Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Le Préfet des Bouches-du-Rhône a déféré au tribunal administratif de Marseille comme prévenue d'une contravention de grande voirie l'Entreprise Nationale de Transport Maritime des Voyageurs, demandé de constater que les faits établis par le procès-verbal constituent la contravention prévue et réprimée par l'article L. 5335-2 du code des transports et de condamner l'entreprise Nationale de Transport Maritime de Voyageurs à verser au Grand Port Maritime de Marseille la somme de 29 918,18 euros en remboursement des frais avancés pour la réparation de l'installation endommagée.
Par un jugement n° 1504610 du 9 juin 2016, le tribunal administratif de Marseille, a relaxé l'Entreprise Nationale de Transport Maritime de Voyageurs des fins de poursuites pour contravention de grande voirie engagées par le préfet des Bouches-du-Rhône à raison des faits constatés le 29 avril 2006.
Procédure devant la Cour :
Par un recours, enregistré le 3 août 2016, la ministre de l'environnement de l'énergie et de la mer, demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 9 juin 2016 ;
2°) de constater que les faits établis par le procès-verbal constituent la contravention prévue et réprimée par l'article L. 5335-2 du code des transports et de condamner l'entreprise Nationale de Transport Maritime de Voyageurs à verser au Grand Port Maritime de Marseille la somme de 29 918,18 euros en remboursement des frais avancés pour la réparation de l'installation endommagée.
Elle soutient que :
- le jugement est insuffisamment motivé ;
- la notification neuf ans après les faits de la contravention de grande voirie n'a pas porté atteinte aux droits de la défense de la société ;
- il n'y a pas d'incohérence entre les dommages décrits sur le procès-verbal et les réparations effectuées ;
- le contradictoire a été respecté concernant l'étendue des dommages.
Par un mémoire, enregistré le 19 juin 2017, l'Entreprise Nationale de Transports Maritimes des Voyageurs, représentée par MaîtreA..., conclut au rejet du recours et à ce que la somme de 3 000 euros soit mise à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que les moyens soulevés par la ministre de l'environnement de l'énergie et de la mer ne sont pas fondés.
Vu :
-le procès-verbal de constatation établi le 27 août 2006 ;
-le certificat du 1er avril 2015 constatant la notification du procès-verbal, comportant citation à comparaître et invitation à produire une défense écrite ;
-les autres pièces du dossier.
Vu
- le code pénal ;
- le code de procédure pénale ;
- le code général de la propriété des personnes publiques ;
- le code des transports ;
- le code général des impôts ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Maury rapporteur;
- les conclusions de M. Chanon, rapporteur public ;
- et les observations de Me A..., représentant l'Entreprise Nationale de Transport Maritime des Voyageurs.
1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'un procès-verbal de contravention de grande voirie a été dressé le 27 août 2006 par l'officier de port adjoint au Port Autonome de Marseille, ultérieurement devenu Grand Port Maritime de Marseille (GPMM), à l'encontre de l'Entreprise Nationale de Transport Maritime des Voyageurs (ENTMV), en raison des dommages causés par le navire Tassili II aux installations portuaires lors de sa manoeuvre d'appareillage ; que par courrier du GPMM en date du 7 février 2014, l' ENTMV s'est vue réclamer la somme de 29 918,18 euros en remboursement des frais de remise en état des installations ; que le procès-verbal a été notifié à l'entreprise par le préfet des Bouches du Rhône le 3 avril 2015 ; que, par jugement du 9 juin 2016, le tribunal administratif de Marseille, a relaxé l'ENTMV des fins de poursuites pour contravention de grande voirie engagées par le préfet des Bouches-du-Rhône à raison des faits constatés le 27 août 2006 ; que la ministre de l'environnement de l'énergie et de la mer relève appel de ce jugement ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés " ;
3. Considérant que le jugement attaqué énonce les éléments de fait et de droit qui le fondent, notamment en ce qui concerne l'atteinte portée aux droits de la défense ; que, par suite, le tribunal, qui a suffisamment motivé son jugement, n'a pas méconnu les dispositions de l'article L. 9 du code de justice administrative ;
Sur la contravention de grande voirie :
4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 332-1 du code des ports maritimes, dans sa rédaction en vigueur à la date des faits : " Nul ne peut porter atteinte au bon état et à la propreté du port et de ses installations. Le fait de jeter dans les eaux du port tous déchets, objets, terre, matériaux ou autres, est puni d'une amende d'un montant égal à celui prévu pour les contraventions de la cinquième classe " ; qu'aux termes de l'article L. 774-2 du code de justice administrative : " Dans les dix jours qui suivent la rédaction d'un procès-verbal de contravention, le préfet fait faire au contrevenant notification de la copie du procès-verbal. La notification est faite dans la forme administrative, mais elle peut également être effectuée par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. La notification indique à la personne poursuivie qu'elle est tenue, si elle veut fournir des défenses écrites, de les déposer dans le délai de quinzaine à partir de la notification qui lui est faite. Il est dressé acte de la notification ; cet acte doit être adressé au tribunal administratif et y être enregistré comme les requêtes introductives d'instance " ; que, si l'observation du délai de dix jours mentionné par ce texte n'est pas prescrite à peine de nullité, la notification tardive du procès-verbal ne doit pas porter atteinte aux droits de la défense ;
5. Considérant que le procès-verbal de contravention de grande voirie dressé le 27 août 2006 n'a été notifié à l'ENTMV que le 3 avril 2015, soit plus de huit ans et sept mois après les faits ; que cette circonstance a privé la société de la possibilité de rassembler les preuves utiles pour sa défense ; que la facture du 27 février 2014 d'un montant de 29 918, 18 euros fait mention de " réparation des dommages causés au poste 086 " alors que le procès-verbal de contravention évoque des " dommages causés à l'angle du quai nord-ouest du poste 087 " ; qu'ainsi il n'est pas établi que l'entreprise aurait pu discuter contradictoirement de l'étendue des dommages et du caractère normal du coût de remise en état ; que dans ces conditions, le retard avec lequel le procès-verbal a été notifié doit être regardé comme ayant eu pour effet de porter atteinte aux droits de la défense ;
6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, que la ministre de l'environnement de l'énergie et de la mer n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a relaxé l'Entreprise Nationale de Transport Maritime de Voyageurs des fins de poursuites pour contravention de grande voirie engagées par le préfet des Bouches-du-Rhône à raison des faits constatés le 27 août 2006 ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;
8. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'Etat le versement à l'Entreprise Nationale de Transport Maritime de Voyageurs d'une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : Le recours de la ministre de l'environnement de l'énergie et de la mer est rejeté.
Article 2 : L'Etat versera à l'Entreprise Nationale de Transport Maritime de Voyageurs une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la l'Entreprise Nationale de Transport Maritime de Voyageurs et au ministre de la transition écologique et solidaire.
Délibéré après l'audience du 26 janvier 2018, où siégeaient :
- M. Pocheron, président de chambre,
- M. Guidal, président assesseur,
- M. Maury, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 9 février 2018
N°16MA03177 2
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