La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

22/10/2015 | FRANCE | N°14MA02604

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 22 octobre 2015, 14MA02604


Vu la requête, enregistrée le 13 juin 2014, présentée pour Mme B...D..., demeurant ... par Me Van de Ghinste, avocate ; Mme D...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1201825 du 18 avril 2014 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant d'une part à la condamnation de l'ONIAM à lui verser la somme totale de 25 150 euros au titre de la réparation du préjudice qu'elle a subi du fait de sa contamination par le virus de l'hépatite C qu'elle impute aux transfusions sanguines dont elle a bénéficié pendant la période du 2 mai 1983 au 30 ma

i 1983, d'autre part à l'annulation de la décision du 3 avril 2012 de ...

Vu la requête, enregistrée le 13 juin 2014, présentée pour Mme B...D..., demeurant ... par Me Van de Ghinste, avocate ; Mme D...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1201825 du 18 avril 2014 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant d'une part à la condamnation de l'ONIAM à lui verser la somme totale de 25 150 euros au titre de la réparation du préjudice qu'elle a subi du fait de sa contamination par le virus de l'hépatite C qu'elle impute aux transfusions sanguines dont elle a bénéficié pendant la période du 2 mai 1983 au 30 mai 1983, d'autre part à l'annulation de la décision du 3 avril 2012 de l'ONIAM lui accordant une indemnisation d'un montant total de

3 776 euros au titre de cette période ;

Mme D...soutient que :

- l'ONIAM a estimé dans la décision litigieuse du 3 avril 2012, qu'elle apportait un faisceau d'indices suffisamment précis et concordants permettant de faire présumer que sa contamination trouvait son origine dans la transfusion de produits sanguins ;

- mais l'office n'a proposé d'indemniser, pour un montant total de 3 776 euros, que deux postes de préjudice, à savoir son déficit fonctionnel temporaire et les souffrances endurées ;

- c'est à tort que le tribunal administratif a estimé qu'elle ne démontrait pas avoir subi d'autres préjudices que ceux indemnisés par l'office ;

- elle est fondée à obtenir une indemnisation supplémentaire au titre de son préjudice spécifique de contamination, reconnu par la jurisprudence de la Cour de cassation ;

- elle doit aussi obtenir réparation de son déficit fonctionnel temporaire pour la journée du 5 mars 2008 et de son déficit fonctionnel permanent ;

Vu, enregistré le 18 août 2014, le mémoire présenté pour la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes, représentée par son directeur en exercice, par MeC..., qui demande que la condamnation de l'ONIAM, par l'article 2 du jugement attaqué, soit portée à la somme définitive totale de 2 924,29 euros portant intérêts, au titre de ses débours et à 974,76 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion ;

La caisse fait valoir que :

- c'est à tort que les premiers juges ont limité la condamnation de l'ONIAM à lui verser la somme de 365,55 euros ;

- elle établit par son relevé des débours avoir versé à son assurée sociale la somme supplémentaire de 2 562,74 euros au titre des indemnités journalières pour les périodes du 4 décembre 2009 au 31 décembre 2009 et du 24 juillet 2010 au 30 septembre 2010 ;

Vu enregistré le 24 mars 2015, le mémoire présenté pour Mme D...par Me Van de Ghinste, qui persiste dans ses précédentes écritures et conclut en outre à la condamnation de l'ONIAM à lui verser la somme totale de 25 150 euros en réparation de son entier préjudice et celle de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et soutient en outre que :

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que son préjudice spécifique de contamination était réparé par l'ONIAM au titre de ses troubles dans les conditions d'existence et de ses souffrances endurées ;

- ce préjudice doit donner lieu à une indemnisation particulière d'un montant de 5 000 euros ;

- son déficit fonctionnel permanent de 5 % après consolidation reconnu par le rapport d'expertise du 10 juillet 2012 et lié à une fatigue chronique qui l'empêche de mener la même vie qu'avant sa contamination sera réparé par la somme de 10 000 euros ;

- c'est à tort aussi que ce rapport estime que son état de santé est consolidé au motif erroné qu'il n'existe pas de traitement adapté à son génotype viral ;

- son asthénie et son anxiété perdurent à ce jour et donneront lieu à l'allocation d'une somme de 10 000 euros ;

Vu, enregistré le 26 mars 2015, le mémoire présenté pour l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM), représenté par son directeur en exercice, par le cabinet d'avocats BJMR, qui conclut au rejet de la requête et, par la voie de l'appel incident, à l'annulation du jugement en tant qu'il a condamné l'office à rembourser à la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes une partie de ses débours et au rejet des conclusions de la caisse ;

