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12/03/2015 | FRANCE | N°14MA00258

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 12 mars 2015, 14MA00258


Vu, enregistrée le 17 janvier 2014, la requête présentée pour Mme B...A..., demeurant ...par Me Perollier, avocat ; Mme A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1306153 du 18 décembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 29 août 2013 par laquelle le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 29 août 2013 susme

ntionnée ;

3°) d'enjoindre au préfet, à titre principal, de lui délivrer un tit...

Vu, enregistrée le 17 janvier 2014, la requête présentée pour Mme B...A..., demeurant ...par Me Perollier, avocat ; Mme A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1306153 du 18 décembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 29 août 2013 par laquelle le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du 29 août 2013 susmentionnée ;

3°) d'enjoindre au préfet, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour portant mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, à titre subsidiaire, de lui délivrer un titre de séjour " salarié " dans les mêmes conditions et à titre infiniment subsidiaire, de réexaminer sa demande dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour dans le délai de 10 jours à compter de cette notification ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 800 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, qui sera versée à Me Perollier en cas d'obtention de l'aide juridictionnelle en contrepartie de sa renonciation à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle ;

Elle soutient que :

- de nationalité gabonaise, elle est entrée en France le 8 octobre 2004 pour y suivre ses études de master 2 " Management et stratégie d'entreprises ", sous couvert d'un visa D mention étudiant ;

- elle a obtenu un titre de séjour " étudiant ", régulièrement renouvelé jusqu'au 31 octobre 2011 ;

- à la fin de ses études, elle a obtenu une autorisation provisoire de séjour en qualité d'étudiant en recherche d'emploi, valable jusqu'au 31 juillet 2012, renouvelé jusqu'au 1er avril 2013 ;

- elle s'est présentée personnellement, avec le courrier du 28 mai 2013 de son conseil, en préfecture, qui a visé ce courrier, pour demander le 28 mai 2013 un titre de séjour à titre principal, au titre de la régularisation exceptionnelle par le travail sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou du pouvoir de régularisation du préfet, en demandant un examen de sa situation au regard des critères de la circulaire du 28 novembre 2012 du ministre de l'intérieur, à titre subsidiaire sur le fondement de l'article L. 313-11 7° du même code ;

- par décision litigieuse du 29 août 2013, le préfet a rejeté sa demande ;

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé qu'elle n'établissait pas s'être présentée personnellement à la préfecture, comme l'exige l'article R. 311-1 du code, pour déposer une demande spécifique sur le fondement de l'article L. 313-11 7° du code et que, par suite, aucune décision implicite de rejet de sa demande n'avait pu naître sur ce fondement ;

- le préfet dans son mémoire en défense ne le conteste pas ;

- en outre, le fondement de la demande peut toujours être précisé après cette présentation personnelle par lettre recommandée avec accusé de réception ;

- c'est aussi à tort que le tribunal a estimé qu'elle ne démontrait pas avoir établi le centre de ses intérêts privés et familiaux en France au sens de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle vit régulièrement en France depuis 9 ans ;

- elle a travaillé de 2011 à 2013 en qualité d'intérimaire ;

- dès lors qu'elle a déposé une demande de titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code, le préfet aurait dû se prononcer d'abord sur un titre de séjour " vie privée et familiale " et seulement ensuite, sur un titre de séjour " salarié " ;

- le préfet a commis une erreur manifeste dans l'appréciation de sa vie privée, en estimant qu'elle ne faisait valoir aucun motif exceptionnel au sens de l'article L. 313-14 du code ;

- la décision implicite de rejet de sa demande présentée sur le fondement de l'article L. 313-11 7° n'est pas motivée et n'a pas fait l'objet d'un examen par le préfet ;

- elle a droit à un titre de séjour sur ce fondement ;

- elle bénéficie d'une promesse d'embauche en contrat à durée déterminée pour une durée de deux mois du 15 juillet au 15 septembre 2013 ;

- elle allait suivre une formation de gestionnaire de paie ;

- elle a loué un appartement ;

- elle a déclaré ses revenus en 2010, 2011 et 2012 ;

- elle est donc très bien intégrée socialement et professionnellement en France ;

- l'obligation de quitter le territoire français méconnait pour les mêmes motifs l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu l'ordonnance du 7 mai 2014 par laquelle l'instruction a été close le 30 septembre 2014 ;

Vu, enregistré le 19 juin 2014, le mémoire complémentaire présenté pour Mme A... par Me Perollier, qui persiste dans ses précédentes écritures et soutient en outre que :

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que le préfet n'était pas tenu d'examiner sa situation en prenant en compte les critères de la circulaire du 28 novembre 2012 du ministre de l'intérieur ;

- ils n'ont pas répondu à ce moyen opérant ;

- le point 2.2.3 a) de cette circulaire, relatif à l'admission au séjour au titre du travail, établit une ligne directrice dont elle peut se prévaloir pour obtenir un titre de séjour " salarié " ;

- le point 2.2.3 c) qui permet à un étranger en situation irrégulière ayant eu comme elle une activité d'intérimaire lui permettait aussi d'obtenir un titre de séjour ;

