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10/12/2015 | FRANCE | N°14MA02196

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 10 décembre 2015, 14MA02196


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E...A...a demandé au tribunal administratif de Nice la condamnation du centre hospitalier de Nice à lui verser une indemnité d'un montant de 64 800 euros en réparation de l'aggravation des préjudices subis à la suite de son hospitalisation le 30 octobre 1994.

Par un jugement n° 1202264 du 21 mars 2014, le tribunal administratif de Nice a condamné le centre hospitalier de Nice à verser à M. A...la somme de 12 100 euros au titre de l'indemnisation de ses préjudices.

Procédure devant la Co

ur :

Par une requête, enregistrée le 20 mai 2014, M.A..., représenté par MeD..., dema...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E...A...a demandé au tribunal administratif de Nice la condamnation du centre hospitalier de Nice à lui verser une indemnité d'un montant de 64 800 euros en réparation de l'aggravation des préjudices subis à la suite de son hospitalisation le 30 octobre 1994.

Par un jugement n° 1202264 du 21 mars 2014, le tribunal administratif de Nice a condamné le centre hospitalier de Nice à verser à M. A...la somme de 12 100 euros au titre de l'indemnisation de ses préjudices.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 20 mai 2014, M.A..., représenté par MeD..., demande à la Cour :

1°) de condamner le centre hospitalier de Nice à lui verser une indemnité d'un montant total de 51 500 euros ;

2°) de mettre à la charge du centre hospitalier de Nice la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- admis, le 28 octobre 1994, à l'hôpital Saint-Roch, à Nice, suite à un accident de la circulation dans un état de choc avancé ; le 30 octobre 1994, il s'est défenestré ; le 29 octobre 1999, l'expert médical, désigné par le président du tribunal administratif, a conclu que M. A... " faisait l'objet de trouble du comportement avec désorientation temporo-spatiale " ; par jugement du 21 mars 2003, devenu définitif, le tribunal administratif de Nice a retenu que la défenestration avait pour origine une maladresse du personnel du fait d'une mauvaise appréciation du risque par l'équipe soignante et que ces circonstances étaient constitutives d'une faute dans l'organisation et le fonctionnement du service engageant la responsabilité de l'hôpital ; le centre hospitalier de Nice a été condamné à verser à M. A...la somme de 23 000 euros ; son état s'est aggravé jusqu'à une hospitalisation du 8 septembre au 4 novembre 2005 suite à une méningite à pneumocoques ; il a sollicité une nouvelle expertise ; l'expert désigné a déposé son rapport le 8 septembre 2007 ;

- c'est à tort que le tribunal administratif de Nice n'a pas retenu la somme de 500 euros correspondant aux honoraires d'un médecin qui l'a assisté au cours d'une expertise médico-légale ; c'est à tort que le tribunal qui lui a accordé la somme de 3 000 euros au titre de troubles dans les conditions d'existence pendant l'incapacité temporaire du 8 septembre au 4 novembre 2005 et depuis la consolidation n'a pas tenu compte du fait qu'il avait complètement perdu l'odorat au titre duquel il sollicite la somme de 6 000 euros ; c'est à tort que le tribunal lui a accordé la somme de 7 500 euros au titre des souffrances endurées évaluées à 4/7 et pour lesquelles il sollicite la somme de 10 000 euros ; c'est à tort que le tribunal qui lui a accordé la somme de 1 000 euros au titre de l'incapacité permanente partielle évaluée à 1 % et pour laquelle il sollicite la somme de 10 000 euros ; c'est à tort que le tribunal lui a accordé la somme de 1 000 euros au titre du préjudice esthétique et pour lequel il sollicite la somme de 5 000 euros ; c'est à tort que le tribunal a refusé de lui accorder la somme de 20 000 euros au titre du préjudice d'agrément subi.

Par mémoire enregistré le 1er juin 2015, le centre hospitalier universitaire de Nice, représenté par MeC..., conclut à l'annulation du jugement du attaqué en tant qu'il a accordé à M. A...les sommes de 7 500 euros au titre des souffrances endurées, 1 000 euros au titre du préjudice esthétique et 3 000 euros en réparation des troubles dans les conditions d'existence et, en toute hypothèse, au rejet de la requête de M.A....

Il soutient que les indemnisations au titre des souffrances endurées, du préjudice esthétique et en réparation des troubles dans les conditions d'existence sont excessives et qu'aucun des moyens de la requête de M. A...n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Laso, rapporteur ;

- et les conclusions de Mme Chamot, rapporteure publique.

