Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société MDCP a demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner :
- la société publique locale (SPL) Sillages à lui payer la somme de 65 012,34 euros correspondant aux sommes versées pour la mise à disposition d'emplacements dans le port de Canet-en-Roussillon pour les années 2009, 2010 et 2011 ;
- solidairement, sur le fondement des dommages de travaux publics, la SPL Sillages, la commune de Canet-en-Roussillon, la communauté d'agglomération Perpignan Méditerranée et, le cas échéant, la société Guintoli Agence de Vendres, la société Sogea Sud et la société EHTP à lui payer la somme de 52 237,45 euros au titre de l'année 2012, avec les intérêts au taux légal à compter du 27 juillet 2012, la somme de 40 149,72 euros au titre de l'année 2013, avec les intérêts au taux légal à compter du 3 octobre 2013, la somme de 538,20 euros pour le mois de novembre 2013, avec les intérêts au taux légal à compter de la date d'enregistrement de la demande, au titre du coût des travaux supplémentaires qu'elle a dû effectuer, ainsi que la somme de 50 000 euros au titre de l'atteinte à son image.
Par un jugement n° 1401588 du 18 décembre 2015, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés le 18 février 2016, le 31 août 2017, le 9 novembre 2017 et le 10 avril 2018, la société MDCP, représentée par la SELARL Atlantic Juris, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 18 décembre 2015 en tant qu'il a rejeté sa demande de condamnation sur le fondement des dommages de travaux publics ;
2°) de condamner solidairement la SPL Sillages et la communauté d'agglomération Perpignan Méditerranée à lui payer la somme de 48 392,58 euros au titre de l'année 2012, avec les intérêts au taux légal à compter du 27 juillet 2012, la somme de 40 149,72 euros au titre de l'année 2013, avec les intérêts au taux légal à compter du 3 octobre 2013, la somme de 538,20 euros pour le mois de novembre 2013, avec les intérêts au taux légal à compter de la date d'enregistrement de la requête devant le tribunal administratif de Montpellier, ainsi que la somme de 50 000 euros au titre de l'atteinte à son image ;
3°) de mettre à la charge de la SPL Sillages, de la commune de Canet-en-Roussillon et de la communauté d'agglomération Perpignan Méditerranée la somme de 6 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le préjudice qu'elle a subi est lié aux travaux publics, effectués sous la maîtrise d'ouvrage de la communauté d'agglomération Perpignan Méditerranée qui l'a déléguée à la SPL Sillages, de viabilisation de terrains jouxtant les parcelles qu'elle occupe ;
- ce préjudice présente un caractère anormal et spécial ;
- le préjudice financier correspond au surcoût salarial dû au travail supplémentaire de nettoyage des bateaux et aux pertes commerciales liées à la dégradation de son image et au report des livraisons.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 9 mai 2016, le 14 avril 2017, le 31 juillet 2017 et le 7 mai 2018, la SPL Sillages, représentée par la SELARL AB Vocare, demande à la cour :
1°) de rejeter la requête ;
2°) à titre subsidiaire, par la voie de l'appel provoqué, de condamner les sociétés Guintoli, Sogea Sud et EHTP à la garantir des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre ;
3°) de mettre à la charge de la société MDCP ou de toute autre partie perdante la somme de 6 000 euros à lui verser en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'autorité de la chose jugée le 3 juillet 2017 par le tribunal de commerce de Perpignan fait obstacle à la demande de la société MDCP tendant au remboursement de la somme de 65 012,34 euros qu'elle lui avait payée ;
- l'action de la société MDCP est prescrite ;
- la juridiction administrative est incompétente pour connaître de dommages causés par des véhicules ;
- la société MDCP, qui n'est pas propriétaire des navires sur lesquelles elle intervient, est dépourvue d'intérêt à agir ;
- les moyens soulevés par la société MDCP ne sont pas fondés ;
- la responsabilité des sociétés Guintoli, Sogea Sud et EHTP est engagée en raison des fautes qu'elles ont commises lors de l'exécution des travaux publics.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 3 mai 2017 et le 24 avril 2018, la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole, venant aux droits de Perpignan Méditerranée communauté d'agglomération, représentée par la SCP Becque - Dahan - Pons-Serradeil -B...- Rey, demande à la cour :
1°) de rejeter la requête ;
2°) de mettre à la charge de la société MDCP la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la juridiction administrative est incompétente pour connaître de dommages causés par des véhicules ;
- les conclusions de la société MDCP tendant à ce qu'elle soit condamnée à lui payer le montant du surcoût salarial sont irrecevables car elles excèdent le montant demandé en première instance ;
- la société MDCP, qui n'est pas propriétaire des navires sur lesquelles elle intervient, est dépourvue d'intérêt à agir ;
- l'action de la société MDCP est prescrite ;
- les moyens soulevés par la société MDCP ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 16 juin 2017, la société Sogea Sud, représentée par MeE..., demande à la cour :
1°) de rejeter la requête ainsi que les conclusions de la SPL Sillages tendant à ce qu'elle soit condamnée à la garantir des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre ;
2°) de mettre à la charge de la SPL Sillages la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les moyens soulevés par la société MDCP ne sont pas fondés ;
- les travaux qu'elle a exécutés ayant été réceptionnés sans réserve, les conclusions de la SPL Sillages en appel en garantie sont " irrecevables " ;
- elle n'a commis aucune faute lors de la réalisation des travaux.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 7 juillet 2017 et le 4 mai 2018, la société EHTP, représentée par MeA..., demande à la cour :
1°) de rejeter la requête ainsi que les conclusions de la SPL Sillages tendant à ce qu'elle soit condamnée à la garantir des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre ;
2°) de mettre à la charge de la société MDCP la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les moyens soulevés par la société MDCP ne sont pas fondés ;
- les travaux qu'elle a exécutés ayant été réceptionnés sans réserve, les conclusions de la SPL Sillages en appel en garantie sont " irrecevables " ;
- elle n'a commis aucune faute lors de la réalisation des travaux et la SPL Sillages a commis des fautes.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 7 juillet 2017, le 18 septembre 2017 et le 4 mai 2018, la société Guintoli, représentée par MeA..., demande à la cour :
1°) de rejeter la requête ainsi que les conclusions de la SPL Sillages tendant à ce qu'elle soit condamnée à la garantir des condamnations qui pourraient être prononcées à son encontre ;
2°) de mettre à la charge de la société MDCP la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les moyens soulevés par la société MDCP ne sont pas fondés ;
- les travaux qu'elle a exécutés ayant été réceptionnés sans réserve, les conclusions de la SPL Sillages en appel en garantie sont " irrecevables " ;
- elle n'a commis aucune faute lors de la réalisation des travaux et la SPL Sillages a commis des fautes.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 57-1424 du 31 décembre 1957 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Barthez,
- les conclusions de Mme Chamot, rapporteure publique,
- et les observations de MeF..., représentant la société MDCP, de MeC..., représentant la SLP Sillages, de MeB..., représentant la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole, de MeA..., représentant la société Guintoli et la société EHTP, et de MeD..., représentant la société Sogea Sud.
