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07/11/2018 | FRANCE | N°18MA02405

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre - formation à 3, 07 novembre 2018, 18MA02405


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A...a demandé au tribunal administratif de Montpellier de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2007 ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1203107 du 14 avril 2014, le tribunal administratif de Montpellier a fait droit à sa demande.

Par un arrêt n° 14MA02615 du 20 décembre 2016, la cour administrative d'appel de Marseille, faisant droit à l'appel formé par le ministre

des finances et des comptes publics contre ce jugement, en a annulé les articles 1er et 2 ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A...a demandé au tribunal administratif de Montpellier de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle il a été assujetti au titre de l'année 2007 ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1203107 du 14 avril 2014, le tribunal administratif de Montpellier a fait droit à sa demande.

Par un arrêt n° 14MA02615 du 20 décembre 2016, la cour administrative d'appel de Marseille, faisant droit à l'appel formé par le ministre des finances et des comptes publics contre ce jugement, en a annulé les articles 1er et 2 et a remis à la charge de M. A... l'imposition et les pénalités dont la décharge avait été prononcée par le tribunal.

Par une décision n° 408187 du 2 mai 2018, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux a, saisi d'un pourvoi de M. A..., annulé l'arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille et a renvoyé l'affaire devant la même Cour.

Procédure devant la Cour :

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 août 2018, M. A..., représenté par Me B... et Me C..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de l'Etat la somme de 30 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que le moyen soulevé par le ministre de l'action et des comptes publics n'est pas fondé.

Par un mémoire, enregistré le 10 août 2018, le ministre de l'action et des comptes publics demande à la Cour :

1°) d'annuler les articles 1er et 2 du jugement du tribunal administratif de Montpellier du 14 avril 2014 ;

2°) de rétablir M. A... au rôle de l'impôt sur le revenu de l'année 2007 pour un montant global en droits et pénalités de 20 813 312 euros.

Il soutient que la plus-value réalisée par M. A... à l'occasion de la revente à la société Castelnou Energia de 80 000 titres de la société La compagnie du vent correspond à la rémunération d'une activité d'intermédiation ayant permis d'accroître, à son avantage, le prix cession final des actions et que cette activité est donc imposable dans la catégorie des bénéfices non commerciaux, sur le fondement du 1 de l'article 92 du code général des impôts.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Barthez,

- et les conclusions de Mme Boyer, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société La compagnie du vent (LCV) a été créée en 1989 à l'initiative de M. A..., avec pour activité la production d'énergie électrique d'origine essentiellement éolienne. En 2007, M. A... détenait 79 996 des 160 000 actions de cette société non cotée qu'il dirigeait. Il a exercé le 27 octobre 2007 l'option d'achat de 80 000 actions de cette société qui lui avait été consentie par l'actionnaire majoritaire, la société de droit espagnol Acciona Energia. Ces actions lui ont été transférées le 29 novembre 2007, au moment où il s'est acquitté de leur prix, et ont été revendues le même jour à la société de droit espagnol Castelnou Energia. Estimant que la plus-value résultant de cette cession devait être regardée comme la contrepartie d'une activité d'intermédiation déployée à titre personnel par le contribuable, ayant permis d'accroître la valeur des titres entre leur acquisition et leur revente, l'administration fiscale a remis en cause l'imposition de la plus-value déclarée sur le fondement de l'article 150-0 A du code général des impôts dans sa rédaction applicable en 2007 et établi une imposition supplémentaire sur le fondement du 1 de l'article 92 du même code.

2. Par un jugement du 14 avril 2014, le tribunal administratif de Montpellier a fait droit à la demande en décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle M. A... a été assujetti au titre de l'année 2007, ainsi que des pénalités correspondantes, pour un montant total de 20 813 312 euros. Par l'arrêt n° 14MA02615 du 20 décembre 2016, la Cour a annulé les articles 1er et 2 du jugement et remis à la charge du contribuable l'imposition et les pénalités dont la décharge avait été prononcée par le tribunal. Par décision du 2 mai 2018, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a jugé que la Cour, en regardant la somme en litige comme le résultat d'une activité d'intermédiation, avait inexactement qualifié les faits qui lui étaient soumis et, par suite, commis une erreur de droit. Il a annulé l'arrêt et renvoyé l'affaire à la Cour.

