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11/04/2019 | FRANCE | N°19MA00898

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, Juge des référés, 11 avril 2019, 19MA00898


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une ordonnance n° 1900324 en date du 7 février 2019 le juge des référés du tribunal administratif de Nîmes a admis l'intervention de la société Enedis, a prononcé la suspension de l'exécution de la décision implicite du maire de Monoblet refusant d'abroger ses arrêtés du 18 décembre 2017, a enjoint au maire de Monoblet de réexaminer la demande du préfet du Gard tendant à ce qu'il abroge ses arrêtés du 18 décembre 2017 dans le délai d'un mois et a rejeté le surplus des conclusions des parti

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Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 20 février 2019, la...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une ordonnance n° 1900324 en date du 7 février 2019 le juge des référés du tribunal administratif de Nîmes a admis l'intervention de la société Enedis, a prononcé la suspension de l'exécution de la décision implicite du maire de Monoblet refusant d'abroger ses arrêtés du 18 décembre 2017, a enjoint au maire de Monoblet de réexaminer la demande du préfet du Gard tendant à ce qu'il abroge ses arrêtés du 18 décembre 2017 dans le délai d'un mois et a rejeté le surplus des conclusions des parties.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 20 février 2019, la commune de Monoblet, représentée par MeD..., demande à la Cour :

1°) de confirmer l'ordonnance du 7 février 2019 en ce qu'elle constate l'irrecevabilité des conclusions du préfet du Gard dirigées contre la délibération du 17 mars 2016 et contre les arrêtés municipaux du 18 décembre 2017 ;

2°) d'annuler l'ordonnance du 7 février 2019 en tant qu'elle suspend le refus du maire de Monoblet d'abroger deux arrêtés du maire de Monoblet en date du 18 décembre 2017 et enjoint au maire de réexaminer la demande d'abrogation du préfet du Gard ;

3°) statuant à nouveau :

- à titre principal, déclarer irrecevable en tous points le déféré du Gard ;

- à titre subsidiaire, rejeter la demande du préfet du Gard tendant à la suspension du refus du maire de Monoblet d'abroger les deux arrêtés du maire du 18 décembre 2017 ;

- en tout état de cause, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

1/ à titre principal :

- le premier juge a reconnu l'irrecevabilité des conclusions du préfet du Gard dirigées contre la délibération du 17 mars 2016 et contre les arrêtés municipaux du 18 décembre 2017 mais le dispositif de son ordonnance n'en fait pas mention de sorte que son office a été méconnu ;

- le premier juge a statué ultra-petita en admettant que le préfet du Gard devait être regardé comme demandant également la suspension du refus d'abroger les arrêtés municipaux du 18 décembre 2017 ;

- le premier juge, sans être saisi de conclusions en ce sens, a enjoint au maire de réexaminer la demande d'abrogation du préfet du Gard dirigée contre les arrêtés du 18 décembre 2017 alors qu'il ne dispose que du pouvoir de prescrire des mesures provisoires ;

2/ à titre subsidiaire :

- le maire pouvait dans le cadre de ses pouvoirs de police générale prendre les arrêtés du 18 décembre 2017 en raison d'une forte préoccupation des habitants, des risques de violation de la vie privée et dans un but de préservation de la tranquillité publique.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 mars 2019, le préfet du Gard conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens ne sont pas fondés.

Par un mémoire, enregistré le 18 mars 2019, la société Enedis, représentée par Me F..., conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens ne sont pas fondés.

Par un mémoire complémentaire, enregistré le 10 avril 2019 à 12h06 et communiqué aux autres parties, accompagné d'une attestation de M. C...B...datée du 9 avril 2019, la commune de Monoblet confirme ses précédentes écritures et demande d'ordonner la suppression du passage diffamatoire des écritures de la société Enedis indiquant " En aucun cas le juge des référés statuant à l'audience du 5 février 2019 a indiqué que la requête du préfet du Gard était " un mémoire type rédigé par habitude ", ces affirmations sont particulièrement mensongères ".