L'ONIAM soutient que :

- par ordonnance du 23 août 2012, une provision de 5 000 euros a été allouée à la requérante par le juge des référés du tribunal administratif de Nice ;

- l'ONIAM ne conteste pas la matérialité des transfusions ni l'origine transfusionnelle de la contamination de la requérante par le virus de l'hépatite C ;

- la demande d'annulation de la décision de l'office du 3 avril 2012 a été rejetée à bon droit par les premiers juges, dès lors que l'action contentieuse de la requérante s'analyse comme un recours en plein contentieux et non comme un recours en excès de pouvoir ;

- sur sa demande indemnitaire, la requérante n'établit pas la réalité des préjudices supplémentaires qu'elle invoque ;

- l'absence d'évolutivité du virus de la requérante fait obstacle à la réparation de son préjudice de contamination ;

- l'expert ne mentionne pas l'existence d'une hospitalisation le 5 mars 2008 pour réaliser un fibroscan qui ne requiert pas en principe d'hospitalisation ;

- l'absence de fibrose ne permet pas de retenir un déficit fonctionnel permanent indemnisable ;

- la provision de 5 000 euros octroyée par le juge des référés indemnise totalement le préjudice subi par la requérante et c'est à bon droit que les premiers juges ont rejeté sa demande d'indemnisation complémentaire ;

- en revanche, c'est à tort que le jugement attaqué, dans son article 2, condamne l'ONIAM à rembourser à la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes une partie de ses débours, dès lors que l'office intervient au titre de la solidarité nationale et non en qualité de responsable de l'accident et que la demande de la requérante a été enregistrée au tribunal administratif de Nice le 25 mai 2012, postérieurement au 1er juin 2010 ;

Vu, enregistré le 21 août 2015, le mémoire en communication de pièces présenté pour Mme D...par Me A...E... ;

Vu la lettre du 11 septembre 2015 informant les partie que la Cour est susceptible de soulever d'office l'irrégularité du jugement pour ne pas avoir statué sur les frais de l'expertise ordonnée par le juge des référés du tribunal administratif de Nice par ordonnance du 10 juillet 2012 ;

Vu la lettre du 16 septembre 2015 informant les parties que la Cour est susceptible de soulever d'office l'irrecevabilité des conclusions à fin d'annulation de l'offre de l'ONIAM en application de l'article L. 1221-14 du code de la santé publique, dès lors que la victime dispose, si elle estime cette offre insuffisante, de la faculté de saisir la juridiction d'une action en indemnisation ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 ;

Vu la loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008 ;

Vu la loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012 ;

Vu le décret n° 2003-314 du 4 avril 2003 relatif au caractère de gravité des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales prévu à l'article L. 1142-1 du code de la santé publique ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 1er octobre 2015 :

- le rapport de Mme Carassic, rapporteure ;

- les conclusions de Mme Chamot, rapporteure publique ;

1. Considérant que Mme D...a subi une intervention chirurgicale pour l'exérèse d'un myxome de l'oreillette gauche le 2 mai 1983 et une autre intervention le 30 mai 1983 consécutive à un épanchement pleuro-péricardique ; qu'elle a bénéficié de plusieurs transfusions sanguines lors de ces interventions ; que sa contamination par le virus de l'hépatite C a été découverte en 1994 lors d'un bilan pré opératoire ; qu'estimant que l'ONIAM était tenue d'une obligation de payer du fait de cette contamination qu'elle impute à ces transfusions sanguines, elle a saisi l'office d'une demande d'indemnisation amiable ; que, par décision litigieuse du 3 avril 2012, le directeur de l'ONIAM a proposé, en se fondant sur le rapport de l'expert du 20 décembre 2011 qu'il avait désigné, de l'indemniser pour la somme totale de 3 776 euros ; qu'estimant cette offre d'indemnisation insuffisante, Mme D...a demandé au juge des référés du tribunal administratif de Nice la désignation d'un expert et la condamnation de l'ONIAM à lui verser une provision au titre de la réparation de son préjudice ; que, par ordonnance du 10 juillet 2012, le juge des référés a désigné le même expert que l'ONIAM, lequel a rendu son rapport le

