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20/06/2016 | FRANCE | N°15MA01215

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 20 juin 2016, 15MA01215


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...A...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 14 octobre 2014 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé le renouvellement de son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours à compter de sa notification et a fixé le pays de renvoi ; d'enjoindre au même préfet de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois suivant le jugement à intervenir.

Par un jugement n° 1404588 du 12 février 2015

, le tribunal administratif de Nice a rejeté la demande de M.A....

Procédure devant l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...A...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 14 octobre 2014 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé le renouvellement de son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours à compter de sa notification et a fixé le pays de renvoi ; d'enjoindre au même préfet de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois suivant le jugement à intervenir.

Par un jugement n° 1404588 du 12 février 2015, le tribunal administratif de Nice a rejeté la demande de M.A....

Procédure devant la Cour

:

Par une requête, enregistrée le 12 mars 2015, M.A..., représenté par MeC..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice du 12 février 2015 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 14 octobre 2014 ;

3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois suivant l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'arrêté attaqué ne comporte aucune signature lisible ;

- il n'est pas justifié d'une délégation de signature au profit de son auteur ;

- il est entaché d'erreur de fait en ce qui concerne le " passé pénal " de l'exposant ;

- il est insuffisamment motivé en ce qui concerne le risque de trouble à l'ordre public en estimé par son auteur en résulter ;

- il a pour effet d'infliger une " double peine " à l'exposant ;

- il repose sur une appréciation erronée de sa situation familiale ;

- il repose sur une appréciation erronée de sa situation professionnelle ;

- il méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de celle lui refusant la délivrance d'un titre de séjour.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 modifiée relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec l'administration ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Gautron,

- et les observations de Me C...représentant M.A....

1. Considérant que M. A..., né le 2 avril 1956 à Kelkit (Turquie) et de nationalité turque, déclare être arrivé en France au mois de mai 1980 et s'être depuis lors maintenu sur le territoire national ; qu'il a bénéficié de plusieurs titres de séjour temporaires l'autorisant à occuper un emploi, en dernier lieu jusqu'au 25 août 2007 ; qu'il a sollicité, le 24 février 2012, la délivrance d'un nouveau titre de séjour, laquelle lui a été refusée par un arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 14 octobre 2014 qui a, en outre, ordonné son éloignement, à la suite d'un avis défavorable de la commission du titre de séjour du 11 juillet précédent ; que M. A... relève appel du jugement du tribunal administratif de Nice du 12 février 2015, par lequel celui-ci a rejeté sa demande tendant, à titre principal, à l'annulation de cet arrêté ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 4 de la loi susvisée du 12 avril 2000, applicable au litige : " Dans ses relations avec l'une des autorités administratives mentionnées à l'article 1er, toute personne a le droit de connaître le prénom, le nom, la qualité et l'adresse administratives de l'agent chargé d'instruire sa demande ou de traiter l'affaire qui la concerne ; ces éléments figurent sur les correspondances qui lui sont adressées. Si des motifs intéressant la sécurité publique ou la sécurité des personnes le justifient, l'anonymat de l'agent est respecté. / Toute décision prise par l'une des autorités administratives mentionnées à l'article 1er comporte, outre la signature de son auteur, la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci. " ;

3. Considérant que l'arrêté attaqué indique les nom et prénom de son signataire, M. B..., ainsi que la qualité de secrétaire général de la préfecture des Alpes-Maritimes de ce dernier ; qu'ainsi, l'identification de son auteur était possible sans difficulté, quand bien même la signature apposée sur cet arrêté est illisible ; que dès lors, le moyen tiré la méconnaissance des dispositions précitées doit être écarté ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que si M. A... soutient que l'arrêté attaqué serait entaché d'incompétence, en l'absence de délégation de signature au profit de son signataire, il ne critique pas les motifs par lesquels les premiers juges ont, à bon droit, écarté ce moyen ; qu'il y a lieu, pour la Cour, d'écarter ce moyen par appropriation de ces motifs ;

5. Considérant, en troisième lieu, que l'arrêté attaqué vise les textes applicables, notamment la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il vise également l'avis défavorable rendu par la commission du titre de séjour à propos de la demande de titre de M.A... ; qu'il mentionne des éléments précis relatifs tant au passé pénal qu'à la situation personnelle et familiale de ce dernier ; qu'il fait état de ce que ces éléments ne justifient pas son admission exceptionnelle au séjour à titre dérogatoire et qu'au vu de ces derniers, ni ce refus d'admission au séjour, ni l'éloignement de M. A... ne méconnaissent les stipulations de la convention susmentionnée, en particulier de ses articles 3 et 8 ; que dans ces conditions, celui-ci n'est pas fondé à soutenir que l'arrêté attaqué serait entaché d'insuffisance de motivation ;

