Vu la requête, enregistrée le 8 juillet 2013, présentée pour la caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault dont le siège est au Pôle inter-caisses des recours contre tiers 29, cours Gambetta à Montpellier Cedex 9 (34934), par la SCP d'Avocats C...- Leygue ; la caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault demande à la Cour :
1°) d'annuler l'article 3 du jugement n° 1100748 du 18 juin 2013 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de la caisse primaire d'assurance maladie du Gard tendant à ce que ses droits soient réservés suite au décès de Mme A...lors de sa prise en charge au centre hospitalier régional universitaire de Montpellier ;
2°) de condamner le centre hospitalier universitaire régional de Montpellier à lui verser la somme de 33 596,45 euros en sa qualité de tiers payeur et la somme de 1 015 euros au titre de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ;
3°) de mettre à la charge du centre hospitalier la somme de 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
.......................................
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de la santé publique ;
Vu le code de la sécurité sociale ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 25 septembre 2014 :
- le rapport de Mme Menasseyre, rapporteure,
- les conclusions de Mme Chamot, rapporteure publique,
Après avoir pris connaissance de la note en délibéré, enregistrée le 30 septembre 2014, présentée pour la caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault par MeC... ;
1. Considérant que, par jugement du 18 juin 2013, le tribunal administratif de Montpellier, après avoir condamné le centre hospitalier régional universitaire de Montpellier à réparer entre les mains de M.A..., son veuf et de MmeF..., sa mère et M.F..., son frère, les préjudices consécutifs au décès de Mme A...survenu à l'occasion de sa prise en charge dans cet établissement, a rejeté la demande de la caisse primaire d'assurance maladie du Gard tendant à ce que ses droits soient réservés ; que la caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault relève appel de ce jugement ; que M. A...et M. et Mme F...demandent, pour leur part, qu'il soit fait droit à leurs prétentions initiales ;
Sur les conclusions présentées par la caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault :
2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 811-1 du code de justice administrative : " Toute partie présente dans une instance devant le tribunal administratif ou qui y a été régulièrement appelée, alors même qu'elle n'aurait produit aucune défense, peut interjeter appel contre toute décision juridictionnelle rendue dans cette instance (...) " ;
3. Considérant que la caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault, à laquelle la victime n'était pas affiliée, n'était pas partie au litige en première instance et n'y a pas été appelée ; qu'elle est sans qualité pour relever appel du jugement rendu ; que la caisse, qui, d'une part, s'est vu communiquer le mémoire présenté par les consorts A...et F...opposant cette fin de non-recevoir et, d'autre part, a été informée par la Cour de ce qu'elle était susceptible de retenir cette irrecevabilité, se prévaut de l'existence d'un pôle inter-caisses mutualisant la gestion des recours contre les tiers, et de la notification du jugement à ce pôle ; qu'elle n'a, toutefois, nullement justifié en temps utile d'une telle mutualisation ; qu'en toute hypothèse, elle ne démontre pas qu'elle ait reçu, en tant que caisse gestionnaire des recours, la possibilité de solliciter pour son propre compte, comme elle le fait en l'espèce, le remboursement des débours engagés par la caisse d'affiliation de la victime ; qu'il en résulte que, à défaut pour la caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault de justifier de sa qualité et de son intérêt pour agir, sa requête ne peut qu'être rejetée comme irrecevable ;
Sur les conclusions présentées par M.A... :
4. Considérant qu'aux termes de l'article R. 811-2 du code de justice administrative : " Sauf disposition contraire, le délai d'appel est de deux mois. Il court contre toute partie à l'instance à compter du jour où la notification a été faite à cette partie dans les conditions prévues aux articles R. 751-3 à R. 751-4-1. " ; qu'il ressort des pièces du dossier que le jugement du 18 juin 2013 du tribunal administratif de Dijon a été régulièrement notifié à M. A...le 19 juin 2013 ; que le délai d'appel était donc expiré lorsque M. A...a présenté ses conclusions, le 17 juillet 2014 ;