26 novembre 2012 ; que, par ordonnance du 23 août 2012, le juge des référés a condamné l'office à lui verser une provision de 5 000 euros ; que Mme D...a demandé au tribunal administratif de Nice la condamnation de l'ONIAM à lui verser la somme totale de 25 150 euros au titre de la réparation du préjudice qu'elle a subi du fait de sa contamination par le virus de l'hépatite C qu'elle impute aux transfusions sanguines dont elle a bénéficié pendant la période du 2 mai 1983 au 30 mai 1983, d'autre part l'annulation de la décision susmentionnée du 3 avril 2012 du directeur de l'office ; que, par l'article 1er du jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté sa demande ; que, par l'article 2 du jugement, ils ont condamné l'ONIAM à verser à la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes la somme totale de 365,55 euros au titre du remboursement de ses débours et ont rejeté par son article 3 le surplus de la demande de la

caisse ; qu'en appel, Mme D...demande qu'il soit fait droit à sa demande ; que l'ONIAM, qui ne conteste pas le principe de son obligation d'indemniser la victime, conclut au rejet de la requête de Mme D...et des conclusions de la caisse ; que la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes demande que la condamnation de l'ONIAM soit portée à la somme définitive totale de 2 924,29 euros portant intérêts au titre des débours qu'elle a dû engager pour son assurée sociale et à 974,76 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant que les premiers juges ne se sont pas prononcés sur la dévolution des frais de l'expertise ordonnée par le juge des référés du tribunal administratif de Nice par ordonnance du 10 juillet 2012 et ont ainsi méconnu la règle applicable même sans texte à toute juridiction administrative, qui lui impartit, sauf dans le cas où un incident de procédure y ferait obstacle, d'épuiser son pouvoir juridictionnel ; que, par suite, il y a lieu d'annuler dans cette mesure le jugement attaqué, d'évoquer sur ce point et de statuer sur la charge des frais d'expertise ;

Sur la recevabilité des conclusions de première instance :

En ce qui concerne les conclusions de la caisse dirigées contre l'ONIAM :

3. Considérant, d'une part, qu'il résulte des dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale et du I de l'article 1er de l'ordonnance du 7 janvier 1959, ainsi que des articles 28 et 29 de la loi du 5 juillet 1985, que les recours des tiers payeurs, subrogés dans les droits d'une victime d'un dommage qu'ils indemnisent, s'exercent à l'encontre des auteurs responsables de l'accident ; que, dans l'exercice de la mission qui lui est confiée par l'article L. 1221-14 du code de la santé publique, l'ONIAM est tenu d'indemniser au titre de la solidarité nationale et non en qualité d'auteur responsable ; qu'il en résulte que les tiers payeurs ayant versé des prestations à la victime d'un dommage entrant dans les prévisions de l'article L. 1221-14 ne peuvent exercer contre l'ONIAM le recours subrogatoire prévu par les articles L. 376-1 du code de la sécurité sociale, 1er de l'ordonnance du 7 janvier 1959 et 29 de la loi du 5 juillet 1985 ; qu'en revanche, les tiers payeurs peuvent exercer leur recours subrogatoire contre l'EFS en sa qualité de responsable du dommage ; qu'à cet égard, il se déduit des dispositions combinées des articles L. 1221-14, alinéa 7, et L. 3122-4 du code de la santé publique, relatives au recours subrogatoire ouvert à l'ONIAM, que, lorsque l'indemnisation de la victime d'une contamination transfusionnelle par le VHC est assurée au titre de la solidarité nationale, le législateur a entendu que la responsabilité de l'EFS ne puisse être recherchée par l'ONIAM et les tiers payeurs subrogés dans les droits de la victime, que dans les cas où le dommage est imputable à une faute de l'établissement de transfusion sanguine et à condition, en principe, que celui-ci bénéficie de la couverture d'une assurance ;

4. Considérant, d'autre part, que selon l'article 67 IV de la loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008, tel que complété par l'article 72 II de la loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012 de financement de la sécurité sociale pour 2013, les tiers payeurs ne peuvent exercer d'action subrogatoire contre l'office si l'établissement de transfusion sanguine n'est pas assuré, si sa couverture d'assurance est épuisée ou encore dans le cas où le délai de validité de sa couverture est expiré ; que l'article 72 III de cette même dernière loi prévoit que cette disposition est d'application immédiate pour toutes les actions juridictionnelles en cours à la date du 1er juin 2010, sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée ;

5. Considérant que la demande de Mme D...a été enregistrée le 29 mai 2012 au greffe du tribunal administratif de Nice ; qu'elle était dirigée contre l'ONIAM ; qu'à cette date, l'ONIAM intervient au titre de la solidarité nationale ; que le tiers payeur ne dispose pas, conformément aux dispositions susvisées de l'article 67 IV, d'un recours subrogatoire contre l'ONIAM pour demander le remboursement des débours qu'elle a dû engager pour son assuré ; que par suite, et ainsi que le fait valoir l'ONIAM, les conclusions de première instance et d'appel de la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes dirigées contre l'ONIAM sont irrecevables et doivent, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, être rejetées ;

En ce qui concerne les conclusions de Mme D...aux fins d'annulation de la décision du 3 avril 2012 :

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 1221-14 du code de la santé publique : " (...)