Considérant ce qui suit :
Sur la régularité du jugement :
1. L'article 1er de la loi du 31 décembre 1957 précédemment visée attribue compétence aux tribunaux de l'ordre judiciaire " pour statuer sur toute action en responsabilité tendant à la réparation des dommages de toute nature causés par un véhicule quelconque ". Cependant, il résulte de l'instruction que le dommage dont se plaint la société MDCP ne trouve pas sa cause déterminante dans l'action d'un véhicule mais dans la conception ou l'exécution de l'opération de travaux publics prise dans son ensemble de viabilisation du port de Canet-en-Roussillon. Par suite et en tout état de cause, ni la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole ni la SPL Sillages ne sont fondées à soutenir que la juridiction administrative ne serait pas compétente pour connaître des conclusions de la société MDCP tendant à la réparation du dommage résultant pour elle de l'exécution, parfois au moyen de véhicules, de ces travaux.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne la responsabilité de la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole et de la SLP Sillages :
2. Il appartient à une personne, qui s'estime victime d'un dommage de travaux publics, de rapporter la preuve du lien de cause à effet entre ces travaux et le dommage dont elle se plaint ainsi que la réalité de celui-ci. Même en l'absence de faute, le maître d'ouvrage ainsi que, le cas échéant, le maître d'ouvrage délégué sont responsables solidairement à l'égard des tiers des dommages causés à ceux-ci par l'exécution d'un travail public qui présentent un caractère anormal et spécial. Ils ne peuvent dégager leur responsabilité que s'ils établissent que ces dommages sont imputables à un cas de force majeure ou à une faute de la victime.
3. Les travaux de viabilisation du port de Canet-en-Roussillon ont constitué une opération de travaux publics à l'égard de laquelle la société MDCP a la qualité de tiers. Il résulte de l'instruction qu'en cas de vent violent, ils ont entraîné des nuages de poussière qui ont sali les bateaux neufs que la société préparait avant leur livraison et été à l'origine d'un surcroît de travail de nettoyage. Cependant, les photographies et les attestations produites n'établissent ni l'importance de ce travail supplémentaire que la société MDCP a pu assurer principalement sans avoir recours à des prestations de service extérieures, ni les dommages que la terre soulevée aurait causés aux bateaux, notamment à leur moteur. En outre, la société n'établit ni que le surcroît de travail ait entraîné une perte financière en raison de l'emploi de personnel supplémentaire ou du retard dans la livraison des bateaux ni que la perte du marché de préparation des bateaux à voile de marque Sunsail et, plus généralement, la baisse de son activité soient liées de manière directe et certaine à ces travaux publics de viabilisation du port.
4. Ainsi, les gênes et nuisances n'ont pas excédé celles que la société MDCP était normalement tenue de supporter sans indemnité. Par suite, elle n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. Dans ces conditions, il n'est nécessaire de se prononcer ni sur la recevabilité de son appel, contestée par la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole, ni sur son intérêt pour agir, contesté par la SPL Sillages.
Sur les frais liés au litige :
5. En application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société MDCP la somme de 1 000 euros à verser la SPL Sillages et la même somme à verser à la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole. Les dispositions de cet article font obstacle à ce que soit mise à la charge de la SPL Sillages, de la commune de Canet-en-Roussillon ou de la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole, qui ne sont pas la partie perdante dans la présente instance, quelque somme que ce soit à verser à la société MDCP au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux demandes des sociétés EHTP, Guintoli et Sogea Sud tendant à l'application de cet article.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de la société MDCP est rejetée.
Article 2 : La société MDCP versera une somme de 1 000 euros à la SPL Sillages et la même somme à la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Les conclusions des autres parties tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société MDCP, à la société publique locale Sillages, à la communauté urbaine Perpignan Méditerranée Métropole, à la société EHTP, à la société Guintoli et à la société Sogea Sud.
Copie en sera adressée à la commune de Canet-en-Roussillon.
Délibéré après l'audience du 14 juin 2018, où siégeaient :
- M. Vanhullebus, président,
- M. Barthez, président assesseur,
- MmeG..., première conseillère.
Lu en audience publique le 28 juin 2018.
N° 16MA00648 2