5. Considérant que si, eu égard au lien qu'établissent les dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale entre la détermination des droits de la victime d'un accident et celle des droits de la caisse de sécurité sociale à laquelle elle est affiliée, l'appel régulièrement exercé par la caisse contre un jugement ayant statué sur des conclusions indemnitaires de la victime et de la caisse dirigées contre l'auteur de l'accident ouvre à la victime la possibilité de former appel sans condition de délai en reprenant sa demande de première instance, augmentée le cas échéant pour tenir compte d'aggravations des préjudices postérieures au jugement, il en va autrement lorsqu'aucun appel n'a été régulièrement exercé par ladite caisse ; qu'en l'espèce la caisse primaire d'assurance maladie du Gard n'a pas relevé appel du jugement ; que les conclusions, irrecevables, présentées par la caisse primaire de l'Hérault n'ont pu ouvrir à M. A...la possibilité de former appel après l'expiration du délai d'appel ; qu'il en résulte que les conclusions présentées par l'intéressé, tant en son nom propre que pour le compte de ses enfants sont tardives et doivent être rejetées ;
Sur les conclusions incidentes dirigées par le centre hospitalier de Montpellier contre l'article 1er du jugement :
6. Considérant que les conclusions du centre hospitalier de Montpellier présentées après l'expiration du délai de recours contentieux et dirigées contre M. A...par la voie du recours incident ne seraient recevables qu'au cas où les conclusions de l'appelant principal seraient elles-mêmes recevables ; que la présente décision rejetant les conclusions de M. A...pour irrecevabilité, les conclusions dirigées par le centre hospitalier de Montpellier contre ce dernier par la voie de l'appel incident ne sont pas recevables ;
Sur les conclusions présentées par M. et MmeF... :
7. Considérant que le jugement n'a pas été notifié à M. et Mme F...qui ne peuvent ainsi se voir opposer aucune forclusion ; que par suite, sont également recevables les conclusions présentées par le centre hospitalier universitaire de Montpellier après l'expiration du délai d'appel et tendant à l'annulation de la partie du jugement faisant droit aux prétentions de Mme B... F...et de M. E...F... ; que le litige se trouve, ainsi, circonscrit à la réparation du préjudice moral de la mère et du frère de la victime ;
8. Considérant que le tribunal a jugé que la responsabilité du centre hospitalier régional universitaire de Montpellier était engagée à raison des fautes commises dans la prise en charge d'Angélique A...le 10 avril 2009 et que ces fautes avaient fait perdre à l'intéressée une chance sur deux d'échapper à une aggravation de son état et au décès ; qu'ils ont estimé que la juste réparation du préjudice moral subi par sa mère et son frère à raison de ce décès s'élevait à la somme de 6 600 euros soit, compte tenu du coefficient de perte de chance retenue, une indemnisation de 3 300 euros mise à la charge de l'hôpital pour chacun d'eux ;
9. Considérant que, se fondant sur le rapport rédigé par l'expert désigné par le juge des référés du tribunal, les premiers juges ont considéré que si la prise en charge en service de cardiologie avait été correctement effectuée et si la décision d'interrompre la grossesse était médicalement justifiée et acceptée par la patiente correctement informée, le choix thérapeutique de faire une anesthésie locorégionale rachi-péri combinée était formellement contre-indiqué et que l'organisation et le fonctionnement du service avaient été à l'origine d'un retard de prise en charge de la complication cardiaque ; que, pour contester ces différents points, l'hôpital a versé aux débats un rapport critique très documenté faisant valoir que pour une porteuse d'une cardiopathie primitive de type hypertension artérielle telle celle que présentait MmeA..., le recours à l'anesthésie péri-rachidienne serait recommandé et serait à l'origine de moindres risques de mortalité qu'une anesthésie générale ; qu'il fait également valoir que l'expert désigné par le juge des référés, qui n'a pas souhaité s'adjoindre un sapiteur anesthésiste, se réfère, pour dire que le procédé d'anesthésie était formellement contre-indiqué, à une seule étude portant sur les techniques analgésiques en matière d'accouchement, et non d'interruption médicale de grossesse, concernant des femmes porteuses de pathologies cardiaques congénitales, et non de pathologies primitives d'apparition récente comme en l'espèce ; que l'hôpital fait également valoir que le délai de mise en route d'une circulation extra corporelle pour un arrêt cardiaque serait habituellement compris entre 30 et 100 minutes selon les recommandations de sociétés savantes de 2008 et que son efficacité au cas d'espèce serait attestée par plusieurs indices tels que la reprise rapide d'un rythme, le réveil de la patiente puis la levée de cette assistance circulatoire ; que, dans ces conditions, les conclusions, parfois nuancées, de l'expert désigné par le juge des référés ne suffisent pas à écarter les éléments fermes, précis et documentés versés aux débats par le centre hospitalier selon lesquels la prise en charge de la patiente serait exempte de faute et justifient que la Cour procède à des investigations complémentaires ;