1. Considérant que, par jugement du 21 mars 2003 devenu définitif, le tribunal administratif de Nice a déclaré le centre hospitalier universitaire de Nice responsable des conséquences dommageables de la défenestration dont M. A...a été victime au sein de l'établissement le 30 octobre 1994 en raison d'une mauvaise appréciation du risque par l'équipe soignante constitutive d'une faute dans l'organisation et le fonctionnement du service et l'a condamné à verser à la victime une somme globale de 23 000 euros ; qu'à la suite d'une méningite à pneumocoques M. A...a été hospitalisé du 8 septembre au 4 novembre 2005 et a subi une intervention le 13 février 2006 ; qu'après une expertise en date du 8 septembre 2007, le tribunal administratif de Nice, par jugement n° 1202264 du 21 mars 2014, a considéré que les méningites bactériennes consécutives qui se sont développées dans des foyers de fractures osseuses du crâne dans les zones de lésions provoquées par la défenestration du 30 octobre 1994 sont, compte tenu de cette localisation, des conséquences de cette défenestration et a condamné le centre hospitalier universitaire de Nice à verser à M. A... la somme de 12 100 euros à titre de réparation des conséquences dommageables de cette aggravation des préjudices subis ; que M. A...relève appel de ce jugement et demande que cette somme soit portée à 52 100 euros ; que le centre hospitalier universitaire de Nice, qui ne conteste pas le principe de sa responsabilité, fait appel incident du jugement du 21 mars 2014 et demande que les condamnations prononcées à son encontre soient ramenées à un montant inférieur ;

Sur l'évaluation du préjudice subi :

2. Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport de l'expert, que M. A... a connu, dans l'aggravation des séquelles consécutives à la chute du 30 octobre 1994, deux méningites bactériennes consécutives, un séjour en réanimation d'un durée de plus d'un mois avec coma d'une durée équivalente, une baisse de l'acuité auditive de l'oreille gauche, une intervention chirurgicale correctrice de ces brèches méningées, une sensation de nez bouché, conséquence de la technique opératoire utilisée pour colmater les brèches méningées, une fatigue importante, des céphalées et des cicatrices ;

3. Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment du rapport de l'expert, que la période de déficit fonctionnel temporaire total a été fixée du 8 septembre au 4 novembre 2005 ; que le taux de déficit fonctionnel permanent qui avait été évalué par le tribunal dans le jugement du 21 mars 2003 à 15 % pour notamment une anosmie et une limitation modérée de la mobilité cervicale et de l'épaule droite a été porté, en 2007, par l'expert à 16 % ; que cette aggravation correspond, selon l'expert, à une baisse de l'acuité auditive de l'oreille gauche qualifiée de modérée, à une sensation de nez bouché, à une fatigue importante et à des céphalées ; que le tribunal a accordé à M. A...une indemnisation de 3 000 euros au titre de l'ensemble des troubles dans les conditions d'existence subis pendant la période d'incapacité temporaire totale et depuis la consolidation de son état ; que M. A...soutient que cette indemnisation ne tient pas compte du fait qu'il a complètement perdu l'odorat ; que cette circonstance justifierait selon le requérant l'octroi de 6 000 euros au titre de la période d'incapacité temporaire totale et de 10 000 euros au titre du taux de l'incapacité permanente partielle ; que, toutefois, il ne résulte pas de l'instruction notamment de l'expertise que la perte de l'odorat invoquée constituerait une aggravation des séquelles consécutives de l'accident du 30 octobre 1994 ; que les certificats médicaux produits ne sont pas de nature à remettre en cause les conclusions de l'expert sur ce point ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que, comme le soutient M.A..., en lui accordant une indemnité de 3 000 euros au titre des troubles dans les conditions d'existence y compris pour la sensation de nez bouché, les premiers juges aient fait une insuffisante évaluation de ce chef de préjudice ou une évaluation excessive de ce chef de préjudice comme le soutient le centre hospitalier universitaire ;

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction notamment de l'expertise que M. A...a subi des souffrances physiques évaluées à 4/7 en raison du séjour en réanimation et de la pathologie concernée, méningite et de sa correction chirurgicale, puis de la rééducation fonctionnelle ; que le tribunal a accordé à M. A...une indemnisation de 7 500 euros au titre des souffrances endurées ; que M. A...soutient que cette indemnisation de ce chef de préjudice est insuffisante et justifie une somme de 10 000 euros dès lors " qu'il a frôlé la mort à deux reprises suite à ses deux comas, il est devenu l'ombre de lui-même, son dos lui fait atrocement mal, ce qui limite tous ses déplacements, sa fracture dorsale est négligée, il ne peut voyager trop longtemps assis, il est dans l'obligation de s'allonger " ; que, toutefois, il ne résulte pas de l'instruction notamment de l'expertise que les douleurs au dos et la fracture dorsale invoqués constitueraient une aggravation des séquelles consécutives de l'accident du 30 octobre 1994 ; qu'il ne résulte pas de l'instruction qu'en lui accordant une indemnité de 7 500 euros au titre des souffrances endurées, les premiers juges aient fait une insuffisante évaluation de ce chef de préjudice comme il le soutient ; que, contrairement à ce que soutient le centre hospitalier universitaire de Nice, il ne résulte de l'instruction ni que M. A...ait déjà obtenu réparation de ce chef de préjudice ni qu'en lui accordant une indemnité de 7 500 euros à ce titre, les premiers juges aient évalué de façon excessive ce chef de préjudice ;

