La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

03/02/2015 | FRANCE | N°13MA01218

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 03 février 2015, 13MA01218


Vu I°), sous le n° 13MA01218, la requête, enregistrée le 26 mars 2013, présentée pour la SARL Nice Fitness, dont le siège est situé 5 ruelle d'Angely à Nice, représentée par son liquidateur amiable, et M. F...B..., pris en sa qualité de liquidateur amiable de la SARL Nice Fitness, demeurant..., par MeG..., de la SCP Courtignon - Pensa Bezzina ;

La SARL Nice Fitness et M. B...demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000996 du 6 mars 2013 par lequel le tribunal administratif de Nice les a condamnés à garantir la société Carilis pour la somme de 242 93

6,15 euros ainsi qu'à lui verser la somme de 1 000 euros au titre de l'article...

Vu I°), sous le n° 13MA01218, la requête, enregistrée le 26 mars 2013, présentée pour la SARL Nice Fitness, dont le siège est situé 5 ruelle d'Angely à Nice, représentée par son liquidateur amiable, et M. F...B..., pris en sa qualité de liquidateur amiable de la SARL Nice Fitness, demeurant..., par MeG..., de la SCP Courtignon - Pensa Bezzina ;

La SARL Nice Fitness et M. B...demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000996 du 6 mars 2013 par lequel le tribunal administratif de Nice les a condamnés à garantir la société Carilis pour la somme de 242 936,15 euros ainsi qu'à lui verser la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de rejeter la demande de première instance présentée par la société Carilis ;

3°) de mettre à la charge de la société Carilis le versement de la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.............................................................................................................

Vu II°), sous le n° 13MA01990, la requête, enregistrée le 3 mai 2013, présentée pour la société Carilis, dont le siège est situé 148 avenue Gambetta à Paris (75020), prise en la personne de son représentant légal, par MeD..., de la SEL D...et Associés ;

La société Carilis demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000996 du 6 mars 2013 par lequel le tribunal administratif de Nice a condamné la SARL Nice Fitness et M.B..., pris en sa qualité de liquidateur de la SARL Nice Fitness, à la garantir pour la somme de 242 936,15 euros ainsi qu'à lui verser la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative en tant que ce jugement n'a pas condamné et n'a pas mis les frais exposés et non compris dans les dépens à la charge, outre de la SARL Nice Fitness représentée par son liquidateur, de M. B...personnellement en sa qualité de garant, et en ce qu'il n'a pas prononcé la solidarité entre les débiteurs ;

2°) de condamner la SARL Nice Fitness, représentée par son liquidateur, solidairement avec M. B...au paiement de la somme de 242 936,15 euros majorée des intérêts capitalisés à compter du titre exécutoire n° 950 émis le 21 juillet 2006 ainsi qu'aux entiers dépens et au versement de la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

3°) en toute hypothèse, de mettre à la charge solidaire de la SARL Nice Fitness, représentée par son liquidateur, et de M. B...les entiers dépens de l'instance ainsi que la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.............................................................................................................

Vu les autres pièces des dossiers ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu le code civil ;

Vu le code général de la propriété des personnes publiques ;

Vu le code général des collectivités territoriales ;

Vu le décret n° 78-704 du 3 juillet 1978 relatif à l'application de la loi n° 78-9 du 4 janvier 1978 modifiant le titre IX du livre III du code civil ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 janvier 2015 :

- le rapport de M. Chanon, premier conseiller ;

- les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public ;

- les observations de MeA..., pour la SARL Nice Fitness et M.B..., et de Me C..., pour la commune de Nice ;

Après avoir pris connaissance de la note en délibéré, enregistrée le 16 janvier 2015, présentée pour la SARL Nice Fitness et M.B..., par MeE... ;

Après avoir pris connaissance de la note en délibéré, enregistrée le 21 janvier 2015, présentée pour la société Carilis, par MeD... ;

1. Considérant que les requêtes n° 13MA01218, présentée pour la SARL Nice Fitness et M.B..., et n° 13MA01990, présentée pour la société Carilis, sont relatives à un même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

