Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... E...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler, d'une part, l'arrêté du 6 mai 2015 par lequel le maire de la commune de Grasse a décidé de prononcer son exclusion de ses fonctions pour la période du 8 mai au 7 novembre 2015, d'autre part, l'arrêté du 24 novembre 2015 par lequel le maire de la commune de Grasse a décidé de le licencier, enfin de condamner la commune de Grasse à lui verser le montant de sa rémunération au titre de la période du 8 mai au 7 novembre 2015, ainsi que la somme de 30 000 euros en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi.
Par un jugement n° 1600122 du 3 mars 2017, le tribunal administratif de Nice a annulé l'arrêté du 6 mai 2015 du maire de la commune de Grasse prononçant l'exclusion temporaire de fonction de M. E...et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 3 mai 2017, M. E..., représenté par MeC..., demande à la Cour :
1°) de confirmer l'article 1er du jugement du tribunal administratif de Nice du 3 mars 2017 qui annule l'arrêté du 6 mai 2015 du maire de la commune de Grasse ;
2°) d'annuler l'article 2 du même jugement rejetant le surplus de sa demande ;
3°) d'annuler l'arrêté du 24 novembre 2015 du maire de Grasse ;
4°) de condamner la commune de Grasse à lui verser le montant de sa rémunération au titre de la période du 8 mai au 7 novembre 2015, ainsi que la somme de 30 000 euros en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi du fait de son licenciement ;
5°) de mettre à la charge de la commune de Grasse une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'arrêté du 6 mai 2015 ne lui a jamais été notifié et ne peut, en conséquence, produire d'effets juridiques ;
- la procédure disciplinaire n'a pas été respectée ;
- l'arrêté d'exclusion n'est pas motivé ;
- l'arrêté du 24 novembre 2015 est entaché d'illégalité en ce qu'il méconnaît le principe " non bis in idem " ;
- le licenciement n'est pas fondé dés lors qu'il est motivé par sa condamnation par le tribunal correctionnel de Grasse laquelle n'est pas définitive ;
- il aurait dû faire l'objet d'une procédure de suspension qui lui aurait permis de percevoir sa rémunération et non d'une procédure d'exclusion temporaire ;
- il peut prétendre à être indemnisé de son préjudice professionnel, financier et moral.
Par un mémoire en défense, enregistré le 4 septembre 2017, la commune de Grasse, représentée par MeD..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. E... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les conclusions de la requête dirigées contre l'arrêté du 6 mai 2015 sont irrecevables dans la mesure où par son article 1er le jugement attaqué a fait droit à la demande d'annulation de cet arrêté ;
- les demandes indemnitaires sont irrecevables faute de demande préalable liant le contentieux ;
- les autres moyens soulevés par M. E... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Guidal,
- et les conclusions de M. Chanon, rapporteur public.
1. Considérant que M. E... a été recruté en qualité de collaborateur du cabinet du maire de la commune de Grasse par un arrêté du 28 mai 2014 pour exercer les fonctions de directeur de cabinet ; que, par un premier arrêté du 6 mai 2015, le maire de la commune a prononcé l'exclusion temporaire de M. E... de ses fonctions pour la période du 8 mai au 7 novembre 2015, puis, par un second arrêté du 24 novembre 2015, il a prononcé le licenciement de l'intéressé ; que M. E... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler ces décisions d'exclusion et de licenciement et de condamner la commune de Grasse à lui verser le montant de sa rémunération au titre de la période d'exclusion ainsi qu'une indemnité au titre de différents préjudices qu'il aurait subis ; que, par un jugement du 3 mars 2017, le tribunal administratif a annulé la décision d'exclusion temporaire de M. E... de ses fonctions et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande ; que M. E... relève appel de ce jugement ;
Sur les conclusions tendant à la confirmation de l'article 1er du jugement attaqué :
2. Considérant que l'appel ne peut tendre qu'à l'annulation ou à la réformation du dispositif du jugement attaqué ; que, dès lors, n'est pas recevable, quels que soient les motifs retenus par les premiers juges, l'appel dirigé contre un jugement dont le dispositif fait intégralement droit aux conclusions qu'avait présentées l'appelant devant les premiers juges ; qu'il ressort des pièces du dossier que par son article 1er le jugement attaqué du tribunal administratif de Nice a, à la demande de M. E..., annulé l'arrêté du 6 mai 2015 par lequel le maire de la commune de Grasse a prononcé son exclusion temporaire de ses fonctions pour la période du 8 mai au 7 novembre 2015 ; qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions de M. E... tendant à la confirmation de l'article 1er de ce jugement, qui ne visent ni à l'annulation ni à la réformation des dispositions de cet article, sont irrecevables et doivent être rejetées ;
