La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/11/2018 | FRANCE | N°17MA03713

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre - formation à 3, 07 novembre 2018, 17MA03713


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Camping du Val d'Hérault a demandé au tribunal administratif de Montpellier de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er octobre 2009 au 30 septembre 2011 et de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2012, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1604102 du 12 juin 2017, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté

sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 11 août 2017, la ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Camping du Val d'Hérault a demandé au tribunal administratif de Montpellier de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er octobre 2009 au 30 septembre 2011 et de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2012, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1604102 du 12 juin 2017, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 11 août 2017, la société Camping du Val d'Hérault, représentée par la SELARL Colbert fiscal, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 12 juin 2017 ;

2°) de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er octobre 2009 au 30 septembre 2011 et de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2012, ainsi que des pénalités correspondantes ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les prestations qu'elle a payées à la société GIFB et à la société Camprives sont des charges pouvant être déduites pour la détermination du bénéfice net, en application de l'article 39 du code général des impôts ;

- la taxe sur la valeur ajoutée mentionnée sur les factures émises par la société GIFB peut être déduite, en application de l'article 271 du code général des impôts ;

- elle peut être déduite en application de la doctrine administrative référencée BOI-TVA-DED-40-10-10 n° 55 ;

- les indemnités de rupture conventionnelle des contrats de travail sont des charges pouvant être déduites pour la détermination du bénéfice net, en application de l'article 39 du code général des impôts.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 mars 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la société Camping du Val d'Hérault ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Barthez,

- et les conclusions de Mme Boyer, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société Camping du Val d'Hérault a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant notamment sur la taxe sur la valeur ajoutée pour la période du 1er octobre 2009 au 30 septembre 2011 et sur l'impôt sur les sociétés au titre de l'année 2012. Elle fait appel du jugement du 12 juin 2017 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à la décharge des rappels de taxe et de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie à la suite de cette vérification.

Sur la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés :

2. Aux termes du 1 de l'article 39 du code général des impôts : " Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges (...) ". En vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, s'il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits nécessaires au succès de sa prétention, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci. Il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions du 1 de l'article 39 du code général des impôts selon lesquelles le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, de justifier tant du montant des créances de tiers, amortissements, provisions et charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du même code que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité. En ce qui concerne les charges, le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée. Dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive. En vertu de ces principes, lorsqu'une entreprise a déduit en charges une dépense réellement supportée, conformément à une facture régulière relative à un achat de prestations ou de biens dont la déductibilité par nature n'est pas contestée par l'administration, celle-ci peut demander à l'entreprise qu'elle lui fournisse tous éléments d'information en sa possession susceptibles de justifier la réalité et la valeur des prestations ou biens ainsi acquis. La seule circonstance que l'entreprise n'aurait pas suffisamment répondu à ces demandes d'explication ne saurait suffire à fonder en droit la réintégration de la dépense litigieuse, l'administration devant alors fournir devant le juge tous éléments de nature à étayer sa contestation du caractère déductible de la dépense. Le juge de l'impôt doit apprécier la valeur des explications qui lui sont respectivement fournies par le contribuable et par l'administration.

3. La société Camping du Val d'Hérault a déduit du résultat imposable au titre de l'année 2012 la somme de 65 000 euros et produit une facture du 1er mars 2013 de ce montant émise par la société Camprives, à laquelle elle appartient à compter du mois d'avril 2012, portant la mention : " prestations réalisées par " le gérant de ces deux sociétés " du 22/03/2012 au 30/09/2012 ". Elle se prévaut du contrat d'assistance et de prestations que les deux sociétés ont conclu et qui est signé par leur gérant commun et détaille, en outre, la nature de l'activité effectuée au cours de cette période ainsi que sa durée pendant chaque semaine. Cependant, ces documents ne sont confirmés par aucune autre pièce, notamment des témoignages. Il est en outre constant que la société Camping du Val d'Hérault emploie six salariés dont certains sont en charge de l'activité qui aurait été ainsi effectuée par le gérant. Par suite, il n'est pas établi que la dépense de 65 000 euros correspond à une prestation réelle et présente un caractère déductible pour la détermination du bénéfice net.

4. La société Camping du Val d'Hérault a également déduit du résultat imposable au titre de l'année 2012 la somme de 64 000 euros correspondant au montant total des indemnités versées à deux salariés, en exécution des ruptures conventionnelles de contrats de travail homologuées par la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi. Cependant, il est constant que les indemnités auxquelles ces salariés pouvaient légalement prétendre s'élevaient, respectivement, à 2 185,51 euros et à 3 850,28 euros. La société requérante, qui se borne à se prévaloir de manière générale de la particularité des circonstances et de l'homologation des conventions de rupture, ne produit pas d'éléments suffisants de nature à justifier le niveau des indemnités accordées. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a remis en cause la charge déduite en tant qu'elle excède le montant légalement dû aux salariés.