2. Considérant que, par une " convention de concession de service public industriel et commercial comprenant occupation de la portion du domaine public communal dénommé : bâtiment Jean Bouin ", signée le 1er juillet 1994, la commune de Nice a confié à la société France Patinoires l'entretien des installations et l'exploitation du complexe sportif Jean Bouin, pour une durée de 10 ans ; que, le 30 juillet 1999, la société France Patinoires, aux droits de laquelle vient la société Carilis, a conclu un " contrat de sous-occupation du domaine public " avec M.B..., gérant de la SARL Nice Fitness, relatif à l'occupation d'une partie des locaux d'une superficie de 1 500 m2, constituée de quatre salles de sport, un centre de remise en forme, des vestiaires et un hall d'attente ; que les deux conventions sont arrivées à expiration le 30 juin 2004 ; que la commune de Nice a alors conclu une convention d'affermage avec la société " Financière sport et loisirs - Gesclub " pour l'exploitation du complexe sportif, en remplacement de la société Carilis ; qu'en raison des dégradations constatées dans la partie du complexe sportif qui était occupée par la SARL Nice Fitness, la commune de Nice a fait procéder à des travaux de remise en état d'octobre 2004 à janvier 2005 ; que la commune a émis à l'encontre de la société Carilis, le 10 août 2006, un titre exécutoire pour obtenir le paiement de la somme de 242 936,15 euros TTC correspondant au montant des travaux réalisés ;

3. Considérant que, par un jugement du 18 mai 2010, le tribunal administratif de Nice a notamment annulé le titre exécutoire du 10 août 2006 ; que, par un arrêt du 1er octobre 2012, la Cour a annulé ce jugement dans cette mesure ; que, par un jugement du 6 mars 2013, le tribunal a condamné la société Nice Fitness et M.B..., pris en sa qualité de liquidateur de la société Nice Fitness, à garantir la société Carilis pour la somme de 242 936,15 euros ; que, sous le n° 13MA01218, la SARL Nice Fitness et M.B..., pris en sa qualité de liquidateur amiable de celle-ci, relèvent appel de ce jugement ; que, la société Carilis, par la voie de l'appel incident dans la même affaire et par la voie de l'appel principal sous le n° 13MA019090, demande l'annulation du jugement en tant qu'il n'a pas condamné au paiement de la somme de 242 936,15 euros et au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, outre la SARL Nice Fitness représentée par son liquidateur, M. B...personnellement en sa qualité de garant, et en tant qu'il n'a pas prononcé la solidarité entre les débiteurs ;

Sur les écritures de la commune de Nice :

4. Considérant que la Cour a communiqué les requêtes à la commune de Nice qui avait, comme le jugement attaqué le mentionne au point 12, la qualité d'observateur en première instance ; que, la commune, contre laquelle aucune conclusion n'est dirigée, n'ayant pas davantage la qualité de partie à l'instance d'appel, ses conclusions tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

Sur la régularité du jugement :

S'agissant de l'appel de la SARL Nice Fitness et de M.B... ; :

En ce qui concerne la compétence de la juridiction administrative :

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2331-1 du code général de la propriété des personnes publiques : " Sont portés devant la juridiction administrative les litiges relatifs : 1° Aux autorisations ou contrats comportant occupation du domaine public, quelle que soit leur forme ou leur dénomination, accordées ou conclus par les personnes publiques ou leurs concessionnaires (...) " ; que l'article L. 1411-1 du code général des collectivités territoriales dispose : " Une délégation de service public est un contrat par lequel une personne morale de droit public confie la gestion d'un service public dont elle a la responsabilité à un délégataire public ou privé, dont la rémunération est substantiellement liée aux résultats de l'exploitation du service. Le délégataire peut être chargé de construire des ouvrages ou d'acquérir des biens nécessaires au service. Les délégations de service public des personnes morales de droit public relevant du présent code sont soumises par l'autorité délégante à une procédure de publicité permettant la présentation de plusieurs offres concurrentes, dans des conditions prévues par un décret en Conseil d'Etat (...) " ; que l'existence d'une délégation de service public suppose de caractériser la volonté d'une personne publique d'ériger des activités d'intérêt général en mission de service public et d'en confier la gestion à un tiers, sous son contrôle ;

