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05/06/2014 | FRANCE | N°12MA00933

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 05 juin 2014, 12MA00933


Vu, enregistrée le 5 mars 2012, la requête présentée pour la caisse primaire d'assurance maladie du Var, représentée par son représentant légal en exercice, dont le siège est sis 42 rue Emile Ollivier, la Rode à Toulon (83082) par la SELU d'avocats Garry ; la caisse primaire d'assurance maladie du Var demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 0806358 - 0900980 du 20 décembre 2011 du tribunal administratif de Toulon en tant qu'il a, par son article 5, limité la condamnation de l'ONIAM à lui verser la somme de 10 730,36 euros en remboursements des débours et des

dépenses de santé futures que la caisse a exposés ou exposera pour Mme...

Vu, enregistrée le 5 mars 2012, la requête présentée pour la caisse primaire d'assurance maladie du Var, représentée par son représentant légal en exercice, dont le siège est sis 42 rue Emile Ollivier, la Rode à Toulon (83082) par la SELU d'avocats Garry ; la caisse primaire d'assurance maladie du Var demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 0806358 - 0900980 du 20 décembre 2011 du tribunal administratif de Toulon en tant qu'il a, par son article 5, limité la condamnation de l'ONIAM à lui verser la somme de 10 730,36 euros en remboursements des débours et des dépenses de santé futures que la caisse a exposés ou exposera pour Mme E...B..., son assurée, victime d'une contamination transfusionnelle par le virus de l'hépatite C ;

2°) de condamner l'ONIAM à lui verser la somme de 20 783,74 euros au titre de ses débours définitifs ;

3°) de condamner tout succombant à lui verser la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, outre les dépens de l'instance ;

- ..........................

Vu le jugement attaqué ;

Vu, enregistré le 15 juin 2012, le mémoire présenté pour l'Etablissement français du sang (EFS), représenté par son président en exercice, par la SELARL d'avocats Campocasso et associés, qui conclut au rejet de la requête de la caisse et des demandes de Mme B...en tant qu'elle tend à la condamnation de l'EFS à indemniser le préjudice subi et de condamner tout succombant aux entiers dépens ;

..............................

Vu, enregistré le 20 juin 2012, le mémoire présenté pour Mme B...par MeC..., qui conclut à titre principal, à la condamnation solidaire de l'ONIAM et de la SHAM à lui verser la somme de 20 000 euros, déduction faite de la provision de 10 000 euros déjà versée, à titre subsidiaire à lui verser la somme de 10 000 euros déduction faite de cette provision, à titre infiniment subsidiaire à la confirmation du jugement en tant qu'il a condamné l'ONIAM à lui verser la somme de 8 500 euros, déduction faite de cette provision et, en tout état de cause, à la condamnation de toute partie succombante à lui verser la somme de 2 000 euros au titre des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;

................................

Vu, enregistré le 21 février 2014, le mémoire présenté pour la société hospitalière d'assurances mutuelles (SHAM) représentée par son représentant légal en exercice, par Me F..., qui conclut à la confirmation du jugement qui l'a mise hors de cause ;

.........................

Vu, enregistré le 27 février 2014, le mémoire présenté pour l'ONIAM, représenté par son directeur en exercice, par la SELARL d'avocats de La Grange et Fitoussi, qui conclut, s'agissant des conclusions de MmeB..., à titre principal, au rejet de ses conclusions, à titre subsidiaire, à réduire ses prétentions à de plus justes proportions, et qui s'en remet à la sagesse de la Cour s'agissant de la requête de la caisse primaire d'assurance maladie du Var et en tout état de cause, au rejet de toutes les demandes de frais irrépétibles ;

......................................

