Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Pharmacie de la mer a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler la décision du 19 juillet 2012 par laquelle le directeur général de l'agence régionale de santé Provence-Alpes-Côte-d'Azur a autorisé le transfert de l'officine de pharmacie exploitée par la SELARL Pharmacie Marina Baie des Anges.
Par un jugement n° 1203347 du 3 octobre 2014, le tribunal administratif de Nice a annulé la décision du 19 juillet 2012.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés le 22 octobre 2014, le 16 avril 2015, le 25 juin 2015, le 20 juillet 2015 et le 1er septembre 2015, la SELARL Pharmacie Marina Baie des Anges, représentée par MeA..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 3 octobre 2014 ;
2°) de rejeter la demande de première instance présentée par la société Pharmacie de la mer ;
3°) de mettre à la charge de la société Pharmacie de la mer le coût du constat d'huissier de justice ainsi que la somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la société Pharmacie de la mer, qui a récupéré sa clientèle, ne justifie pas d'un intérêt lui donnant qualité pour agir ;
- la population du quartier de départ n'est pas abandonnée dans la mesure où elle pourra s'approvisionner en médicaments auprès de la société Pharmacie de la mer ;
- le directeur général de l'agence régionale de santé n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation quant au caractère optimal de la réponse au besoin en médicaments du quartier des Maurettes et des Baumettes au regard du développement du quartier d'accueil et de l'évolution prévisible de sa population, notamment démontrés par le rapport de présentation du plan local d'urbanisme approuvé le 15 septembre 2013, du fait qu'aucune pharmacie n'est implantée dans ce secteur, de l'importance de la population actuelle, résidante et saisonnière, des projets immobiliers en cours et de la population de la commune de Biot fréquentant le centre commercial d'implantation ;
- le directeur général de l'agence régionale de santé aurait pris la même décision s'il avait pris en considération l'habitat déjà existant, sans se fonder sur la future opération immobilière des Maurettes ;
- une nouvelle autorisation de transfert sur le même site lui a été accordée par décision devenue définitive du 13 mars 2015, qui s'est substituée à la décision du 19 juillet 2012.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 2 juillet 2015 et le 20 août 2015, la société Pharmacie de la mer, représenté par MeC..., de la SCP C...et Associés, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 30 000 euros soit mise à la charge de la SELARL Pharmacie Marina Baie des Anges au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que les moyens soulevés par la SELARL Pharmacie Marina Baie des Anges ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Chanon, premier conseiller,
- les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public,
- et les observations de MeB..., représentant la SELARL Pharmacie Marina Baie des Anges.
Une note en délibéré présentée par MeA..., pour la SELARL Pharmacie Marina Baie des Anges, a été enregistrée à la Cour le 10 décembre 2015.
1. Considérant que, par jugement du 3 octobre 2014, le tribunal administratif de Nice, sur demande de la société Pharmacie de la mer, a annulé la décision du 19 juillet 2012 par laquelle le directeur général de l'agence régionale de santé Provence-Alpes-Côte d'Azur a autorisé le transfert, dans la même commune de Villeneuve-Loubet, de l'officine de pharmacie exploitée par la SELARL Pharmacie Marina Baie des Anges, qui relève appel de ce jugement ;
Sur la recevabilité de la demande de première instance :
2. Considérant que la société Pharmacie de la mer exploite une officine de pharmacie sur le territoire de la commune de Villeneuve-Loubet, à une distance de 2,3 km du centre commercial dans lequel l'officine de la SELARL Pharmacie Marina Baie des Anges est autorisée à s'implanter, laquelle bénéficiera de la clientèle ne résidant pas à proximité mais fréquentant le centre commercial ; qu'ainsi et quand bien même elle aurait récupéré une partie de la clientèle délaissée par la SELARL Pharmacie Marina Baie des Anges dans son emplacement initial, la société Pharmacie de la mer justifie d'un intérêt pour agir à l'encontre de la décision en litige ; que, par suite, la fin de non-recevoir opposée par la SELARL Pharmacie Marina Baie des Anges, tirée de l'irrecevabilité de la demande de première instance, ne peut être accueillie ;
Sur la légalité de la décision du 19 juillet 2012 :
3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 5125-3 du code de la santé publique : " Les créations, les transferts et les regroupements d'officines de pharmacie doivent permettre de répondre de façon optimale aux besoins en médicaments de la population résidant dans les quartiers d'accueil de ces officines. Les transferts et les regroupements ne peuvent être accordés que s'ils n'ont pas pour effet de compromettre l'approvisionnement nécessaire en médicaments de la population résidente de la commune ou du quartier d'origine. Les créations, les transferts et les regroupements d'officines de pharmacie ne peuvent être effectués que dans un lieu qui garantit un accès permanent du public à la pharmacie et permet à celle-ci d'assurer un service de garde ou d'urgence mentionné à l'article L. 5125-2 " ;
