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24/09/2015 | FRANCE | N°15MA03609

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, Juge des référés, 24 septembre 2015, 15MA03609


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une ordonnance n° 1503714 du 14 août 2015, le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a ordonné, sur déféré du préfet de l'Hérault, la suspension de l'exécution de la décision en date du 5 février 2015 par laquelle le maire de la commune de Vias a délivré à la société à responsabilité limitée (SARL) Paina le permis de construire n° PC 034 332 14 K 0031 en vue de la construction d'un bâtiment abritant des locaux à matériels pour le karting et des sanitaires sur des par

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une ordonnance n° 1503714 du 14 août 2015, le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a ordonné, sur déféré du préfet de l'Hérault, la suspension de l'exécution de la décision en date du 5 février 2015 par laquelle le maire de la commune de Vias a délivré à la société à responsabilité limitée (SARL) Paina le permis de construire n° PC 034 332 14 K 0031 en vue de la construction d'un bâtiment abritant des locaux à matériels pour le karting et des sanitaires sur des parcelles cadastrées section BK n° 17 et BK n° 18 sises sur le territoire de ladite collectivité.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 27 août 2015, sous le n° 15MA03609, dans l'application Télérecours, et par un mémoire récapitulatif et responsif, enregistré le 22 septembre 2015, la commune de Vias, représentée par la SCP d'avocats Scheuer, Vernhet et associés, demande, dans le dernier état de ses écritures, à au juge des référés :

1°) d'annuler cette ordonnance du 14 août 2015 ;

2°) de rejeter le déféré du préfet de l'Hérault ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'ordonnance contestée est entachée d'irrégularité, au regard des prescriptions de l'article R. 741-1 du code de justice administrative, dès lors que l'exemplaire qui lui a été notifié ne comporte ni la signature du juge des référés ni celle de la greffière ; qu'elle entend maintenir ce moyen auquel le préfet n'a pas répliqué, dans ses observations en défense ;

- en estimant que le moyen tiré de la méconnaissance du I de l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme était propre à créer un doute sérieux sur la légalité du permis de construire attaqué, le juge des référés a excédé sa compétence et dénaturé le moyen soulevé par le préfet de l'Hérault, ce dernier n'ayant pas invoqué la méconnaissance de la " loi littoral " mais ayant soutenu que le projet ne respectait pas le schéma de cohérence territoriale (SCOT) du Biterrois ; que le moyen ainsi invoqué était inopérant ;

- le juge des référés a commis une erreur de droit en retenant ce moyen dès lors que la zone d'activité ludique de Vias, caractérisée par une densité importante de constructions, doit être considérée comme une " agglomération " au sens de ces dispositions ; que le projet en litige constitue non une extension de l'urbanisation mais une simple opération de construction ;

- dans l'hypothèse d'une évocation, les autres moyens invoqués par le préfet à l'appui de son déféré de première instance ne sont pas fondés ;

- c'est ainsi que le projet contesté, qui ne comprend que des sanitaires et des locaux destinés à remiser les karts, ne contrevient pas aux dispositions du règlement de la zone rouge " Rp " du plan de prévention des risques naturels d'inondation et littoraux approuvé le 3 avril 2014 ;

- le plan de prévention des risques approuvé n'exige pas la production d'une étude analysant les conséquences d'un projet de construction sur l'écoulement des crues en zone " Rn " ; qu'au surplus, le préfet ne démontre pas que le projet litigieux pourrait avoir des conséquences négatives sur l'écoulement des eaux ;

- le moyen tiré de ce que le stationnement des karts correspondrait à un usage non autorisé par le plan de prévention des risques n'est pas fondé dès lors que le projet prévoit des locaux à matériels pour entreposer et remiser les karts de la société bénéficiaire ;

- le préfet n'est pas fondé à remettre en cause, au motif du caractère disproportionnée de la surface du bâtiment affectée au rangement de matériel, l'utilité que présente pour le pétitionnaire le projet de construction ici en cause ;

- le moyen tiré de la violation des dispositions du SCOT est inopérant dès lors que ce document n'est pas opposable aux autorisations d'urbanisme ;

- le moyen tiré de la violation de l'article VNA11 du règlement du plan local d'urbanisme (PLU) communal et de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme, bien que le projet soit situé au sein du périmètre de la zone sensible du canal du Midi, n'est pas fondé eu égard aux modifications apportées par la société pétitionnaire à l'aspect extérieur du projet et à la végétalisation de l'ensemble, ainsi qu'il résulte du dossier du permis de construire modificatif.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 septembre 2015 dans l'application Télérecours, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête ;

Il fait valoir que :