L'offre d'indemnisation visant à la réparation intégrale des préjudices subis du fait de la contamination est faite à la victime dans les conditions fixées aux deuxième, troisième et cinquième alinéas de l'article L. 1142-17. La victime dispose du droit d'action en justice contre l'office si sa demande d'indemnisation a été rejetée, si aucune offre ne lui a été présentée dans un délai de six mois à compter du jour où l'office reçoit la justification complète des préjudices ou si elle juge cette offre insuffisante. La transaction à caractère définitif ou la décision juridictionnelle rendue sur l'action en justice prévue au précédent alinéa vaut désistement de toute action juridictionnelle en cours et rend irrecevable toute autre action juridictionnelle visant à la réparation des mêmes préjudices (...). " ; que l'offre d'indemnisation consécutive à une contamination transfusionnelle faite par l'ONIAM en application de cet article ne constitue pas une décision susceptible de faire l'objet d'un recours en excès de pouvoir, dès lors que la victime dispose, si elle estime cette offre insuffisante, de la faculté de saisir la juridiction d'une action en indemnisation ; que, par suite, les conclusions de Mme D...aux fins d'annulation de la décision du 3 avril 2012 du directeur de l'ONIAM sont irrecevables, ainsi que les parties en ont été informées par un moyen d'ordre public ;

Sur l'obligation de payer de l'ONIAM :

7. Considérant que l'ONIAM ne conteste pas que la probabilité d'une origine transfusionnelle de la contamination de Mme D...au VHC est manifestement plus élevée que celle d'une origine étrangère aux transfusions ; qu'ainsi, les premiers juges ont pu estimer à bon droit que l'hypothèse selon laquelle la contamination de Mme D...s'est produite à l'occasion des transfusions qu'elle a reçues présentait une vraisemblance suffisante ; que, dès lors, ils ont pu à juste titre estimer que les conditions d'indemnisation de la victime par l'ONIAM au titre de la solidarité nationale étaient remplies ;

Sur les conclusions indemnitaires de Mme D...:

8. Considérant que les premiers juges ont écarté l'indemnisation du déficit fonctionnel temporaire total pour la journée du 5 mars 2008, du déficit fonctionnel permanent, du préjudice spécifique de contamination et du préjudice résultant d'une atteinte permanente à l'intégrité physique et psychique invoqués par la requérante ;

9. Considérant en premier lieu qu'il résulte du rapport daté du 20 décembre 2011 de l'expert désigné par l'ONIAM que la requérante a subi le 5 mars 2008 un fibroscan afin notamment d'évaluer son taux de transaminases ; que, toutefois et alors que l'expert ne retient pas cette journée au titre de son déficit fonctionnel temporaire total, la requérante n'établit pas que la réalisation de cet examen, qui ne requiert pas en principe d'hospitalisation sans que l'ONIAM ne soit contesté sur ce point, aurait entraîné un tel déficit temporaire total ; que, dès lors, ce chef de préjudice a été écarté à bon droit par les premiers juges ;

