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29/09/2015 | FRANCE | N°15MA01554

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 29 septembre 2015, 15MA01554


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 28 novembre 2014 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté sa demande d'admission au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1409059 du 16 février 2015, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de M.C....

Procédure devant la Cour :

I°) Par une requête et des mémoires, e

nregistrés les 15, 16 avril et le 21 août 2015 sous le n° 15MA01549, M.C..., représenté par MeA.....

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 28 novembre 2014 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté sa demande d'admission au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1409059 du 16 février 2015, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de M.C....

Procédure devant la Cour :

I°) Par une requête et des mémoires, enregistrés les 15, 16 avril et le 21 août 2015 sous le n° 15MA01549, M.C..., représenté par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 16 février 2015 ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône en date du 28 novembre 2014 ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la date de l'arrêt à intervenir ;

4°) à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois à compter de la date de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer, pendant l'instruction du dossier, un récépissé valant autorisation de travail et de séjour ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le préfet était tenu de saisir au préalable la commission du titre de séjour en application de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le motif du refus de séjour tiré de la précédente décision du 14 juin 2013 est infondé en droit comme en fait ;

- l'administration n'a pas procédé à un examen sérieux de sa situation particulière, notamment eu égard aux nombreuses nouvelles pièces produites ;

- le préfet ne pouvait lui reprocher un défaut d'insertion professionnelle ;

- il démontre le caractère habituel de sa résidence sur le territoire français depuis plus de dix ans, son voyage en Algérie en 2003 n'ayant aucune incidence ;

- le préfet a porté une atteinte excessive à sa vie privée au regard des nombreuses relations sociales et amicales en France dont il justifie ;

- il peut bénéficier de la délivrance d'un titre de séjour en vertu de la circulaire du 28 novembre 2012, applicable aux ressortissants algériens ;

- il en est de même au titre de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français emporterait des conséquences manifestement excessives sur sa situation personnelle ;

- le préfet a méconnu l'étendue de sa compétence en s'estimant en situation de compétence liée pour édicter une mesure d'éloignement à la suite du refus de séjour ;

- cette mesure porte une atteinte excessive à sa vie privée et familiale ;

- le préfet n'a pas apprécié les conséquences de cette décision sur sa vie privée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 mai 2015, le préfet des Bouches-du-Rhône conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

II°) Par une requête et un mémoire, enregistrés le 16 avril et le 21 août 2015 sous le n° 15MA01554, M.C... représenté par MeA..., demande à la Cour :

1°) de prononcer, sur le fondement des dispositions des articles R. 811-15 et R. 811-17 du code de justice administrative, le sursis à exécution du même jugement du tribunal administratif de Marseille du 16 février 2015 ;

2°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un récépissé valant autorisation provisoire de séjour et de travail dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'exécution de la mesure d'éloignement porte une atteinte suffisamment grave et immédiate à sa situation personnelle ;

- les moyens articulés dans sa requête au fond établissent l'existence d'un doute sérieux quant à la légalité de l'arrêté préfectoral du 28 novembre 2014.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 mai 2015, le préfet des Bouches-du-Rhône conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Chanon, premier conseiller,

- et les observations de MeA..., représentant M.C....

1. Considérant que les requêtes n° 15MA01549 et n° 15MA01554 présentées pour M. C... présentent à juger des questions semblables et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

2. Considérant que, par jugement du 16 février 2015, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de M.C..., de nationalité algérienne, tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 novembre 2014 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a rejeté sa demande d'admission au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi ; que M. C...relève appel de ce jugement dans la première affaire et demande qu'il soit sursis à son exécution dans la seconde ;

Sur légalité du refus de séjour :

3. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : 1. au ressortissant algérien qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans (...) ; 5. au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

4. Considérant, en premier lieu, que M. C...ne justifie pas, par les seules pièces produites, qu'il réside habituellement en France depuis plus de dix ans ; qu'en particulier, il a versé aux débats pour l'année 2005 une attestation d'adhésion à l'" association culturelle Amazigh Marseille " " en date du 2 février 2005 et une lettre du 14 décembre 2005 relative à son admission à l'aide médicale d'Etat, qui lui a été adressée chez un tiers ; que, s'il a également communiqué de nombreuses attestations de connaissances, celles-ci ont été établies postérieurement en 2012 ou 2014 et mentionnent de façon stéréotypée et non circonstanciée connaître l'intéressé depuis l'année 2005 ou les années précédentes ; que ces seules pièces ne permettent pas de démontrer la résidence habituelle de M. C...sur le territoire français au cours de l'année 2005 ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations du 1 de l'article 6 de l'accord franco-algérien doit être écarté ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte des termes mêmes de l'arrêté contesté que le préfet des Bouches-du-Rhône n'a pas fondé le refus de délivrance d'un titre de séjour sur la circonstance que l'essentiel des pièces relatives au séjour de l'intéressé en France avait déjà été produit lors d'une précédente demande ayant fait l'objet d'une décision de rejet confirmée par la juridiction administrative mais qu'il s'est borné à apporter cette précision après avoir analysé l'ensemble des pièces produites ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que, malgré le bref délai d'instruction de la demande de l'intéressé, l'administration n'aurait pas procédé à l'examen sérieux de la situation particulière de M. C..., notamment dès lors que, ainsi qu'il a été dit au point 4, les nombreuses attestations de connaissances produites sont, eu égard aux termes dans lesquels elles sont rédigées, insuffisamment probantes pour établir la résidence habituelle de l'intéressé en France, alléguée de 2002 à 2014 ;

