Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. E... A...a demandé au tribunal administratif de Nice de condamner l'Etat à lui verser la somme globale de 669 149,98 euros en réparation des préjudices financier et moral et des troubles dans les conditions d'existence qu'il estime avoir subis, avec intérêts au taux légal et capitalisation des intérêts, et d'enjoindre à l'administration de procéder à la reconstitution de sa carrière.
Par un jugement n° 1202122 en date du 19 décembre 2014, le tribunal administratif de Nice a renvoyé M. A... devant l'Etat pour qu'il soit procédé à la liquidation de l'indemnité à laquelle il a droit au titre de la perte de traitements sur la période du 20 février 2003 au 2 janvier 2008, condamné l'Etat à lui verser la somme de 1 500 euros au titre du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence et les intérêts au taux légal à compter du 22 décembre 2011 avec capitalisation des intérêts, et rejeté le surplus des conclusions de la requête.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et des mémoires enregistrés les 19 janvier 2015, 16 décembre 2015, 29 janvier 2016 et 12 mai 2016, M. A..., représenté par Me D...C..., doit être regardé comme demandant à la Cour :
1°) d'annuler le jugement précité rendu le 19 décembre 2014 par le tribunal administratif de Nice en ce qu'il ne lui a pas donné intégralement satisfaction ;
2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 449 149,98 euros au titre du préjudice financier subi entre le 1er septembre 1998 et le 1er janvier 2012, assortie des intérêts au taux légal avec capitalisation des intérêts à compter du 10 novembre 2009 ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme globale de 200 000 euros en réparation du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence subis sur la même période ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement de la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- il avait proposé un chiffrage précis qui n'avait pas été contesté par le ministre de l'éducation nationale et pouvait être retenu par le tribunal sans procéder à un renvoi devant l'administration pour le calcul de l'indemnisation due ;
- le tribunal ne pouvait, eu égard aux circonstances particulières de l'espèce, décider d'un partage de responsabilité à hauteur de 50 % ;
- il convient de tenir compte de l'indemnité de suivi et d'orientation des élèves et l'indemnité de professeur principal dès lors qu'elles sont attachées à la fonction d'enseignement, ainsi que l'indemnité de résidence, les heures supplémentaires et les vacations dans l'enseignement supérieur ;
- l'intensité du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence justifie une plus forte indemnisation que celle accordée par les premiers juges ;
- la demande de liquidation de la pension à partir du 2 janvier 2008 ne fait pas obstacle à l'indemnisation de la perte de revenus subie au-delà du 3 janvier 2008 ;
- l'administration devait procéder à la reconstitution de sa carrière.
Par un mémoire en défense enregistré le 8 janvier 2016, le ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'il a déjà indemnisé M. A... à hauteur de la somme de 48 677,37 euros et que les moyens de la requête sont infondés.
Les parties ont été informées le 25 mars 2016, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de ce que M. A...n'est pas fondé à soulever pour la première fois en appel la faute qu'aurait commise l'administration en prolongeant la mesure de suspension dont il a fait l'objet au-delà de l'arrêt de la Cour d'appel d'Aix-en-Provence du
3 janvier 2000 ;
Par un mémoire enregistré le 5 avril 2016, M. A..., représenté par Me C..., a répondu à ce moyen d'ordre public.
Par un mémoire enregistré le 21 avril 2016, le ministre de l'éducation nationale a répondu au moyen d'ordre public.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Renouf,
- et les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public.
