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10/01/2014 | FRANCE | N°11MA01908

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 10 janvier 2014, 11MA01908


Vu, sous le numéro 11MA01908, la requête enregistrée le 13 mai 2011 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, présentée pour la société anonyme d'ingénieur-conseil Jean-PierreA..., représentée par M. C...A..., et dont le siège social est 443 chemin rural 21 à Béziers ; la société Jean-Pierre A...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000341 du 18 février 2011 par lequel le tribunal administratif de Montpellier l'a condamnée à payer, à la commune de Valras-Plage, solidairement avec la société Solatel Telec, la somme de 140 000 euros TTC

, assortie des intérêts légaux à compter du 21 janvier 2010 ;

2°) de rejete...

Vu, sous le numéro 11MA01908, la requête enregistrée le 13 mai 2011 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, présentée pour la société anonyme d'ingénieur-conseil Jean-PierreA..., représentée par M. C...A..., et dont le siège social est 443 chemin rural 21 à Béziers ; la société Jean-Pierre A...demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1000341 du 18 février 2011 par lequel le tribunal administratif de Montpellier l'a condamnée à payer, à la commune de Valras-Plage, solidairement avec la société Solatel Telec, la somme de 140 000 euros TTC, assortie des intérêts légaux à compter du 21 janvier 2010 ;

2°) de rejeter l'intégralité des demandes de la commune de Valras-Plage à son encontre ;

3°) à titre subsidiaire, de ramener sa part de responsabilité à 10 % ;

4°) à titre subsidiaire, si une condamnation in solidum était prononcée, d'allouer l'indemnisation arrêtée par l'expert, sans faire application des intérêts au taux légal et de juger qu'elle sera relevée et garantie de toutes condamnations prononcées au-delà de sa part et portion par la société à responsabilité limitée Solatel Telec ;

5°) de mettre à la charge de tout succombant une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

6°) de mettre les dépens, en ce y compris les frais d'expertise, à la charge de tout succombant ;

.........................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 16 décembre 2013 :

- le rapport de M. Thiele, rapporteur ;

- et les conclusions de Mme Felmy, rapporteur public ;

1. Considérant que, le 24 décembre 1999, la commune de Valras-Plage a conclu avec la société Solatel Telec deux marchés de travaux portant sur la fourniture et la pose de mâts d'éclairage en vue de l'éclairage public d'un front de mer ; qu'à la suite de l'apparition de désordres, tenant à des déformées, des fissures en haut de la trappe de visite et à la présence de corrosion, la commune de Valras-Plage a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'ordonner une expertise ; que, le 20 décembre 2005, l'expert désigné, M.B..., a déposé son rapport ; que, par ordonnance du 14 octobre 2007, le juge des référés du tribunal administratif de Montpellier a condamné la société Solatel Telec et la société GHM, entreprise sous-traitante, au versement d'une provision d'un montant de 145 190,45 euros ; que, par ordonnance du 23 février 2009, la cour a confirmé la condamnation de la société Solatel Telec, mais infirmé l'ordonnance du 14 octobre 2007 en ce qu'elle condamnait la société GHM, au motif que la juridiction administrative était incompétente pour se prononcer sur la responsabilité du sous-traitant ; que, par le jugement attaqué du 18 février 2011, le tribunal administratif de Montpellier a condamné solidairement la société Solatel Telec et la société Jean-Pierre A...à payer à la commune de Valras-Plage la somme de 140 000 euros TTC, assortie des intérêts légaux, à compter du 21 janvier 2010, déduction faite, le cas échéant, des sommes qui ont déjà été payées à titre de provision ; qu'il a en outre jugé que la société Solatel Telec garantira la société d'ingénieur conseil Jean-Pierre A...de 60% des condamnations prononcées ;

Sur la validité du marché de maîtrise d'oeuvre :

2. Considérant que, lorsque les parties soumettent au juge un litige relatif à l'exécution du contrat qui les lie, il incombe en principe à celui-ci, eu égard à l'exigence de loyauté des relations contractuelles, de faire application du contrat ; que, toutefois, dans le cas seulement où il constate une irrégularité invoquée par une partie ou relevée d'office par lui, tenant au caractère illicite du contenu du contrat ou à un vice d'une particulière gravité relatif notamment aux conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement, il doit écarter le contrat et ne peut régler le litige sur le terrain contractuel ;

3. Considérant que l'absence de transmission de la délibération autorisant le maire à signer un contrat avant la date à laquelle le maire procède à sa signature constitue un vice affectant les conditions dans lesquelles les parties ont donné leur consentement ; que, toutefois, eu égard à l'exigence de loyauté des relations contractuelles, ce seul vice ne saurait être regardé comme d'une gravité telle que le juge doive écarter le contrat et que le litige qui oppose les parties ne doive pas être tranché sur le terrain contractuel ;

4. Considérant qu'il en résulte que la société Jean-Pierre A...n'est pas fondée à soutenir que le litige ne pouvait être tranché sur le terrain contractuel en raison de la transmission tardive, au service chargé du contrôle de légalité, de la délibération du 18 novembre 2009 du conseil municipal décidant de lui confier la mission de maîtrise d'oeuvre pour la réalisation des travaux de réaménagement du boulevard Jean Moulin ;

Sur les conclusions d'appel principal de la société Jean-PierreA... :

En ce qui concerne la responsabilité :

5. Considérant qu'en application des principes dont s'inspirent les articles 1792 à 1792-5 du code civil, est susceptible de voir sa responsabilité engagée de plein droit, avant l'expiration d'un délai de dix ans à compter de la réception des travaux, à raison des dommages qui compromettent la solidité d'un ouvrage ou le rendent impropre à sa destination, toute personne appelée à participer à la construction de l'ouvrage, liée au maître de l'ouvrage par un contrat de louage d'ouvrage ou qui, bien qu'agissant en qualité de mandataire du propriétaire de l'ouvrage, accomplit une mission assimilable à celle d'un locateur d'ouvrage, ainsi que toute personne qui vend, après achèvement, un ouvrage qu'elle a construit ou fait construire ;

