Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C...D...a demandé au tribunal administratif de Toulon de le décharger des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2007 et 2008, ainsi que des pénalités correspondantes.
Par un jugement n°1202230 du 17 avril 2014, le tribunal administratif de Toulon a rejeté cette demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 18 juin 2014, M. D..., représenté par MeA..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 17 avril 2014 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions en litige ainsi que des pénalités correspondantes ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- l'existence de soldes débiteurs de comptes courants d'associés s'explique par les remboursements comptabilisés en avance par la société des emprunts que ses associés ont été tenus de souscrire pour son compte ;
- la preuve qu'il ne s'agit pas de revenus distribués est apportée par la circonstance que le prêt a donné lieu au versement d'intérêts, comptabilisés par la société à partir de 2008 avant l'engagement de la vérification de comptabilité ;
- il est fondé à se prévaloir sur le fondement de l'article L. 80 du livre des procédures fiscales d'une prise de position formelle de l'administration fiscale sur une situation de fait ;
- l'administration n'établit pas sa mauvaise foi et ne pouvait donc lui appliquer la majoration de l'article 1729 du code général des impôts ;
- il est fondé à se prévaloir du paragraphe 66 de la documentation administrative de base référencée 13 L 1323 relatif à la bonne foi du contribuable.
Par un mémoire en défense, enregistré le 23 octobre 2014, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par le requérant n'est fondé.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Guidal, président ;
- les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public.
1. Considérant que la SARL Restosoleil a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices clos de 2007 à 2009 ; qu'à l'issue des opérations de vérification, l'administration a regardé la variation positive du solde débiteur du compte courant d'associé de M. C...D...dans les écritures de la société, au 31 décembre des années 2007 et 2008, comme un revenu distribué par cette société ; qu'elle a, par suite, assujetti l'intéressé, pour les années en cause, à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales ; que M. D...relève appel du jugement du 17 avril 2014 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : a. Sauf preuve contraire, les sommes mises à la disposition des associés directement ou par personnes ou sociétés interposées à titre d'avances, de prêts ou d'acomptes (...) " ; qu'en application de ces dispositions, doivent être regardés comme des revenus distribués, sauf preuve contraire, les montants des soldes débiteurs des comptes courants ouverts dans les écritures d'une société au nom de ses associés, actionnaires ou porteurs de parts ;
3. Considérant, en premier lieu, que, pour soutenir que les sommes imposées entre ses mains correspondent à des remboursements comptabilisés en avance par la SARL Restosoleil des emprunts que ses associés avaient souscrits pour le compte de la société afin de financer des travaux d'agencement et de modernisation de son fonds de commerce, M. C...D...se borne à relever que son père, M. B...D..., a souscrit en janvier 2006 un emprunt d'un montant de 553 000 euros, qui a été comptabilisé en apport au crédit de son compte courant d'associé ; que cette opération, enregistrée au compte courant d'associé de M. B...D...est, en tout état de cause, sans incidence sur la situation débitrice du compte courant d'associé de son fils ; que si le requérant fait valoir que la comptabilisation par la société d'intérêts à partir de l'exercice 2008 est de nature à écarter le caractère d'avance des sommes mises par la société à la disposition de ses associés, cette circonstance n'est pas à elle-seule suffisante, en l'absence de tout contrat de prêt, pour établir le bien fondé d'une telle allégation, alors au demeurant que le compte courant de M. C...D...a toujours présenté un solde débiteur depuis la création de la société en 2002 ; que, dès lors, l'intéressé n'apporte pas la preuve, qui lui incombe, que les sommes figurant au débit de son compte courant d'associé ne constituent pas des revenus distribués dont il a eu la disposition ; que, par application de l'article 111 a, l'administration était donc fondée à réintégrer les sommes constituées par la différence entre les deux soldes débiteurs constatés respectivement aux 1er janvier et 31 décembre des années 2007 et 2008 dans les revenus imposables de M. D...des mêmes années, au titre des revenus de capitaux mobiliers ;