Vu le moyen d'ordre public du 18 avril 2014 communiqué aux parties tiré de ce que la Cour est susceptible de soulever d'office l'irrecevabilité des conclusions présentées contre la société hospitalière d'assurances mutuelles (SHAM) pour être nouvelles en appel ;

Vu, enregistré le 25 avril 2014, le mémoire présenté pour Mme B...par Me C...en réponse à ce moyen d'ordre public ;

Vu, enregistré le 6 mai 2014, le mémoire présenté pour la société hospitalière d'assurances mutuelles (SHAM) par Me F...en réponse à ce moyen d'ordre public ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la décision du bureau d'aide juridictionnelle, en date du 4 septembre 2012, admettant Mme B...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ;

Vu la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, notamment son article 102 ;

Vu la loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008 de financement de la sécurité sociale pour 2009, notamment son article 67 ;

Vu la loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012 de financement de la sécurité sociale pour 2013 ;

Vu le code de la santé publique ;

Vu le code de la sécurité sociale ;

Vu les arrêtés des 10 novembre 2010 et 3 décembre 2012 relatifs aux montants de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 15 mai 2014 :

- le rapport de Mme Carassic, rapporteure ;

- les conclusions de Mme Chamot, rapporteure publique ;

- et les observations de Me D... substituant Me F...pour la SHAM et de Me A... de la Selarl Campocasso pour l'EFS ;

1. Considérant que MmeB..., née le 4 août 1955, a reçu une transfusion de produits sanguins le 9 octobre 1983 dans le service de maternité du centre hospitalier intercommunal de Toulon-La Seyne sur Mer, où elle avait été admise pour subir une césarienne en raison d'une fausse couche à l'origine d'une hémorragie ; que sa contamination par le virus de l'hépatite C a été diagnostiquée en août 2002 ; que la ponction biopsie hépatique réalisée le 9 septembre 2003 a mis en évidence une hépatite C de génotype 1b d'activité modérée mesurée par un score de métavir A2 F2 ; qu'estimant que la responsabilité de l'Etablissement français du sang était engagée en raison de l'origine transfusionnelle de sa contamination, elle a demandé au juge des référés la désignation d'un expert, qui a rendu son rapport le 31 mars 2008 ; que, par ordonnance du 4 juin 2009, le juge des référés a condamné l'Etablissement français du sang à lui verser une première provision de 5 000 euros ; que, par jugement avant dire droit du 6 avril 2011, le tribunal administratif de Toulon a condamné l'ONIAM, substitué à l'EFS, à lui verser une seconde provision de 5 000 euros et a ordonné une nouvelle expertise pour évaluer ses préjudices ; que l'expert a déposé son rapport le 21 octobre 2011 ; que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont mis hors de cause l'EFS et la SHAM, ont condamné l'ONIAM à verser la somme de 18 500 euros à MmeB..., sous déduction de la provision de 10 000 euros déjà versée, ont rejeté le surplus de la demande, ont condamné l'ONIAM à verser à la caisse primaire d'assurance maladie du Var la somme de 10 730,36 euros en remboursement de ses débours et des dépenses de santé futures de MmeB..., ainsi que la somme de 980 euros d'indemnité forfaitaire de gestion ; que ce jugement a mis les frais d'expertise à la charge de l'ONIAM ; qu'en appel, la caisse demande la réformation du jugement en tant qu'il a, par son article 5, limité la condamnation de l'ONIAM à lui verser la somme de 10 730,36 euros et demande que cette somme soit portée à 20 783,74 euros au titre de ses débours définitifs actuels et futurs ; que Mme B... demande la condamnation solidaire de l'ONIAM et de la SHAM à lui verser, à titre principal, la somme de 20 000 euros, déduction faite de la provision de 10 000 euros déjà versée, à titre subsidiaire, à lui verser la somme de 10 000 euros déduction faite de cette provision, à titre infiniment subsidiaire, à la confirmation du jugement en tant qu'il a condamné l'ONIAM à lui verser la somme de 8 500 euros, déduction faite de cette provision ; que l'ONIAM conclut, s'agissant des conclusions d'appel de MmeB..., à titre principal, au rejet des ces conclusions, à titre subsidiaire, à réduire ses prétentions à de plus justes proportions et s'en remet à la sagesse de la Cour s'agissant de la requête de la caisse primaire d'assurance maladie du Var ; que l'Etablissement français du sang conclut au rejet de la requête de la caisse et des conclusions de Mme B...en tant qu'elles tendent à la condamnation de l'EFS à indemniser le préjudice subi ; que la société hospitalière d'assurances mutuelles (SHAM) conclut à la confirmation du jugement qui l'a mise hors de cause ;

