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16/06/2015 | FRANCE | N°14MA02893

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 8ème chambre - formation à 3, 16 juin 2015, 14MA02893


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G...A...C...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté en date du 29 janvier 2014 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de l'admettre au séjour, a assorti son refus d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il serait renvoyé à défaut de se conformer à ladite obligation, d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer un titre de séjour ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa demande et de mettre à l

a charge de l'Etat le paiement d'une somme de 1 500 euros en application des dispos...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G...A...C...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté en date du 29 janvier 2014 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de l'admettre au séjour, a assorti son refus d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il serait renvoyé à défaut de se conformer à ladite obligation, d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer un titre de séjour ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa demande et de mettre à la charge de l'Etat le paiement d'une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1401499 du 20 juin 2014, le tribunal administratif de Nice a rejeté la requête de M. A...C....

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 26 juin 2014 et un mémoire enregistré le 10 avril 2015 à 11h55, M. A...C..., représenté par Me B...F..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement précité rendu le 20 juin 2014 par le tribunal administratif de Nice ;

2°) d'annuler l'arrêté précité du 29 janvier 2014 ;

3°) d'enjoindre, à titre principal, au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer un titre de séjour de dix ans, à titre subsidiaire, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" ou "salarié" ou, à titre infiniment subsidiaire, de réexaminer sa demande dans un délai d'un mois avec délivrance, dans cette attente, d'une autorisation provisoire de séjour valant autorisation de travail, sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement de la somme de 2 500 euros qui sera versée à son conseil sous réserve de sa renonciation au bénéfice de l'indemnité d'aide juridictionnelle.

Il soutient :

- que le jugement est entaché d'irrégularité ;

- que l'arrêté attaqué est insuffisamment motivé ;

- que l'arrêté attaqué porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale ;

- que l'arrêté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- qu'il aurait dû bénéficier d'une admission exceptionnelle au séjour ; que les lignes directrices de la circulaire du 31 juillet 2009 ont été méconnues ;

- que le médecin de l'agence régionale de santé aurait dû être saisi ; qu'il devait bénéficier d'un titre de séjour en qualité d'étranger malade en application des dispositions de l'article L. 313-11-11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- que le préfet a méconnu les stipulations de l'article 3 de l'accord franco-tunisien et l'autorité de la chose jugée par la cour administrative d'appel de Marseille le 29 septembre 2011 ; que le préfet était ressaisi de la demande antérieure à l'arrêté du 25 mai 2010 et avait une compétence liée ; qu'il n'avait pas à justifier d'un visa de long séjour ; qu'il n'a pas reçu la demande de pièces qui lui aurait été adressée le 29 juillet 2013 ; qu'il avait adressé au préfet, le 21 janvier 2014, une demande d'autorisation de travail datée du 9 mai 2013 ;

- qu'il entend exciper, à l'appui de ses conclusions aux fins d'annulation de l'obligation de quitter le territoire français, de l'illégalité du refus de titre de séjour ;

Par une ordonnance du 11 mars 2015, la clôture de l'instruction a été fixée au 10 avril 2015.

M. A...C...a produit un mémoire le 18 mai 2015 soit postérieurement à la clôture de l'instruction.

La demande d'aide juridictionnelle de M. A...C...a été rejetée par une décision du 30 septembre 2014.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République de Tunisie en matière de séjour et de travail du 17 mars 1988 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Vincent-Dominguez,

- et les observations de Me D..., substituant MeF..., représentant M. A... C....

1. Considérant que M. A...C..., de nationalité tunisienne, serait, selon ses dires, entré en France en octobre 2002 ; qu'il a été mis en possession de titres de séjour portant la mention "vie privée et familiale" du 7 mars 2006 au 6 mars 2010 ; qu'à l'expiration de la durée de validité de son dernier titre de séjour, il a présenté une demande de changement de statut et demandé à bénéficier d'un titre de séjour portant la mention "salarié" ; que, par un arrêté en date du 25 mai 2010, le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de faire droit à cette demande et a assorti son refus d'une obligation de quitter le territoire français ; que, par un arrêt en date du 29 septembre 2011, la cour a annulé ledit arrêté et enjoint au préfet des Alpes-Maritimes de réexaminer, dans un délai de deux mois à compter de la notification dudit arrêt, la demande de M. A...C...après avis de la direction départementale du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle ; que, par arrêté en date du 29 janvier 2014 faisant suite à une lettre adressée le 21 janvier 2014 par le conseil du requérant, le préfet des Alpes-Maritimes a, de nouveau, refusé de faire droit à la demande de titre de séjour de M. A...C..., a assorti son refus d'une obligation de quitter le territoire français et fixé le pays à destination duquel il serait renvoyé à défaut de se conformer à ladite obligation ; que M. A...C...interjette appel du jugement en date du 20 juin 2014 par lequel le tribunal administratif de Nice a rejeté ses conclusions aux fins d'annulation dudit arrêté ainsi que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

2. Considérant, en premier lieu, que, par l'arrêt précité du 29 septembre 2011, la cour a annulé l'arrêté susmentionné du préfet des Alpes-Maritimes en date du 25 mai 2010 portant refus de titre de séjour mention "salarié" ; que cet arrêt est devenu définitif ; que son dispositif et les motifs qui en sont le support nécessaire sont revêtus de l'autorité absolue de la chose jugée ;