6. Considérant qu'il résulte de l'instruction que le complexe sportif Jean Bouin est une dépendance du domaine public communal ; que le sport relève des activités de service public ; qu'ainsi qu'il a été dit au point 2, la convention conclue entre la commune de Nice et la société France Patinoires s'intitule " convention de concession de service public industriel et commercial " ; que celle-ci a fait suite à une procédure de publicité et mise en concurrence ; que l'article 3 de la convention prévoit que le délégataire ne dispose pas du choix des activités assurées dans les locaux mis à disposition et que la création de nouvelles activités par la société France Patinoires doit recueillir l'accord de la commune de Nice ; que l'article 6 impose des contraintes d'exploitation à la société en réservant des horaires d'ouverture précis pour les élèves relevant des établissements scolaires de la commune et la mise à disposition de certaines installations à des clubs sportifs municipaux ; que l'article 14 dote la commune de Nice d'un pouvoir de contrôle financier, portant en particulier sur le contrôle des objectifs définis par les articles 3 à 8 et 15, et d'un pouvoir de contrôle des activités du concessionnaire s'agissant de la sécurité du service public concédé et de la continuité de son exploitation ; que l'article 20 stipule que la rémunération du concessionnaire est constituée par les ressources que procure l'exploitation des installations sportives, ces ressources étant réputées assurer l'équilibre financier de la convention ; que les tarifs pratiqués par le concessionnaire sont fixés par l'autorité concédante en application des articles 20 et 21 ; que l'ensemble de ces éléments caractérise la volonté de la commune de Nice d'ériger l'exploitation du complexe sportif Jean Bouin en mission de service public et d'en confier la gestion la société France Patinoires, sous son contrôle ; que, par suite, le " contrat de sous-occupation du domaine public ", mentionné au point 2, conclu entre cette dernière, titulaire d'une délégation de service public, et M.B..., en qualité de gérant de la SARL Nice Fitness, relève, en application des dispositions de l'article L. 2331-1 du code général de la propriété des personnes publiques, et sans qu'il soit besoin de rechercher s'il a pour effet de subdéléguer en partie la délégation de service public, de la compétence de la juridiction administrative ; que, dès lors, l'exception d'incompétence opposée par la SARL Nice Fitness et M. B...ne peut être accueillie ;

7. Considérant qu'il suit de là que, contrairement à ce qui est soutenu, la juridiction administrative est également compétente pour condamner, le cas échéant, M. B...tant en sa qualité de liquidateur de la SARL Nice Fitness qu'à titre personnel, si la société ou lui-même à titre personnel sont responsables de manquements aux obligations résultant de la convention d'occupation du domaine public en date du 30 juillet 1999 ;

8. Considérant, cependant, que M. B...est fondé à soutenir qu'il ne peut, dans le cadre du présent contentieux, être condamné à raison de fautes commises dans l'exercice de ses fonctions de liquidateur, qui ne relèvent que de l'autorité judiciaire ; que les conclusions de la société Carilis, en tant qu'elles sont fondées sur de telles fautes, pour avoir omis de la prévenir des opérations de liquidation, l'empêchant ainsi de préserver ses droits, et pour ne pas avoir provisionné la somme de 242 936,15 euros dans les comptes de la liquidation, doivent donc être rejetées comme portées devant une juridiction incompétente pour en connaître ;

En ce qui concerne la procédure suivie devant le tribunal :

9. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 5 du code de justice administrative : " L'instruction des affaires est contradictoire (...) " ;