10. Considérant, par suite, que l'état du dossier ne permettant pas à la Cour de statuer sur les conclusions relatives à l'indemnisation du préjudice moral de M. et Mme F...demeurant... ;
11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que ni la caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault, ni M. A...ne sont recevables à contester le jugement attaqué ; que le centre hospitalier n'est pas davantage recevable à le contester en tant qu'il indemnise M.A... ;
Sur les conclusions présentées par l'organisme social et M. A...tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
12. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que le centre hospitalier universitaire de Montpellier qui n'a pas, dans la présente instance et en dépit du rejet de ses conclusions incidentes, la qualité de partie perdante vis-à-vis de M. A...ou de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault, verse une quelconque somme à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault ou à M. A...;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault est rejetée.
Article 2 : Les conclusions de M. A...et les conclusions incidentes du centre hospitalier universitaire de Montpellier dirigées contre l'article 1er du jugement du tribunal administratif de Montpellier du 18 juin 2013 sont rejetées.
Article 3 : Il sera, avant de statuer sur les conclusions relatives à l'indemnisation du préjudice moral de Mme B...F...et de M. E...F..., procédé à une expertise médicale contradictoire avec le centre hospitalier de Montpellier en vue de :
1°) se faire communiquer tous documents relatifs à l'état de santé, à la prise en charge et au décès de Mme A...et, notamment, tous documents relatifs au suivi médical, aux actes de soins, et aux diagnostics pratiqués sur elle lors de son hospitalisation au centre hospitalier universitaire de Montpellier ; convoquer et entendre les parties et tous sachants ; procéder à l'examen sur pièces du dossier médical de Mme A...;
2°) donner un avis motivé sur le point de savoir si les examens pratiqués, les diagnostics établis et les traitements, interventions et soins prodigués ont été consciencieux, attentifs, diligents et conformes aux données acquises de la science et s'ils étaient adaptés à l'état d'Angélique A...; donner notamment un avis sur la technique d'anesthésie retenue et sur le délai de mise en place d'une assistance circulatoire ;
3°) de manière générale, réunir tous les éléments devant permettre de déterminer si des fautes médicales, des fautes de soins ou des fautes dans l'organisation des services ont été commises ; rechercher si les diligences nécessaires pour l'établissement d'un diagnostic exact ont été mises en oeuvre ; rechercher si les interventions et actes médicaux pratiqués ont été exécutés conformément aux règles de l'art ; déterminer les raisons de la dégradation de l'état de santé de Mme A...ayant conduit à son décès ;
4°) donner un avis sur le point de savoir si le ou les manquements éventuellement constatés ont fait perdre à Mme A...une chance de survie ; donner son avis sur l'ampleur de la chance perdue par Mme A...d'éviter le décès en la quantifiant ;
5°) de fournir toutes précisions complémentaires utile à la solution du litige.
Article 4 : L'expert sera désigné par le président de la Cour. Il accomplira sa mission dans les conditions prévues par les articles R. 621-2 à R. 621-14 du code de justice administrative. En application des dispositions de l'article R. 621-9 du code de justice administrative, il déposera son rapport au greffe en deux exemplaires dans un délai de trois mois à compter de la prestation de serment et en notifiera une copie aux parties intéressées.
Article 5 : Tous droits, moyens et conclusions des parties sur lesquels il n'est pas statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'en fin d'instance.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault, à M. D... A..., à Mme B...F..., à M. E... F...et au centre hospitalier régional universitaire de Montpellier.
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N°13MA02687 2