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02/10/2014 | FRANCE | N°13MA00728

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 02 octobre 2014, 13MA00728


Vu la requête, enregistrée le 21 février 2013, présentée pour M. B... D..., demeurant au..., par la SCP C...et Associes ; M. D... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1204453 du 22 janvier 2013 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Hérault du 21 septembre 2012 refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le Maroc comme pays à destination duquel il serait éloigné en cas d'exécution d'of

fice de cette mesure ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet...

Vu la requête, enregistrée le 21 février 2013, présentée pour M. B... D..., demeurant au..., par la SCP C...et Associes ; M. D... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1204453 du 22 janvier 2013 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa requête tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de l'Hérault du 21 septembre 2012 refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le Maroc comme pays à destination duquel il serait éloigné en cas d'exécution d'office de cette mesure ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", à titre subsidiaire de procéder au réexamen de sa situation, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 196 euros à verser à la SCP C...et associés, en cas d'admission à l'aide juridictionnelle, en application des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991, ou, à défaut, à lui verser au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention internationale relative aux droits de l'enfant, signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-marocain en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979, relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;

Vu la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 11 septembre 2014 :

- le rapport de Mme Menasseyre, rapporteure,

- les observations de M.D... ;

1. Considérant que M.D..., de nationalité marocaine, s'est marié dans son pays avec une Française le 5 mars 2011 ; que son mariage a été transcrit le 19 avril 2011 ; que l'intéressé est entré régulièrement en France le 16 juillet 2011 muni d'un visa de long séjour valant titre de séjour valable jusqu'au 12 juillet 2012 ; qu'il en a sollicité le renouvellement en juillet 2012 sur le triple fondement des articles L. 313-11 4° et L. 313-12, de l'article L. 313-11 7° et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que cette demande a été rejetée par arrêté du préfet de l'Hérault du 21 septembre 2012 portant obligation de quitter le territoire français à destination du Maroc ; que M. D... relève appel du jugement du 22 janvier 2013 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande dirigée contre cet arrêté ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 3 de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs, celle-ci " doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit ... 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 313-12 du même code : " (...) Le renouvellement de la carte de séjour délivrée au titre du 4° de l'article L. 313-11 est subordonné au fait que la communauté de vie n'ait pas cessé... Toutefois, lorsque la communauté de vie a été rompue en raison de violences conjugales qu'il a subies de la part de son conjoint, l'autorité administrative ne peut procéder au retrait du titre de séjour de l'étranger et peut en accorder le renouvellement (...) " ;

3. Considérant qu'il ressort de la demande de titre de séjour versée aux débats par le préfet de l'Hérault que celle-ci renvoyait explicitement au document établi par l'avocate de M. D... pour l'étayer et en préciser les fondements ; que ce document, produit par l'intéressé, exposait les trois fondements exposés au point 1. et précisait que l'épouse de M. D... s'était montrée violente en proférant à son égard des insultes racistes et en portant atteinte à son intégrité physique ; qu'en se bornant à indiquer dans son arrêté : " M. A...qui déclare vivre séparé de son épouse depuis le 16 décembre 2011, celle-ci ayant déposé une requête en divorce dont l'audience aura lieu le 4 octobre 2012, ne remplit pas la condition d'une communauté de vie avérée pour se voir renouveler son titre de séjour " conjoint de français " ", le préfet de l'Hérault ne peut être regardé comme ayant exposé de façon claire, complète et précise, même implicitement, les raisons qui l'ont conduit à estimer que M. D...n'entrait pas dans les prévisions susmentionnées de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont il revendiquait le bénéfice ; que ce dernier ne pouvait, à la seule lecture de cet arrêté, comprendre les motifs qui ont conduit le préfet à écarter l'application en sa faveur de ces dispositions ; qu'il en résulte que l'appelant est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal a jugé que l'arrêté lui refusant un titre de séjour était suffisamment motivé au regard des prescriptions de la loi du 11 juillet 1979 ; que la décision portant obligation de quitter le territoire et celle fixant le pays de destination n'auraient pu légalement être prises en l'absence de ce refus illégal ; que l'annulation de ce refus emporte, par voie de conséquence, annulation de ces décisions ; qu'il en résulte que le jugement et l'arrêté contestés doivent être annulés ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 dudit code : "Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé" ;

5. Considérant que M. D...a également fait valoir que l'arrêté était entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle et qu'il méconnaissait tant les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'en l'espèce, eu égard à sa séparation d'avec son épouse et à son entrée récente en France, M.D..., qui n'établit pas avoir été victime de violences conjugales, ne justifie pas d'une vie privée et familiale, à laquelle le refus de titre porterait une atteinte excessive, par l'existence d'un domicile et la présence d'un frère, de sa mère dont il n'est pas établi que le frère du requérant ne puisse s'occuper, enfin de collatéraux au troisième degré, non plus que par l'existence d'un emploi salarié et d'une bonne intégration dans la société française ; qu'il suit de là que les moyens ainsi invoqués ne sont pas fondés ;

6. Considérant qu'aucun des moyens de la requête susceptibles d'impliquer la délivrance à M. D...d'un titre de séjour n'est fondé ; que ses conclusions tendant à cette fin ne peuvent, par voie de conséquence, qu'être rejetées ; qu'en revanche, il y a lieu, au regard du motif d'annulation retenu, de prescrire au préfet de l'Hérault de réexaminer la demande de titre de séjour de M.D..., dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ; que, dans les circonstances de l'affaire, les conclusions tendant à ce que cette injonction soit assortie d'une astreinte doivent être rejetées ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant qu'aux termes de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, modifiée par la loi du 29 décembre 2013 : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou qui perd son procès, et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, à payer à l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, partielle ou totale, une somme qu'il détermine et qui ne saurait être inférieure à la part contributive de l'Etat, au titre des honoraires et frais non compris dans les dépens que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. / Si l'avocat du bénéficiaire de l'aide recouvre cette somme, il renonce à percevoir la part contributive de l'Etat. S'il n'en recouvre qu'une partie, la fraction recouvrée vient en déduction de la part contributive de l'Etat. Si, à l'issue du délai de douze mois à compter du jour où la décision est passée en force de chose jugée, l'avocat n'a pas demandé le versement de tout ou partie de la part contributive de l'Etat, il est réputé avoir renoncé à celle-ci. " ;

8. Considérant que, par application de ces dispositions, il y a lieu de condamner l'Etat, qui est la partie perdante dans la présente instance, à verser une somme de 1 196 euros au titre des frais exposés à Me C...qui, si elle recouvre cette somme, renoncera à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 22 janvier 2013 et l'arrêté du préfet de l'Hérault du 21 septembre 2012 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de l'Hérault de procéder à un nouvel examen de la demande de titre de séjour de M. D...dans un délai de deux mois à compter du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera la somme de 1 196 (mille cent quatre vingt-seize) euros en application du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 à Me C...qui renoncera, si elle recouvre cette somme, à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Article 4 : Le surplus des conclusions de M. D... est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... D..., à Me C...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera transmise au préfet de l'Hérault.

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N° 13MA00728


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 13MA00728
Date de la décision : 02/10/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03-04 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour. Motifs.


Composition du Tribunal
Président : M. VANHULLEBUS
Rapporteur ?: Mme Anne MENASSEYRE
Rapporteur public ?: Mme CHAMOT
Avocat(s) : SCP DESSALCES et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2014-10-02;13ma00728 ?
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