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26/06/2018 | FRANCE | N°17MA02271

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre - formation à 3, 26 juin 2018, 17MA02271


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 24 avril 2017 par lequel le préfet de l'Hérault l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de circuler sur le territoire français pendant une durée de deux ans.

Par un jugement n° 1702042 du 5 mai 2017, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :


Par une requête, enregistrée le 1er juin 2017, M. A..., représenté par Me C... demande à la Co...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 24 avril 2017 par lequel le préfet de l'Hérault l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de circuler sur le territoire français pendant une durée de deux ans.

Par un jugement n° 1702042 du 5 mai 2017, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 1er juin 2017, M. A..., représenté par Me C... demande à la Cour :

1°) de saisir, à titre principal, la juridiction judiciaire de la question préjudicielle suivante : " L'audition de Monsieur A...en date du 21 avril 2017 doit-elle être déclarée illégale au regard des articles 66 de la Constitution, 78-2 et suivants, 61-1 et suivants du code de procédure pénale, L. 611-1-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ou de toute autre disposition légalement applicable ' " ;

2°) d'annuler le jugement n° 1702042 du 5 mai 2017 du tribunal administratif de Montpellier ;

3°) d'annuler l'arrêté du 24 avril 2017 ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me C... d'une somme de 900 euros en application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

Un mémoire, non communiqué, présenté pour M. A..., a été enregistré au greffe de la Cour le 7 juin 2018.

Il soutient que :

- le tribunal a omis de se prononcer sur le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- l'obligation de quitter le territoire sans délai est fondée sur une audition irrégulière ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation personnelle ;

- le préfet a méconnu son obligation de loyauté dans l'administration de la preuve ;

- la décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,

- le critère de contribution effective ne peut lui être opposé ;

- la décision en litige méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant de New-York ;

- la décision portant interdiction de circulation sur le territoire sera annulée par voie d'exception d'illégalité de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant de New-York.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 mai 2018, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Chevalier-Aubert,

- et les observations de Me B... substituant Me C..., représentant M. A....

1. Considérant que M. A..., né en 1984, de nationalité roumaine, relève appel du jugement en date du 5 mai 2017 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 avril 2017 par lequel le préfet de l'Hérault l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination et lui a interdit de circuler sur le territoire français pendant une durée de deux ans ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant qu'il ressort de l'examen du point 4 du jugement attaqué que le tribunal a répondu au moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant de New-York ; qu'ainsi, M. A... n'est pas fondé à soutenir que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif aurait entaché sa décision d'une omission à statuer sur ce point ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

3. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que M. A... a été successivement condamné, le 7 décembre 2012 par le tribunal correctionnel de Marseille à trois mois d'emprisonnement avec sursis pour des faits de conduite d'un véhicule sans permis et de circulation avec un véhicule terrestre à moteur sans assurance, le 29 janvier 2013 par le tribunal correctionnel d'Aix-en-Provence à six mois d'emprisonnement avec sursis pour vol en réunion, le 23 mai 2013 par le même tribunal à deux ans et six mois d'emprisonnement pour tentative de vol en réunion, le 6 novembre 2013 par le tribunal correctionnel de Montpellier à six mois d'emprisonnement pour tentative de vol avec destruction ou dégradation, le 5 février 2014 par le même tribunal à six mois d'emprisonnement pour vol en réunion, enfin le 26 décembre 2014 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence, sur appel du jugement précité du 23 mai 2013, à trois ans d'emprisonnement pour tentative de vol en réunion ; que dès lors, compte tenu de la réitération des faits délictueux, le préfet a pu légalement, sans erreur d'appréciation, estimer que le comportement de l'intéressé constituait une menace réelle, actuelle et suffisamment grave à l'encontre de la sécurité publique, qui constitue un intérêt fondamental de la société au sens des dispositions précitées, et prononcer une obligation de quitter le territoire français à l'encontre de M. A... ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1 - Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2 - Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; et qu'aux termes de l'article 3-1 de la Convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ;

