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19/12/2013 | FRANCE | N°11MA01467

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 19 décembre 2013, 11MA01467


Vu la requête, enregistrée le 13 avril 2011, présentée pour M. C...B..., demeurant..., par Me D...A... ; M. B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1005817 du 15 mars 2011 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 décembre 2010 par lequel le préfet de la région Languedoc-Roussillon, préfet de l'Hérault, a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de un mois et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler,

pour excès de pouvoir, la décision susmentionnée ;

3°) d'enjoindre au préfet de ...

Vu la requête, enregistrée le 13 avril 2011, présentée pour M. C...B..., demeurant..., par Me D...A... ; M. B...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1005817 du 15 mars 2011 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 décembre 2010 par lequel le préfet de la région Languedoc-Roussillon, préfet de l'Hérault, a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de un mois et a fixé le pays de destination ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision susmentionnée ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la notification du jugement à intervenir ;

4°) à défaut, d'enjoindre au préfet de l'Hérault de réexaminer sa situation dans un délai de quinze jours et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour, et ce sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

5°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

.........................................................................................................................

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu la convention des Nations Unies contre la torture du 10 février 1984 ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Vu la décision du président de la 2ème chambre de la Cour dispensant le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 28 novembre 2013 :

- le rapport de M. Firmin, rapporteur ;

1. Considérant que M.B..., de nationalité marocaine, interjette appel du jugement du 15 mars 2011 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 8 décembre 2010 par lequel le préfet de la région Languedoc-Roussillon, préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de un mois et a fixé le pays de destination ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que si M. B...soutient que les premiers juges ont omis de répondre à son moyen tiré de ce que la commission du titre de séjour n'a pas été consultée préalablement à l'intervention de l'arrêté qu'il critique, ce moyen manque en fait et sera écarté comme tel ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

3. Considérant que si M. B...soutient que l'arrêté du 8 décembre 2010 du préfet de la région Languedoc-Roussillon, préfet de l'Hérault a été signé par une personne incompétente pour le faire, ce moyen doit être écarté comme manquant en fait dès lors que, par arrêté n° 2010-I-2768 du 7 septembre 2010, régulièrement publié au recueil des actes administratifs du département de l'Hérault de même date, le préfet de la région Languedoc Roussillon, préfet de l'Hérault a donné délégation de signature à M. Patrice Latron, secrétaire général de la préfecture de l'Hérault et signataire de la décision attaquée, à l'effet de signer tous actes, arrêtés, décisions et circulaires relevant des attributions de l'Etat dans le département de l'Hérault et notamment en ce qui concerne les affaires intéressant plusieurs services départementaux des administrations civiles de l'Etat, à l'exception des réquisitions prises en application de la loi du 11 juillet 1938 relative à l'organisation générale de la nation pour temps de guerre ;

4. Considérant que l'arrêté du préfet de l'Hérault du 8 décembre 2010, qui énonce les considérations de droit et de fait sur lesquels il se fonde, est ainsi suffisamment motivé et satisfait aux prescriptions de l'article 1er de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs ;

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 312-2 du même code : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) / 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigé ; / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que le préfet est tenu de saisir la commission du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues aux articles L. 313-11, L. 314-11, L. 314-12 et L. 431-3 auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions ;

6. Considérant que M. B...soutient qu'il peut bénéficier des dispositions de l'article L. 313-11 6° et 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il ne ressort toutefois d'aucune des pièces du dossier et qu'il n'est pas même allégué, d'ailleurs, que l'intéressé serait père d'un enfant français mineur résidant en France ; que s'il soutient, par ailleurs, qu'il est entré en France en 2004, sans d'ailleurs l'établir, il ressort des pièces du dossier qu'il n'en a pas moins déclaré, lors de la demande d'aide médicale d'Etat qu'il a déposée le 5 octobre 2009, résider de façon stable et permanente sur le territoire national depuis le 15 novembre 2008 ; qu'il est célibataire, sans enfant et sans charge de famille en France ; qu'il n'établit, et n'allègue pas même, être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine ; qu'ainsi, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, et eu égard à la durée et aux conditions de séjour de M. B... en France, la décision attaquée n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise et ne méconnaît donc pas les dispositions précitées de l'article L. 313-11-7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il suit de là que M. B...n'était pas au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour en application de l'article L. 313-11 6° et 7° précité ; qu'il s'ensuit que le préfet de l'Hérault n'était pas tenu de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande ;

