Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C...B...et M. A...B...ont demandé au tribunal administratif de Toulon de condamner la commune de Saint-Tropez et la communauté de communes du Golfe de Saint-Tropez à leur verser les sommes de 124 300 euros, à titre principal, et 750 000 euros, à titre subsidiaire, en réparation des préjudices subis du fait de la présence et de l'exploitation de l'aire de stockage de déchets des Salins.
Par un jugement n° 1200899 du 27 juin 2014, le tribunal administratif de Toulon a rejeté la demande de MM.B....
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 25 août 2014 et le 15 février 2016,
MM.B..., représentés par MeD..., demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1200899 du tribunal administratif de Toulon du 27 juin 2014 ;
2°) de condamner la commune de Saint-Tropez et la communauté de communes du Golfe de Saint-Tropez à leur verser les sommes de 124 300 euros, à titre principal, et de
750 000 euros, à titre subsidiaire ;
3°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Tropez et de la communauté de communes du Golfe de Saint-Tropez la somme de 10 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- en ne se prononçant pas sur la qualification de l'ouvrage au regard de la règlementation des installations classées pour la protection de l'environnement, le jugement attaqué est insuffisamment motivé ;
- la délibération du 9 janvier 2014 de la communauté de communes du Golfe de Saint-Tropez reconnaît le fonctionnement irrégulier du site et sa dangerosité ;
- les nuisances olfactives, visuelles et sonores et le préjudice économique subis sont établis.
Par un mémoire, enregistré le 20 octobre 2014, la communauté de communes du Golfe de Saint-Tropez demande à la Cour de rejeter la requête des consorts B...et de mettre à leur charge la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les constructions ayant été irrégulièrement édifiées, la requête n'est pas recevable pour défaut d'intérêt à agir ;
- le jugement attaqué est suffisamment motivé ;
- les nuisances olfactives, visuelles et sonores et le préjudice économique ne sont pas établis.
Par un mémoire, enregistré le 20 octobre 2014, la commune de Saint-Tropez demande à la Cour de rejeter la requête des consorts B...et de mettre à leur charge la somme de
1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- elle doit être mise hors de cause ;
- les constructions ayant été irrégulièrement édifiées, la requête n'est pas recevable pour défaut d'intérêt à agir ;
- le jugement attaqué est suffisamment motivé ;
- les nuisances olfactives, visuelles et sonores et le préjudice économique ne sont pas établis.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Laso ;
- et les conclusions de Mme Chamot, rapporteure publique.
1. Considérant que les consorts B...sont propriétaires de trois parcelles cadastrées section BA n°s 15, 16 et 17 situées chemin des Salins à Saint-Tropez, sur lesquelles sont implantées trois villas dont l'une constitue leur résidence principale, les deux autres faisant l'objet de location saisonnière ; qu'ils interjettent appel du jugement du 27 juin 2014 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté leur demande tenant à la condamnation de la commune de Saint-Tropez et de la communauté de communes du Golfe de Saint-Tropez à les indemniser des préjudices subis du fait de la présence et de l'exploitation d'une aire de stockage de déchets verts, d'encombrants et de déchets d'équipements électriques et électroniques située à proximité immédiate de leur propriété ;
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Considérant que le tribunal, après avoir exposé, au point 2 de son jugement, le principe régissant la responsabilité sans faute du maître d'ouvrage public à l'égard des tiers, a indiqué au point suivant que, quelle qu'en soit la qualification donnée par les parties, l'aire de stockage de déchets constituait un ouvrage public ; qu'ainsi, les premiers juges, devant lesquels était invoqué le moyen tiré de l'exploitation sans titre d'une installation classée pour la protection de l'environnement, y ont suffisamment répondu en regardant cette circonstance comme sans incidence sur l'engagement de la responsabilité sans faute de la commune et de la communauté de communes à l'égard d'un tiers ; que, par suite, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le jugement attaqué serait irrégulier du fait d'une omission de réponse à ce moyen et d'une insuffisance de motivation ;
