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26/06/2018 | FRANCE | N°17MA02376

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre - formation à 3, 26 juin 2018, 17MA02376


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 18 novembre 2016 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1606386 du 24 mars 2017, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 7 juin 2017, M. B..., repr

senté par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 24 mars 2017 du tribunal admi...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 18 novembre 2016 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1606386 du 24 mars 2017, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 7 juin 2017, M. B..., représenté par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 24 mars 2017 du tribunal administratif de Montpellier ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de l'Hérault du 18 novembre 2016 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de l'arrêt à intervenir ou, subsidiairement, de réexaminer sa situation dans un délai de deux mois sous la même astreinte ;

4°) de condamner l'Etat aux entiers dépens et de mettre à sa charge une somme de 1 500 euros à verser à son conseil en cas d'admission à l'aide juridictionnelle en application des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991, ou à lui-même en cas de non admission à l'aide juridictionnelle sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision de refus de séjour a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision de refus de séjour est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- cette décision a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'inconventionnalité du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui est incompatible avec l'article 12 de la directive du 16 décembre 2008 ;

- le préfet, qui s'est cru en situation de compétence lié, a entaché sa décision portant obligation de quitter le territoire français d'une erreur de droit.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 mai 2018, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 22 mai 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme Mastrantuono a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M. B..., né en 1971, de nationalité turque, relève appel du jugement en date du 24 mars 2017 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 18 novembre 2016 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) " ;

3. Considérant que si M. B... a épousé, le 8 juillet 2016, une compatriote séjournant régulièrement en France sous couvert d'un certificat de résidence de dix ans et que de cette union est né à Béziers, le 12 août 2016, un fils prénommé Umut, les pièces produites par le requérant, constituées principalement d'attestations rédigées dans le cadre de l'instance, ne sont pas de nature à démontrer la réalité et la continuité du séjour de l'intéressé en France avant l'année 2016, ni son intégration, alors qu'il n'est pas dépourvu d'autres attaches familiales en Turquie, où résident deux autres de ses enfants, dont un mineur ; que, dans ces conditions, la décision de refus de séjour contestée n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et ne méconnaît donc pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni, en tout état de cause, les dispositions de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que pour les mêmes motifs, le préfet ne saurait être regardé comme ayant entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " 1. Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

5. Considérant que M. B..., qui a la même nationalité que son épouse et dont le dernier enfant est très jeune, ne démontre pas l'impossibilité de reconstituer la cellule familiale soit en France, dans le cadre d'une procédure de regroupement familial suivie d'une issue positive, soit dans le pays d'origine des deux époux, où résident les deux premiers enfants du requérant, l'intéressé n'apportant aucun début d'explication sur les circonstances qui pourraient faire obstacle à ce que son épouse le suive en Turquie ; que l'arrêté en litige n'étant pas nécessairement porteur d'une séparation durable du jeune enfant d'avec l'un de ses parents, les stipulations précitées n'ont pas été méconnues ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes du 1 de l'article 12 de la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 : " Les décisions de retour (...) ainsi que les décisions d'éloignement sont rendues par écrit, indiquent leurs motifs de fait et de droit et comportent des informations relatives aux voies de recours disponibles (...) " ; qu'aux termes du I de l'article L. 511 1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) / La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III (...) " ;

7. Considérant que lorsqu'une obligation de quitter le territoire français assortit un refus de séjour, la motivation de cette mesure se confond avec celle du refus de titre de séjour dont elle découle nécessairement et n'implique pas, par conséquent, dès lors que ce refus est lui même motivé, de mention spécifique pour respecter les exigences de l'article 12 de la directive précitée ; que, par suite, les dispositions susmentionnées du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne sont pas incompatibles avec celles précitées de ladite directive ; qu'il s'ensuit que le moyen tiré de l'illégalité de la décision préfectorale contestée, par voie de conséquence de l'application d'une disposition de droit interne contraire au droit de l'Union européenne, doit être écarté ;

8. Considérant, en dernier lieu, qu'il ne ressort d'aucune des pièces du dossier que le préfet se serait cru en situation de compétence liée pour assortir le refus de séjour opposé à M. B... d'une décision lui faisant obligation de quitter le territoire français ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ; que ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte, ainsi que celles présentées au titre des dispositions des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 et, en tout état de cause, de celles de l'article R. 761-1 du code de justice administrative, doivent, par voie de conséquence, être rejetées ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à Me C... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.

Délibéré après l'audience du 12 juin 2018, où siégeaient :

- M. Antonetti, président,

- Mme Chevalier-Aubert, président assesseur,

- Mme Mastrantuono, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 26 juin 2018.

5

N° 17MA02376

mtr


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17MA02376
Date de la décision : 26/06/2018
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. ANTONETTI
Rapporteur ?: Mme Florence MASTRANTUONO
Rapporteur public ?: M. RINGEVAL
Avocat(s) : BONOMO FAY

Origine de la décision
Date de l'import : 17/07/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-06-26;17ma02376 ?
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