Sur la recevabilité des conclusions d'appel de Mme B...tendant à la condamnation solidaire de l'ONIAM et de la SHAM :

2. Considérant qu'en première instance, Mme B...ne dirigeait explicitement ses conclusions indemnitaires que contre l'ONIAM, substitué à l'EFS ; que ses conclusions tendant à la condamnation de la SHAM, assureur de cet établissement, sont nouvelles en appel et donc irrecevables ;

Sur la recevabilité des conclusions de la caisse :

3. Considérant, d'une part, qu'il résulte des dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale et du I de l'article 1er de l'ordonnance du 7 janvier 1959, ainsi que des articles 28 et 29 de la loi du 5 juillet 1985, que les recours des tiers payeurs, subrogés dans les droits d'une victime d'un dommage qu'ils indemnisent, s'exercent à l'encontre des auteurs responsables de l'accident ; que, dans l'exercice de la mission qui lui est confiée par ces articles, l'ONIAM est tenu d'indemniser au titre de la solidarité nationale et non en qualité d'auteur responsable ; qu'il en résulte que les tiers payeurs ayant versé des prestations à la victime d'un dommage entrant dans les prévisions de l'article L. 1221-14 ne peuvent exercer contre l'ONIAM le recours subrogatoire prévu par les articles L. 376-1 du code de la sécurité sociale, 1er de l'ordonnance du 7 janvier 1959 et 29 de la loi du 5 juillet 1985 ; qu'en revanche, les tiers payeurs peuvent exercer leur recours subrogatoire contre l'EFS en sa qualité de responsable du dommage ; qu'à cet égard, il se déduit des dispositions combinées des articles L. 1221-14, alinéa 7, et L. 3122-4 du code de la santé publique, relatives au recours subrogatoire ouvert à l'ONIAM, que, lorsque l'indemnisation de la victime d'une contamination transfusionnelle par le VHC est assurée au titre de la solidarité nationale, le législateur a entendu que la responsabilité de l'EFS ne puisse être recherchée par l'ONIAM et les tiers payeurs subrogés dans les droits de la victime, que dans les cas où le dommage est imputable à une faute de l'établissement de transfusion sanguine et à condition, en principe, que celui-ci bénéficie de la couverture d'une assurance ;

4. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 67 IV de la loi n° 2008-1330 du 17 décembre 2008, tel que modifié par l'article 72 II de la loi n° 2012-1404 du 17 décembre 2012 de financement de la sécurité sociale pour 2013 : " (...) Lorsque l'office a indemnisé une victime et, le cas échéant, remboursé des tiers payeurs, il peut directement demander à être garanti des sommes qu'il a versées par les assureurs des structures reprises par l'Etablissement français du sang en vertu du B de l'article 18 de la loi n° 98-535 du 1er juillet 1998 relative au renforcement de la veille sanitaire et du contrôle de la sécurité sanitaire de produits destinés à l'homme, de l'article 60 de la loi de finances rectificative pour 2000 (n° 2000-1353 du 30 décembre 2000) et de l'article 14 de l'ordonnance n° 2005-1087 du 1er septembre 2005 relative aux établissements publics nationaux à caractère sanitaire et aux contentieux en matière de transfusion sanguine, que le dommage subi par la victime soit ou non imputable à une faute. Les tiers payeurs ne peuvent exercer d'action subrogatoire contre l'office si l'établissement de transfusion sanguine n'est pas assuré, si sa couverture d'assurance est épuisée ou encore dans le cas où le délai de validité de sa couverture est expiré. " ; que l'article 72 III de cette même loi prévoit que cette disposition est d'application immédiate pour toutes les actions juridictionnelles en cours à la date du 1er juin 2010, sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée ;

5. Considérant qu'il n'est pas contesté qu'ainsi que le fait valoir l'ONIAM, le centre départemental de transfusion sanguine du Var était assuré en 1983 par la SHAM pour des sinistres relatifs à des contaminations au VHC par transfusion provenant des produits sanguins que ce centre a livrés ; que la SHAM ne conteste pas, dans son mémoire d'appel, la garantie due à son assuré, l'Etablissement français du sang ; que dès lors que l'EFS bénéficie d'une garantie auprès d'un assureur, la caisse primaire d'assurance maladie du Var dispose, conformément aux dispositions susvisées de l'article 67 IV, d'un recours subrogatoire contre l'ONIAM pour demander le remboursement des débours qu'elle a dû engager pour son assurée ;