4. Considérant que, pour l'application de ces dispositions, il appartient à l'autorité administrative d'apprécier les effets du transfert envisagé sur l'approvisionnement en médicaments du quartier d'origine et du quartier de destination de l'officine qui doit être transférée ainsi que, le cas échéant, des autres quartiers pour lesquels ce transfert est susceptible de modifier significativement l'approvisionnement en médicaments ; que la population résidente, au sens des mêmes dispositions, doit s'entendre, outre éventuellement de la population saisonnière, de la seule population domiciliée dans ces quartiers ou y ayant une résidence stable; que l'administration peut toutefois tenir compte, pour apprécier cette population, des éventuels projets immobiliers en cours ou certains à la date de sa décision ; qu'enfin, le caractère optimal de la réponse apportée par le projet de transfert ne saurait résulter du seul fait que ce projet apporte une amélioration relative de la desserte par rapport à la situation d'origine ;
5. Considérant, en premier lieu, que la décision du 13 mars 2015, par laquelle le directeur général de l'agence régionale de santé a accordé à la SELARL Pharmacie Marina Baie des Anges une nouvelle autorisation de transfert sur le même site, ne s'est pas substituée à la décision contestée dès lors que celle-ci était à cette date déjà annulée par le jugement attaqué ; que, dès lors, cette décision n'a aucune incidence dans la présente instance ;
6. Considérant, en deuxième lieu, que le transfert de l'officine de la SELARL Pharmacie Marina Baie des Anges au sein du centre commercial Intermarché dans le quartier des Maurettes a été autorisé, par la décision du 19 juillet 2012, aux motifs que la population de la partie nord du quartier d'origine de l'officine continuera, au regard de la distance d'éloignement et des moyens de communication, à être desservie en médicaments par la nouvelle officine, la partie sud étant desservie par la société Pharmacie de la mer, que le quartier des Maurettes entre dans un périmètre de requalification urbaine, que la construction de 214 logements est déjà programmée, que d'autres ensembles immobiliers sont planifiés dans le plan local d'urbanisme et qu'il n'y a aucune autre pharmacie dans un périmètre compris entre 2 300 et 7 000 mètres ;
7. Considérant que la SELARL Pharmacie Marina Baie des Anges soutient, contrairement aux mentions de la décision en litige, que sa clientèle d'origine s'approvisionnera en médicaments auprès de la société Pharmacie de la mer, ou même d'autres officines, et donc non pas auprès de la nouvelle officine dans son quartier d'accueil ; que, s'agissant de ce dernier quartier, l'autorité administrative ne s'est pas fondée sur la population résidente à la date de sa décision mais notamment sur les projets immobiliers ; qu'il ressort des pièces du dossier que le quartier des Maurettes était, à la date de la décision en litige, une " zone mixte d'habitat et d'activités " ; que les documents produits par la SELARL Pharmacie Marina Baie des Anges, notamment le rapport de présentation du plan local d'urbanisme approuvé le 15 septembre 2013 ou les éléments relatifs à l'opération de requalification urbaine de l'Etablissement public foncier Provence-Alpes-Côte d'Azur, ne sont pas de nature à démontrer l'existence de projets immobiliers en cours ou certains à la date du 19 juillet 2012 ; qu'il résulte de ce qui a été dit au point 4 que la circonstance que la zone d'activités comporte trois mille six cents emplois est dépourvue d'incidence et que la clientèle du centre commercial ne peut être prise en compte ; qu'enfin l'absence de pharmacie dans le quartier d'accueil n'a, par elle-même, aucune influence ; que, dans ces conditions, le transfert en cause ne peut être regardé comme permettant de répondre de façon optimale aux besoins en médicaments de la population résidant dans le quartiers d'accueil de l'officine ; que, par conséquent, le directeur général de l'agence régionale de santé Provence-Alpes-Côte d'Azur a fait une inexacte application des dispositions de l'article L. 5125-3 du code de la santé publique ;
8. Considérant, en troisième et dernier lieu, que, si la société appelante soutient aussi que le directeur général de l'agence régionale de santé aurait pris la même décision s'il avait pris en considération l'habitat déjà existant dans le quartier des Maurettes, seul l'auteur de la décision peut solliciter une substitution de motifs ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SELARL Pharmacie Marina Baie des Anges n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande ; que, par suite, la requête doit être rejetée, y compris les conclusions tendant au remboursement du coût d'un constat d'huissier et celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de faire application de ces dernières dispositions et de mettre à la charge de la SELARL Pharmacie Marina Baie des Anges, partie perdante dans la présente instance, le versement à la société Pharmacie de la mer de la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de la SELARL Pharmacie Marina Baie des Anges est rejetée.
Article 2 : La SELARL Pharmacie Marina Baie des Anges versera à société Pharmacie de la mer la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SELARL Pharmacie Marina Baie des Anges, à la société Pharmacie de la mer et au ministre des affaires sociales, de la santé et des droits des femmes.
Délibéré après l'audience du 8 décembre 2015, à laquelle siégeaient :
- M. Lascar, président de chambre,
- M. Guidal, président assesseur,
- M. Chanon, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 21 décembre 2015.
''
''
''
''
2
N° 14MA04240
bb