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction notamment de l'expertise que M. A...a subi un préjudice esthétique qualifié de modéré en raison des deux cicatrices dont celle du crâne qui impose pour être masquée le port permanent d'un couvre-chef ; que le tribunal a accordé à M. A...une indemnisation de 1 000 euros au titre de ce chef de préjudice ; que M. A... soutient que cette indemnisation est insuffisante et justifie une somme de 5 000 euros dès lors qu'il a, en outre " le dos courbé, une plaque de métal dans la mâchoire, il présente des traces des deux trachéotomies effectuées suite à ses comas, outre sa surdité " ; que, toutefois, il ne résulte pas de l'instruction notamment de l'expertise que les circonstances que le requérant ait le dos courbé et une plaque de métal dans la mâchoire constitueraient une aggravation des séquelles consécutives de l'accident du 30 octobre 1994 ; qu'il ne résulte pas de l'instruction notamment de l'expertise que M. A...présente d'autres traces que les deux cicatrices précitées ; que, contrairement à ce que soutient le centre hospitalier universitaire de Nice, il ne résulte de l'instruction ni que M. A...ait déjà obtenu réparation de ce chef de préjudice ni qu'en lui accordant une indemnité de 1 000 euros à ce titre, les premiers juges aient évalué de façon excessive ce chef de préjudice ; que, toutefois, il résulte de l'instruction qu'en lui accordant une indemnité de 1 000 euros au titre du préjudice esthétique, les premiers juges ont fait une insuffisante évaluation de ce chef de préjudice ; qu'il sera fait une juste appréciation de ce chef de préjudice en lui accordant la somme de 2 000 euros ;

6. Considérant que le tribunal n'a pas retenu d'aggravation du préjudice d'agrément ; que M. A...soutient que ce chef de préjudice justifie une indemnisation de 20 000 euros dès lors qu'il n'est plus en mesure de pratiquer une activité physique et sportive ; qu'il résulte de l'instruction notamment de l'expertise que M. A...a connu dans l'aggravation des conséquences de l'accident du 30 octobre 1994 une fatigue importante, la sensation de nez bouché et une baisse de l'acuité auditive de l'oreille gauche ; que M. A...produit également plusieurs attestations et un certificat médical ; que, dès lors, M. A...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande d'indemnisation de ce chef de préjudice ; qu'il sera fait une juste appréciation du préjudice d'agrément subi en lien avec l'aggravation des séquelles de l'accident du 30 octobre 1994 en lui accordant la somme de 2 000 euros ;

7. Considérant que le tribunal n'a pas retenu à titre d'indemnisation la somme de 500 euros représentant le coût des honoraires d'une expertise médico-légale du 7 juillet 2010 ; que M. A...n'établit pas plus en appel qu'en première instance l'utilité de cette expertise ; que, dès lors, M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande d'indemnisation de ce chef de préjudice ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...est fondé à demander que la somme que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a condamné le centre hospitalier universitaire de Nice à lui verser soit portée de 12 100 euros à 15 100 euros à titre de réparation de l'aggravation des préjudices subis à la suite de son hospitalisation le 30 octobre 1994 ; que, dès lors, le centre hospitalier universitaire de Nice n'est ni fondé à soutenir, par la voie de l'appel incident, que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a alloué à M. A...une somme de 12 100 euros à titre de réparation ni fondé à soutenir, à titre subsidiaire, que la somme de 12 100 euros soit réduite ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Nice une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. A...et non compris dans les dépens ;

D E C I D E :

Article 1er : La somme que le centre hospitalier universitaire de Nice a été condamné à verser à M. A...par l'article 1er du jugement du tribunal administratif de Nice du 21 mars 2014 est portée à 15 100 euros.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Nice du 21 mars 2014 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Le centre hospitalier universitaire de Nice versera à M. A...la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A...et l'appel incident du centre hospitalier universitaire de Nice sont rejetés.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. E...A..., à la caisse primaire d'assurance maladie du Gard et au centre hospitalier universitaire de Nice.

Délibéré après l'audience du 19 novembre 2015, où siégeaient :

- M. Vanhullebus, président de chambre,

- M. Laso, président assesseur,

- MmeB..., première conseillère,

Lu en audience publique, le 10 décembre 2015.

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N° 14MA02196 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA02196
Date de la décision : 10/12/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

61-06-025 Santé publique. Établissements publics de santé. Responsabilité des établissements de santé (voir : Responsabilité de la puissance publique).


Composition du Tribunal
Président : M. VANHULLEBUS
Rapporteur ?: M. Jean-Michel LASO
Rapporteur public ?: Mme CHAMOT
Avocat(s) : LE PRADO ; LE PRADO ; CECCALDI

Origine de la décision
Date de l'import : 24/12/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-12-10;14ma02196 ?
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