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25/01/2019 | FRANCE | N°17MA03914

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 25 janvier 2019, 17MA03914


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 4 avril 2017 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a rejeté sa demande de renouvellement de titre de séjour portant la mention " étudiant ", lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 1701432 en date du 27 juillet 2017, le tribunal administratif de

Nice a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 4 avril 2017 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a rejeté sa demande de renouvellement de titre de séjour portant la mention " étudiant ", lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours, et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 1701432 en date du 27 juillet 2017, le tribunal administratif de Nice a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 15 septembre 2017 et le 30 août 2018, M. A..., représenté par Me Expert, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice du 27 juillet 2017 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 4 avril 2017 ;

3°) d'enjoindre à ce préfet de lui délivrer un titre de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros, en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à verser à son conseil.

Il soutient que :

Sur la légalité de l'arrêté contesté dans son ensemble :

- il est entaché d'un vice d'incompétence ;

Sur la décision portant refus de renouvellement d'un titre de séjour :

- elle méconnaît le principe général du droit de l'Union européenne d'être entendu préalablement à l'édiction d'une décision défavorable ;

- elle repose sur des faits matériellement inexacts, dès lors qu'il établit avoir suivi des études d'anglais durant l'année universitaire 2016/2017 ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle a été prise en violation du principe général du droit de l'Union européenne d'être entendu ;

- elle est insuffisamment motivée ;

Sur la décision fixant le délai de départ volontaire :

- elle n'est pas motivée, en violation des dispositions de l'article 12 de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008.

La requête a été communiquée au préfet des Alpes-Maritimes qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Par ordonnance du 21 juin 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 31 août 2018.

Un mémoire présenté pour M. A... a été enregistré le 21 novembre 2018.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 30 octobre 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Guidal ;

- et les observations de M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant guinéen né le 25 décembre 1986, a sollicité le 9 décembre 2016 le renouvellement du titre de séjour dont il a été titulaire en sa qualité d'étudiant depuis le 5 septembre 2008. Par un arrêté du 4 avril 2017, le préfet des Alpes-Maritimes a rejeté cette demande de renouvellement de titre de séjour, et a assorti cette décision d'une obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours. M. A... relève appel du jugement du 27 juillet 2017 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté du 4 avril 2017.

Sur la légalité de l'arrêté préfectoral du 4 avril 2017 :

2. Aux termes de l'article L. 313-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa version en vigueur à la date de l'arrêté contesté : " I. - La carte de séjour temporaire accordée à l'étranger qui établit qu'il suit en France un enseignement ou qu'il y fait des études et qui justifie qu'il dispose de moyens d'existence suffisants porte la mention " étudiant ".(...) / La carte ainsi délivrée donne droit à l'exercice, à titre accessoire, d'une activité professionnelle salariée dans la limite de 60 % de la durée de travail annuelle./ II. - (...) Un décret en Conseil d'Etat précise les conditions d'application des dispositions du présent article, en particulier en ce qui concerne les ressources exigées, les conditions d'inscription dans un établissement d'enseignement et celles dans lesquelles l'étranger entrant dans les prévisions du 2° peut être dispensé de l'obligation prévue à l'article L. 313-2. ". L'article R. 313-7 du même code dispose que " Pour l'application du I de l'article L. 313-7, l'étranger qui demande la carte de séjour portant la mention " étudiant " doit présenter, outre les pièces mentionnées aux articles R. 311-2-2 et R. 313-1, les pièces suivantes (...) : 2° Un certificat d'immatriculation, d'inscription ou de préinscription dans un établissement public ou privé d'enseignement ou de formation initiale, ou une attestation d'inscription ou de préinscription dans un organisme de formation professionnelle au sens du titre II du livre IX du code du travail, ou bien une attestation justifiant qu'il est bénéficiaire d'un programme de coopération de l'Union européenne dans les domaines de l'éducation, de la formation et de la jeunesse ".

3. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a obtenu le diplôme de Master 2 mention " Gouvernance et Financement du développement " délivré par l'université de Nice Sophia Antipolis au titre de l'année universitaire 2014-2015. Il s'est inscrit en licence d'anglais pour l'année universitaire 2015-2016 et a sollicité en vain le renouvellement de son titre de séjour en qualité d'étudiant qui lui a été refusé par une décision du 23 mai 2016 annulée par un jugement devenu définitif du 17 novembre 2016 du tribunal administratif de Nice. Le 9 décembre 2016, l'intéressé a de nouveau sollicité le renouvellement de son titre de séjour " étudiant ". Par l'arrêté en litige du 4 avril 2017, le préfet des Alpes-Maritimes lui a opposé un nouveau refus au motif qu'il ne justifiait " d'aucune inscription scolaire au titre de l'année universitaire 2016-2017 " et qu'il n'apportait " aucun résultat pour l'année universitaire 2015-2016 afin de justifier de son assiduité scolaire ".

