Vu le recours, enregistré le 16 juillet 2013 par le préfet des Alpes-Maritimes, sis en cette qualité route de Grenoble à Nice Cedex 3 (06286) ;
Le préfet des Alpes-Maritimes demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1300927 du 14 juin 2013 par lequel le tribunal administratif de Nice a annulé l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 26 février 2013 refusant d'admettre M. D...A...B...au séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. A...B...devant le tribunal administratif de Nice ;
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Vu le jugement attaqué ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention relative aux droits de l'enfant signée à New-York le 26 janvier 1990 ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu la circulaire NOR INTK1229185C du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 sur les conditions d'examen des demandes d'admission au séjour déposées par des ressortissants étrangers en situation irrégulière dans le cadre des dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la décision du président de la 2ème chambre de la Cour dispensant la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu, au cours de l'audience publique du 27 novembre 2014, le rapport de Mme Carassic, rapporteure ;
1. Considérant que le préfet des Alpes-Maritimes demande l'annulation du jugement du 14 juin 2013 par lequel le tribunal administratif de Nice a annulé son arrêté du 26 février 2013 refusant d'admettre M. A...B..., de nationalité capverdienne, au séjour et lui faisant obligation de quitter le territoire français ;
2. Considérant que, pour annuler la décision litigieuse, les premiers juges ont estimé que le demandeur établissait avoir créé en France sa propre cellule familiale et que la décision litigieuse était ainsi entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle ; que le préfet soutient en appel que cette cellule familiale ne peut être considérée comme intense, stable et ancienne, de nature à lui permettre la délivrance d'un titre de séjour "vie privée et familiale", notamment sur le fondement de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
3. Considérant qu'il appartient au préfet, saisi d'une demande de titre de séjour par un étranger en vue de régulariser sa situation, de vérifier que la décision de refus qu'il envisage de prendre ne comporte pas de conséquences d'une gravité exceptionnelle sur la situation personnelle de l'intéressé et n'est pas ainsi entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
4. Considérant qu'il n'est pas contesté par le préfet que M. A...B...est entré en France le 19 avril 2004 muni d'un visa Schengen valable du 11 avril 2004 au 10 juin 2004 ; que, si le demandeur dit produire la copie intégrale de son passeport pour établir qu'il n'a pas quitté la France depuis 2004, certaines pages de son passeport sont manquantes ; que ni les copies du carnet de santé de son enfant né en 2008, ni les nombreuses pièces produites établies au seul nom de son épouse, Mme C...ou Borges Duarte ou au nom de sa belle-famille, ni les avis d'imposition établis à son nom, ni les factures d'achat ne permettent d'établir la présence de M. A...B...à partir de 2004 ; que son épouse et compatriote a fait l'objet d'un refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français datée du même jour que M. A... B...; que les deux enfants issus de leur union nés en 2008 et 2011 sont en bas âge ; qu'il n'est pas établi, ni même allégué que sa fille ainée, scolarisée en maternelle, ne pourrait pas suivre une scolarité normale dans son pays d'origine ; que rien ne fait obstacle à ce que le couple poursuive sa vie familiale dans son pays d'origine ; que M. A...B...n'établit pas être dépourvu d'attaches dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de 27 ans ; que, dans ces conditions, et alors même qu'il bénéficierait d'une promesse d'embauche en qualité de maçon, qu'il serait bien intégré et que son épouse a de nombreux membres de sa famille vivant régulièrement en France, M. A...B...n'établit pas, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, avoir transféré le centre de sa vie privée et familiale en France ; que, par suite, la décision litigieuse n'est pas entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de sa vie privée et familiale ;
5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le préfet est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Nice, par le jugement attaqué, a annulé son arrêté du 26 février 2013 au motif de l'erreur manifeste d'appréciation qui l'entacherait ;
6. Considérant, toutefois, qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. A...B...devant le tribunal administratif de Nice et devant la Cour ;
7. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; et qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7º A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée " ;
8. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit au point 4., M. A...B...n'établit pas être entré en France en 2004 ; que son épouse est en situation irrégulière comme lui et a fait l'objet d'un refus de titre de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire français du même jour ; que les deux enfants issus de leur union sont en bas âge ; que le demandeur n'invoque aucun obstacle pour que leur vie familiale se poursuive dans son pays d'origine ; qu'il n'est pas dépourvu d'attaches dans son pays d'origine où il a vécu jusqu'à l'âge de 36 ans ; que, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, notamment des conditions d'entrée et de séjour et alors même que M. A...B...bénéficierait d'une promesse d'embauche en qualité de maçon, le moyen tiré de ce que le préfet aurait méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des doits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en lui refusant un titre de séjour doit être écarté ;
9. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la fille aînée du demandeur serait scolarisée en France depuis au moins trois ans à la date de la décision litigieuse ; que M. A... B...ne peut ainsi en tout état de cause pas se prévaloir de la circulaire du 28 novembre 2012 pour obtenir un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ;
10. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11(...) peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 (...).L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. " ; que les dispositions dérogatoires de cet article, qui permettent au préfet de délivrer un titre de séjour au regard d'une appréciation discrétionnaire de la situation de l'étranger même non pourvu d'un visa de long séjour, ne créent aucun droit au profit de l'intéressé ; que M. A...B..., entré pour la première fois en France à l'âge de 36 ans selon ses dires, qui fait état, au demeurant sans l'établir, de l'ancienneté de son séjour en France depuis 2004, de la présence en France de sa femme en situation irrégulière et de ses jeunes enfants et de sa bonne intégration en France, n'établit pas par les pièces qu'il produit que son admission au séjour répondrait à des considérations humanitaires ou se justifierait au regard de motifs exceptionnels au sens des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il résulte des éléments qui précèdent que le préfet des Alpes-Maritimes n'était pas tenu de saisir la commission du titre de séjour prévue aux articles L. 312-1 et L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que M. A...B...ne justifie pas résider habituellement en France depuis plus de 10 ans ;
11. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant signée à New-York le 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces dispositions, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;
12. Considérant qu'ainsi qu'il a été dit précédemment, il n'est pas établi que la fille ainée du demandeur, scolarisée en moyenne section de classe de maternelle, ne pourrait pas suivre une scolarité normale dans son pays d'origine ; qu'eu égard à cette faculté, la décision litigieuse ne méconnaît pas l'intérêt supérieur de cet enfant ;
13.Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet des Alpes-Maritimes est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a annulé son arrêté en date du 26 février 2013 refusant de délivrer un titre de séjour "vie privée et familiale" à M. A...B..., lui a enjoint de délivrer à ce dernier un titre de séjour et a mis à la charge de l'Etat la somme de 700 euros à verser à M. A...B...en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; que doivent être rejetées par voie de conséquence les conclusions d'appel de M. A...B...tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du 14 juin 2013 du tribunal administratif de Nice est annulé.
Article 2 : La demande présentée devant le tribunal administratif de Nice par M. A...B...et ses conclusions d'appel tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D...A...B...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.
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N° 13MA02864 2
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