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12/03/2015 | FRANCE | N°13MA01215

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 12 mars 2015, 13MA01215


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille le 22 mars 2013 sous le n° 13MA01215, présentée pour M. F...B...élisant domicile... ;

M. B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1301048 du 20 février 2013 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 février 2013 portant obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire et le plaçant en rétention administrative pour une durée de cinq jours ;

2°) d'annuler, pour e

xcès de pouvoir, ladite décision ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de r...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille le 22 mars 2013 sous le n° 13MA01215, présentée pour M. F...B...élisant domicile... ;

M. B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1301048 du 20 février 2013 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 février 2013 portant obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire et le plaçant en rétention administrative pour une durée de cinq jours ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, ladite décision ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de réexaminer sa demande dans le délai d'un mois à compter de la notification de la décision ;

4°) de lui verser une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

..........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-marocain en matière de séjour et d'emploi du 1er janvier 1994 ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 19 février 2015 le rapport de M. Marcovici, rapporteur ;

1. Considérant que M.B..., de nationalité marocaine, relève appel du jugement du 20 février 2013 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 15 février 2013 par laquelle le préfet des Bouches-du-Rhône l'a obligé à quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, et l'a placé en rétention administrative pour une durée de cinq jours ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que le tribunal administratif de Marseille a omis de statuer sur le moyen invoqué par M. B...tiré de ce que l'arrêté du 15 février 2013 a été signé par une personne incompétente ; que, par suite, le jugement attaqué doit être annulé ;

3. Considérant qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. B...devant le tribunal administratif ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

4. Considérant, que, par l'article 1er de l'arrêté n° 2012356-0004 en date du 21 décembre 2012, le préfet des Bouches-du-Rhône a donné délégation de signature à M. C... E..., directeur du service de l'immigration et de l'intégration dans les matières relevant de ses attributions, et notamment, s'agissant des " refus de séjour, obligations de quitter le territoire, décisions relatives au délai de départ volontaire et décisions fixant le pays de destination " et aux " interdictions de retour sur le territoire français " ; que, par son article 2, le même arrêté donne délégation de signature à M. A...D..., chef du bureau des mesures administratives, du contentieux et des examens spécialisés, pour " signer tout document relatif à la procédure de délivrance de titre de séjour " ; que cet arrêté a été publié au recueil des actes administratifs de la préfecture ; que, par suite, M. D...disposait d'une délégation régulière l'autorisant à signer l'arrêté attaqué ;

5. Considérant que la décision litigieuse indique que M. B...ne justifie pas être entré régulièrement sur le territoire ; qu'elle mentionne sa situation familiale et également qu'il n'a pas demandé la délivrance d'un titre de séjour ; que la décision vise les dispositions pertinentes du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'elle est ainsi suffisamment motivée en droit et en fait ;

6. Considérant que le défaut d'examen de la situation du requérant au regard des stipulations de l'accord franco-marocain, est, comme l'ont relevé les premiers juges, sans incidence sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

7. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) " ;

8. Considérant, qu'il ressort des pièces du dossier que M.B..., né en 1970, est célibataire et sans enfant ; qu'il soutient résider en France depuis l'année 2002 ; qu'il fait valoir que, suite au décès de ses deux parents, il fait preuve d'une particulière intégration en France ; que si sa soeur réside régulièrement en France, et s'il établit avoir travaillé en France pendant plusieurs années, au demeurant sous un nom d'emprunt, il n'établit pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où il a vécu la majeure partie de son existence ; qu'en dépit des éléments d'insertion professionnelle dont il fait état, la décision du préfet n'a pas, dans les circonstances de l'espèce, porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale, qui se limite comme il a été dit, à la présence en France de sa soeur et à l'exercice d'une activité professionnelle ; qu'il suit de là que, contrairement à ce que soutient le requérant, le préfet n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni l'article L. 313-11 7° du code précité ; que pour les mêmes motifs, la décision attaquée n'est pas entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée ;

9. Considérant que M. B...fait également valoir que la décision a été prise en méconnaissance du droit d'être entendu, qu'il tient des principes généraux du droit de l'Union européenne et de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; que, toutefois, une atteinte au droit d'être entendu n'est susceptible d'affecter la régularité de la procédure à l'issue de laquelle la décision faisant grief est prise que si la personne concernée a été privée de la possibilité de présenter des éléments pertinents qui auraient pu influer sur l'appréciation portée par le préfet sur sa situation, ce qu'il lui revient, le cas échéant, d'établir devant la juridiction saisie ; que M. B...se borne à faire valoir qu'il n'a pas été informé de l'éventualité d'une mesure d'éloignement, ni mis à même de présenter ses observations sur cette mesure, sans invoquer aucun élément précis qu'il aurait été empêché de faire valoir ; que, par suite, les moyens tirés de la méconnaissance du droit d'être entendu, en tant qu'il constitue un principe général du droit de l'Union européenne, et de la méconnaissance de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ne peuvent, en tout état de cause, être accueillis ;