Sur la régularité du jugement :

6. Considérant qu'aux termes de l'article R. 613-1 du code de justice administrative : "Le président de la formation de jugement peut, par une ordonnance, fixer la date à partir de laquelle l'instruction sera close (...)" ; qu'aux termes de l'article R. 613-2 de ce code : "Si le président de la formation de jugement n'a pas pris une ordonnance de clôture, l'instruction est close trois jours francs avant la date de l'audience indiquée dans l'avis d'audience prévu à l'article R. 711-2. Cet avis le mentionne (...)" ; qu'aux termes de l'article R. 613-3 du même code :"Les mémoires produits après la clôture de l'instruction ne donnent pas lieu à communication et ne sont pas examinés par la juridiction (...)" ; qu'il résulte de ces dispositions que l'instruction écrite est normalement close dans les conditions fixées par l'article R. 613-1 ou bien, à défaut d'ordonnance de clôture, dans les conditions fixées par l'article R. 613-2 ; que toutefois, lorsque, postérieurement à cette clôture, le juge est saisi d'un mémoire émanant de l'une des parties à l'instance, et conformément au principe selon lequel, devant les juridictions administratives, le juge dirige l'instruction, il lui appartient, dans tous les cas, de prendre connaissance de ce mémoire avant de rendre sa décision, ainsi que de le viser sans l'analyser ; que s'il a toujours la faculté, dans l'intérêt d'une bonne justice, d'en tenir compte - après l'avoir visé et, cette fois, analysé -, il n'est tenu de le faire, à peine d'irrégularité de sa décision, que si ce mémoire contient, soit l'exposé d'une circonstance de fait dont la partie qui l'invoque n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction écrite et que le juge ne pourrait ignorer sans fonder sa décision sur des faits matériellement inexacts, soit d'une circonstance de droit nouvelle ou que le juge devrait relever d'office ; que dans tous les cas où il est amené à tenir compte de ce mémoire, il doit - à l'exception de l'hypothèse particulière dans laquelle il se fonde sur un moyen qu'il devait relever d'office - le soumettre au débat contradictoire, soit en suspendant l'audience pour permettre à l'autre partie d'en prendre connaissance et de préparer ses observations, soit en renvoyant l'affaire à une audience ultérieure ;

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme B...a adressé un "mémoire récapitulatif n°3 (valant note en délibéré)", qui a été enregistré au tribunal administratif le 8 décembre 2011, après la clôture d'instruction fixée le 4 décembre 2011 à minuit en application de l'article R. 613-2 suscité du code de justice administrative et le jour même de l'audience publique fixée au 8 décembre 2011 ; que, contrairement à ce que soutient MmeB..., ce mémoire est visé, sans être analysé, dans la minute du jugement attaqué ; que ce mémoire de Mme B...ne faisait état d'aucune circonstance de fait dont la partie qui l'invoque n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction écrite et que le juge ne pourrait ignorer sans fonder sa décision sur des faits matériellement inexacts, ou de droit nouvelle ou que le juge devrait relever d'office rendant nécessaire la réouverture de l'instruction ; que par suite, et alors même que ce mémoire répondrait aux dernières écritures de l'ONIAM, produites après la clôture d'instruction et transmises directement par le conseil de l'office aux autres parties " pour information ", les premiers juges ont pu ne pas prendre en compte ce mémoire de Mme B...sans entacher leur jugement d'irrégularité pour ce motif ;

Sur la personne débitrice des indemnités :

8. Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 1142-22 du code de la santé publique dans sa rédaction issue du II de l'article 67 de la loi du 17 décembre 2008, entré en vigueur à la même date que le décret n° 2010-251 du 11 mars 2010 pris pour son application, soit le 1er juin 2010, l'office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) est chargé " de l'indemnisation des victimes de préjudices résultant de la contamination par le virus de l'hépatite C causée par une transfusion de produits sanguins ou une injection de médicaments dérivés du sang en application de l'article L. 1221-14 " ; qu'il résulte des dispositions de l'article L. 1221-14 issu du I du même article 67 de la loi du 17 décembre 2008 que la responsabilité de l'ONIAM est engagée dans les conditions prévues par l'article 102 de la loi du 4 mars 2002 ; qu'aux termes du IV du même article 67 : " A compter de la date d'entrée en vigueur du présent article, l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales se substitue à l'Etablissement français du sang dans les contentieux en cours au titre des préjudices mentionnés à l'article L. 1221-14 du code de la santé publique n'ayant pas donné lieu à une décision irrévocable " ;

9. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que, dans le contentieux qui opposait à la date du 1er juin 2010, Mme B...et l'établissement français du sang, l'ONIAM, qui a produit postérieurement à cette date un mémoire par lequel il faisait d'ailleurs état de cette substitution, est désormais substitué à ce dernier s'agissant de la réparation au titre de la solidarité nationale des victimes du VHC ;

Sur la responsabilité :

10. Considérant que l'ONIAM qui " s'en remet à la sagesse de la Cour " concernant la matérialité des transfusions de Mme B...en 1983 et l'imputabilité de sa contamination à ces transfusions, reconnues par le jugement susmentionné avant dire droit du 6 avril 2011, ne conteste pas que la responsabilité de l'EFS, auquel il s'est substitué ;

Sur le préjudice :

En ce qui concerne les préjudices patrimoniaux :

S'agissant des dépenses de santé :

11. Considérant que les premiers juges ont fixé à la somme de 8 755,60 euros, au titre des frais médicaux et pharmaceutiques pour la période du 1er août 2002 au 20 décembre 2010, les débours de la caisse présentant un lien de causalité direct entre la contamination et les séquelles imputables de MmeB..., et à la somme de 1 974,76 euros les dépenses de santé futures de Mme B...en lien avec le VHC pour les 2 années à venir, pour un total de 10 730,36 euros ; que les premiers juges, qui s'en expliquent dans le jugement attaqué, ont pu se fonder à juste titre sur un relevé provisoire de créance, produit par la caisse le 3 janvier 2011, pour la période du 1er août 2002 au 20 décembre 2010, pour fixer les dépenses de santé actuelles à la somme de 8 755,60 euros, alors que le relevé définitif de créance du 23 novembre 2011 produit par la caisse le 30 novembre 2011 faisait quant à lui état de débours pour un montant de 20 783,74 euros, en l'absence de toute justification de la caisse de l'augmentation du montant de ses débours en cours d'instance, de l'absence d'attestation du médecin-conseil sur l'imputabilité de ces débours en lien direct avec le VHC et de l'existence d'autres pathologies de Mme B...relevées par l'expert et sans lien avec le VHC ;

