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19/10/2017 | FRANCE | N°16MA01813

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 19 octobre 2017, 16MA01813


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B...épouse E...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 26 octobre 2015 du préfet des Bouches-du-Rhône refusant de lui délivrer un certificat de résidence, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel elle pourrait être éloignée d'office.

Par un jugement n° 1508903 du 16 décembre 2015, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...B...épouse E...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 26 octobre 2015 du préfet des Bouches-du-Rhône refusant de lui délivrer un certificat de résidence, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel elle pourrait être éloignée d'office.

Par un jugement n° 1508903 du 16 décembre 2015, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 9 mai 2016 et 23 juin 2016, Mme B...épouseE..., représentée par MeD..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 16 décembre 2015 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 26 octobre 2015 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 et 75 de la loi du

10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- l'arrêté contesté est entaché d'un vice de procédure, en l'absence de saisine de la commission du titre de séjour ;

- l'arrêté méconnait l'article 6, 5 de l'accord franco-algérien ;

- l'arrêté méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'arrêté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle.

La requête a été communiquée au préfet des Bouches-du-Rhône qui n'a pas produit de mémoire.

Mme B...épouse E...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 21 mars 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme Bourjade-Mascarenhas a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que Mme B...épouseE..., ressortissante algérienne, née le 15 octobre 1983, relève appel du jugement du 16 décembre 2015 du tribunal administratif de Marseille qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 26 octobre 2015 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un certificat de résidence sur le fondement des dispositions de l'article 6, 5 de l'accord franco-algérien, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être éloignée d'office ;

Sur le bien fondé du jugement attaqué :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ; (...) " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; que, pour l'application de ces stipulations, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité, l'intensité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme B... a épousé le 14 juin 2007 à Bousmail (Algérie) M. C...E...; qu'elle est entrée en France, le 28 décembre 2010, pour rejoindre son mari, sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa d'une validité de trente jours, avec ses deux enfants mineurs nés le 5 septembre 2008 et le 31 mars 2010 ; que le troisième enfant du couple est né en France le 6 octobre 2011 ; que, pour justifier du caractère habituel de sa résidence depuis la fin de l'année 2000, l'intéressée a versé au dossier de nombreuses pièces en cause d'appel, constituées notamment par des documents médicaux, des déclarations de situation pour les prestations familiales et les aides au logement, des attestations de droits auprès de la caisse d'allocations familiales des Bouches-du-Rhône et des attestations de scolarité ; que ses trois enfants, âgés respectivement de 7, 5 et 4 ans à la date de l'arrêté attaqué, sont tous scolarisés depuis la classe de petite-section de maternelle ; que, par ailleurs, l'époux de l'intéressée de même nationalité est titulaire d'un certificat de résidence en qualité d'étudiant renouvelé sans interruption depuis le 14 septembre 2009 et bénéficie depuis le 17 octobre 2012 d'un contrat de travail à durée indéterminée pour un emploi d'agent de sécurité au sein de la société Proségur ; qu'en outre, la requérante, qui est membre de plusieurs associations et parle le français, est insérée socialement ; que dans ces conditions, Mme B...épouseE..., qui établit la durée de son séjour sur le sol français et la réalité et l'intensité de ses liens personnels et familiaux en France, est fondée à soutenir que la décision du préfet des Bouches-du-Rhône lui refusant un certificat de résidence porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et méconnaît par suite les stipulations précitées de l'article 6, 5 de l'accord franco-algérien et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme B...épouse E...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 26 octobre 2015 ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

5. Considérant que Mme B... épouse E...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me D... renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de celui-ci le versement à Me D... de la somme de 1 500 euros qu'elle demande ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 16 décembre 2015 et l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 26 octobre 2015 sont annulés.

Article 2 : L'Etat versera à Me D...une somme de 1 500 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve que Me D...renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...B...épouseE..., à Me D...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 5 octobre 2017 où siégeaient :

- M. Vanhullebus, président de chambre,

- M. Barthez, président assesseur,

- Mme Bourjade-Mascarenhas, première conseillère.

Lu en audience publique, le 19 octobre 2017.

2

N° 16MA01813


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16MA01813
Date de la décision : 19/10/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. VANHULLEBUS
Rapporteur ?: Mme Agnes BOURJADE
Rapporteur public ?: Mme CHAMOT
Avocat(s) : GUERCHI

Origine de la décision
Date de l'import : 31/10/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2017-10-19;16ma01813 ?
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