Vu, enregistré le 15 juillet 2014, le mémoire présenté par le préfet des Bouches-du-Rhône, qui conclut au rejet de la requête ;

Le préfet fait valoir que :

- la Cour voudra bien se reporter à son mémoire en défense de première instance ;

- la demande de la requérante ne concernait qu'une admission exceptionnelle au séjour par le travail ;

- en tout état de cause, il a examiné la vie privée et familiale de la requérante dans le cadre de l'examen de sa demande ;

Vu, enregistré le 25 septembre 2014, le mémoire présenté pour Mme A...par Me Perollier, qui persiste dans ses précédentes écritures ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle du tribunal de grande instance de Marseille, en date du 21 février 2014 accordant à Mme A...l'aide juridictionnelle totale ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la 2ème chambre de la Cour dispensant la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 29 janvier 2015 :

- le rapport de Mme Carassic, rapporteure ;

1. Considérant que MmeA..., de nationalité gabonaise, interjette appel du jugement du 18 décembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 29 août 2013 par laquelle le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire et a fixé le pays de destination ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

2. Considérant qu'il résulte des pièces du dossier et notamment de l'objet de la demande écrite du 28 mai 2013 remise par la requérante au guichet de la préfecture à l'appui de sa présentation dans les services préfectoraux que Mme A...a présenté sa demande de titre de séjour sur le double fondement d'une part, à titre principal, de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et du pouvoir général de régularisation du préfet et, d'autre part, à titre subsidiaire, de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour obtenir un titre de séjour " vie privée et familiale " ; que le préfet dans ses écritures d'appel soutient à nouveau que la requérante n'a présenté sa demande de titre de séjour que sur le fondement de l'admission exceptionnelle au séjour par le travail et qu'il n'avait donc pas à examiner sa demande de titre de séjour sur le fondement de la vie privée et familiale ; que ce faisant, le préfet n'a pas procédé à l'examen particulier de la situation de Mme A..., qui est fondée, pour ce motif, à demander l'annulation du refus de titre de séjour litigieux ; que cette annulation entraine, par voie de conséquence, celle de la décision faisant obligation de quitter le territoire et fixant le pays de renvoi ;

3. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement attaqué, que Mme A...est fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant d'un délai d'exécution. " ; que selon les dispositions de l'article L. 911-3 : " Saisie de conclusions en ce sens, la juridiction peut assortir, dans la même décision, l'injonction prescrite en application des articles L. 911-1 et L. 911-2 d'une astreinte qu'elle prononce dans les conditions prévues au présent livre et dont elle fixe la date d'effet. " ;

5. Considérant que, eu égard au motif d'annulation ci-dessus retenu, l'exécution du présent arrêt n'implique pas nécessairement que le préfet délivre un titre de séjour à Mme A..., mais simplement qu'il procède à un réexamen de la situation de l'intéressée ; que, par suite, il y a lieu d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de délivrer à l'intéressée une autorisation provisoire de séjour dans le délai de 8 jours et de procéder au réexamen de sa demande dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

6. Considérant qu'aux termes de l'article 37 de la loi susvisée du 10 juillet 1991 modifiée par la loi susvisée du 29 décembre 2013 : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou qui perd son procès, et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, à payer à l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, partielle ou totale, une somme qu'il détermine et qui ne saurait être inférieure à la part contributive de l'Etat, au titre des honoraires et frais non compris dans les dépens que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. Si l'avocat du bénéficiaire de l'aide recouvre cette somme, il renonce à percevoir la part contributive de l'Etat. S'il n'en recouvre qu'une partie, la fraction recouvrée vient en déduction de la part contributive de l'Etat (...). " ;

7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Etat à verser la somme de 1 800 euros au titre de ces dispositions à Me Perollier qui, s'il recouvre cette somme, renoncera à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du 18 décembre 2013 du tribunal administratif de Marseille est annulé.

Article 2 : L'arrêté du 29 août 2013 du préfet des Bouches-du-Rhône est annulé.

Article 3 : Il est enjoint au préfet des Bouches-du-Rhône de procéder au réexamen de la demande de Mme A...dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans le délai de huit jours suivant cette notification.

Article 4 : L'Etat versera à Mme A...la somme de 1 800 (mille huit cents) euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 à Me Perollier qui, s'il recouvre cette somme, renoncera à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A...est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...A..., à Me Perollier et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône et au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Marseille.

Délibéré après l'audience du 29 janvier 2015, où siégeaient :

- M. Vanhullebus, président de chambre,

- MmeC..., première conseillère,

- Mme Carassic, première conseillère,

Lu en audience publique, le 12 mars 2015.

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N° 14MA002582


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 14MA00258
Date de la décision : 12/03/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03-04 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour. Motifs.


Composition du Tribunal
Président : M. VANHULLEBUS
Rapporteur ?: Mme Marie-Claude CARASSIC
Rapporteur public ?: Mme CHAMOT
Avocat(s) : PEROLLIER

Origine de la décision
Date de l'import : 13/08/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-03-12;14ma00258 ?
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