4. Considérant, en deuxième lieu, que si lors d'une précédente vérification de comptabilité de la SARL Restosoleil l'administration n'a pas imposé les soldes débiteurs des comptes courants des associés de la société, se bornant à imposer la société sur les avances sans intérêt consenties à ses associés sur le fondement de l'acte anormal de gestion, cette absence d'imposition au regard des dispositions de l'article 111 précité du code général des impôts ne constitue pas une prise de position formelle dont le contribuable puisse se prévaloir sur le fondement de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales ; que, par ailleurs, les énonciations de la documentation de base 13 L 1323 du 1er juillet 2002, qui se rapportent aux conditions d'application du 1° de l'article L. 80 B du livre des procédures fiscales, ne comportent pas, au sens de l'article L. 80 A de ce livre, d'interprétation du texte fiscal fondant les impositions en litige ; que le moyen tiré de ces énonciations ne peut, par suite, qu'être écarté ;
5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l'infraction sanctionnée : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : / a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) " ;
6. Considérant que M. C...D...ne pouvait ignorer que la variation positive du solde débiteur de son compte courant d'associé au cours de l'année 2008 avait le caractère de revenus de capitaux mobiliers imposables dès lors que lui et ses parents étaient les seuls associés de la société et qu'il en connaissait le fonctionnement, qu'il n'a jamais été en mesure de justifier les motifs de l'aggravation de ce solde dans des proportions importantes et que la société a, elle-même, confirmé le caractère partiellement personnel des avances ainsi consenties à ses associés ; que ces circonstances suffisent ainsi à établir l'existence d'un manquement délibéré ; que la circonstance que la mauvaise foi n'ait pas été retenue au titre de l'année 2007 est sans incidence sur le bien fondé de la majoration infligée au titre de l'année 2008 ;
7. Considérant, en quatrième lieu, qu'avant sa modification par la loi du 30 décembre 2008 portant loi de finances rectificative pour 2008, le second alinéa de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales était ainsi rédigé : " Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente " ; que l'article 47 de cette loi l'a complété par la phrase suivante : " Sont également opposables à l'administration, dans les mêmes conditions, les instructions ou circulaires publiées relatives au recouvrement de l'impôt et aux pénalités fiscales " ; que si cette dernière disposition, applicable aux instances en cours pour ce qui concerne les pénalités fiscales, institue une garantie contre les changements de doctrine de l'administration permettant, en particulier, aux contribuables auteurs d'infractions fiscales de se prévaloir des énonciations contenues dans les notes ou instructions publiées, c'est à la condition, notamment, que ces notes ou instructions soient relatives aux pénalités fiscales et aient été susceptibles d'influencer le comportement des intéressés au regard de leurs obligations fiscales ;
8. Considérant que le paragraphe 66 de la documentation administrative de base référencée 13 L 1323 dans sa rédaction mise à jour au 1er juillet 2002, invoqué par le requérant, énonce que " la garantie de l'article L 80 B 1° du livre des procédures fiscales ne peut trouver à s'appliquer que si le contribuable concerné est de bonne foi, c'est-à-dire : /- si sa situation est strictement identique à celle sur laquelle l'administration a pris position ; /- et si le contribuable s'est conformé à la solution admise par l'administration lors de sa prise de position formelle " ; que cette doctrine administrative a été prise par l'administration pour l'interprétation du 1° de l'article L 80 B du livre des procédures fiscales et non pas pour celle de l'article 1729 du code général des impôts ; qu'ainsi, elle n'est pas applicable au litige portant sur l'application de la majoration pour manquement délibéré prévue à l'article 1729 ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C...D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles il a été assujettie au titre des années 2007 et 2008 ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. C...D...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...D...et au ministre des finances et des comptes publics.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal sud-est.
Délibéré après l'audience du 24 novembre 2015, où siégeaient :
- M. Lascar, président de chambre,
- M. Guidal, président assesseur,
- MmeE..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 15 décembre 2015.
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N° 14MA02661
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