1. Considérant que M. A..., alors professeur certifié d'anglais, a été suspendu de ses fonctions du 1er septembre 1998 au 10 mars 2003 et mis à la retraite d'office à compter de la notification, le 10 mars 2003, de la décision du 20 février 2003 lui infligeant cette sanction ; que la décision du 20 février 2003 a été annulée pour erreur manifeste d'appréciation par arrêt de la cour administrative d'appel de Marseille en date du 10 novembre 2009 ; que, par jugement du 19 décembre 2014, le tribunal administratif de Nice a rejeté la demande de M. A... tendant à l'indemnisation des préjudices nés de la suspension et ne lui a reconnu un droit à indemnisation que pour la période du 20 février 2003 au 2 janvier 2008, a décidé que les fautes de l'intéressé justifiaient que l'administration ne l'indemnise que de la moitié du préjudice subi et a renvoyé M. A... devant l'administration pour la liquidation de l'indemnité due selon les principes énoncés dans les motifs du jugement ; que M. A... interjette appel du jugement en tant qu'il ne lui a pas donné intégralement satisfaction ;
Sur les conclusions indemnitaires :
En ce qui concerne la suspension :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 30 de la loi susvisée du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " En cas de faute grave commise par un fonctionnaire, qu'il s'agisse d'un manquement à ses obligations professionnelles ou d'une infraction de droit commun, l'auteur de cette faute peut être suspendu par l'autorité ayant pouvoir disciplinaire qui saisit, sans délai, le conseil de discipline (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que la mesure de suspension, qui ne peut être prononcée que dans l'hypothèse dans laquelle un agent public a commis des faits suffisamment vraisemblables et graves, présente un caractère conservatoire et a pour unique objet, pendant la durée d'une instance disciplinaire, de sauvegarder l'intérêt du service en restaurant la sérénité nécessaire à l'action administrative et en préservant la sécurité des personnes et des biens ; qu'elle est donc subordonnée, d'une part, à l'existence d'une faute grave et d'autre part, à la démonstration, par l'administration, de son caractère nécessaire au regard de l'intérêt du service ;
3. Considérant que les premiers juges ont estimé que la décision de suspension litigieuse était justifiée par l'intérêt du service et qu'existait, à la date de son édiction, une présomption de faute grave eu égard à la nature des faits pour lesquels M. A... était alors poursuivi pénalement ; que le requérant ne conteste pas l'analyse en tout état de cause fondée du tribunal sur ce point ; que, si M. A... fait état pour la première fois en appel de la faute qu'a commise l'administration en prolongeant la mesure de suspension jusqu'en février 2003, très au-delà de la date de l'arrêt de la Cour d'appel d'Aix-en-Provence du 3 janvier 2000 mettant fin aux poursuites pénales, il ressort des pièces du dossier qu'il ne s'était pas prévalu de cette faute en première instance ; que les conclusions présentées sur ce nouveau fondement en appel sont, dès lors, irrecevables ; qu'il résulte de ce qui précède que, dans le cadre de la présente instance, les conclusions présentées au titre de la période du 1er septembre 1998 jusqu'à la date de prise d'effet de la mise à la retraite d'office en date du 20 février 2003 ne peuvent qu'être rejetées ;
En ce qui concerne la mise à la retraite d'office :
4. Considérant que le principe de la responsabilité de l'administration n'est plus discutée par le ministre de l'éducation nationale ; que, si M. A... soutient que le tribunal devait retenir les chiffres non contestés par l'administration qui lui étaient soumis, le tribunal, qui n'a pas retenu l'ensemble des éléments pris en considération par M. A..., a pu, sans commettre d'irrégularité, fixer les principes de l'indemnisation à laquelle M. A... pouvait prétendre et renvoyer l'intéressé devant l'administration pour qu'il soit procédé à cette indemnisation ; qu'ainsi, reste en litige l'appréciation du bien-fondé du jugement attaqué en tant qu'il a défini la période d'indemnisation et déterminé les bases de calcul de l'indemnité due à M. A... ainsi qu'en tant qu'il a procédé à un abattement de 50 % sur cette indemnité ;
S'agissant de la période de responsabilité de l'administration :