Elle soutient, en outre, sur le moyen de l'ultra-petita, que l'attitude du premier juge méconnaît les stipulations de l'article 6-1 de la convention européenne des droits de l'homme et les règles de la procédure administrative.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- la décision de la présidente de la cour administrative d'appel de Marseille donnant délégation à M. Bocquet, premier vice-président, président de la 5ème chambre, pour juger les référés.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'énergie ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique du 10 avril 2019 à 14h30 :

- le rapport de M. Bocquet, juge des référés,

- les observations de MeA..., représentant la commune de Monoblet, confirmant l'ensemble des conclusions et moyens de la requête ;

- et les observations de MeE..., représentant la société Enedis , maintenant le rejet de la requête.

La clôture de l'instruction a été prononcée à 15h30 au terme de l'audience.

Considérant ce qui suit :

1. Par une ordonnance n°1900324 du 7 février 2019, le juge des référés du tribunal administratif de Nîmes a admis l'intervention de la société Enedis au soutien de la demande du préfet du Gard tendant à la suspension du refus implicite du maire de Monoblet d'abroger ses arrêtés du 18 décembre 2017, a prononcé la suspension de l'exécution de la décision implicite du maire de Monoblet refusant d'abroger ses arrêtés du 18 décembre 2017, a enjoint au maire de Monoblet de réexaminer la demande du préfet du Gard tendant à ce qu'il abroge ses arrêtés du 18 décembre 2017 dans le délai d'un mois et a rejeté le surplus des conclusions des parties. La commune de Monoblet doit être regardée comme relevant appel de l'ordonnance du 7 février 2019 dans ses dispositifs de suspension et d'injonction.

Sur l'intervention de la société Enedis :

2. Le litige concerne le déploiement des compteurs " Linky " sur le territoire de la commune de Monoblet. Il résulte des dispositions des articles L. 111-52 et L. 341-4 du code de l'énergie que la société Enedis, gestionnaire national du réseau public, est investie d'une mission de service public impliquant notamment le déploiement des compteurs " Linky ". Elle justifie ainsi d'un intérêt suffisant, eu égard à la nature et à l'objet du litige, pour intervenir à l'instance.

Sur la régularité de l'ordonnance :

3. En premier lieu, la commune estime que le premier juge a méconnu son office dans la mesure où si l'irrecevabilité des conclusions du préfet du Gard dirigées contre la délibération du 17 mars 2016 et contre les arrêtés municipaux du 18 décembre 2017 a été reconnue dans la motivation de l'ordonnance du 7 février 2019, le dispositif n'en fait pas mention. Le moyen n'est pas fondé dès lors que l'article 3 du dispositif de l'ordonnance attaquée précise que " le surplus des conclusions des parties est rejeté ". Par ce dispositif, le premier juge a nécessairement entendu rejeter notamment les conclusions du préfet du Gard portant sur la délibération du 17 mars 2016 et les arrêtés du 18 décembre 2017. Il s'ensuit et, alors d'ailleurs qu'il n'appartient pas au juge d'appel de confirmer ce dispositif à la demande de la commune, dispositif qui ne lui fait pas grief, que ce moyen ne peut être qu'écarté.

4. En deuxième lieu, il est vrai que le préfet du Gard ne demandait expressément en première instance que l'annulation de la délibération du conseil municipal du 17 mars 2016 et des deux arrêtés du maire du 18 décembre 2017. Toutefois, en raison de l'argumentation développée dans la demande et des pièces qui l'accompagnait et afin de donner une portée utile au déféré, le premier juge a pu valablement, sans statuer ultra-petita, regarder la demande comme tendant également à la suspension des refus d'abroger les arrêtés du maire. De plus, il ressort des mentions de l'ordonnance attaquée, lesquelles ne sont pas, en tout état de cause, contredites par l'attestation du 9 avril 2019, que le premier juge a indiqué aux parties lors de la présentation de son rapport l'interprétation de cette demande et le représentant du préfet du Gard a formulé à la barre du tribunal cette demande auquel le conseil de la commune a répliqué non seulement oralement mais aussi par la production d'une note en délibéré. Par suite, ce deuxième moyen d'irrégularité portant sur l'ultra-petita doit donc être également écarté. Il en va de même du moyen développé par le mémoire complémentaire du 10 avril 2019 invoquant, à l'appui des stipulations de l'article 6-1 de la convention européenne des droits de l'homme et des règles de la procédure administrative, la violation du droit au procès équitable.