10. Considérant en deuxième lieu que la consolidation d'un état de santé ne signifie pas que celui-ci ne peut pas évoluer, mais seulement que la phase active de la maladie s'est achevée et que le patient entre dans une phase de son état de santé au cours de laquelle les séquelles permanentes de la maladie peuvent être décrites et appréciées dans leurs conséquences sur ses conditions de vie, sans que cela fasse obstacle à ce que cet état de santé soit susceptible d'aggravation ou d'amélioration ; que l'expert, chef du service d'hématologie du centre hospitalier universitaire Nord à Marseille, souligne dans son rapport du 26 novembre 2012, que l'état de santé de Mme D...peut être considéré comme consolidé à la date du 13 juillet 2010, soit plus de six mois après la fin de son traitement qu'elle a suivi entre mai 2008 et avril 2009 ; que, contrairement à ce que soutient la requérante, cet expert ne s'est pas fondé pour fixer cette date sur l'absence de traitement adapté à son génotype viral 4d, mais explique que lors de l'examen de la patiente le 24 octobre 2012, Mme D...ne présentait aucune évolution depuis son examen précédent du 16 novembre 2011, qu'aucun nouveau traitement n'a été mis en oeuvre depuis cette dernière date, que son score de fibrose de F1 sur le fibrotest du 13 juillet 2010 est stabilisé à F1 sur le fibroscan du 31 octobre 2012 et qu'aucun élément significatif n'indique l'aggravation de l'état de santé telle qu'invoquée par Mme D...lors de cet examen ; que la requérante ne conteste pas les dires précis et circonstanciés de l'expert, se bornant en appel à affirmer que la possibilité d'une rechute et l'absence de traitement adapté lui créeraient des angoisses sur l'évolution de son état de santé ; qu'aucun élément médical du dossier ne permet de remettre en cause sa consolidation, qui doit ainsi être tenue pour acquise au 13 juillet 2010 ;

11. Considérant que l'expert, dans son rapport du 26 novembre 2012, fixe le déficit fonctionnel permanent subi par la requérante après cette consolidation à 5 % en raison de l'asthénie persistante dont se plaint la patiente ; qu'ainsi qu'il a été dit au point 9 et contrairement à ce que soutient l'ONIAM, la requérante présente une fibrose F1, ce qui correspond à une fibrose d'activité minime et non pas à une absence totale de fibrose (F0) ; qu'il y a lieu d'allouer à la requérante, compte tenu de son âge à la date de sa consolidation, la somme de 5 000 euros au titre de son déficit fonctionnel permanent ;

12. Considérant que la requérante en invoquant des "atteintes physique et psychique permanentes" en raison de son incapacité d'envisager sereinement un futur dès lors que la stabilisation de son état ne serait pas définitive entend invoquer le préjudice spécifique de contamination, réparé au titre des troubles de toute nature dans les conditions d'existence eu égard à l'anxiété ressentie en raison des possibilités de rechute ; que contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, ces troubles n'ont pas été indemnisés par l'ONIAM dès lors que sa proposition d'indemnisation n'a pas été suivie de la signature d'une transaction ; qu'il y a lieu d'allouer à ce titre à Mme D...la somme de 5 000 euros ;

13. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme D...est fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande indemnitaire et à demander que l'ONIAM soit condamné à lui verser la somme totale de 10 000 euros en réparation de ses préjudices personnels, sous réserve de la provision de 5 000 euros que l'ONIAM a été condamné à lui verser par ordonnance du 23 août 2012 du juge des référés du tribunal administratif de

Nice ;

Sur les dépens :

14. Considérant qu'il y a lieu de mettre les frais d'expertise, d'un montant de

717,80 euros qui comprend le montant de l'allocation provisionnelle de 100 euros accordée par l'expert, à la charge de l'ONIAM ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

15. Considérant qu'il y a lieu dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'ONIAM à verser à Mme D...la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du 18 avril 2014 du tribunal administratif de Nice est annulé en tant qu'il a omis de se prononcer sur la dévolution des frais d'expertise.

Article 2 : L'article 2 du jugement du 18 avril 2014 est annulé.

Article 3 : L'ONIAM est condamné à verser à Mme D...la somme de 10 000 euros en réparation de son préjudice, sous déduction de la provision de 5 000 euros que l'ONIAM a été condamné à lui verser.

Article 4 : Les frais d'expertise, d'un montant de 717,80 euros, sont mis à la charge de l'ONIAM.

Article 5 : L'ONIAM est condamné à verser à Mme D...la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 7 : Le jugement est réformé en ce qu'ils ont de contraire au présent arrêt.

Article 8 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...D..., à l'ONIAM et à la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes.

Délibéré après l'audience du 1er octobre 2015, où siégeaient :

- M. Vanhullebus, président de chambre,

- M. Laso, président-assesseur,

- Mme Carassic, première conseillère,

Lu en audience publique, le 22 octobre 2015.

''

''

''

''

N° 14MA026042

CM


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA02604
Date de la décision : 22/10/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-02-01-02 Responsabilité de la puissance publique. Responsabilité en raison des différentes activités des services publics. Service public de santé. Dons du sang.


Composition du Tribunal
Président : M. VANHULLEBUS
Rapporteur ?: Mme Marie-Claude CARASSIC
Rapporteur public ?: Mme CHAMOT
Avocat(s) : VAN DE GHINSTE AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 07/11/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-10-22;14ma02604 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award