12. Considérant toutefois, qu'en appel, la caisse verse une attestation d'imputabilité, datée du 14 décembre 2011, du médecin conseil des prestations strictement en lien avec la contamination au VHC de MmeB... ; qu'il résulte du rapprochement entre, d'une part, le rapport de l'expert du 21 octobre 2011, qui estime que l'état de santé de MmeB..., encore sous traitement au jour de l'expertise, n'était pas consolidé, mais a fixé la date de stabilisation de ses lésions histologiques au 21 avril 2010, date de la dernière ponction biopsie hépatique et, d'autre part, de cette attestation d'imputabilité et qu'il n'est d'ailleurs pas contesté par l'ONIAM, que les frais d'hospitalisation des 14 septembre 2009 au centre hospitalier d'Hyères et du 22 mars 2010 au centre hospitalier de Toulon-la Seyne, les frais médicaux et pharmaceutiques pour la période du 11 juillet 2002 au 21 avril 2010, puis en post-stabilisation du 22 avril 2010 au 24 octobre 2011, ainsi que les soins infirmiers du 13 mars 2006 au 3 septembre 2009 et ceux en post-consolidation du 10 décembre 2010 au 16 juin 2011 sont en lien direct avec la contamination au VHC de MmeB... ; qu'il y a lieu d'allouer à la caisse la somme demandée de 17 875,14 euros de débours ; que, s'agissant des " frais futurs " d'un montant de 2 908,60 euros, demandés par la caisse, ces frais correspondent, selon le relevé des débours définitifs de la caisse daté du 21 février 2012, à des frais que la caisse devra engager pour Mme B...à la fin de l'année 2011 et sur les deux années à venir, à savoir une consultation hépato-gastroentérologue tous les 3 mois pendant ces deux années, une biologie tous les 3 mois, une journée d'acte technique hospitalier de suivi et de contrôle, ainsi que des prescriptions pharmaceutiques usuelles ; que toutefois, à la date où le juge d'appel statue, ces dépenses ne peuvent plus être qualifiées de " futures " ; que, dans ces conditions, l'EFS est fondé à soutenir que la condamnation de l'ONIAM, substitué à l'EFS, à rembourser à la caisse les frais exposés pour le compte d'un assuré social est conditionnée au paiement préalable par la caisse des frais réellement exposés par la caisse ; qu'il y a ainsi lieu de condamner l'ONIAM à rembourser ces frais sur présentation par la caisse de pièces justificatives de leur engagement ; qu'il résulte de ce qui précède que la caisse primaire d'assurance maladie est fondée à demander, d'une part, au titre des dépenses d'ores et déjà certaines, à ce que la somme de 10 730,36 euros qui lui a été allouée par les premiers juges soit portée à 17 875,14 euros, d'autre part, au titre des dépenses qualifiées de " futures ", à ce que l'ONIAM soit condamné à les lui rembourser sur présentation de pièces justificatives dans la limite des 2 908,60 euros demandés ;

13. Considérant que Mme B...n'allègue plus en appel avoir conservé des frais de santé à sa charge ; qu'elle ne fait état d'aucun préjudice patrimonial en lien avec sa contamination au VHC ;

En ce qui concerne les préjudices à caractère personnel :

14. Considérant que les premiers juges ont alloué à MmeB..., au titre du déficit fonctionnel permanent de 5 %, la somme de 5 000 euros, au titre des souffrances endurées celle de 3 500 euros et, au titre des troubles de toute nature dans les conditions d'existence, comprenant le préjudice moral, le préjudice sexuel et celui de pathologie évolutive, la somme de 10 000 euros, soit un total de 18 500 euros, à laquelle il convient de soustraire la somme de 10 000 euros déjà versée à Mme B...à titre de provisions ;

15. Considérant, d'abord, que l'ONIAM n'est pas lié par ses précédentes offres d'indemnisation faites à la victime ; que, par suite, l'office pouvait retirer son offre initiale d'indemnisation contenue dans son mémoire enregistré au greffe du tribunal administratif le 13 janvier 2011 d'un montant de 30 000 euros, sous réserve de la déduction de la somme de 10 000 euros des deux provisions déjà versées, pour la réduire à celle de 20 000 euros sous la même réserve, une fois les conclusions de l'expert connues ; que, d'ailleurs, l'office explique qu'il a modifié le montant de l'indemnisation proposée après le rapport de l'expert du 21 octobre 2011, eu égard à la régression de la fibrose hépatique de Mme B...G...F3 à F2 entre 2006 et 2010 ;

16. Considérant, ensuite, que Mme B...soutient que son taux de déficit fonctionnel permanent, fixé à 30 % par l'expert, réévalué à 5 % par les premiers juges, doit être porté à 10 %, ainsi que le prévoit l'annexe 11-2 du code de la santé publique relatif au barème d'évaluation des taux d'incapacité des victimes d'accidents médicaux, d'affections iatrogènes ou d'infections nosocomiales mentionnés à l'article D1142-2 de ce code, dès lors qu'elle présentait un score métavir de F1- F2 en 2011 ; qu'eu égard au fibroscan réalisé le 15 septembre 2011 qui a révélé un score d'activité compris entre A0 et A1 et un stade de fibrose compris entre F1 et F2, les premiers juges ont pu à bon droit fixer ce taux de déficit à 5 % ; que les premiers juges n'ont pas fait une estimation insuffisante de ce préjudice en allouant à ce titre la somme de 5 000 euros à MmeB... ;