Sur la légalité du refus d'octroi d'un délai de départ volontaire :

10. Considérant qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) II. Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d' un délai de trente jours à compter de sa notification (...) Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français (...) 3. S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque est regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : (...) f. Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentations suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité, ou qu'il a dissimulé les éléments de son identité, ou qu'il n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente, ou qu'il s' est précédemment soustrait aux obligations prévues par les articles L. 513-4, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2 (...) " ;

11. Considérant que M. B...fait valoir qu'il dispose de garanties exceptionnelles de représentation pour qu'il lui soit accordé un délai de départ volontaire ; que, pour refuser d'accorder un tel délai à l'intéressé, le préfet des Bouches-du-Rhône a retenu, aux termes de la décision attaquée, que le requérant était dépourvu d'un passeport en cours de validité, qu'il s'est soustrait à l'exécution d'une obligation de quitter le territoire français du 9 novembre 2011, qu'il a refusé à trois reprises d'embarquer sur les vols programmés vers le Maroc le 27 novembre 2012, le 30 novembre 2012 et le 10 décembre 2012 et a été condamné par le tribunal correctionnel d'Aix-en-Provence à trois mois d'emprisonnement le 7 janvier 2013 ; qu'il s'ensuit que le préfet des Bouches-du-Rhône a pu estimer que le requérant ne présentait pas de garanties de représentation suffisantes et qu'il existait un risque que ce dernier se soustraie à la mesure d'éloignement dont il a fait l'objet ; que les moyens tirés de l'insuffisance de motivation de la décision attaquée et du défaut d'examen particulier de la situation du requérant doivent également être écartés ;

Sur la légalité de la décision de placement en rétention administrative :

12. Considérant qu'aux termes de l'article L. 551-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " A moins qu'il ne soit assigné à résidence en application de l'article L. 561-2, l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français peut être placé en rétention par l'autorité administrative dans des locaux ne relevant pas de l'administration pénitentiaire, pour une durée de cinq jours, lorsque cet étranger : (...) 6° Fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise moins d'un an auparavant et pour laquelle le délai pour quitter le territoire est expiré ou n'a pas été accordé " ;

13. Considérant que, comme il a été vu, M. B...s'était précédemment soustrait à une mesure d'éloignement et qu'il a refusé d'embarquer trois fois pour des vols à destination du Maroc et qu'il a été condamné par le tribunal correctionnel d'Aix-en-Provence ; qu'il ne justifiait par ailleurs pas de garanties de représentation suffisantes, quand bien même il établirait disposer d'une adresse stable ; qu'ainsi, le préfet des Bouches-du-Rhône pouvait régulièrement décider de le placer en rétention ;

14. Considérant que M. B...soutient que la décision de placement en rétention administrative méconnait les dispositions précitées de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 dès lors que le préfet ne l'a pas invité à présenter des observations avant de prendre la décision litigieuse à son encontre ; que, toutefois, par les dispositions de l'article L. 512-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le législateur a entendu déterminer l'ensemble des règles de procédure, administratives et contentieuses, auxquelles sont soumises les décisions portant obligation de quitter le territoire français ainsi que les décisions qui l'accompagnent, telle la décision décidant le placement en rétention administrative ; qu'il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions sus-rappelées est inopérant et doit être écarté ;

15. Considérant, que le requérant ne peut utilement se prévaloir des dispositions de l'article 15 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008, dès lors que la directive a régulièrement été transposée en droit interne par la loi du 16 juin 2011 ;

16. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à solliciter l'annulation de la décision du préfet des Bouches-du-Rhône du 15 février 2013 ; qu'ainsi ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Marseille du 20 février 2013 est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. B...devant le tribunal administratif de Marseille est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. F...B....

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.

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N° 13MA01215 2

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13MA01215
Date de la décision : 12/03/2015
Type d'affaire : Administrative

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. GUERRIVE
Rapporteur ?: M. Laurent MARCOVICI
Rapporteur public ?: Mme FELMY
Avocat(s) : GONAND

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-03-12;13ma01215 ?
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