5. Considérant que M. A..., né le 2 janvier 1948, demande à être indemnisé jusqu'à l'âge de 64 ans, soit jusqu'au 2 janvier 2012, en faisant valoir qu'il souhaitait travailler jusqu'à cette date et en a été empêché par la décision du 20 février 2003 le mettant dès cette date à la retraite ;
6. Considérant que, dès lors que M. A... avait été mis à la retraite d'office le 20 février 2003, la demande qu'il a présentée le 31 mai 2007, sur le formulaire de " demande d'admission à la retraite " que lui a procuré l'administration, ne pouvait avoir pour objet son placement à la retraite à cette date et ne peut être regardée que comme tendant à ce que la pension de l'intéressé soit liquidée à compter du 2 janvier 2008, date à laquelle il atteignait l'âge permettant une telle liquidation ; que cette demande, présentée alors qu'il est constant, d'une part, que l'intéressé était à cette date dénué de tout revenu d'activité en raison de sa mise à la retraite d'office et percevait le revenu minimum d'insertion d'un montant de 388 euros par mois et qu'il est, d'autre part, également constant que le montant de sa pension est actuellement d'environ 2 000 euros, ne permet pas non plus de postuler que l'intéressé, s'il avait exercé en 2007 ses fonctions et perçu la rémunération de 3 300 euros s'y rapportant, aurait décidé de demander à être admis à la retraite le 2 janvier 2008 ; qu'ainsi, le ministre de l'Education n'est pas fondé à soutenir que la liquidation des droits à pension de M. A... à compter du 2 janvier 2008, à la demande de ce dernier, ferait obstacle à ce que l'intéressé puisse se prévaloir de la perte de revenus subie au-delà de cette date ;
7. Considérant, de même, que l'incertitude sur la date à laquelle M. A... aurait demandé à être admis à la retraite entre celle à laquelle il a atteint l'âge de 60 ans et la limite d'âge de 65 ans assignée à son activité résulte du fait que l'intéressé, ayant été mis à la retraite d'office par la décision du 20 février 2003 ensuite annulée le 10 novembre 2009, n'exerçait pas, en raison de la décision fautive du ministre de l'Education, ses fonctions au cours de cette période ;
8. Considérant en revanche que, dès lors que la décision de mise à la retraite d'office du 20 février 2003 a été annulée par arrêt du 10 novembre 2009, ladite décision a cessé d'exister et de produire des effets à cette date et ne peut, par suite, être regardée comme étant à l'origine directe de la perte de revenus alléguée par M. A... pour la période postérieure au 10 novembre 2009, laquelle ne peut en réalité être imputée qu'au fait que l'administration s'est abstenue d'exécuter ledit arrêt en se prononçant notamment sur les droits de l'intéressé à une réintégration effective dans ses fonctions ; qu'ainsi, l'intéressé, qui n'a pas mis en cause la responsabilité de l'administration à ce titre, n'est pas fondé à soutenir dans le cadre de la présente instance que les préjudices ayant résulté pour lui de la mise à la retraite d'office illégale se sont prolongés jusqu'au 2 janvier 2012 ;
9. Considérant, enfin, que la demande par M. A... de liquidation de sa pension de retraite ne pouvant dans les circonstances indiquées ci-dessus lui être opposée et le ministre de l'Education ne se prévalant d'aucune circonstance particulière permettant de postuler qu'en l'espèce, M. A... aurait demandé à être admis à la retraite avant le 10 novembre 2009, date à laquelle il n'était âgé que de 61 ans, s'il n'avait pas été, auparavant, mis à la retraite d'office à compter du 10 mars 2003 par la décision du 20 février 2003 entachée d'illégalité, il y a lieu de fixer le terme de la responsabilité de l'administration au 10 novembre 2009 ;
S'agissant de l'incidence des fautes commises par M. A... :
10. Considérant qu'aux termes de l'article 66 de la loi susvisée du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes. / Premier groupe : - l'avertissement ; - le blâme. / Deuxième groupe : - la radiation du tableau d'avancement ; - l'abaissement d'échelon - l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée maximale de quinze jours ; - le déplacement d'office. / Troisième groupe : - la rétrogradation ; - l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trois mois à deux ans. / Quatrième groupe : - la mise à la retraite d'office ; - la révocation (...) " ;
