La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/12/2016 | FRANCE | N°16MA01749

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 15 décembre 2016, 16MA01749


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...C...a demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner Pôle emploi à lui verser la somme de 41 058,89 euros, assortie des intérêts au taux légal, en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis en raison, d'une part, d'une erreur commise dans le calcul de ses allocations d'assurance chômage et, d'autre part, de la carence de l'établissement public à assurer son accompagnement en qualité de demandeur d'emploi.

Par un jugement n° 1405477 du 8 mars 2016, le tribunal admin

istratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...C...a demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner Pôle emploi à lui verser la somme de 41 058,89 euros, assortie des intérêts au taux légal, en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis en raison, d'une part, d'une erreur commise dans le calcul de ses allocations d'assurance chômage et, d'autre part, de la carence de l'établissement public à assurer son accompagnement en qualité de demandeur d'emploi.

Par un jugement n° 1405477 du 8 mars 2016, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 4 mai 2016 et le 30 novembre 2016, M. C..., représenté par la SCP Brun Chabadel Expert Piton, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 8 mars 2016 ;

2°) de condamner Pôle emploi à lui verser une somme de 38 830,89 euros en réparation de ses préjudices ;

3°) de mettre à la charge de Pôle emploi la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la juridiction administrative était compétente pour statuer sur ses conclusions tendant à obtenir la réparation du préjudice qu'il a subi à raison du retard mis par Pôle emploi à reconnaître la réalité de son contrat de travail ;

- Pôle emploi a, par ailleurs, commis différentes fautes dans l'accompagnement qu'il devait assurer, lui occasionnant à ce titre un préjudice distinct dont il est également fondé à demander réparation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 novembre 2016, Pôle emploi, représenté par la SCP Nicolas Boullez, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. C... la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le recours indemnitaire en tant qu'il concerne un prétendu manquement dans l'appréciation des conditions d'ouverture des droits de M. C... à l'assurance chômage relève de la seule compétence de la juridiction judiciaire ;

- les autres moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Guidal, président,

- les conclusions de M. Salvage, rapporteur public,

- et les observations de Me B... de la SCP Brun Chabadel Expert Piton, représentant M. C....

1. Considérant que M. C..., qui exerçait les fonctions d'assistant de vie auprès de ses parents, a été inscrit sur la liste des demandeurs d'emploi à compter du 30 septembre 2009 à la suite du licenciement économique dont il aurait fait l'objet ; que l'intéressé a demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner Pôle emploi à l'indemniser des préjudices qu'il estime avoir subis du fait, d'une part, d'erreurs commises dans la détermination du montant de ses allocations d'assurance chômage et, d'autre part, de différentes fautes imputables à l'institution dans l'accompagnement qu'elle lui a accordé en qualité de demandeur d'emploi ; que M. C... relève appel du jugement du 8 mars 2016 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à la réparation du préjudice né des erreurs dans la détermination du montant des allocations d'assurance chômage :

2. Considérant qu'en vertu de l'article L. 5312-1 du code du travail, Pôle emploi est une institution nationale publique dotée de la personnalité morale et de l'autonomie financière qui a pour mission d'" 4° Assurer, pour le compte de l'organisme gestionnaire du régime d'assurance chômage, le service de l'allocation d'assurance et, pour le compte de l'Etat ou du Fonds de solidarité prévu à l'article L. 5423-24, le service des allocations de solidarité (...) " ; que l'article L. 5312-12 du même code prévoit que : " Les litiges relatifs aux prestations dont le service est assuré par l'institution, pour le compte de l'organisme chargé de la gestion du régime d'assurance-chômage, de l'Etat ou du Fonds de solidarité prévu à l'article L. 5423-24 sont soumis au régime contentieux qui leur était applicable antérieurement à la création de cette institution ".

3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions, éclairées par les travaux préparatoires de la loi du 13 février 2008 relative à la réforme de l'organisation du service public de l'emploi dont elles sont issues, que le législateur a entendu prévoir que la réforme, qui s'est notamment caractérisée par la substitution de Pôle emploi à l'Agence nationale pour l'emploi et aux associations pour l'emploi dans l'industrie et le commerce (Assédic), reste sans incidence sur le régime juridique des prestations et sur la juridiction compétente pour connaître du droit aux prestations, notamment sur la compétence de la juridiction judiciaire s'agissant des prestations servies au titre du régime d'assurance chômage ;

4. Considérant que la compétence de la juridiction judiciaire ainsi maintenue s'étend nécessairement aux actions en responsabilité formées à l'encontre de Pôle emploi en raison des manquements qu'aurait pu commettre cette institution en assurant l'attribution et le service des allocations d'assurance chômage ;

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. C... a demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner Pôle emploi à lui verser la somme de 21 058,89 euros, représentant le montant des allocations chômage qui selon lui auraient dû lui être versées en sus des sommes déjà reçues de l'institution à ce titre ; que si l'intéressé soutient que son préjudice trouve son origine dans le retard fautif de Pôle emploi à reconnaître la réalité de son contrat de travail et non pas dans les modalités de calcul des allocations, son recours vise sans ambigüité à obtenir la condamnation de l'établissement public à l'indemniser du fait des manquements qu'il aurait pu commettre lors de l'attribution et du service de ces allocations ; qu'il résulte des dispositions citées ci-dessus qu'il n'appartient qu'au juge judiciaire de connaître d'un tel recours ; que, par suite, les conclusions présentées par M. C... se rapportent à un litige qui, ainsi que l'a jugé à bon droit le tribunal administratif de Montpellier, ne relève pas de la compétence de la juridiction administrative ;

