Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D...B...et Mme A...C...B...ont demandé au tribunal administratif de Nîmes de condamner le centre hospitalier universitaire de Nîmes à payer à M. B... une somme de 54 500 euros et à sa mère Mme C...B...une somme de 10 000 euros en réparation des préjudices consécutifs à la prise en charge médicale dont a fait l'objet M. B... au cours du mois d'avril 2010.
Par un jugement n° 1403939 du 16 juin 2016, le tribunal administratif de Nîmes a condamné le centre hospitalier universitaire de Nîmes à payer à M. B...la somme de 1 000 euros et a rejeté le surplus des conclusions de leur demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 12 août 2016 et un mémoire enregistré le 23 juin 2017, M. B...et Mme C...B..., représentés par MeE..., demandent à la Cour :
1°) de réformer le jugement du 16 juin 2016 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a limité à la somme de 1 000 euros l'indemnité au versement de laquelle il a condamné le centre hospitalier universitaire de Nîmes en réparation du préjudice subi ;
2°) de porter à la somme de 54 500 euros le montant de l'indemnité due par le centre hospitalier au titre des préjudices que M. B...a subis et de condamner cet établissement de santé à payer à sa mère la somme de 10 000 au titre de son préjudice d'affection, ainsi que les intérêts au taux légal à compter de la date de réception de la demande préalable et la capitalisation de ces intérêts ;
3°) de mettre à la charge du centre hospitalier la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- la responsabilité pour faute du centre hospitalier universitaire de Nîmes est engagée pour retard de diagnostic et défaut de surveillance ;
- les préjudices qu'il a subis en lien avec ces deux fautes doivent être réparés, ainsi que le préjudice d'affection éprouvé par sa mère.
Par un mémoire en défense, enregistré le 23 mai 2017, le centre hospitalier universitaire de Nîmes demande à la cour :
1°) de rejeter la requête ;
2°) par la voie de l'appel incident :
- d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nîmes en tant qu'il l'a condamné à verser à M. B...la somme de 1 000 euros ;
- de rejeter la demande présentée par M. et Mme B...devant le tribunal administratif.
Il soutient que :
- aucune faute dans les soins administrés ni aucun retard de diagnostic ne peuvent lui être imputés ;
- le retard fautif de diagnostic a été sans incidence ;
- la perte de chance subie d'éviter les préjudices est très faible ;
- aucun défaut de surveillance ne saurait lui être imputé ;
- l'état du patient ne justifiait pas une surveillance particulière ;
- l'indemnisation accordée par le tribunal est suffisante ;
- les autres postes de préjudices dont il est demandé réparation ne sont pas en lien avec la faute qui lui est imputée, mais avec l'état initial du patient.
La requête a été communiquée à la caisse primaire d'assurance maladie du Gard qui n'a pas produit de mémoire.
M. B...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 10 octobre 2016.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Duran-Gottschalk, rapporteure,
- et les conclusions de Mme Chamot, rapporteure publique.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne la responsabilité :
1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute " ;
2. Considérant, en premier lieu, que M. B...a été hospitalisé dans le service de psychiatrie du centre hospitalier universitaire de Nîmes du 5 mars 2010 au 12 mai 2010 ; que le 19 avril, l'équipe soignante, constatant la présence d'ampoules, a réalisé des pansements au niveau des talons du patient ; qu'alors que l'état des plaies se dégradait, le centre hospitalier n'a fait intervenir un dermatologue, sur demande du médecin traitant de M.B..., que le 30 avril ; que le diagnostic d'escarres talonnières des deux pieds au stade III, de phlyctènes percées et de nécrose sous-jacente a alors été posé et un traitement adéquat mis en place ; qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport de l'expert nommé par la CRCI PACA, plus étayé que celui de l'expert désigné par le tribunal administratif, qu'une vérification de l'état cutané sous les phlyctènes était nécessaire dès le 20 avril ; qu'ainsi que l'a jugé à bon droit le tribunal administratif, ce retard de diagnostic et de prise en charge constitue une faute de nature à engager la responsabilité de l'établissement de santé ;
3. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le centre hospitalier universitaire de Nîmes n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a engagé sa responsabilité sur ce fondement ;
4. Considérant, en second lieu, que l'apparition des escarres a été favorisée à la fois par la polyneuropathie sensitivo motrice dont souffrait le patient et par la compression extrinsèque de la peau des talons exercée par les briquets que M. B...cachait dans ses chaussettes ; que la circonstance que l'équipe soignante n'ait pas détecté ces briquets avant le 26 avril ne constitue pas dans les circonstances de l'espèce un défaut de surveillance ; que les douleurs ressenties aux jambes par le patient depuis le 16 avril n'étaient pas évocatrices de l'apparition d'escarres ; qu'aucun élément ne justifiait une surveillance accrue de M. B...durant son séjour hospitalier ; que c'est donc à bon droit que le tribunal administratif n'a pas retenu de défaut de surveillance ;
En ce qui concerne la réparation :
5. Considérant, d'une part, que le tribunal administratif n'a pas insuffisamment réparé les seuls préjudices en lien direct et certain avec la faute retenue au point 2, constitués par des souffrances évaluées par l'expert à 1 sur une échelle de 0 à 7 et de troubles dans les conditions d'existence durant la période de déficit fonctionnel temporaire total subi du 19 au 29 avril 2010 en allouant à M. B...la somme de 1 000 euros ; que les autres chefs de préjudice dont il est demandé réparation par le requérant ne sont pas en lien avec la faute mais avec l'état initial du patient ;
6. Considérant, d'autre part, que compte tenu de la faute du centre hospitalier et des préjudices de courte durée qui en ont résulté, le préjudice d'affection de Mme C...B...n'est pas de nature à lui ouvrir droit à indemnisation ;
7. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a fixé à 1 000 euros le montant de l'indemnité accordée en réparation des préjudices subis ; que Mme C... B...n'est quant à elle pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a rejeté sa demande ;
Sur les frais liés au litige :
8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge du centre hospitalier universitaire de Nîmes, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement d'une somme aux requérants, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. B...et de Mme C...B...est rejetée.
Article 2 : Les conclusions du centre hospitalier universitaire de Nîmes présentées par la voie de l'appel incident sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...B..., à Mme A...C...B..., au centre hospitalier universitaire de Nîmes, à la caisse primaire d'assurance maladie du Gard et à MeE....
Délibéré après l'audience du 17 mai 2018, où siégeaient :
- M. Vanhullebus, président de chambre,
- M. Barthez, président-assesseur,
- Mme Duran-Gottschalk, première conseillère.
Lu en audience publique, le 31 mai 2018
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N° 16MA03348