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23/12/2013 | FRANCE | N°12MA04399

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 23 décembre 2013, 12MA04399


Vu la requête, enregistrée le 16 novembre 2012, présentée pour M. B... D..., demeurant..., par la SCP Sanguinetti, Ferraro, Clerc ;

M. D... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1106892 du 2 octobre 2012 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 24 août 2011 par laquelle l'inspecteur du travail des Bouches-du-Rhône a autorisé le Centre Informatique Provence Alpes Méditerranée à le licencier pour inaptitude médicale ;

2°) de mettre à la charge du Centre Informatique

Provence Alpes Méditerranée la somme de 3 000 euros par application de l'article L. ...

Vu la requête, enregistrée le 16 novembre 2012, présentée pour M. B... D..., demeurant..., par la SCP Sanguinetti, Ferraro, Clerc ;

M. D... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1106892 du 2 octobre 2012 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision en date du 24 août 2011 par laquelle l'inspecteur du travail des Bouches-du-Rhône a autorisé le Centre Informatique Provence Alpes Méditerranée à le licencier pour inaptitude médicale ;

2°) de mettre à la charge du Centre Informatique Provence Alpes Méditerranée la somme de 3 000 euros par application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

..............................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code du travail ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 3 décembre 2013 :

- le rapport de M.A...'hôte, premier conseiller,

- les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public,

- et les observations de Me C..., pour M. D... ;

1. Considérant que M. D... a été embauché le 2 avril 2002 par le Centre Informatique Provence Alpes Méditerranée (CIPAM) en qualité d'informaticien administrateur système ; qu'à l'occasion d'une visite médicale de reprise, consécutive à un arrêt de travail, le médecin du travail l'a déclaré définitivement inapte à tout poste de travail dans l'entreprise, par un avis du 7 juin 2011 ; que, le 2 août 2011, le CIPAM a demandé à l'inspecteur du travail des Bouches-du-Rhône l'autorisation de le licencier ; que celui-ci a accordé cette autorisation par une décision du 24 août 2011 ; que M. D... défère à la Cour le jugement du 2 octobre 2012 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;

Sur la légalité de l'autorisation de licenciement :

2. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 2411-1 du code du travail, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " Bénéficie de la protection contre le licenciement prévue par le présent chapitre, y compris lors d'une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire, le salarié investi de l'un des mandats suivants : 1° Délégué syndical ; (...) 4° Représentant syndical au comité d'entreprise (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 2411-3 du même code : " Le licenciement d'un délégué syndical ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail " ; qu'aux termes de l'article L. 2411-8 de ce code : " Le licenciement d'un membre élu du comité d'entreprise, titulaire ou suppléant, ou d'un représentant syndical au comité d'entreprise, ne peut intervenir qu'après autorisation de l'inspecteur du travail (...) " ; que, d'autre part, l'article L. 1226-2 dudit code dispose : " Lorsque, à l'issue des périodes de suspension du contrat de travail consécutives à une maladie ou un accident non professionnel, le salarié est déclaré inapte par le médecin du travail à reprendre l'emploi qu'il occupait précédemment, l'employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités. Cette proposition prend en compte les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu'il formule sur l'aptitude du salarié à exercer l'une des tâches existantes dans l'entreprise. L'emploi proposé est aussi comparable que possible à l'emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, transformations de postes de travail ou aménagement du temps de travail " ; que l'article L. 1226-4 prévoit : " Lorsque, à l'issue d'un délai d'un mois à compter de la date de l'examen médical de reprise du travail, le salarié déclaré inapte n'est pas reclassé dans l'entreprise ou s'il n'est pas licencié, l'employeur lui verse, dès l'expiration de ce délai, le salaire correspondant à l'emploi que celui-ci occupait avant la suspension de son contrat de travail. Ces dispositions s'appliquent également en cas d'inaptitude à tout emploi dans l'entreprise constatée par le médecin du travail (...) " ;

3. Considérant qu'en vertu du code du travail, les salariés protégés bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que lorsque le licenciement de l'un de ces salariés est envisagé, il ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées par l'intéressé ou avec son appartenance syndicale ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par l'inaptitude physique, il appartient à l'inspecteur du travail et, le cas échéant, au ministre, de rechercher, sous le contrôle du juge, si cette inaptitude est telle qu'elle justifie le licenciement envisagé, compte tenu des caractéristiques de l'emploi exercé à la date à laquelle elle est constatée, de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé, des exigences propres à l'exécution normale des mandats dont il est investi, et de la possibilité d'assurer son reclassement ;

En ce qui concerne la légalité externe :