7. Considérant, en quatrième lieu, que l'absence de preuve d'une " insertion professionnelle notable " ne constitue pas un motif déterminant du refus de séjour mais seulement un des éléments pris en compte par le préfet pour apprécier l'existence de la vie privée et familiale en France de M.C... ; qu'en outre l'intéressé, qui mentionne lui-même qu'il a travaillé de façon non déclarée, ne saurait dès lors se prévaloir d'une insertion par le travail ;

8. Considérant, en cinquième lieu, que M.C..., né le 16 août 1971, célibataire sans charge de famille, reconnaît dans l'instance ne pas se prévaloir de l'existence d'une vie familiale en France ; que si les témoignages produits démontrent qu'il a tissé des relations sociales et amicales sur le territoire français, le requérant n'allègue pas être dépourvu d'attaches privées et familiales en Algérie ; qu'il ne ressort des pièces du dossier que M. C...aurait transféré en France le centre de ses intérêts privés et familiaux ; que, dans les circonstances de l'espèce, compte tenu notamment de la durée et des conditions de séjour en France de M.C..., le préfet n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis par le refus de séjour ; qu'ainsi, doit être écarté le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations du 5 de l'accord franco-algérien et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

9. Considérant, en sixième lieu, que l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 régit d'une manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France, ainsi que les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés ; qu'il n'est fait exception à ce principe que pour l'application des dispositions de procédure afférentes à la délivrance, au renouvellement ou au refus de titres de séjour qui concernent tous les étrangers, sauf stipulations incompatibles expresses de la convention internationale dont ils relèvent, et sous réserve que cette convention comporte des stipulations de portée équivalente à la disposition interne pour laquelle a été édictée la règle de procédure dont l'application est invoquée ; qu'ainsi, les ressortissants algériens ne peuvent se prévaloir, pour l'obtention d'un titre de séjour, que des dispositions de cet accord et, le cas échéant, solliciter, sauf stipulations incompatibles expresses, l'application des dispositions de procédure du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui s'appliquent à tous les étrangers ; que, par suite, M. C...ne peut utilement soutenir qu'il peut se prévaloir de la délivrance d'un titre de séjour en application des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, relatives à l'admission exceptionnelle au séjour, et pas davantage, par voie de conséquence, que le préfet était tenu de saisir la commission du titre de séjour en vertu du 4ème alinéa de cet article ; qu'en tout état de cause, le requérant ne justifiant ni d'une résidence habituelle en France depuis plus de dix ans, ni avoir transféré en France le centre de ses intérêts privés et familiaux comme il a déjà été dit, le préfet n'était pas tenu de saisir la commission du titre de séjour en application des dispositions de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, applicable aux ressortissants algériens ;

10. Considérant, en septième et dernier lieu, que les énonciations de la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012, relatives aux conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière dans le cadre des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ne constituent pas des lignes directrices dont les intéressés peuvent utilement se prévaloir devant le juge ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

11. Considérant, d'abord, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet aurait méconnu l'étendue de sa compétence en s'estimant à tort en situation de compétence liée pour édicter une mesure d'éloignement à la suite du refus de séjour ;

12. Considérant, ensuite, que, compte tenu de ce qui a été dit aux points 4 et 8, il ne résulte pas des éléments versés au débat que l'obligation de quitter le territoire français emporterait des conséquences manifestement excessives sur la situation personnelle de M. C... ;

13. Considérant, enfin, que, contrairement à ce qui est soutenu, l'arrêté en litige mentionne les éléments invoqués par l'intéressé quant à sa vie privée en France, lesquels ont ainsi été pris en compte ; que, pour les mêmes raisons qu'en ce qui concerne le refus de séjour, le moyen tiré de l'atteinte excessive portée à la vie privée et familiale de M. C...ne peut être accueilli ;

14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. C...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ; que, par suite, la requête n° 15MA01549 doit être rejetée, y compris les conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

15. Considérant que dès lors que le présent arrêt statue sur les conclusions de la requête d'appel de M.C..., il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête n° 15MA01554 sollicitant le sursis à exécution du jugement du 16 février 2015 ainsi que sur les conclusions à fin d'injonction ; que, dans les circonstances de l'espèce, les conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative dans cette instance doivent également être rejetées ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête n° 15MA01549 de M. C...est rejetée.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fin de sursis à exécution et à fin d'injonction de la requête n° 15MA01554 de M. C....

Article 3 : Les conclusions de M. C...tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative présentées dans l'instance n° 15MA01554 sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 8 septembre 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Lascar, président de chambre,

- M. Chanon, premier conseiller,

- Mme Menasseyre, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 29 septembre 2015.

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N° 15MA01549, 15MA01554 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15MA01554
Date de la décision : 29/09/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03-04 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour. Motifs.


Composition du Tribunal
Président : M. LASCAR
Rapporteur ?: M. René CHANON
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : AHMED ; AHMED ; AHMED

Origine de la décision
Date de l'import : 13/10/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-09-29;15ma01554 ?
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