6. Considérant que la circonstance, alléguée par la société Jean-PierreA..., qu'elle n'a commis aucune faute lors des travaux dont elle a été chargée, n'est pas de nature à l'exonérer de l'obligation de garantie qu'elle doit au maître de l'ouvrage du seul fait de sa participation à la réalisation des ouvrages affectés de désordres ;

En ce qui concerne les intérêts :

7. Considérant que, par l'article 1er de son dispositif, le jugement attaqué dispose que " La société Solatel Telec et la société d'ingénieur conseil Jean-Pierre A...sont solidairement condamnées à payer à la COMMUNE DE VALRAS-PLAGE la somme de 140.000 euros TTC, assortie des intérêts légaux à compter du 21 janvier 2010, déduction faite, le cas échéant, des sommes qui ont déjà été payées à titre de provision " ;

8. Considérant, d'une part, que le tribunal administratif a ainsi laissé à la charge des sociétés Solatel Telec et Jean-Pierre A...le versement des intérêts légaux sur la somme de 140 000 euros, dans l'hypothèse même où la somme aurait été versée à titre de provision, alors que, en pareil cas, la personne publique, ayant la disposition des sommes en cause, n'a pas droit auxdits intérêts ;

9. Considérant, d'autre part, qu'il résulte de l'instruction qu'en application d'une ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Montpellier, la société Solatel Telec a versé, le 29 octobre 2008, la totalité de la somme de 140 000 euros demandée par la commune de Valras-Plage à titre de provision ;

10. Considérant que, dès lors, et ainsi que le soutiennent les sociétés Jean-Pierre A...et Solatel Telec, c'est à tort que le tribunal administratif de Montpellier a considéré qu'il y avait lieu de faire droit à la demande de la commune de Valras-Plage, qui disposait déjà en totalité de cette somme, tendant à ce que lui soient accordés les intérêts à compter de la date d'enregistrement de sa requête ;

En ce qui concerne les dépens de la première instance :

11. Considérant qu'il y a lieu de laisser les frais et honoraires d'expertise à la charge solidaire de la société Solatel Telec et de la société d'ingénieur conseil Jean-PierreA... ;

En ce qui concerne la garantie :

12. Considérant que la société Jean-Pierre A...demande, à titre subsidiaire, à être garantie en totalité, et non pas à hauteur de 60 % comme l'a retenu le tribunal administratif de Montpellier, de la condamnation solidaire prononcée à son encontre ;

13. Considérant qu'ainsi que le relève l'expert, les désordres relevés sont imputables à la " très mauvaise exécution des soudures de renfort " destinées à compenser la perte de solidité du fût des mâts au niveau de la trappe permettant d'accéder à l'appareillage électrique intérieur desdits mâts ; que ces désordres sont donc imputables à un vice de fabrication interne desdits mâts, qui n'a pu être décelé par l'expert qu'après démontage de l'appareillage électrique intérieur ; qu'eu égard au caractère difficilement décelable de ce vice de fabrication, il y a lieu de condamner la société Solatel Telec à relever et garantir la société Jean-Pierre A...à hauteur de 80 % ;

14. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la société Jean-Pierre A...est seulement fondée à demander que le taux de la garantie de sa condamnation par la société Solatel Telec soit porté de 60 % à 80 % ;

Sur les conclusions d'appel incident de la commune de Valras-Plage tendant à la réévaluation du montant de la condamnation :

13. Considérant que l'évaluation de dégâts subis doit être faite à la date où, leur cause ayant pris fin et leur étendue étant connue, il pouvait être procédé aux travaux destinés à les réparer ; que la commune de Valras-Plage n'apporte pas la preuve que les travaux de reprise nécessaires auraient été retardés par l'impossibilité soit d'en assurer le financement soit de se procurer les matériaux nécessaires à leur exécution ; qu'ainsi, elle n'est pas fondée à demander la réévaluation du montant de la condamnation prononcée à l'encontre des sociétés Jean-Pierre A...et Solatel Telec pour tenir compte de l'évolution du coût des constructions ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

15. Considérant que, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire application de ces dispositions ;

D E C I D E :

Article 1er : La société Solatel Telec garantira la société Jean-Pierre A...à hauteur de 80 % du montant des condamnations solidaires prononcées à l'encontre de ces deux sociétés.

Article 2 : Les condamnations solidaires prononcées à l'encontre de ces deux sociétés ne porteront pas intérêt.

Article 3 : Le jugement n° 1000341 du 18 février 2011 du tribunal administratif de Montpellier est réformé en ce qu'il a de contraire aux articles 1er et 2.

Article 4 : Le surplus des conclusions présentées par les sociétés Jean-Pierre A...et Solatel Telec est rejeté.

Article 5 : Les conclusions de la commune de Valras-Plage sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la société Jean-PierreA..., à la société Solatel Telec et à la commune de Valras-Plage.

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N° 11MA01908 3

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11MA01908
Date de la décision : 10/01/2014
Type d'affaire : Administrative

Analyses

39-06-01-06 Marchés et contrats administratifs. Rapports entre l'architecte, l'entrepreneur et le maître de l'ouvrage. Responsabilité des constructeurs à l'égard du maître de l'ouvrage. Actions en garantie.


Composition du Tribunal
Président : M. GUERRIVE
Rapporteur ?: M. Renaud THIELE
Rapporteur public ?: Mme FELMY
Avocat(s) : SCP AVOCARREDHORT

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2014-01-10;11ma01908 ?
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