4. Considérant qu'aux termes du premier alinéa de l'article R. 2421-5 du code du travail : " La décision de l'inspecteur du travail est motivée " ; qu'aux termes de l'article R. 2421-7 du même code : " L'inspecteur du travail et, en cas de recours hiérarchique, le ministre examinent notamment si la mesure de licenciement envisagée est en rapport avec le mandat détenu, sollicité ou antérieurement exercé par l'intéressé " ;

5. Considérant que la décision contestée du 24 août 2011 comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement ; que, dès lors qu'il estimait qu'aucun élément soumis à son appréciation ne permettait de conclure à l'existence d'un lien entre la procédure de licenciement engagée et les mandats exercés par le salarié, l'inspecteur du travail pouvait se borner à constater cette absence de lien sans méconnaitre l'obligation de motivation qui s'imposait à lui ; que, par suite, le moyen tiré de la motivation irrégulière de la décision contestée manque en fait ;

En ce qui concerne la légalité interne :

6. Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que, dans son avis du 7 juin 2011, le médecin du travail a déclaré M. D... " inapte définitivement à tout poste dans l'entreprise même avec mutation ou aménagement de poste de travail " ; que le requérant n'a pas contesté cet avis, comme le lui permettaient les dispositions de l'article L. 4624-1 du code du travail ; que, par un courrier du 10 juin 2011, le CIPAM a interrogé le médecin du travail sur les aptitudes du salarié à exercer éventuellement d'autres tâches et sur le type de postes susceptible de lui convenir, en vue de la recherche de possibilités de reclassement, notamment dans un autre organisme de sécurité sociale ou un autre centre informatique ; que, par un nouvel avis du 16 juin 2011, le médecin du travail a estimé que l'état de santé de M. D... était incompatible à tout poste de travail, non seulement au sein du CIPAM mais également dans un autre organisme de sécurité sociale ou un autre centre informatique, précisant " ceci même avec reclassement ou aménagement de poste de travail ou d'horaire " ; qu'il est constant que, le 20 juin juin 2011, le CIPAM a néanmoins sollicité 107 organismes de sécurité sociale ou centres informatiques afin de trouver des possibilités de reclassement ; que le courriel adressé à cette fin mentionnait le sens de l'avis du médecin du travail ainsi que les qualifications et l'ancienneté du salarié ; que les 32 réponses parvenues ont toutes été négatives ; qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'impose à l'employeur d'attendre l'ensemble des réponses pour procéder au licenciement du salarié, pourvu que le délai laissé aux organismes sollicités pour examiner les possibilités de reclassement en leur sein soit suffisant ; que tel a été le cas en l'espèce ; que, le 27 juin 2011, le CIPAM a enfin proposé deux postes en interne à M. D..., que ce dernier a refusés le 5 juillet suivant ; que le moyen tiré de ce que l'avis du médecin du travail n'aurait pas été sollicité sur la compatibilité de ces postes avec l'état de santé du requérant, manque en fait ; qu'il ressort en effet des pièces du dossier que le médecin du travail a confirmé l'inaptitude de l'intéressé à ces deux postes dans un avis du 28 juin 2011 ; que le requérant ne démontre pas par ailleurs que, compte tenu des indications très restrictives du médecin du travail, d'autres postes susceptibles de lui convenir étaient disponibles au sein du CIPAM ou de l'un des organismes du groupe ou du réseau auquel celui-ci appartient ; que, dans ces circonstances, M. D... n'est pas fondé à soutenir que le CIPAM n'a pas procédé à une recherche réelle, sérieuse et individualisée des possibilités de le reclasser ;

7. Considérant, en second lieu, que si M. D... fait état de son engagement dans l'exercice de ses fonctions représentatives, des difficultés innombrables qu'il aurait rencontrées dans l'accomplissement de ses mandats et de la nature conflictuelle de ses relations avec son employeur, il se borne à de simples allégations non circonstanciées, sans produire la moindre pièce à l'appui de ses dires ; que, dès lors, c'est à bon droit que l'inspecteur du travail a estimé le projet de licenciement sans lien avec le mandat du requérant ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du CIPAM, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme que M. D... demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de ce dernier une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par le CIPAM et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : M. D... versera au CIPAM la somme de 1 000 euros (mille euros) en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... D..., au ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social et au Centre Informatique Provence Alpes Méditerranée.

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N° 12MA04399

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 12MA04399
Date de la décision : 23/12/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07-01-04-035-02 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés. Conditions de fond de l'autorisation ou du refus d'autorisation. Motifs autres que la faute ou la situation économique. Inaptitude ; maladie.


Composition du Tribunal
Président : M. BEDIER
Rapporteur ?: M. Vincent L'HÔTE
Rapporteur public ?: M. DELIANCOURT
Avocat(s) : SCP SANGUINETTI - FERRARO - CLERC

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2013-12-23;12ma04399 ?
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