Sur la légalité de l'arrêté du 24 novembre 2015 prononçant le licenciement de M. E... :
3. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article 110 de la loi du 26 janvier 1984 : " L'autorité territoriale peut, pour former son cabinet, librement recruter un ou plusieurs collaborateurs et mettre librement fin à leurs fonctions " ; que compte tenu de la liberté dont bénéficie l'autorité territoriale pour mettre fin aux fonctions de ses collaborateurs de cabinet en application des dispositions susmentionnées de l'article 110 de la loi du 26 janvier 1984, il appartient seulement au juge de vérifier qu'un tel licenciement ne repose pas sur un motif matériellement inexact, erroné en droit ou entaché de détournement de pouvoir ;
4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que la décision de licenciement du 24 novembre 2015 a été motivée par la rupture des liens de confiance entre le maire et M. E... à la suite de la condamnation de ce dernier à une peine de six mois d'emprisonnement avec sursis pour délit de fuite après accident par véhicule, conduite sous empire alcoolique et dénonciation mensongère à une autorité judiciaire, par un jugement du 18 septembre 2015 du tribunal correctionnel de Grasse ; que si ce jugement n'était pas définitif à la date à laquelle est intervenue la décision en litige, cette circonstance est sans incidence sur sa légalité, dès lors qu'à cette même date les faits à l'origine de cette condamnation étaient établis sans ambigüité et avaient d'ailleurs été reconnus par l'intéressé et qu'ils étaient susceptibles, de par leur nature, d'affecter la relation de confiance personnelle qui doit nécessairement exister entre un maire et un collaborateur exerçant les fonctions de directeur de cabinet ;
5. Considérant que, eu égard à ses motifs ainsi qu'à sa finalité, la décision par laquelle l'autorité territoriale met fin aux fonctions d'un collaborateur de cabinet pour perte de confiance ne présente pas le caractère d'une sanction ; que, par suite, le moyen tiré de la violation du principe " non bis in idem " est inopérant ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Nice a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision de licenciement du 24 novembre 2015 ;
Sur les conclusions indemnitaires :
7. Considérant que si le tribunal administratif de Nice a jugé illégal l'arrêté du 6 mai 2015 prononçant l'exclusion temporaire de M. E... de ses fonctions pour une durée de six mois, pour être intervenu à l'issue d'une procédure irrégulière, l'administration ne pouvait verser à l'intéressé un rémunération pour cette période en l'absence de service fait ; que, par ailleurs, le requérant n'apporte aucun élément de droit à l'appui de son allégation selon laquelle dans une telle situation il appartenait au maire de prendre une mesure de suspension au lieu et place d'une procédure d'exclusion temporaire ; qu'il suit de là que M. E... n'est pas fondé à demander l'annulation du jugement du tribunal administratif de Nice en tant que ce jugement a rejeté ses conclusions indemnitaires à raison de ce chef de préjudice ;
8. Considérant qu'en l'absence d'illégalité fautive de la mesure de licenciement, les conclusions indemnitaires de M. E... tendant à la réparation des préjudices qui résulteraient de cette mesure doivent être rejetées ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Nice a rejeté le surplus des conclusions de sa demande ;
Sur les frais liés au litige :
10. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. E... le versement d'une somme de 2 000 euros à la commune de Grasse au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que ces dispositions font, en revanche, obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de cette dernière qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.
Article 2 : M. E... versera à la commune de Grasse une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... E...et à la commune de Grasse.
Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.
Délibéré après l'audience du 14 septembre 2018, où siégeaient :
- M. Pocheron, président de chambre,
- M. Guidal, président-assesseur,
- MmeB..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 28 septembre 2018.
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N° 17MA01832
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