La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/07/2016 | FRANCE | N°14MA05140

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 12 juillet 2016, 14MA05140


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision en date du 14 janvier 2013 par laquelle le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Par une ordonnance n° 1301582 du 7 octobre 2014, le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 23 décembre 2014, Mme B..., représentée par Me Bessa-Soufi, demande à la Cour :

1

) d'annuler l'ordonnance du 7 octobre 2014 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de l'Hérault du 10 janvie...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision en date du 14 janvier 2013 par laquelle le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour.

Par une ordonnance n° 1301582 du 7 octobre 2014, le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 23 décembre 2014, Mme B..., représentée par Me Bessa-Soufi, demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance du 7 octobre 2014 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de l'Hérault du 10 janvier 2013 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à verser à son conseil sur le fondement des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- sa demande ne pouvait être rejetée par voie d'ordonnance ;

- le refus de séjour n'est pas suffisamment motivé ;

- sa situation aurait dû être examinée au regard des critères fixés par la circulaire du 12 mai 1998 ;

- la décision contestée porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, en méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle pouvait prétendre à un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire, enregistré le 9 juin 2016, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.

Mme B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle en date du 17 mars 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 en matière de séjour et d'emploi ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

A été entendu, au cours de l'audience publique, le rapport de M. A... 'hôte, premier conseiller.

1. Considérant que Mme B..., de nationalité marocaine, fait appel de l'ordonnance en date du 7 octobre 2014 par laquelle le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Hérault du 10 janvier 2013, et non du 14 janvier comme indiqué par erreur dans la requête et dans l'ordonnance attaquée, ayant refusé de lui délivrer un titre de séjour ;

Sur la régularité de l'ordonnance du 7 octobre 2014 :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " (...) les présidents de formation de jugement des tribunaux (...) peuvent, par ordonnance : (...) / 7° Rejeter, après l'expiration du délai de recours ou, lorsqu'un mémoire complémentaire a été annoncé, après la production de ce mémoire, les requêtes ne comportant que des moyens de légalité externe manifestement infondés, des moyens irrecevables, des moyens inopérants ou des moyens qui ne sont assortis que de faits manifestement insusceptibles de venir à leur soutien ou ne sont manifestement pas assortis des précisions permettant d'en apprécier le bien-fondé (...) " ;

3. Considérant que, devant le tribunal, Mme B... a soutenu que le refus de séjour contesté portait une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, en violation de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'à l'appui de son moyen, elle a fait valoir qu'elle vivait en France depuis quatre ans avec sa mère titulaire d'une carte de résident de dix ans et que l'état de santé de cette dernière rendait indispensable sa présence à ses côtés ; que ces éléments de fait, se rapportant à la situation personnelle et familiale de la requérante et assortis de pièces justificatives, ne pouvaient être regardés comme manifestement insusceptibles de venir au soutien du moyen soulevé ; que, dès lors, la demande de Mme B... devait être jugée par une formation collégiale et ne pouvait être rejetée sur le fondement du 7° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative ; que, par suite, l'ordonnance attaquée est entachée d'irrégularité et doit être annulée ;

4. Considérant qu'il y a lieu de statuer par la voie de l'évocation sur les conclusions de Mme B... ;

Sur la légalité de l'arrêté du 10 janvier 2013 :

5. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° - Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2° - Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

6. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme B..., bien que titulaire d'un titre de séjour en cours de validité délivrée par les autorités espagnoles, réside en France afin d'aider sa mère dont l'état de santé nécessite l'assistance quotidienne d'une tierce personne ; que cette assistance ne peut pas être apportée par une autre personne que la requérante ; que, notamment, son père et ses frères et soeurs résident en Espagne et l'intéressée a été admise par la caisse d'allocation familiale comme aidant familial à domicile depuis le 1er juillet 2012 ; que, dans ces circonstances, le préfet de l'Hérault n'a pu refuser légalement de lui délivrer un titre de séjour sans porter une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ; qu'il suit de là, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que Mme B... est fondée à soutenir que la décision contestée a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et a en demander l'annulation ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

7. Considérant qu'eu égard à son motif et dès lors qu'il n'est fait état d'aucun changement dans les circonstances de droit et de fait concernant la situation de l'intéressée, l'annulation par le présent arrêt de l'arrêté du 10 janvier 2013 implique que le préfet de l'Hérault délivre à la requérante un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ; qu'il y a lieu, dès lors, d'enjoindre au préfet de l'Hérault de délivrer à Mme B... un tel titre dans un délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant que Mme B... a demandé et obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocate peut se prévaloir des dispositions de l'article 37 de la loi susvisée du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Bessa-Soufi, avocate de la requérante, renonce à percevoir les sommes correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à Me Bessa-Soufi au titre des frais exposés par Mme B... et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : L'ordonnance du président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Montpellier du 7 octobre 2014 est annulée.

Article 2 : L'arrêté du préfet de l'Hérault du 10 janvier 2013 est annulé.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de l'Hérault de délivrer à Mme B... un titre de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera à Me Bessa-Soufi la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sous réserve que celle-ci renonce à percevoir les sommes correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 5 : Le surplus des conclusions de première instance et d'appel présentées par Mme B... est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault et au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Montpellier.

Délibéré après l'audience du 28 juin 2016, où siégeaient :

- M. Lascar, président de chambre,

- M. Guidal, président assesseur,

- M. A...'hôte, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 12 juillet 2016.

''

''

''

''

3

N° 14MA05140

bb


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA05140
Date de la décision : 12/07/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03-04 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour. Motifs.


Composition du Tribunal
Président : M. GUIDAL
Rapporteur ?: M. Vincent L'HÔTE
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : BESSA-SOUFI

Origine de la décision
Date de l'import : 02/08/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-07-12;14ma05140 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award