7. Considérant que M. B...soutient, en outre, qu'il entre dans le champ d'application de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'arrêté du 18 janvier 2008 relatif aux métiers permettant l'obtention d'un titre de séjour ; que, par son arrêté litigieux, le préfet de l'Hérault a rejeté la demande de M.B..., notamment par un motif tiré de ce que l'activité de soudeur, pour l'exercice de laquelle M. B...se prévaut d'une promesse d'embauche pour un contrat de travail à durée indéterminée, ne figure pas sur la liste des métiers nationale et régionale annexée à l'arrêté du 18 janvier 2008 et de ce que le marché de l'emploi dans le département de l'Hérault pour cette catégorie d'emploi fait apparaître 258 demandes, dont 83 sur le secteur de Montpellier non satisfaites ;

8. Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 311-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, l'octroi de la carte de séjour temporaire et celui de la carte de séjour "compétences et talents" sont subordonnés à la production par l'étranger d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois. " ; qu'aux termes de l'article L. 313-10 du même code : " La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée : 1° A l'étranger titulaire d'un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 du code du travail. Pour l'exercice d'une activité professionnelle salariée dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et figurant sur une liste établie au plan national par l'autorité administrative, après consultation des organisations syndicales d'employeurs et de salariés représentatives, l'étranger se voit délivrer cette carte sans que lui soit opposable la situation de l'emploi sur le fondement du même article L. 341-2. La carte porte la mention "salarié" lorsque l'activité est exercée pour une durée supérieure ou égale à douze mois (...) " ;

9. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum et qui ne relèvent pas de l'article 1er du présent accord, reçoivent après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention salarié éventuellement assortie de restrictions géographiques ou professionnelles. / Après trois ans de séjour régulier en France, les ressortissants marocains visés à l'alinéa précédent peuvent obtenir un titre de séjour de dix ans. Il est statué sur leur demande en tenant compte des conditions d'exercice de leurs activités professionnelles et de leurs moyens d'existence. Les dispositions du deuxième alinéa de l'article 1er sont applicables pour le renouvellement du titre de séjour après dix ans (...) " ; que l'article 9 du même traité stipule que : " Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'accord (...) " ;

10. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées de l'article 9 de l'accord franco-marocain que l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'est pas applicable aux ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France dont la situation est régie par l'article 3 de cet accord ; que par suite, l'arrêté litigieux du 8 décembre 2010 ne pouvait être pris sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

11. Considérant que l'administration peut faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existante à la date de cette décision ; qu'il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif ; que dans l'affirmative il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué ; que le préfet de l'Hérault sollicite, par ses écritures en défense régulièrement communiquées, une substitution des articles L. 313-10 1° et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au profit de l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;

12. Considérant qu'en l'espèce les dispositions de l'article 3 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 peuvent être substituées à celles de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors, en premier lieu, qu'en l'absence non contestée de détention par M. B...d'un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 du code du travail, repris à l'article L. 5221-2 de ce code, le requérant ne remplissait pas les conditions permettant d'obtenir la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " salarié " en application des stipulations précitées de l'article 3 de l'accord franco marocain et que le préfet de l'Hérault aurait pris, en deuxième lieu, la même décision de refus du titre de séjour sollicité sur le fondement de l'article 3 de l'accord franco-marocain et que cette substitution de motif n'a pour effet de priver l'intéressé d'aucune garantie procédurale ;

13. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et des libertés d'autrui. " ; que si M. B...soutient, d'une part, que l'arrêté attaqué porte manifestement atteinte à son droit au respect de sa vie privée et familiale et, d'autre part, qu'il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur sa vie personnelle et familiale, ces moyens doivent être écartés pour les mêmes raisons que développées au point 6 ci-dessus ;

14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :

15. Considérant que le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de la requête, n'appelle aucune mesure d'exécution ; que, par suite, les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte présentées par M. B...doivent être rejetées ;

Sur l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

16. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, une quelconque somme à verser à M. B...au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.

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N° 11MA014672


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11MA01467
Date de la décision : 19/12/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. DUCHON-DORIS
Rapporteur ?: M. Jean-Pierre FIRMIN
Rapporteur public ?: Mme CHAMOT
Avocat(s) : ESCALE

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2013-12-19;11ma01467 ?
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