3. Aux termes du 1 de l'article 92 du code général des impôts : " Sont considérés comme provenant de l'exercice d'une profession non commerciale ou comme revenus assimilés aux bénéfices non commerciaux, les bénéfices des professions libérales, des charges et offices dont les titulaires n'ont pas la qualité de commerçants et de toutes occupations, exploitations lucratives et sources de profits ne se rattachant pas une autre catégorie de bénéfices ou de revenus ". A ce titre, les sommes provenant d'une cession de titres peuvent être imposées sur ce fondement si elles sont la contrepartie directe de l'activité personnelle du cédant, exercée à titre professionnel, en vue d'augmenter la valeur des titres cédés.

4. En l'espèce, par le protocole du 20 juillet 2007 complété le 30 juillet 2007, la société Acciona Energia avait consenti à M. A... une option d'achat sur les actions de la société LCV qu'elle détenait ; un " ajustement de prix " égal à 50 % de la plus-value réalisée le cas échant par M. A... en cas de revente de ces actions pour un prix supérieur au prix prévu pour la levée de l'option était également prévu. Cependant, par cet accord, la société renonçait expressément au pouvoir d'imposer à M. A... la revente des titres sur lesquels elle lui accordait une option d'achat ou de s'opposer à sa revente.

5. En outre, M. A..., et non la société cédante Acciona Energia, a accordé le 29 novembre 2007 à la société Castelnou Energia, par l'intermédiaire de la société Soper dont il est l'unique actionnaire, une garantie de passif sur les titres revendus. La circonstance que l'acquisition et la rétrocession des actions par M. A... avaient lieu le même jour ne faisait pas disparaître le risque financier lié à cette garantie des titres cédés, la société Castelnou Energia ayant la possibilité de s'en prévaloir pendant une durée de deux ans.

6. De plus, la somme due par la société Castelnou Energia à M. A... et la somme due par celui-ci à la société Acciona Energia ont certes été versées par le biais d'un compte séquestre ouvert aux noms de la société Acciona Energia et de M. A..., qui ainsi n'a procédé à aucun décaissement. Cependant, il résulte de l'instruction que cette procédure a eu pour objet de permettre à la société Acciona Energia de connaître le prix de revente et de lui garantir le paiement prévu par le protocole majoré de l' " ajustement " calculé sur la base de ce prix.

7. Enfin, ce n'est qu'au début du mois d'octobre 2007 que les offres fermes des cinq candidats à la reprise des titres sélectionnés sur appel d'offres ont été déposées et que le 16 novembre 2007 que le rachat des parts par la société Castelnou Energia a été annoncé, alors que, dès la date de la levée de l'option d'achat le 29 octobre 2007, M. A... était débiteur du prix de cession, quelle qu'ait pu être l'issue du processus de sélection du nouvel actionnaire majoritaire.

8. Il résulte des éléments mentionnés aux points 4 à 7 que les diligences particulières dont a fait preuve M. A... pour procéder à l'achat puis à la revente des actions de la société LCV que détenait la société Acciona Energia ne se détachent pas de son activité de dirigeant de la société LCV qu'il avait fondée et dont il détenait près de la moitié des parts. Le moyen soulevé par le ministre selon lequel ces diligences constitueraient une activité d'intermédiation devant être imposée sur le fondement des dispositions précédemment citées du code général des impôts doit donc être écarté.

9. Il résulte de tout ce qui précède que le ministre de l'action et des comptes publics n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a prononcé la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle M. A... a été assujetti au titre de l'année 2007, ainsi que des pénalités correspondantes.

10. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce et pour l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à M. A... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête du ministre de l'action et des comptes publics est rejetée.

Article 2 : L'Etat versera une somme de 2 000 euros à M. A... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'action et des comptes publics et à M. D... A....

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal sud-est.

Délibéré après l'audience du 16 octobre 2018, où siégeaient :

- M. Antonetti, président,

- M. Barthez, président assesseur,

- M. Maury, premier conseiller.

Lu en audience publique le 7 novembre 2018.

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N° 18MA02405

mtr


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18MA02405
Date de la décision : 07/11/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Bénéfices industriels et commerciaux - Cession d'entreprise - cessation d'activité - transfert de clientèle (notions).

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Bénéfices non commerciaux - Personnes - profits - activités imposables.


Composition du Tribunal
Président : M. ANTONETTI
Rapporteur ?: M. Alain BARTHEZ
Rapporteur public ?: Mme BOYER
Avocat(s) : MARTINOD

Origine de la décision
Date de l'import : 27/11/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-11-07;18ma02405 ?
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