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15/10/2015 | FRANCE | N°15MA03837

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, Juge des référés, 15 octobre 2015, 15MA03837


Vu la procédure suivante :

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 15 septembre 2015, et un mémoire complémentaire enregistré le 13 octobre 2015, M.B..., représenté par MeA..., demande au juge des référés de la Cour :

1°) d'ordonner la suspension de l'arrêté du 29 janvier 2015 par lequel le préfet de Vaucluse a refusé de renouveler son titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours à compter de sa notification et a fixé le pays de destination.

2°) d'enjoin

dre au préfet de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour portant droit au travail d...

Vu la procédure suivante :

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 15 septembre 2015, et un mémoire complémentaire enregistré le 13 octobre 2015, M.B..., représenté par MeA..., demande au juge des référés de la Cour :

1°) d'ordonner la suspension de l'arrêté du 29 janvier 2015 par lequel le préfet de Vaucluse a refusé de renouveler son titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours à compter de sa notification et a fixé le pays de destination.

2°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour portant droit au travail dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 400 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative et, en application des dispositions de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, à verser à son avocat, ce dernier renonçant à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle qui lui a été confiée.

Il soutient que, s'agissant de la condition d'urgence :

- selon une jurisprudence constante, la condition d'urgence à suspendre un arrêté litigieux est réputée satisfaite dans le cadre d'un refus de renouvellement d'un titre de séjour ;

- il est suivi depuis de très nombreuses années par des médecins spécialistes pour de lourdes et graves pathologies, en particulier pour une insuffisance rénale chronique en phase terminale et est soumis à une hémodialyse trois fois par semaine ;

- la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées lui a reconnu le 14 octobre 2014 un taux d'incapacité supérieur à 80 % et lui a accordé une carte d'invalidité pour la période du 16 septembre 2014 au 31 août 2019 ;

- il n'existe pas de traitement approprié à sa pathologie en Egypte ;

- il fait actuellement l'objet d'une mesure d'assignation à résidence.

Il soutient, s'agissant de l'existence d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision, que :

- en raison de la gravité de son état de santé et de l'impossibilité pour lui d'être soigné dans son pays d'origine, il s'est vu délivrer depuis 2008, des titres de séjour en sa qualité d'étranger malade ;

- au regard de la situation sanitaire générale en Egypte et de la gravité de son état de santé, il ne survivra pas s'il n'obtient pas de titre de séjour et si l'obligation de quitter le territoire français est mise à exécution ;

- il a, en outre, construit toute sa vie privée et personnelle en France ;

- il justifie, en conséquence, de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels justifiant qu'il soit admis au séjour au sens des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un mémoire en défense enregistré le 12 octobre 2015, le préfet de Vaucluse conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la condition tenant à l'urgence n'est pas remplie ;

- la condition tenant à l'existence d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision, n'est pas davantage remplie.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le jugement n° 1501066 du 16 juin 2015 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté la demande de M. B...tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 29 janvier 2015 par lequel le préfet de Vaucluse a refusé de lui renouveler son titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours à compter de sa notification et a fixé le pays de destination.

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991;

- la loi n° 2011-672 de la loi du 16 juin 2011 relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité et notamment son article 26 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Par décision en date du 1er septembre 2015, le président de la cour administrative d'appel de Marseille a, en application de l'article L. 511-2 du code de justice administrative, désigné M. Jean-Louis Bédier, président de la 3ème chambre, pour juger les référés.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La séance publique a été ouverte le 14 octobre 2015 à 14 heures 30 et a été levée à 14 heures 45.

Au cours de celle-ci, MeD..., substituant MeA..., a repris, pour M.B..., les conclusions et moyens figurant dans la requête et indiqué que les circonstances humanitaires exceptionnelles dont fait état M. B...justifiaient que l'avis du directeur général de l'agence régionale de santé soit recueilli ;

1. Considérant que M.B..., ressortissant égyptien, demande au juge des référés de la Cour d'ordonner la suspension de l'arrêté du 29 janvier 2015 par lequel le préfet de Vaucluse a refusé de renouveler son titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours à compter de sa notification et a fixé le pays de destination.