Sur les conclusions tendant à la réparation du préjudice né des fautes alléguées de Pôle emploi dans sa mission d'accompagnement personnalisé des demandeurs d'emploi :

6. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 5311-1 du code du travail : " Le service public de l'emploi a pour mission l'accueil, l'orientation, la formation et l'insertion ; il comprend le placement, le versement d'un revenu de remplacement, l'accompagnement des demandeurs d'emploi et l'aide à la sécurisation des parcours professionnels de tous les salariés " ; et qu'aux termes de l'article L. 5312-1 du même code : " Pôle emploi est une institution nationale publique (...) qui a pour mission de : (...) / 2° Accueillir, informer, orienter et accompagner les personnes, qu'elles disposent ou non d'un emploi, à la recherche d'un emploi, d'une formation ou d'un conseil professionnel, prescrire toutes actions utiles pour développer leurs compétences professionnelles et améliorer leur employabilité, favoriser leur reclassement et leur promotion professionnelle, faciliter leur mobilité géographique et professionnelle et participer aux parcours d'insertion sociale et professionnelle (...) " ; ". que l'article L. 5411-6 du même code dispose que " Le demandeur d'emploi immédiatement disponible pour occuper un emploi est orienté et accompagné dans sa recherche d'emploi par l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1. [...] " ; qu'enfin, aux termes de l'article L. 5411-6-1 dudit code : " Un projet personnalisé d'accès à l'emploi est élaboré et actualisé conjointement par le demandeur d'emploi et l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1 [...]. / Ce projet précise, en tenant compte de la formation du demandeur d'emploi, de ses qualifications, de ses connaissances et compétences acquises au cours de ses expériences professionnelles, de sa situation personnelle et familiale ainsi que de la situation du marché du travail local, la nature et les caractéristiques de l'emploi ou des emplois recherchés, la zone géographique privilégiée et le niveau de salaire attendu. Le projet personnalisé d'accès à l'emploi retrace les actions que l'institution mentionnée à l'article L. 5312-1 s'engage à mettre en oeuvre dans le cadre du service public de l'emploi, notamment en matière d'accompagnement personnalisé et, le cas échéant, de formation et d'aide à la mobilité " ;

7. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article R. 811-1 du code de justice administrative, dans sa rédaction issue du décret du 13 août 2013 portant modification du code de justice administrative, applicable au jugement attaqué : " (...) le tribunal administratif statue en premier et dernier ressort : / 1° Sur les litiges relatifs aux prestations, allocations ou droits attribués au titre de l'aide ou de l'action sociale, du logement ou en faveur des travailleurs privés d'emploi, mentionnés à l'article R. 772-5 (...) ;

8. Considérant que les actions mentionnées aux articles L. 5312-1 et L. 5411-6-1 du code du travail que Pôle emploi s'engage à mettre en oeuvre en faveur des travailleurs privés d'emploi, notamment en matière d'accompagnement personnalisé et, le cas échéant, de formation et d'aide à la mobilité, constituent un droit pour les intéressés ; que, par suite, le recours indemnitaire formé par un demandeur d'emploi à raison d'une carence alléguée de Pôle emploi dans la mise en oeuvre des missions précitées est au nombre des litiges relatifs aux prestations, allocations ou droits en faveur des travailleurs privés d'emploi sur lesquels, en application de l'article R. 811-1 du code de justice administrative, le tribunal administratif statue en premier et dernier ressort ; que, dès lors, les conclusions de la requête de M. C... dirigées contre le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 8 mars 2016 rejetant sa demande indemnitaire formée à raison des fautes qu'aurait commises Pôle emploi dans sa mission d'accompagnement personnalisée, doivent être regardées non comme un appel mais comme un pourvoi en cassation ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que, d'une part, les conclusions de la requête de M. C... relatives à la demande indemnitaire formée à raison des fautes qu'aurait commises Pôle emploi dans sa mission d'accompagnement personnalisée doivent être transmises au Conseil d'État ; que, d'autre part, le requérant n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté le surplus de sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, les conclusions de M. C... tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à sa charge le versement de la somme demandée par Pôle emploi au titre de ces mêmes dispositions ;

D E C I D E :

Article 1er : Les conclusions de la requête de M. C... relatives à la demande indemnitaire formée à raison des fautes qu'aurait commises Pôle emploi dans sa mission d'accompagnement personnalisée sont transmises au Conseil d'Etat.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 3 : Les conclusions de Pôle emploi au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...C...et à Pôle emploi.

Délibéré après l'audience du 6 décembre 2016, où siégeaient :

- M. Lascar, président de chambre,

- M. Guidal, président assesseur,

- M. Chanon, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 15 décembre 2016.

N° 16MA01749 2

acr


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16MA01749
Date de la décision : 15/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Compétence - Répartition des compétences entre les deux ordres de juridiction.

Compétence - Compétence à l'intérieur de la juridiction administrative - Compétence en premier et dernier ressort des tribunaux administratifs.

Travail et emploi - Politiques de l'emploi.

Travail et emploi - Service public de l'emploi.


Composition du Tribunal
Président : M. LASCAR
Rapporteur ?: M. Georges GUIDAL
Rapporteur public ?: M. SALVAGE
Avocat(s) : SCP BRUN - CHABADEL - EXPERT

Origine de la décision
Date de l'import : 03/01/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-12-15;16ma01749 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award