- le moyen tiré de la dénaturation par le juge des référés du moyen qu'il invoquait en première instance n'est pas fondé dès lors que, dans son déféré suspension, il a soulevé ce moyen, dans la partie intitulée " sur le non respect des dispositions de la loi littoral visées à l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme ", et l'argumentaire qui y était développé était basé sur ces dispositions, le SCOT du Biterrois apportant un éclairage sur les conditions d'urbanisation dans ces espaces ;

- le juge des référés n'a pas commis d'erreur dans son appréciation du secteur d'implantation du projet contesté dès lors que ce dernier, situé en discontinuité de la ville de Vias, ne constitue pas, par lui-même, une agglomération ;

- le moyen, tiré du non respect des dispositions de la zone Rp du plan de prévention des risques naturels d'inondation et littoraux approuvé le 3 avril 2014 ainsi que celui tiré de la méconnaissance des articles VNA11 du règlement du PLU communal et R. 111-21 du code de l'urbanisme, invoqués en première instance, sont propres à créer également un doute sérieux sur la légalité du permis de construire en litige.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Vu la décision du 1er septembre 2015 du président de la cour administrative d'appel de Marseille désignant Mme Buccafurri, présidente de la 9ème chambre, pour juger les référés.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique du 23 septembre 2015 :

- le rapport de Mme Buccafurri, juge des référés,

- les observations de Me C...pour la commune de Vias qui persiste dans les moyens invoqués dans ses écritures et précise, en réponse à une interrogation du juge des référés, que le karting existant s'étend sur une superficie de l'ordre de 7 hectares et que les campings confrontant le terrain d'assiette sont composés notamment de mobil home et d'emplacements pour les tentes,

- les observations de M.A..., représentant le préfet de l'Hérault qui persiste dans ses observations écrites,

- les observations de M.B..., agent de l'Etat, entendu par le juge des référés, en application des dispositions de l'article R. 732-1 du code de justice administrative, qui fournit des explications sur les risques d'inondation répertoriés dans le secteur d'implantation, dans le cadre du plan de prévention des risques naturels d'inondation et littoraux approuvé le 3 avril 2014.

La clôture de l'instruction a été prononcée au terme de l'audience.

1. Considérant que, par un arrêté en date du 5 février 2015, la maire de la commune de Vias a délivré à la SARL Paina un permis de construire en vue de l'édification d'un bâtiment en R+1 abritant des locaux à matériels pour le karting et des sanitaires, d'une surface de plancher créée de 890 mètres carrés, sur les parcelles cadastrées section BK n° 17 et BK n° 18, sises route de Farinette, lieu-dit Tricot, classées en zone V NAa au plan d'occupation des sols (POS) communal et situées sur le territoire de ladite collectivité ; que, par une ordonnance en date du 14 août 2015, le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a, sur déféré du préfet de l'Hérault, ordonné la suspension de l'exécution de ce permis de construire jusqu'à ce qu'il soit statué au fond sur la légalité de cette décision ; que la commune de Vias relève appel de cette ordonnance ;

Sur la régularité de l'ordonnance attaquée :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 741-8 du code de justice administrative : " (....) Lorsque l'affaire est jugée par un magistrat statuant seul, la minute du jugement est signée par ce magistrat et par le greffier d'audience. " ;

3. Considérant qu'il ressort de l'examen de la minute de l'ordonnance attaquée que celle-ci comporte, conformément aux dispositions de l'article R. 741-8 du code de justice administrative, la signature du magistrat qui l'a rendue ainsi que celle de la greffière d'audience ; que le moyen selon lequel ladite ordonnance serait à cet égard irrégulière doit, par suite, être écarté comme manquant en fait ; que, par ailleurs, la circonstance que l'ampliation notifiée aux parties ne comporterait pas ces signatures est sans incidence sur la régularité de l'ordonnance attaquée ;

Sur le bien-fondé de l'ordonnance attaquée :

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 554-1 du code de justice administrative : " Les demandes de suspension assortissant les requêtes du représentant de l'Etat dirigées contre les actes des communes sont régies par le 3e alinéa de l'article L. 2131-6 du code général des collectivités territoriales (...) " ; qu'aux termes de cet article : " Le représentant de l'Etat dans le département défère au tribunal administratif les actes mentionnés à l'article L. 2131-2 qu'il estime contraires à la légalité dans les deux mois suivant leur transmission. / (...) Le représentant de l'Etat peut assortir son recours d'une demande de suspension. Il est fait droit à cette demande si l'un des moyens invoqués paraît, en l'état de l'instruction, propre à créer un doute sérieux quant à la légalité de l'acte attaqué. (...) " ;

5. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier, notamment de l'examen du déféré de première instance, que le préfet de l'Hérault a clairement invoqué, dans le paragraphe de son recours figurant sous l'intitulé " sur le non respect des dispositions de la loi littoral visées à l'article L. 146-4 du code de l'urbanisme " le moyen tiré de ce que le permis de construire contesté avait été délivré en violation des dispositions de l'article L. 146-4 I du code de l'urbanisme alors même que le préfet a, dans le cadre de son argumentation développée à l'appui de ce moyen, également mentionné que le projet de construction litigieux était contraire au Document d'Orientations Générales du schéma de cohérence territoriale (SCOT) du Biterrois ; qu'ainsi, contrairement à ce que soutient la commune de Vias, en retenant le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 146-4 I du code de l'urbanisme comme étant propre à créer un doute sérieux sur la légalité de ce permis de construire, le juge des référés, n'a ni dénaturé le moyen invoqué par le préfet de l'Hérault ni excédé son office ;

6. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 146-1 du code de l'urbanisme : " Les dispositions du présent chapitre déterminent les conditions d'utilisation des espaces terrestres, maritimes et lacustres : - dans les communes littorales définies à l'article 2 de la loi n° 86-2 du 3 janvier 1986 relative à l'aménagement, la protection et la mise en valeur du littoral ; / (...) lesdites dispositions sont applicables à toute personne publique ou privée pour l'exécution de tous travaux, constructions, défrichements, plantations, installations et travaux divers, la création de lotissements et l'ouverture de terrains de camping ou de stationnement de caravanes, l'établissement de clôtures, pour l'ouverture de carrières, la recherche et l'exploitation de minerais. (...) " ; qu'aux termes du I de l'article L. 146-4 du même code : " L'extension de l'urbanisation doit se réaliser soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement. (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que les constructions peuvent être autorisées dans les communes littorales en continuité avec les zones déjà urbanisées, caractérisées par une densité significative des constructions, mais qu'aucune construction ne peut en revanche être autorisée, même en continuité d'autres constructions, dans les zones d'urbanisation diffuse éloignées des agglomérations ;

7. Considérant, d'une part, qu'il est constant que le projet de construction litigieux n'est pas en continuité avec le centre urbain de la commune de Vias ; que, d'autre part, il ressort des pièces du dossier, notamment des photographies aériennes versées au dossier, que le projet de construction litigieux est confronté à l'Ouest par des parcelles restées à l'état naturel ou de nature agricole ; que si, au Nord des parcelles d'assiette, il existe un parc d'attractions dénommé Europark, il est constant que ces installations ont été érigées sans aucune autorisation d'urbanisme et que le propriétaire a été condamné, sous astreinte, par une décision définitive du juge pénal à remettre les lieux en l'état au besoin après démolition des installations en cause ; qu'ainsi, ces constructions illégalement édifiées ne peuvent être prises en compte dans l'appréciation de l'urbanisation existant dans ce secteur ; que, par ailleurs, ni les installations de campings, situées au Sud du terrain d'assiette, ni celles, situées au Sud Est, au demeurant dans un compartiment de terrain distinct du fait de la présence de la Route Départementale (RD) n° 137, ne peuvent être regardées, compte tenu de la nature et des caractéristiques de ces installations, comme constituant une " agglomération " existante au sens des dispositions précitées de l'article L. 146-4 I du code de l'urbanisme ; qu'enfin, il ressort des pièces du dossier que seules quelques constructions éparses, caractérisant une urbanisation diffuse, confrontent, à l'Est, les parcelles d'assiette du projet contesté ; qu'il suit de là que c'est à bon droit que le premier juge a estimé que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 146-4 I du code de l'urbanisme était de nature à faire naître un doute sérieux sur la légalité du permis de construire attaqué dès lors que ce dernier autorisait une extension de l'urbanisation qui ne se réalisait en continuité ni avec une agglomération existantes ni avec un village existant ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier ni même allégué que le projet constituerait un hameau nouveau intégré à l'environnement ; que, par suite, la commune de Vias n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a ordonné la suspension de l'exécution du permis de construire susvisé du 5 février 2015 ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à verser une quelconque somme à la commune de Vias au titre des frais qu'elles a exposés et non compris dans les dépens ;

O R D O N N E :

Article 1er : La requête de la commune de Vias est rejetée.

Article 2 : La présente ordonnance sera notifiée à la commune de Vias et à la ministre de l'égalité des territoires, du logement et de la ruralité.

Copie en sera transmise au préfet de l'Hérault.

Fait à Marseille, le 24 septembre 2015.

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N° 15MA03609


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : Juge des référés
Numéro d'arrêt : 15MA03609
Date de la décision : 24/09/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire - Légalité interne du permis de construire.

Urbanisme et aménagement du territoire - Règles de procédure contentieuse spéciales - Procédure d'urgence - Référé.


Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Isabelle BUCCAFURRI
Avocat(s) : SCP SCHEUER - VERNHET ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 13/10/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-09-24;15ma03609 ?
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