10. Considérant que la SARL Nice Fitness et M. B...font valoir que le tribunal a fondé sa décision sur l'arrêt de la Cour en date du 1er octobre 2012, mentionné au point 3, produit par la société Carilis à l'appui d'un mémoire enregistré le 31 janvier 2013 dont les pièces annoncées ne leur ont pas été communiquées ; que, toutefois, si le jugement fait mention à deux reprises de cet arrêt, qui pouvait au demeurant être recherché sur Légifrance, il n'est pas fondé sur celui-ci mais sur les termes du contrat de sous-occupation du domaine public du 30 juillet 1999 ; qu'en outre, il était loisible à l'avocat de la SARL Nice Fitness et M. B..., auquel a été fourni un accès au système informatique de suivi de l'instruction lors de l'enregistrement de la requête, de vérifier l'état de la procédure à tout moment, notamment au reçu de l'avis d'audience, et, le cas échéant, de s'adresser au greffe pour que des pièces qu'il n'aurait pas reçues lui soient de nouveau envoyées ; qu'il ressort des mentions du jugement attaqué que les intéressés étaient représentés à l'audience et que le rapporteur y a présenté publiquement, en application de l'article R. 731-3 du code de justice administratif, le rapport dans lequel sont mentionnées les productions des parties ; qu'il ne ressort d'aucun élément du dossier que leur avocat aurait contesté, dans les observations qu'il a été amené à présenter oralement après le rapport, et pas davantage dans la note en délibéré qu'il a produite le 7 février 2013, avoir reçu communication des pièces en cause ; que, dans ces circonstances, la communication doit être regardée comme ayant été effectuée ; qu'ainsi, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 5 du code de justice administrative et des stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doivent être écartés ;

11. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article R. 711-3 du code de justice administrative : " Si le jugement de l'affaire doit intervenir après le prononcé de conclusions du rapporteur public, les parties ou leurs mandataires sont mis en mesure de connaître, avant la tenue de l'audience, le sens de ces conclusions sur l'affaire qui les concerne (...) " ;

12. Considérant que, pour l'application de ces dispositions et eu égard à leurs objectifs, il appartient au rapporteur public de préciser, en fonction de l'appréciation qu'il porte sur les caractéristiques de chaque dossier, les raisons qui déterminent la solution qu'appelle, selon lui, le litige, et notamment d'indiquer, lorsqu'il propose le rejet de la requête, s'il se fonde sur un motif de recevabilité ou sur une raison de fond, et de mentionner, lorsqu'il conclut à l'annulation d'une décision, les moyens qu'il propose d'accueillir ; que la communication de ces informations n'est toutefois pas prescrite à peine d'irrégularité de la décision ; qu'il suit de là que la circonstance que le sens des conclusions du rapporteur public porté sur l'application Sagace indiquait seulement " Satisfaction totale ou partielle " est dépourvue d'influence sur la régularité du jugement ;

S'agissant de l'appel de la société Carilis :

13. Considérant que la société Carilis a présenté en première instance des conclusions tendant à ce que M. B...soit condamné à titre personnel solidairement avec la SARL Nice Fitness, représentée par son liquidateur, en soutenant que la solidarité résultait des stipulations de la convention du 30 juillet 1999 prévoyant que l'intéressé restait personnellement responsable de l'application de la convention vis-à-vis d'elle ; que les premiers juges n'ont pas répondu à ce moyen, qui n'était pas inopérant ; que, dès lors, la société Carilis est fondée à soutenir, dans la limite de ses conclusions d'appel, que le jugement attaqué doit être annulé ;

14. Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu de statuer sur les conclusions de la SARL Nice Fitness et M. B...par la voie de l'effet dévolutif et sur les conclusions de la société Carilis par la voie de l'évocation ;

Sur le bien-fondé de l'action en garantie :

S'agissant du principe et du montant de la garantie :

15. Considérant que la convention du 30 juillet 1999 est intitulée " contrat de sous-occupation du domaine public " ; qu'elle mentionne en préambule que, conformément à la convention de concession, " France patinoires est mandatée pour céder à des tiers une partie des activités dont elle ne souhaite pas assurer l'exploitation directe " ; que la convention n'autorise pas la SARL Nice Fitness à exercer une autre activité que l'usage des salles de sport et de remise en forme et prévoit que les horaires d'ouverture des locaux ainsi que la modification des clés d'accès aux locaux sont soumis à l'approbation de la société France Patinoires et que la SARL Nice Fitness ne peut ni céder, ni sous-louer les locaux mis à sa disposition ; que la convention précise expressément que sa résiliation est de droit en cas de résiliation de la convention du 1er juillet 1994 et qu'elle est soumise au respect des dispositions du règlement intérieur prévu à l'article 13 de la même convention ; que, sur le plan financier, le contrat de sous-occupation du domaine public se borne à prévoir le versement d'un loyer dont le montant est fixé compte tenu des investissements que le preneur s'engage à réaliser, sans mentionner les tarifs ; que ces éléments, en particulier en l'absence de l'exercice d'un droit de regard sur l'activité exercée par la SARL Nice Fitness, ne sont pas susceptibles de caractériser l'existence d'une subdélégation de service public mais d'une simple concession d'occupation domaniale ; que, par suite, la société Carilis n'est pas fondée à faire valoir que les aménagements réalisés par la SARL Nice Fitness seraient constitutifs de biens de retour ;