Sur l'aide juridictionnelle :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 20 de la loi du 10 juillet 1991 : " Dans les cas d'urgence (...), l'admission provisoire à l'aide juridictionnelle peut être prononcée (...) par la juridiction compétente ou son président " ; qu'en raison de l'urgence, il y a lieu d'admettre, à titre provisoire, M. B...au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;

Sur la demande de suspension :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 521-1 du code de justice administrative : " Quand une décision administrative, même de rejet, fait l'objet d'une requête en annulation ou en réformation, le juge des référés, saisi d'une demande en ce sens, peut ordonner la suspension de l'exécution de cette décision, ou de certains de ses effets, lorsque l'urgence le justifie et qu'il est fait état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision " ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction issue de l'article 26 de la loi du 16 juin 2011 relative à l'immigration, à l'intégration et à la nationalité qui a supprimé la condition tenant à un accès effectif à un traitement approprié qui figurait antérieurement au 11° de cet article : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; (...)11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police. Le médecin de l'agence régionale de santé ou, à Paris, le chef du service médical de la préfecture de police peut convoquer le demandeur pour une consultation médicale devant une commission médicale régionale dont la composition est fixée par décret en Conseil d'Etat " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'enfin, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...). L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans (...) " ;

5. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que M. B...était titulaire de plusieurs titres de séjour portant la mention " étranger malade " depuis 2008 ; que, pour l'instruction de sa demande tendant à obtenir à nouveau un titre de séjour sur le fondement des dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet de Vaucluse a recueilli l'avis du médecin de l'agence régionale de santé ; que l'avis rendu par ce médecin le 1er juillet 2014, s'il conclut que l'état de santé de M. B...nécessite une prise en charge médicale, indique également qu'une telle prise en charge peut être assurée dans le pays d'origine du requérant, lequel peut supporter le voyage vers ce pays ; que les documents médicaux produits par le requérant confirment qu'il est diabétique et souffre d'une insuffisance rénale nécessitant une dialyse et bénéficie d'un traitement adéquat en France mais ne démontrent pas que le traitement des pathologies dont il souffre ne pourrait être effectivement assuré dans son pays d'origine comme l'a indiqué le médecin de l'agence régionale de santé ; que, d'ailleurs, M. B...a pu recevoir les soins que nécessite son état de santé au cours des séjours en Egypte de plusieurs semaines qu'il a effectués notamment au cours des mois d'août et de septembre de l'année 2012, des mois de février et mars de l'année 2013 et entre le 18 novembre 2013 et le 5 mai 2014, comme cela ressort des mentions de son passeport et d'un certificat médical établi le 14 avril 2015 par un praticien suivant M. B...; que, par suite, l'Egypte ne peut être regardée comme n'étant pas en mesure d'offrir un traitement approprié au requérant ; qu'en refusant de délivrer à M. B...un titre de séjour nonobstant la reconnaissance de son invalidité et son inscription sur la liste des demandeurs d'une greffe d'organe, le préfet de Vaucluse n'a pas méconnu les dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, compte tenu de ce qui précède, ne peut être retenue l'existence d'une circonstance humanitaire exceptionnelle qui aurait nécessité que l'avis du directeur général de l'agence régionale de santé soit recueilli ;

6. Considérant, en deuxième lieu, que l'ensemble des attaches familiales de M.B..., qui est célibataire et sans charge de famille, se trouve en Egypte, où il a séjourné plusieurs mois au cours de l'année 2014 notamment ; que la décision n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a été prise ; que, par suite, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 précité de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peuvent qu'être écartés ;

7. Considérant, en troisième lieu, que les éléments invoqués par le requérant tels que précédemment examinés ne sont pas de nature à constituer des motifs exceptionnels ni des considérations humanitaires au sens de ces dispositions ; qu'il s'ensuit que M. B...n'est pas fondé à soutenir que le préfet aurait méconnu l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précité et que la décision attaquée serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

8. Considérant que, dans ces conditions, sans qu'il soit besoin de rechercher si la condition tenant à l'urgence est en l'espèce satisfaite, le requérant ne peut être regardé comme faisant état d'un moyen propre à créer, en l'état de l'instruction, un doute sérieux quant à la légalité de la décision ; que doivent être rejetées par voie de conséquence ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

ORDONNE :

Article 1er : M. B...est admis, à titre provisoire, à l'aide juridictionnelle.

Article 2 : La requête de M. B...est rejetée.

Article 3 : La présente ordonnance sera notifiée à M. C...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de Vaucluse.

Fait à Marseille, le 15 octobre 2015.

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N° 15MA03837


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 15MA03837
Date de la décision : 15/10/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

54-035-02 Procédure. Procédures instituées par la loi du 30 juin 2000. Référé suspension (art. L. 521-1 du code de justice administrative).


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: M. Jean-Louis BEDIER
Avocat(s) : GONAND

Origine de la décision
Date de l'import : 23/12/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-10-15;15ma03837 ?
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