5. Considérant que pour justifier des liens entretenus avec son épouse et ses enfants, M. A..., notamment lors de son incarcération, se borne à produire une seule demande de visite dans le cadre des " unités de vie familiales " en date du 20 juin 2016 ; que le magistrat désigné pouvait prendre notamment, en considération l'absence de contribution effective à l'entretien et à l'éducation des enfants ; qu'en se bornant à faire valoir que sa fille est placée à l'aide sociale à l'enfance il ne justifie pas que sa cellule familiale ne pourrait se reconstituer en Roumanie dans son pays d'origine et dans celui de ses enfants et de son épouse ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des stipulations de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ne peuvent qu'être écartés ; qu'il en est de même du moyen tiré de ce que le préfet aurait commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences qu'emporte la décision portant obligation de quitter le territoire sur la situation personnelle de l'intéressé ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que M. A... a été auditionné au centre pénitentiaire de Béziers, le 21 avril 2017 par un officier de police judiciaire dans le cadre d'une enquête administrative ; que cette mesure de contrôle est distincte de la mesure par laquelle le préfet a fait obligation à l'intéressé de quitter le territoire français ; qu'il n'appartient pas au juge administratif, devant lequel il est loisible au requérant d'apporter tous éléments de nature à établir que les faits sur lesquels le préfet s'est fondé seraient erronés, de se prononcer sur la régularité de l'audition en cause ; que, dès lors, les moyens tirés de ce que celle-ci aurait été effectuée en dehors de tout cadre légal en méconnaissance du droit à l'assistance d'un avocat ne peuvent qu'être écartés, sans qu'il soit besoin de saisir l'autorité judiciaire d'une question préjudicielle sur ce point ;

7. Considérant, en quatrième lieu, que pour les motifs énoncés au point précédent, le préfet ne saurait être regardé comme ayant manqué à son obligation de loyauté en se fondant, pour prendre l'arrêté contesté, sur les éléments contenus dans le procès-verbal d'audition de M. A... ;

8. Considérant, en cinquième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier, que le préfet a procédé à un examen particulier de la situation de M. A... ;

Sur la décision interdisant la circulation sur le territoire français :

9. Considérant que la décision portant obligation de quitter le territoire français n'étant pas, ainsi qu'il vient d'être dit entachée des illégalités invoquées, M. A... n'est pas fondé à soulever, par voie d'exception, l'illégalité de cette décision à l'encontre de la décision d'interdiction de circulation ;

10. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-3-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut, par décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français prononcée en application des 2° et 3° de l'article L. 511-3-1 d'une interdiction de circulation sur le territoire français d'une durée maximale de trois ans " ; qu'aux termes de l'article L. 511-3-1 du même code : " (...) L'autorité administrative compétente tient compte de l'ensemble des circonstances relatives à sa situation, notamment la durée du séjour de l'intéressé en France, son âge, son état de santé, sa situation familiale et économique, son intégration sociale et culturelle en France, et de l'intensité de ses liens avec son pays d'origine.(...) " ;

11. Considérant que le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision interdisant la circulation sur le territoire français doit être écarté, par adoption des motifs des premiers juges qui n'appellent pas de précision en appel ;

12. Considérant que pour les mêmes raisons que celles qui ont été exposées au point 5, M. A... n'est fondé à soutenir ni que la décision portant interdiction de circulation sur le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et celles de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant de New-York, ni qu'elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A..., à Me C... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.

Délibéré après l'audience du 12 juin 2018, où siégeaient :

- M. Antonetti, président,

- Mme Chevalier-Aubert, président assesseur,

- Mme Boyer, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 26 juin 2018.

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N° 17MA02271

nc


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17MA02271
Date de la décision : 26/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. ANTONETTI
Rapporteur ?: Mme Virginie CHEVALIER-AUBERT
Rapporteur public ?: M. RINGEVAL
Avocat(s) : DE FOUCAULD

Origine de la décision
Date de l'import : 10/07/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-06-26;17ma02271 ?
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