11. Considérant que si la décision de mise à la retraite d'office a été annulée pour erreur manifeste d'appréciation, il résulte de l'instruction que les actes de M. A... qui ont donné lieu à la condamnation pénale prononcée par la cour d'appel d'Aix-en-Provence le 3 janvier 2000 étaient, bien que commis en dehors du service, de nature à porter atteinte à l'honneur et à la réputation du corps des professeurs certifiés et pouvaient, dans les circonstances de l'espèce, justifier l'exclusion temporaire de fonctions de M. A... pour une durée de
deux ans ; qu'ainsi, les fautes commises par M. A... l'exposant à la privation de ses revenus d'activité pendant 24 mois et la période de responsabilité définie au point 9 ci-dessus étant de 6 ans et 8 mois, soit 80 mois, il y a seulement lieu de condamner l'administration à réparerà hauteur de 70 % les préjudices subis par l'appelant, ce qui correspond à une indemnité représentative d'une perte de revenus d'activité pendant 56 mois (80 - 24) ;
S'agissant des bases de calcul de l'indemnisation due au titre du préjudice matériel :
12. Considérant qu'en vertu des principes généraux qui régissent la responsabilité de la puissance publique, un agent public irrégulièrement évincé a droit à la réparation intégrale du préjudice qu'il a effectivement subi du fait de la mesure illégalement prise à son encontre ; que sont ainsi indemnisables les préjudices de toute nature avec lesquels l'illégalité commise présente, compte tenu de l'importance respective de cette illégalité et des fautes relevées à l'encontre de l'intéressé, un lien direct de causalité ; que, pour l'évaluation du montant de l'indemnité due, doit être prise en compte la perte du traitement ainsi que celle des primes et indemnités dont l'intéressé avait, pour la période en cause, une chance sérieuse de bénéficier, à l'exception de celles qui, eu égard à leur nature, à leur objet et aux conditions dans lesquelles elles sont versées, sont seulement destinées à compenser les frais, charges ou contraintes liés à l'exercice effectif des fonctions ; qu'enfin, il y a lieu de déduire, le cas échéant, le montant des rémunérations que l'agent a pu se procurer par son travail au cours de la période d'éviction ;
13. Considérant que M. A... présente une demande d'indemnisation du préjudice financier résultant de son exclusion fautive du service, dont il vient d'être dit qu'elle n'engage la responsabilité de l'administration qu'entre le 10 mars 2003 et le 10 novembre 2009 ; que l'indemnisation de ce préjudice ne peut, par suite, porter que sur cette période et ne doit, en outre, réparer que 70 % de la perte effective de revenus subie ;
14. Considérant, d'une part, que, contrairement aux calculs opérés par M. A..., le montant du traitement à prendre en compte pour la détermination du montant de l'indemnité due est le traitement net et non le traitement brut ; que, par ailleurs, il convient d'ajouter à ce montant celui de l'indemnité de résidence et de prendre en considération, ainsi que l'intéressé s'en prévaut, son passage au 7ème échelon le 1er septembre 2008, 3 ans après qu'il a accédé au
6ème échelon ;
15. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 1er du décret n° 93-55 du 15 janvier 1993 instituant une indemnité de suivi et d'orientation des élèves en faveur des personnels enseignants du second degré : " Une indemnité de suivi et d'orientation des élèves non soumise à retenues pour pensions est allouée aux personnels enseignants du second degré exerçant dans les établissements scolaires du second degré ou affectés au Centre national d'enseignement à distance. / Cette indemnité comprend une part fixe à laquelle peut s'ajouter une part modulable. " ; qu'aux termes de l'article 2 dudit décret : " La part fixe est allouée aux personnels enseignants désignés à l'article 1er ci-dessus, ainsi qu'aux enseignants des classes post-baccalauréat. / L'attribution de cette part est liée à l'exercice effectif des fonctions enseignantes y ouvrant droit, en particulier au suivi individuel et à l'évaluation des élèves, comprenant notamment la notation et l'appréciation de leur travail et la participation aux conseils de classe " ; qu'enfin aux termes de l'article 3 dudit décret : " La part modulable est allouée aux personnels enseignants