4. Il ressort toutefois des pièces du dossier et notamment de la carte d'étudiant produite par M. A... que, contrairement à ce qu'a retenu le préfet dans sa décision, l'intéressé était bien inscrit en Licence 1 " études anglophones " à l'université de Nice Sophia Antipolis pour l'année 2016-2017. Il ressort également de ces mêmes pièces qu'il était par ailleurs, bénéficiaire à ce titre d'une bourse du gouvernement guinéen d'un montant mensuel de 615 euros et, enfin, que la date prévue de son départ de la cité universitaire Jean Médecin gérée par le CROUS de Nice où il était résident depuis le 1er septembre 2015, était le 31 août 2017, soit à l'issue de l'année universitaire 2016-2017. M. A..., qui justifiait bien d'une inscription universitaire pour l'année 2016-2017, est ainsi fondé à soutenir que la décision du préfet des Alpes-Maritimes repose sur des faits matériellement inexacts.

5. Comme il a été dit au point 3, l'administration a également fondé le refus de séjour en litige sur la circonstance que M. A... n'avait pas justifié de son assiduité scolaire ni de ses résultats au cours de l'année universitaire 2015-2016. Il ressort toutefois des pièces du dossier, que le tribunal administratif de Nice a, par un jugement devenu définitif n° 1602771 du 17 novembre 2016, annulé pour excès de pouvoir un précédent refus de renouvellement de titre de séjour opposé à M. A... au titre de l'année universitaire 2015-2016, au motif que la maîtrise de la langue anglaise était cohérente et complémentaire du cursus de gouvernance et financement du développement suivi par l'intéressé qui s'inscrivait dans une stratégie d'insertion professionnelle à l'international et que cette cohérence était d'ailleurs soulignée par les attestations de professeurs d'université versées aux débats qui corroboraient le caractère sérieux des études de ce dernier. Le tribunal a déduit de l'ensemble de ces circonstances que c'était à tort que le préfet des Alpes-Maritimes avait remis en cause le caractère réel et sérieux des études que menait en France M. A... au cours de l'année en cause. Ces motifs du jugement, étant le support nécessaire de l'annulation prononcée par le tribunal, sont revêtus de l'autorité absolue de chose jugée. Par suite, il ne résulte pas de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision en se fondant sur le seul motif tiré du défaut d'assiduité des études au cours de l'année universitaire 2015-2016.

6. Il s'ensuit que le refus de renouvellement de titre de séjour opposé par le préfet des Alpes-Maritimes étant illégal, il doit être annulé, ainsi que par voie de conséquence, les décisions portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de renvoi qui sont dépourvues de base légale.

7. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

8. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant d'un délai d'exécution. ". Aux termes de l'article L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé ".

9. L'exécution du présent arrêt n'implique pas la délivrance d'un titre de séjour. En revanche, elle implique que la demande de M. A... soit réexaminée. Il y a lieu, par suite, d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de procéder à ce réexamen dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Sur les frais liés à l'instance :

10. M. A... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Expert, avocat de M. A..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Expert de la somme de 1 500 euros.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du 27 juillet 2017 du tribunal administratif de Nice et l'arrêté du 4 avril 2017 du préfet des Alpes-Maritimes sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet des Alpes-Maritimes de procéder au réexamen de la demande de M. A... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Me Expert, avocat de M. A..., une somme de 1 500 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me Expert renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., au ministre de l'intérieur et à Me Expert.

Copie en sera adressé au préfet des Alpes-Maritimes.

Délibéré après l'audience du 11 janvier 2019 où siégeaient :

- M. Pocheron, président,

- M. Guidal, président-assesseur,

- Mme C..., première conseillère,

Lu en audience publique, le 25 janvier 2019.

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bb


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17MA03914
Date de la décision : 25/01/2019
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. POCHERON
Rapporteur ?: M. Georges GUIDAL
Rapporteur public ?: M. CHANON
Avocat(s) : EXPERT

Origine de la décision
Date de l'import : 05/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-01-25;17ma03914 ?
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