3. Considérant que la cour a jugé, d'une part, qu'il résultait des stipulations et de l'article 3 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 en vertu desquelles " Les ressortissants tunisiens désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an minimum (...) reçoivent, après contrôle médical et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an et renouvelable portant la mention salarié (...) " et des dispositions de l'article R. 313-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile selon lesquelles : " L'étranger qui, n'étant pas déjà admis à résider en France, sollicite la délivrance d'une carte de séjour temporaire présente à l'appui de sa demande (...) 3° Sauf stipulation contraire d'une convention internationale applicable en France, un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois (...) ", qu'en l'absence de stipulation contraire de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988, M. A...C..., titulaire d'une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" lorsqu'il avait demandé à bénéficier d'un changement de statut, n'avait pas à justifier d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois ; que le préfet des Alpes-Maritimes, à qui il a été enjoint par la cour de réexaminer la situation de M. A...C...ne pouvait, dès lors, lui opposer, de nouveau, l'absence d'entrée en France sous couvert d'un visa de long séjour ; qu'il a, ce faisant, méconnu l'autorité absolue de la chose jugée par la cour le 29 septembre 2011 ;

4. Considérant, en second lieu, que le préfet des Alpes-Maritimes a également fondé son refus sur la circonstance que M. A...C...n'aurait pas, en dépit de demandes qui lui auraient été adressées les 29 novembre 2011 et 29 juillet 2013, procédé à la réactualisation de son dossier et fourni d'informations quant à la pérennité de sa promesse d'embauche au sein de la société SK Bâtiment ; que, néanmoins, il ressort des pièces du dossier que, par sa lettre du 21 janvier 2014, M. A...C...avait adressé, en pièce jointe n° 24, un contrat de travail simplifié à durée indéterminée daté du 9 mai 2013 pour un emploi de peintre en bâtiment au sein de la SARL Renov Arenas ; que le préfet des Alpes-Maritimes devait donc instruire la demande de titre de séjour "salarié" de M. A...C...à la lumière de ce dernier contrat de travail ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit nécessaire d'examiner la régularité du jugement attaqué et de statuer sur les autres moyens de la requête, que M. A... C... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté ses conclusions aux fis d'annulation de l'arrêté du 29 janvier 2014 ; qu'il y a lieu, par suite, d'annuler ledit jugement ainsi que, par l'effet dévolutif de l'appel, l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes en date du 29 janvier 2014 ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

6. Considérant que l'exécution du présent arrêt n'implique pas que soit délivré à M. A... C...une carte de séjour temporaire ou, a fortiori, une carte de résident mais implique, en revanche, que le préfet des Alpes-Maritimes réexamine la demande de titre de séjour portant la mention "salarié" déposée par le requérant et lui délivre, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour ; qu'il y a lieu, par suite, d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de procéder, sur la base des éléments les plus récents, à un réexamen de la demande de M. A...C...dans un délai d'un mois à compter de la notification dudit arrêt ; qu'eu égard à l'extrême lenteur dont ont fait preuve les services de la préfecture pour procéder à l'exécution de l'arrêt de la cour du 29 septembre 2011 et à la méconnaissance sus-rappelée de l'autorité de la chose jugée, il y a lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte de 200 euros par jour de retard ;

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

7. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ; que, par ailleurs, aux termes de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique dans sa rédaction issue de la loi n° 2013-1278 du 29 décembre 2013 : " Les auxiliaires de justice rémunérés selon un tarif peuvent renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat et poursuivre contre la partie condamnée aux dépens et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle le recouvrement des émoluments auxquels ils peuvent prétendre./ Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou qui perd son procès, et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, à payer à l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, partielle ou totale, une somme qu'il détermine et qui ne saurait être inférieure à la part contributive de l'Etat, au titre des honoraires et frais non compris dans les dépens que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. / Si l'avocat du bénéficiaire de l'aide recouvre cette somme, il renonce à percevoir la part contributive de l'Etat. S'il n'en recouvre qu'une partie, la fraction recouvrée vient en déduction de la part contributive de l'Etat. / Si, à l'issue du délai de douze mois à compter du jour où la décision est passée en force de chose jugée, l'avocat n'a pas demandé le versement de tout ou partie de la part contributive de l'Etat, il est réputé avoir renoncé à celle-ci. / Un décret en Conseil d'Etat fixe, en tant que de besoin, les modalités d'application du présent article. " ;

8. Considérant que la demande d'aide juridictionnelle déposée par M. A...C...a été rejetée par décision du 30 septembre 2014 ; que, par suite, les conclusions présentées avant la clôture de l'instruction par le seul conseil du requérant, à l'exclusion de ce dernier lui-même, ne peuvent qu'être rejetées ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1401499 rendu le 20 juin 2014 par le tribunal administratif de Nice et l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes en date du 29 janvier 2014 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet des Alpes-Maritimes de réexaminer la demande de titre de séjour portant la mention "salarié" de M. A...C..., dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, sous astreinte de 200 euros (deux cents euros) par jour de retard et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. G...A...C..., au ministre de l'intérieur, et au préfet des Alpes-Maritimes.

Copie en sera adressée au Procureur de la République près le tribunal de grande instance de Nice.

Délibéré après l'audience du 26 mai 2015, à laquelle siégeaient :

- M. Gonzales, président,

- M. Renouf, président assesseur,

- Mme Vincent-Dominguez, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 16 juin 2015.

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N° 14MA028932


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 8ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA02893
Date de la décision : 16/06/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. GONZALES
Rapporteur ?: Mme Aurélia VINCENT-DOMINGUEZ
Rapporteur public ?: Mme HOGEDEZ
Avocat(s) : JAIDANE

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-06-16;14ma02893 ?
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