5. Enfin, la société Camping du Val d'Hérault a également déduit du résultat imposable au titre des années 2010 et 2011 diverses sommes correspondant aux prestations que la société GIFB, qui la détenait durant cette période, aurait fournies. Cependant, le moyen tiré de ce que ces charges, contrairement à ce que soutient l'administration, présentent un caractère déductible est sans incidence sur le montant de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés au titre de l'année 2012, en litige dans la présente instance.

Sur les rappels de taxe sur la valeur ajoutée :

6. Aux termes de l'article 271 du code général des impôts : " I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération (...) II. 1. Dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de leurs opérations imposables, et à la condition que ces opérations ouvrent droit à déduction, la taxe dont les redevables peuvent opérer la déduction est, selon les cas : / a) celle qui figure sur les factures établies conformément aux dispositions de l'article 289 et si la taxe pouvait légalement figurer sur lesdites factures (...) ". Aux termes du 4 de l'article 283 du même code : " Lorsque la facture ne correspond pas à la livraison d'une marchandise ou à l'exécution d'une prestation de services, ou fait état d'un prix qui ne doit pas être acquitté effectivement par l'acheteur, la taxe est due par la personne qui l'a facturée ". Il résulte de ces dispositions combinées que la taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'opérations imposables est déductible, dans le cas de services facturés à l'entreprise, de la taxe à laquelle celle-ci est assujettie à raison des opérations en cours, à condition que les factures mentionnent ladite taxe, qu'elles aient été établies au nom du redevable par son fournisseur, qu'elles correspondent effectivement à l'exécution de la prestation de service dont elles font état, et que le prix indiqué soit réellement celui qui doit être acquitté par l'entreprise.

7. La société GIFB, qui détient la société Camping du Val d'Hérault jusqu'au mois d'avril 2012, a émis deux factures, le 30 septembre 2010 et le 30 septembre 2011, relatives aux prestations de services qu'elle aurait réalisées en exécution du contrat d'assistance et de prestations du 30 juillet 2003 et la société requérante a déduit la taxe sur la valeur ajoutée correspondante. Celle-ci produit également la liste des prestations qui auraient été réalisées. Cependant, ces documents peu précis ne sont assortis d'aucune autre pièce, notamment les témoignages d'autres personnes, de nature à confirmer la réalité du travail effectué par la société GIFB. En outre, il est constant que celle-ci n'emploie aucun salarié et n'a recouru à des prestataires extérieurs que pour des montants nettement inférieurs à ceux des deux factures. Ainsi, elles ne correspondent pas effectivement à l'exécution de la prestation de service dont elles font état. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a remis en cause la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée à laquelle a procédé la société requérante.

8. Aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. / Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente (...) ".

9. Les énonciations de la doctrine administrative référencée BOI-TVA-DED-40-10-10 n° 55 sont relatives au droit à la déduction de la taxe sur la valeur ajoutée en cas d'omission ou d'inexactitude de l'une des mentions obligatoires devant figurer sur une facture. Par suite, la société Camping du Val d'Hérault n'est pas fondée à s'en prévaloir dès lors que le rappel contesté est fondé sur l'absence de réalité des prestations dont font état les factures du 30 septembre 2010 et du 30 septembre 2011 et non sur une omission ou une inexactitude dont celles-ci seraient entachées.

10. Il résulte de tout ce qui précède que la société Camping du Val d'Hérault n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, quelque somme que ce soit à verser à la société Camping du Val d'Hérault au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la société Camping du Val d'Hérault est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Camping du Val d'Hérault et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal sud-est.

Délibéré après l'audience du 16 octobre 2018, où siégeaient :

- M. Antonetti, président,

- M. Barthez, président assesseur,

- M. Maury, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 7 novembre 2018.

6

N° 17MA03713

nc


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17MA03713
Date de la décision : 07/11/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Règles générales - Impôt sur les bénéfices des sociétés et autres personnes morales - Détermination du bénéfice imposable.

Contributions et taxes - Taxes sur le chiffre d'affaires et assimilées - Taxe sur la valeur ajoutée - Liquidation de la taxe - Déductions - Conditions de la déduction.


Composition du Tribunal
Président : M. ANTONETTI
Rapporteur ?: M. Alain BARTHEZ
Rapporteur public ?: Mme BOYER
Avocat(s) : SELARL COLBERT FISCAL

Origine de la décision
Date de l'import : 27/11/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-11-07;17ma03713 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award