6. Considérant, en quatrième lieu, que si le préfet des Alpes-Maritimes n'a effectivement pas démontré la réalité de la durée totale d'incarcération de soixante-trois mois qu'il impute à M. A..., ce dernier ne conteste pas, de son côté, avoir fait l'objet de quatorze condamnations pénales dont la moitié en relation avec son alcoolisme et au moins une en situation de récidive, ainsi que le mentionne la décision du juge d'application des peines du 14 juin 2012 le concernant versée aux débats ; que la seule production par l'intéressé d'un extrait vierge du bulletin n° 3 de son cahier judiciaire n'est pas de nature, à cet égard, à remettre en cause la réalité de ces éléments ; que les seules analyses sanguines qu'il produit également, lesquelles sont du reste espacées de deux ans et la plus récente, antérieure d'un an à l'arrêté attaqué, ne le sont pas davantage ; que dans ces conditions, l'erreur de fait entachant l'arrêté attaqué en ce qui concerne la durée d'incarcération de M. A... est, en tout état de cause, sans incidence sur l'appréciation portée par l'autorité administrative sur son passé pénal et les conséquences de ce dernier sur son intégration à la société française et son respect des valeurs de la République ; que la circonstance qu'aucune des condamnations prononcées à l'encontre de M. A... n'aurait été assortie d'une interdiction du territoire est à cet égard indifférente ; que le moyen tiré de cette erreur de fait doit, dès lors, être écarté ;

7. Considérant, en cinquième lieu, que si M. A... soutient qu'il a déjà été condamné pour ses fautes et que l'arrêté contesté constitue une double peine, un refus de titre de séjour qui répond à une demande présentée par l'intéressé ne constitue pas une sanction ; que par suite, ce moyen ne peut qu'être écarté ;

8. Considérant, en sixième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; (...) " ;

9. Considérant que M. A... ne peut justifier de sa date d'arrivée en France ; que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été présent sur le territoire national et y a exercé une activité professionnelle à partir de l'année 1982, il n'y établit pas pour autant sa présence habituelle depuis lors, tandis qu'il a résidé dans son pays d'origine jusqu'à l'âge de 26 ans ; qu'il ne conteste pas, ainsi qu'il a été dit au point 6, la réalité de ses multiples condamnations pénales et des peines d'emprisonnement auxquelles plusieurs d'entre elles ont donné lieu, entre les années 1992 et 2012 ; que dans ces conditions, alors même que M. A... aurait repris une vie commune avec son épouse à l'issue de sa dernière incarcération, qui a pris fin le 5 décembre 2012, qu'il justifie, en outre, de la présence régulière de nombreux membres de sa famille dans les départements des Alpes-Maritimes et du Var et qu'il justifie avoir noué certains liens personnels et professionnels depuis son arrivée en France, il ne peut être regardé, comme l'a relevé à bon droit l'auteur de l'arrêté attaqué, comme ayant fixé de manière à la fois ancienne, stable et durable, le centre de sa vie privée et familiale dans ce pays ; que par suite, le moyen tiré de l'atteinte disproportionnée portée par cet arrêté au droit au respect de cette dernière qu'il tient notamment des stipulations et dispositions précitées doit être écarté ;

10. Considérant, en septième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. (...) " ;

11. Considérant que si M. A... justifie, au vu de son relevé de carrière professionnelle, avoir occupé divers emplois dans le domaine du bâtiment depuis 1982, ce même document montre que cette activité professionnelle a été discontinue, avec de notables interruptions notamment au cours des années 1988 à 1990, 1994 à 1999, 2002 à 2004 et depuis 2009 ; que M. A... ne justifie pas, au vu de ces éléments comme de la promesse d'embauche dont il entend également se prévaloir, de l'existence de motifs exceptionnels ou de considérations humanitaires de nature à fonder sa régularisation exceptionnelle sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation entachant l'arrêté attaqué au regard de ces dispositions doit être écarté ;

12. Considérant, en dernier lieu, que le moyen tiré de l'illégalité de la décision faisant à M. A... obligation de quitter le territoire français, par voie de conséquence de celle de la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, ne peut qu'être écarté au regard de ce qui a été dit aux points précédents ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par leur jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté sa demande tendant, à titre principal, à l'annulation de l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 14 octobre 2014 ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

14. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. A..., n'appelle aucune mesure d'exécution ; que ses conclusions à fin d'injonction doivent, dès lors, être également rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

15. Considérant que ces dispositions s'opposent à ce que la somme réclamée par M. A... au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...A...au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.

Délibéré après l'audience du 30 mai 2016, où siégeaient :

- M. Moussaron, président,

- Mme Héry, premier conseiller,

- M. Gautron, conseiller.

Lu en audience publique, le 20 juin 2016.

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N° 15MA01215


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15MA01215
Date de la décision : 20/06/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. MOUSSARON
Rapporteur ?: M. Allan GAUTRON
Rapporteur public ?: M. THIELE
Avocat(s) : DE VALKENAERE

Origine de la décision
Date de l'import : 12/07/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2016-06-20;15ma01215 ?
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