16. Considérant, toutefois, qu'aux termes des " conditions financières " du contrat de sous-occupation du domaine public du 30 juillet 1999 : " Le présent contrat est consenti moyennant le versement d'un loyer établi dans les conditions suivantes : 1) Compte tenu des investissements que le preneur s'engage à réaliser et notamment pour la mise en conformité des lieux, un loyer annuel en principal d'un montant de 300 000 F hors taxes (... ) sera versé au Palais des Sports [à la société Carilis] (...). 4) Compte tenu des investissements que réalise le preneur pour un montant estimé à 1 000 000 de francs, [la société Carilis] s'engage, en cas de rupture anticipée du contrat de concession [la] liant avec la ville de Nice, à indemniser le preneur d'une somme de 150 000 euros hors taxes par année restant à couvrir [sic], si toutefois, la ville de Nice ou l'organisme chargé de gérer le palais des sports maintenait le preneur en activité, cette clause serait nulle et sans effet ; dans le cas contraire, les agencements resteraient acquis au Palais des Sports " ;

17. Considérant qu'il résulte de ces stipulations que la redevance annuelle d'occupation du domaine public est fixée en prenant en compte les investissements estimés à un million de francs que la SARL Nice Fitness s'est engagée à réaliser pour mettre les locaux en conformité et que, si la convention arrive à son terme du 30 juin 2004 sans faire l'objet d'un renouvellement, les agencements ainsi réalisés restent acquis au gestionnaire du domaine public sans indemnité ; que, par suite et contrairement à ce qu'elle soutient, la SARL Nice Fitness était tenue en l'espèce, sur le seul fondement de ces stipulations contractuelles et indépendamment de celles de la délégation de service public qui ne lui sont pas opposables, de laisser gratuitement en place les aménagements qu'elle a réalisés dès lors que la convention d'occupation du domaine public est parvenue à son terme contractuel sans faire l'objet d'un renouvellement ;

18. Considérant qu'aucune stipulation de la convention d'occupation du domaine public, ni aucun principe, n'imposait à la société Carilis d'adresser à la SARL Nice Fitness, avant l'expiration de la convention, une mise en demeure de laisser les agencements en place, ou, début juillet 2004, de désigner un expert en vue d'évaluer l'état des lieux et le chiffrage du coût de remise en état ;

19. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier de première instance que les factures dont la commune de Nice a demandé le paiement à la société Carilis, par le titre exécutoire du 10 août 2006, sont relatives à divers travaux immobiliers d'entretien et de réparation effectués dans le complexe sportif Jean Bouin entre les mois d'octobre 2004 et janvier 2005 pour un montant total de 242 936,15 euros TTC correspondant pour 9 941,25 euros à des travaux de maçonnerie, pour 26 558,97 euros à des travaux de peinture, pour 83 249,57 euros à des travaux de " menuiserie/casiers ", pour 422,67 euros à des travaux de création d'une banque d'accueil, pour 5 076,70 euros à des prestations de nettoyage, pour 26 634,82 euros à des travaux de plomberie, pour 36 158,07 euros à des travaux de climatisation et pour 54 894,10 euros à des travaux d'électricité ; qu'il résulte de l'instruction, et notamment du constat d'huissier établi le 4, 5, 6 et 7 juillet 2004 en présence de M.B..., en sa qualité de représentant de la société Nice Fitness, que les locaux mis à disposition de la SARL Nice Fitness étaient dans un état dégradé au terme de la convention d'occupation du domaine public ; qu'en particulier des portes de vestiaires, des bacs de douches, des sanitaires, des lavabos, des cloisons, des casiers avaient été enlevés, des miroirs cassés, le comptoir de réception avait été déposé et des fils électriques avaient été sectionnés ; que, si, lors du constat de l'huissier, M. B... a seulement expressément reconnu avoir fait démonter un climatiseur qu'il avait fait installer, récupéré la pompe d'un jacuzzi qu'il avait fait remplacer, déposé une vitrine publicitaire ainsi que des cloisons et appareillages dans le vestiaire près du jacuzzi, il n'a pas contesté l'affirmation d'un représentant de la commune de Nice selon laquelle il n'aurait pas dû démonter les agencements qu'il a réalisés, ce qui doit être entendu comme l'ensemble des agencements effectués ; qu'ainsi qu'il a été dit aux points 16 et 17, la SARL Nice Fitness s'était engagée à réaliser des investissements importants en contrepartie d'un loyer minoré, et en particulier des travaux de remise en état des lieux ; que, si M. B...et la SARL Nice Fitness soutiennent dans l'instance que la société a réalisé des travaux d'un montant de 260 000 euros HT, d'ailleurs sans en justifier, ils ne peuvent sérieusement faire valoir qu'ils ont rendu des locaux entièrement rénovés ; qu'il ne résulte pas de l'instruction que les dégradations correspondant au travaux effectués par la commune de Nice auraient été commises postérieurement au constat d'huissier ; que, dans ces conditions, la société Carilis est fondée à demander, à titre de garantie de la somme mise à sa charge par la commune correspondant aux travaux de remise en état du complexe sportif, le paiement de la somme totale de 242 936,15 euros ;