17. Considérant, encore, que MmeB..., en se bornant à soutenir que ce taux ne correspondrait pas aux vives douleurs abdominales qu'elle ressent depuis presque 30 ans du fait de sa maladie chronique, ne conteste pas utilement l'évaluation par l'expert des souffrances endurées à 3 sur une échelle sur 7, qui, selon l'homme de l'art, prend en compte, depuis la contamination jusqu'à la stabilisation, l'ensemble des souffrances endurées pour les deux cures thérapeutiques, le traitement anti-fibrosant et les trois ponctions biopsie hépatiques de la victime ; que l'anxiété liée aux risques d'aggravation de sa maladie évolutive est pris en compte au titre de ses troubles de toute nature dans les conditions d'existence ; que les premiers juges n'ont pas fait une insuffisante appréciation des souffrances endurées en lui allouant la somme de 3 500 euros à ce titre ;

18. Considérant, aussi, que les premiers juges n'ont pas écarté le préjudice sexuel, qui ne se confond pas avec le préjudice de l'agrément de jouir des choses de la vie, de MmeB..., qui doit avoir des rapports sexuels protégés, dans l'évaluation des troubles de toute nature dans les conditions d'existence ;

19. Considérant, enfin, que les premiers juges ont nécessairement pris en compte le préjudice spécifique de contamination de Mme B...en mentionnant dans leur jugement qu'elle éprouve de l'anxiété face à l'évolution, qui peut être péjorative, de sa maladie ; que, compte-tenu du taux de déficit fonctionnel permanent de 5 %, du déficit fonctionnel temporaire total de six jours pour les trois biopsies hépatiques subies les 9 septembre 2003, 6 février 2007 et 21 avril 2010, des souffrances endurées fixées par l'expert de 3 sur une échelle de 7, les premiers juges n'ont pas fait une estimation insuffisante des troubles de toute nature dans les conditions d'existence, qui comprennent notamment le préjudice spécifique de contamination eu égard aux craintes éprouvées par la victime devant l'évolution possible de sa maladie, en allouant à Mme B... la somme totale de 18 500 euros, sous réserve de déduire la provision de 10 000 euros déjà versée à la requérante ;

20. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que Mme B...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Toulon a limité la réparation de ses préjudices à la somme de 18 500 euros, sous réserve de déduire la provision de 10 000 euros déjà versée ; que la caisse primaire d'assurance maladie du Var est fondée à demander que le remboursement de ses débours soit porté à la somme de 17 875,14 euros augmentée, dans la limite de 2 908,60 euros, des dépenses mentionnées au point 11, dont elle justifiera ;

Sur l'indemnité forfaitaire de gestion :

21. Considérant qu'il y a lieu, comme le demande la caisse, de confirmer l'indemnité forfaitaire de gestion qui lui a été allouée en 1ère instance ;

Sur les dépens :

22. Considérant qu'il y a lieu de confirmer les frais d'expertise, taxés et liquidés à la somme de 1 369,80 euros par ordonnance du président du tribunal administratif de Toulon du 21 novembre 2011, à la charge de l'ONIAM ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

23. Considérant qu'il n'y pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner une partie à verser à une autre une quelconque somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La somme de 10 730,36 euros allouée à la caisse primaire d'assurance maladie du Var par l'article 5 du jugement du 20 décembre 2011 du tribunal administratif de Toulon est portée à 17 875,14 euros, augmentée, dans la limite de 2 908,60 euros, des dépenses mentionnées au point 11, dont elle justifiera.

Article 2 : Le jugement du 20 décembre 2011 du tribunal administratif de Toulon est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : Les conclusions de Mme B...et le surplus des conclusions des parties sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la caisse primaire d'assurance maladie du Var, à Mme E...B..., à l'ONIAM, à l'EFS et à la SHAM.

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N° 12MA009332

MD


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12MA00933
Date de la décision : 05/06/2014
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

54-07-01-04-01-02 Procédure. Pouvoirs et devoirs du juge. Questions générales. Moyens. Moyens d'ordre public à soulever d'office. Existence.


Composition du Tribunal
Président : M. DUCHON-DORIS
Rapporteur ?: Mme Marie-Claude CARASSIC
Rapporteur public ?: Mme CHAMOT
Avocat(s) : CABINET GARRY - AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2014-06-05;12ma00933 ?
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