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne la commune de Saint-Tropez :
3. Considérant qu'il est constant que la communauté de communes du golfe de Saint-Tropez, créée par un arrêté du préfet du Var du 27 décembre 2012, s'est vu transférer, notamment, la compétence relative à la gestion, valorisation et élimination des déchets ménagers et assimilés, comprenant la gestion des déchèteries et des aires de stockage, à compter du
1er janvier 2013 ; qu'en vertu de ce transfert de compétences, le tribunal administratif de Toulon a mis hors de cause la commune de Saint-Tropez à raison de dommages de travaux publics résultant de la présence et du fonctionnement de l'aire de stockage des Salins ; que MM. B...ne contestent pas le motif pour lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté leur demande en tant qu'elle est dirigée contre la commune de Saint-Tropez ; que leurs conclusions sur ce point devant la Cour ne peuvent dès lors qu'être rejetées ;
En ce qui concerne la communauté de communes du Golfe de Saint-Tropez :
4. Considérant que l'aire de stockage de déchets des Salins créée, aménagée et affectée pour les besoins du service de tri des déchets constitue un ouvrage public dont la présence et le fonctionnement, notamment au cas où les préjudices allégués procéderaient de la méconnaissance des règles relatives aux installations classées pour la protection de l'environnement, est susceptible d'engager envers les requérants, en leur qualité de tiers par rapport à cette installation, la responsabilité du maître de l'ouvrage, même en l'absence de faute ; qu'il appartient toutefois aux requérants d'apporter la preuve de la réalité des préjudices allégués et du lien entre la présence ou le fonctionnement de l'ouvrage et ces préjudices doivent, en outre, présenter un caractère anormal et spécial ; que ne sont pas susceptibles d'ouvrir droit à indemnité les préjudices qui n'excèdent pas les sujétions susceptibles d'être normalement imposées, dans l'intérêt général, aux riverains des ouvrages publics ;
5. Considérant qu'en se bornant à soutenir que l'aire de stockage de déchets des Salins nécessite une déclaration pour les activités de stockage de déchets d'équipements électriques et électroniques considérés comme dangereux et une autorisation pour les activités de stockage et de traitement de déchets verts, les requérants n'établissent ni même n'allèguent subir de nuisances liées à la méconnaissance des règles relatives aux installations classées pour la protection de l'environnement invoquées ;
6. Considérant qu'il n'est pas contesté que les déchets de taille des palmiers traités à la suite d'attaques du charançon rouge et du papillon du palmier ne sont pas acceptés sur l'aire de stockage et qu'il n'est pas établi que les déchets verts qui sont stockés sur le site auraient subi un traitement phytosanitaire ; qu'en outre, il résulte de l'instruction que les déchets d'équipements électriques et électroniques sont collectés indépendamment des déchets verts et des encombrants et que l'ensemble des déchets sont enlevés vers d'autres lieux et installations, afin d'y être traités ; que, par ailleurs, il n'est pas contesté qu'une borne incendie est située à proximité de l'aire des Salins et que la zone, référencée par les services d'incendie, fait l'objet d'une surveillance particulière de la part de ces derniers ; qu'enfin, la circonstance que la délibération du 9 janvier 2014 du conseil communautaire de la communauté de communes du golfe de Saint-Tropez a interdit l'accès aux professionnels pour le dépôt de leurs déchets verts sur le site " pour des raisons de sécurité " n'est pas par elle-même de nature à établir que l'aire des Salins présenterait des risques d'incendie et de pollution ; qu'ainsi, comme l'ont retenu à bon droit les premiers juges, il ne résulte pas de l'instruction que les risques invoqués, liés à la présence et du fonctionnement de l'aire des Salins, excèdent les sujétions que les riverains d'un tel ouvrage public sont normalement appelés à supporter ;
7. Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment du procès-verbal de constat d'huissier du 11 juin 2011, que l'impact visuel de l'aire des Salins, tenant à la présence d'un amas de végétaux et d'une machine à broyer, demeure limité depuis la propriété des requérants ; que si ce même procès-verbal ainsi que deux courriers de locataires font état de nuisances olfactives, il ne résulte pas de l'instruction, eu égard à la nature des déchets stockés, que ces nuisances excédent les inconvénients résultant, de manière générale, de ce type d'ouvrage ; que si MM. B...font état de nuisances sonores en se référant au même procès-verbal de constat d'huissier et à des courriers de locataires, il ne résulte pas de l'instruction, à défaut en particulier d'indications plus précises quant à l'importance et à la fréquence de ces nuisances, qu'elles atteindraient un niveau particulièrement élevé ; qu'en outre, les horaires durant lesquels les déplacements des engins utilisés sur le site sont autorisés sont limités le matin, entre 10 et
12 heures, et que les opérations de broyage des déchets verts, en vue de leur transport vers un autre lieu de traitement, ne sont réalisées que trois ou quatre fois par an ; que, dès lors, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que les préjudices invoqués à raison de l'ensemble de ces troubles ne pouvaient être regardés comme présentant un caractère anormal excédant les sujétions susceptibles d'être, sans indemnité, normalement imposées dans l'intérêt général aux riverains des ouvrages publics ;
8. Considérant que les préjudices économiques allégués par MM. B...qui soutiennent qu'ils ont subi des pertes de revenus sur la location de leurs villas et que la valeur de leur bien immobilier a diminué depuis l'installation de l'aire des Salins ne sont justifiés par aucun élément probant notamment comptable ; que, par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé que la réalité des préjudices économiques allégués en raison de la présence et du fonctionnement de l'installation ne pouvait être regardée comme établie ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non recevoir opposée par la commune et la communauté de communes, MM B...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté leur demande ;
Sur les autres conclusions :
10. Considérant que MM. B...ne contestent pas les motifs pour lesquels le tribunal administratif de Toulon a rejeté leurs conclusions tendant à ce qu'il soit déclaré que la présence d'une déchèterie en zone touristique et forestière constitue un trouble à l'ordre public et à ce qu'il soit enjoint à la communauté de communes du Golfe de Saint-Tropez de procéder, d'une part, à la fermeture du site ou de restreindre son activité à la seule période hivernale et, d'autre part, à l'enlèvement des maisons mobiles ; qu'en tout état de cause, si le juge administratif saisi d'un recours indemnitaire peut, en vertu de ses pouvoirs de pleine juridiction et lorsqu'il est saisi de conclusions en ce sens, enjoindre à la personne publique en cause de mettre fin à un comportement fautif ou d'en pallier les effets, il résulte de ce qui a été indiqué aux points 5 à 8 qu'il n'y a pas lieu pour la Cour, en l'absence de préjudice, de prescrire les mesures demandées ; que les conclusions présentées par MM. B... sur ce point devant la Cour ne peuvent dès lors qu'être rejetées ;
Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
11. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Saint-Tropez et de la communauté de communes du Golfe de Saint-Tropez, qui ne sont pas les parties perdantes, la somme que demandent MM. B...au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ; que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux demandes présentées sur ce fondement par la commune de Saint-Tropez et la communauté de communes du Golfe de Saint-Tropez ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de MM. B...est rejetée.
Article 2 : Les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par la commune de Saint-Tropez et la communauté de communes du golfe de Saint-Tropez sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B..., à M. C...B..., à la commune de Saint-Tropez et à la communauté de communes du Golfe de Saint-Tropez.
Délibéré après l'audience du 26 mai 2016, où siégeaient :
- M. Vanhullebus, président de chambre,
- M. Laso, président-assesseur,
- MmeE..., première conseillère,
Lu en audience publique, le 16 juin 2016.
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N° 14MA03782