désignés à l'article 1er ci-dessus, qui assurent une tâche de coordination tant du suivi des élèves d'une division que de la préparation de leur orientation, en liaison avec les conseillers d'orientation-psychologues, et en concertation avec les parents d'élèves. L'attribution de cette part est liée à l'exercice effectif de ces fonctions. / Une seule part modulable est allouée par division. Elle n'est attribuée qu'à un seul professeur, désigné avec l'accord de l'intéressé par le chef d'établissement pour la durée de l'année scolaire. /Toutefois, dans des établissements où l'exercice des fonctions définies au premier alinéa ci-dessus comporte des difficultés particulières tenant à l'environnement socio-économique et culturel de l'établissement, deux professeurs par division perçoivent chacun une part modulable. La liste de ces établissements est fixée par le ministre chargé de l'éducation nationale et le ministre chargé du budget " ;
16. Considérant, s'agissant de la part fixe de cette indemnité, qu'elle est automatiquement accordée, indépendamment de toute appréciation sur les mérites personnels d'un agent, dès lors qu'est exercée la fonction d'enseignant ; qu'il est constant que M. A... exerçait, avant l'éviction du service dont il a fait l'objet, les fonctions d'enseignant du second degré ; qu'il a donc, ainsi qu'il le soutient, perdu une chance sérieuse de percevoir la part fixe de l'indemnité de suivi et d'orientation des élèves qui, dès lors, et contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, doit être incluse dans les bases de calcul du montant de son indemnisation ;
17. Considérant, en revanche, s'agissant de la part modulable de cette indemnité, que celle-ci n'est versée qu'à un seul professeur par division assurant une tâche de coordination du suivi des élèves, et de préparation de leur orientation en liaison avec les conseillers d'orientation et en concertation avec les parents d'élèves ; que, si M. A... fait valoir qu'il était, avant son éviction du service, professeur principal, il ne produit, bien que cette carence ait été relevée par le ministre de l'éducation nationale, aucune pièce à l'appui de ses allégations ; que, par suite, il n'établit pas avoir perdu une chance sérieuse de percevoir la part modulable de l'indemnité de suivi et d'orientation des élèves ;
18. Considérant, par ailleurs, que si M. A... sollicite une indemnisation au titre d'une perte d'heures supplémentaires et de vacations dans l'enseignement supérieur, les pièces qu'il produit ne permettent pas d'établir qu'il aurait perdu une chance sérieuse d'accomplir les services correspondants ;
19. Considérant, en dernier lieu, qu'il y aura lieu de déduire du montant des sommes ainsi dues à M. A..., outre le montant non contesté des revenus de remplacement perçus de la date de prise d'effet de la mise à la retraite d'office au 1er janvier 2008, le montant des pensions perçues du 2 janvier 2008 au 10 novembre 2009 ainsi que la part de la régularisation à hauteur de 89 959 euros des pensions de retraite qui se rapportent à cette même période ;
S'agissant du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence :
20. Considérant que M. A..., du fait de la mise à la retraite d'office dont il a fait l'objet à l'âge de 55 ans, a été définitivement évincé de son service ; qu'il est constant qu'il n'a pas alors retrouvé d'emploi ; que, par ailleurs, il n'est pas contesté qu'il a été contraint, en raison de l'insuffisance de ses moyens matériels, de s'installer chez sa mère ; qu'il sera fait une juste appréciation du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence subis par M. A... du fait de la décision du 20 février 2003 en condamnant l'Etat à lui verser, compte tenu du partage de responsabilité retenu ci-dessus, la somme de 7 000 euros en lieu et place des 1 500 euros alloués par les premiers juges ;
Sur les intérêts et la capitalisation des intérêts :
21. Considérant, d'une part, que le montant des sommes dues par l'Etat, tant au titre du préjudice financier subi par M. A... calculé conformément aux motifs du présent arrêt, qu'au titre de son préjudice moral et de troubles dans ses conditions d'existence, sera assorti des intérêts au taux légal à compter de la date de réception de la demande préalable formulée par M. A... le 7 décembre 2011 auprès du ministre de l'éducation nationale, soit à compter du 22 décembre 2011 ;
22. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 1154 du code civil : " Les intérêts échus des capitaux peuvent produire des intérêts, ou par une demande judiciaire, ou par une convention spéciale, pourvu que, soit dans la demande, soit dans la convention, il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière " ; que, pour l'application des dispositions précitées la capitalisation des intérêts peut être demandée à tout moment devant le juge du fond ; que cette demande prend toutefois effet au plus tôt à la date à laquelle elle est enregistrée et pourvu qu'à cette date il s'agisse d'intérêts dus au moins pour une année entière ; que, le cas échéant, la capitalisation s'accomplit à nouveau à l'expiration de chaque échéance annuelle ultérieure sans qu'il soit besoin de formuler une nouvelle demande ; que M. A... a demandé, par requête enregistrée le 7 juin 2012 au greffe du tribunal administratif de Nice, la capitalisation des intérêts ; qu'à cette date, les intérêts n'étaient pas encore dus pour une année entière ; qu'il y a lieu, dès lors, de faire droit à la demande de M. A... un an après la date de réception de sa demande préalable, soit à compter du 22 décembre 2012 ;
23. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A... est seulement fondé à demander, d'une part, que l'indemnité que le tribunal administratif a condamné l'Etat à lui verser au titre du préjudice moral et des troubles dans les conditions d'existence, soit portée à la somme de 7 000 euros et, d'autre part, que l'indemnisation de la perte de revenus soit portée à 70 % du préjudice effectivement subi, calculé pour la période du 10 mars 2003 au 10 novembre 2009 en incluant la part fixe de l'indemnité de suivi et d'orientation des élèves et en prenant en considération le passage de l'intéressé au 7ème échelon de son grade le 1er septembre 2008 ; que l'état de l'instruction ne permet pas, eu égard notamment à la régularisation intervenue du montant de la pension de retraite et à celle susceptible d'intervenir en tenant compte de l'allongement de la reconstitution administrative de carrière de l'intéressé et du changement d'échelon qui en résulte, de déterminer le montant de l'indemnité due à M. A... ; qu'il y a lieu de renvoyer le requérant devant le ministre de l'éducation nationale pour qu'il soit procédé à la liquidation en principal et intérêts de cette indemnité ;
24. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le jugement attaqué doit être réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt ;
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
25. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;
26. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. A...et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : L'Etat est condamné à verser à M. A..., d'une part, une indemnité visant à réparer le préjudice financier de l'intéressé qui sera calculée conformément aux motifs du présent arrêt et, d'autre part, la somme de 7 000 euros au titre de son préjudice moral et des troubles dans ses conditions d'existence, sous déduction, pour chacun de ces postes de préjudices, des sommes qui lui ont déjà été versées à la suite du jugement attaqué. Le montant global de l'indemnité sera assorti des intérêts au taux légal à compter du 22 décembre 2011. Les intérêts échus à compter du 22 décembre 2012 puis à chaque échéance annuelle à compter de cette date seront capitalisés à chacune de ces dates pour produire eux-mêmes intérêts.
Article 2 : M. A... est renvoyé devant l'administration pour le calcul et la liquidation des sommes dues au titre du préjudice financier en application de l'article 1er ci-dessus.
Article 3 : Le jugement du tribunal administratif de Nice du 19 décembre 2014 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5: L'Etat versera à M. A... la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... A...et au ministre de l'éducation nationale, de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Délibéré après l'audience du 13 septembre 2016, où siégeaient :
- M. Gonzales, président,
- M. Renouf, président assesseur,
- Mme B..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 11 octobre 2016.
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N° 15MA00260