5. En troisième lieu et contrairement à ce qui est soutenu, s'il lui apparaît que la suspension qu'il ordonne implique nécessairement que l'auteur de la décision prenne, à titre provisoire, une mesure dans un sens déterminé, le juge des référés peut, y compris de sa propre initiative, lorsque la décision contestée est une décision de rejet, assortir la mesure de suspension de l'indication des obligations provisoires qui en découleront pour l'administration.

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

6. Il y a lieu d'écarter les fins de non-recevoir soulevées par la commune par adoption des motifs retenus à bon droit par le juge des référés du tribunal administratif de Nîmes aux points 8, 9 et 10 de son ordonnance.

Sur le bien-fondé de la suspension des refus d'abrogation :

7. Aux termes de l'article L. 554-1 du code de justice administrative : " Les demandes de suspension assortissant les requêtes du représentant de l'Etat dirigées contre les actes des communes sont régies par le 3e alinéa de l'article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales ci-après reproduit : / Art. L. 2131-6, alinéa 3. - Le représentant de l'Etat peut assortir son recours d'une demande de suspension. Il est fait droit à cette demande si l'un des moyens invoqués paraît, en l'état de l'instruction, propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de l'acte attaqué. (...) " .

8. En cause d'appel et à titre subsidiaire, la commune reprend son argumentation tirée de ce que le maire pouvait faire usage de ses pouvoirs de police en particulier dans un but de préservation de la tranquillité publique et en raison des troubles constitués notamment par des risques d'atteintes à la vie privée et les préoccupations des habitants. Toutefois, la commune de Monoblet n'apporte au soutien de son affirmation aucun élément suffisant et probant de nature à caractériser un trouble à l'ordre public ou un risque pour la sécurité, pour la vie privée justifiant l'usage des pouvoirs de police du maire. Donc, c'est à bon droit que le premier juge a considéré que le moyen du préfet du Gard, clairement soulevé comme indiqué à juste titre par l'ordonnance attaquée et tiré de ce que les arrêtés du maire n'étaient justifiés par aucun trouble paraissait, en l'état de l'instruction, propre à créer un doute sérieux quant à leur légalité et, par suite, quant à la légalité du refus implicite de les abroger.

9. Il résulte de tout ce qui précède que la commune de Monoblet n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Nîmes a prononcé la suspension de l'exécution de la décision implicite du maire de Monoblet refusant d'abroger ses arrêtés du 18 décembre 2017 et a enjoint au maire de Monoblet de réexaminer la demande du préfet du Gard tendant à ce qu'il abroge ses arrêtés du 18 décembre 2017 dans le délai d'un mois.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 741-2 du code de justice administrative :

10. Le passage du mémoire présenté par la société Enedis et enregistré le 18 mars 2019 dont la commune de Monoblet demande la suppression en application de l'article L. 741-2 du code de justice administrative, ne peut être regardé comme diffamatoire, au sens de la loi du 29 juillet 1881, à laquelle renvoie cet article. Il n'y a, par suite, pas lieu de faire droit à la demande de la commune de Monoblet tendant à la suppression de ce passage.

Sur les frais de l'instance :

11. L'Etat n'étant pas partie perdante à la présente instance, les conclusions présentées à son encontre par la commune de Monoblet sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

ORDONNE :

Article 1er : L'intervention de la société Enedis est admise.

Article 2 : La requête de la commune de Monoblet est rejetée.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à la commune de Monoblet, à la société Enedis et au préfet du Gard.

Fait à Marseille, le 11 avril 2019.

N° 19MA00898 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 19MA00898
Date de la décision : 11/04/2019
Type d'affaire : Administrative

Analyses

54-035-02 Procédure. Procédures instituées par la loi du 30 juin 2000. Référé suspension (art. L. 521-1 du code de justice administrative).


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Philippe BOCQUET
Avocat(s) : HUGLO LEPAGE AVOCATS SAS

Origine de la décision
Date de l'import : 23/04/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-04-11;19ma00898 ?
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