Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B...D..., épouseC..., a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 7 juin 2013 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.
Par un jugement n° 1302659 du 31 octobre 2013, le tribunal administratif de Nice a rejeté la demande de MmeD....
Procédure devant la Cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés le 28 novembre 2013 et les 27 juin et 26 novembre 2014, MmeD..., représentée par MeA..., de la SCP A...-Mamillo-Culioli, demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 31 octobre 2013 ;
2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté préfectoral du 7 juin 2013 ;
3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa demande de titre de séjour, dans le délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu, au cours de l'audience publique, le rapport de M. Chanon, premier conseiller.
1. Considérant que, par jugement du 31 octobre 2013, le tribunal administratif de Nice a rejeté la demande de Mme D...tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 juin 2013 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi ; que Mme D... relève appel de ce jugement ;
Sur la légalité de l'arrêté préfectoral :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;
3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que MmeD..., née le 20 juillet 1984, s'est mariée en Tunisie le 16 août 2005 avec un compatriote titulaire d'un titre de séjour valable dix ans délivré le 2 novembre 2000, lequel a été ultérieurement renouvelé jusqu'au 1er novembre 2020 ; qu'elle a rejoint son époux en 2008 sur le territoire français pour donner naissance à un premier enfant, le 12 mai 2008 ; que les justificatifs versés au débats, tant en première instance qu'en appel, sont suffisants pour établir que Mme D...s'est ensuite maintenue en France avec son mari et son enfant ; qu'un deuxième enfant est né en France le 10 janvier 2013 ; que, dans ces conditions, le préfet de l'Hérault a porté au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts poursuivis par le refus de séjour ; qu'ainsi, il a méconnu tant les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
4. Considérant que le moyen retenu au point précédent suffisant à censurer le jugement attaqué et à annuler l'arrêté préfectoral, il n'est pas nécessaire d'examiner les autres moyens de la requête ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme D...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande ; que, par suite, le jugement et l'arrêté du 7 juin 2013 doivent être annulés ;
Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :
6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une décision dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ; qu'aux termes de l'article L. 911-3 du même code : " Saisie de conclusions en ce sens, la juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet " ;
7. Considérant que, eu égard à ses motifs, l'exécution du présent arrêt implique nécessairement que le préfet des Alpes-Maritimes délivre à Mme D...une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ; que, dès lors, il y a lieu d'enjoindre au préfet de délivrer un tel titre de séjour à l'intéressée dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt ; que, dans les circonstance de l'affaire, les conclusions tendant à ce que cette injonction soit assortie d'une astreinte doivent être rejetées ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
8. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;
9. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'Etat le versement à Mme D...de la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nice du 31 octobre 2013 et l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes en date du 7 juin 2013 sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet des Alpes-Maritimes de délivrer à Mme D...une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à Mme D...la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...D..., épouseC..., et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.
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N° 13MA04553
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