

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire - Nature de la décision - Octroi du permis - Permis tacite.

Urbanisme et aménagement du territoire - Règles de procédure contentieuse spéciales - Introduction de l'instance - Délais de recours - Point de départ du délai.


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Thierry VANHULLEBUS
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS BLANC - TARDIVEL

Origine de la décision
Date de l'import : 08/11/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-10-24;19ma04356 ?
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