S'agissant des personnes responsables :

20. Considérant qu'aux termes de l'article 1843 du code civil : " Les personnes qui ont agi au nom d'une société en formation avant l'immatriculation sont tenues des obligations nées des actes ainsi accomplis, avec solidarité si la société est commerciale, sans solidarité dans les autres cas. La société régulièrement immatriculée peut reprendre les engagements souscrits, qui sont alors réputés avoir été dès l'origine contractés par celle-ci " ; qu'aux termes de l'article 6 du décret du 3 juillet 1978 : " L'état des actes accomplis pour le compte de la société en formation avec l'indication, pour chacun d'eux, de l'engagement qui en résulterait pour la société est présenté aux associés avant la signature des statuts. Cet état est annexé aux statuts, dont la signature emportera reprise des engagements par la société, lorsque celle-ci aura été immatriculée. En outre, les associés peuvent, dans les statuts ou par acte séparé, donner mandat à l'un ou plusieurs d'entre eux, ou au gérant non associé qui a été désigné, de prendre des engagements pour le compte de la société. Sous réserve qu'ils soient déterminés et que les modalités en soient précisées par le mandat, l'immatriculation de la société emportera reprise de ces engagements par ladite société. La reprise des engagements souscrits pour le compte de la société en formation ne peut résulter, après l'immatriculation de la société, que d'une décision prise, sauf clause contraire des statuts, à la majorité des associés " ;

21. Considérant que la convention du 30 juillet 1994 a été conclue par M. B...en qualité de gérant de la SARL Nice Fitness, laquelle n'a été constituée que début septembre 1994 et était donc à l'époque en formation, sans que cette dernière précision ne soit apportée ; que la convention stipule en préliminaire que " M. B...pourra choisir pour l'objet du présent contrat, la structure juridique de son choix restant personnellement responsable vis-à-vis de l'application de la présente convention. Il en informera [la société Carilis] " ;

22. Considérant qu'il résulte de l'instruction que les associés fondateurs de la SARL Nice Fitness ont annexé aux statuts signés le 2 septembre 1994 un " état des actes accomplis pour le compte de la société en formation " qui mentionne exclusivement le contrat de sous occupation du domaine public du 30 juillet 1999 avec ses caractéristiques principales, et, par suite, l'engagement qui en résulte pour la société au sens des dispositions de l'article 6 du décret du 3 juillet 1978, valant reprise des engagements ; que, cependant, ni les dispositions de l'article 1843 du code civil, ni la reprise des engagements par la société alors que la convention n'indique pas qu'elle était alors en formation, ne font obstacle à ce que M. B..., ainsi qu'il en a pris l'engagement contractuel exprès, reste personnellement responsable, solidairement avec la SARL Nice Fitness, qui est une société commerciale, de l'exécution de la convention du 30 juillet 1994 ;

23. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la SARL Nice Fitness, représentée par son liquidateur, et M. B... à titre personnel doivent être condamnés solidairement à payer à la société Carilis la somme de 242 936,15 euros à titre de garantie ;

Sur les intérêts et leur capitalisation :

24. Considérant que la société Carilis ne saurait demander les intérêts à compter de la date d'un titre exécutoire émis à son encontre par la commune de Nice, qui ne constitue pas une sommation de payer, au sens de l'article 1153 du code civil, adressée à la SARL Nice Fitness et M. B... ; qu'elle a droit aux intérêts légaux sur la somme de 242 936,15 euros à compter du 11 mars 2010, date d'introduction de la demande de première instance ; qu'à cette date il n'était pas dû au moins une année d'intérêts ; que, dès lors, conformément aux dispositions de l'article 1154 du code civil, il y a lieu de faire droit à la demande de capitalisation des intérêts seulement à compter du 11 mars 2011 ainsi qu'à chaque échéance annuelle à compter de cette dernière date ;

Sur les conclusions tendant à la suppression de certaines écritures :

25. Considérant que, contrairement à ce que soutiennent la SARL Nice Fitness et M. B..., les termes employés en page 18 du mémoire de la société Carilis enregistré le 2 août 2013 n'excèdent pas les limites de la controverse entre parties dans le cadre d'une procédure contentieuse ; que, dès lors, il n'y a pas lieu d'en prononcer la suppression par application des dispositions de l'article 41 de la loi du 29 juillet 1881, reproduites à l'article L. 741-2 du code de justice administrative ;

Sur les autres conclusions des parties :

26. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société Carilis, qui n'est pas la partie perdante dans les présentes instances, la somme que la SARL Nice Fitness et M. B... demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;

27. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions des articles R. 761-1 et L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge solidaire de la SARL Nice Fitness, représentée par son liquidateur, et de M. B..., à titre personnel, le versement à la société Carilis de la somme globale de 3 000 euros au titre de la contribution pour l'aide juridique et des frais exposés et non compris dans les dépens, tant en première instance qu'en appel ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nice du 6 mars 2013 est annulé en tant qu'il n'a pas condamné au paiement de la somme de 242 936,15 euros et au titre des frais exposés et non compris dans les dépens, outre la SARL Nice Fitness représentée par son liquidateur, M. B... personnellement, et en tant qu'il n'a pas prononcé la solidarité entre les débiteurs.

Article 2 : La SARL Nice Fitness, représentée par son liquidateur, et M. B... à titre personnel, sont condamnés à payer à la société Carilis la somme de 242 936,15 euros (deux cent quarante deux mille neuf cent trente-six euros et quinze centimes) assortie des intérêts au taux légal à compter du 11 mars 2010, capitalisés au 11 mars 2011 et à chaque échéance annuelle à compter de cette date.

Article 3 : La partie non annulée du jugement du tribunal administratif de Nice du 6 mars 2013 est réformée en ce qu'elle a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : La SARL Nice Fitness, représentée par son liquidateur, et M. B..., à titre personnel, verseront solidairement à la société Carilis la somme globale de 3 000 euros au titre des articles L. 761-1 et R. 761-1 du code de justice administrative, tant en première instance qu'en appel.

Article 5 : Le surplus des conclusions des parties et de la commune de Nice est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Nice Fitness, représentée par son liquidateur, à M. F...B..., d'une part, pris en sa qualité de liquidateur amiable de la SARL Nice Fitness, et, d'autre part, à titre personnel, à la société Carilis et à la commune de Nice.

''

''

''

''

2

N° 13MA01218,13MA01990

bb


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13MA01218
Date de la décision : 03/02/2015
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Marchés et contrats administratifs - Notion de contrat administratif - Nature du contrat - Contrats ayant un caractère administratif - Contrats relatifs au domaine public.

Marchés et contrats administratifs - Notion de contrat administratif - Diverses sortes de contrats - Délégations de service public.


Composition du Tribunal
Président : M. BEDIER
Rapporteur ?: M. René CHANON
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : SCP COURTIGNON - BEZZINA - LE GOFF

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2015-02-03;13ma01218 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award