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29/10/2013 | FRANCE | N°11MA01755

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 8ème chambre - formation à 3, 29 octobre 2013, 11MA01755


Vu, I, enregistrée le 5 mai 2011 par télécopie et le 9 mai 2011 par courrier, sous le n° 11MA01755, la requête présentée pour la commune de Trans en Provence, par

Me G...D... ; La commune demande à la Cour :

* d'annuler le jugement n° 0902696 du tribunal administratif de Toulon en date du

25 mars 2011 par lequel elle a été condamnée à verser à M. E...la somme de 198 400 € en réparation des préjudices consécutifs à l'accident dont il a été victime le 17 juillet 2007 ainsi que la somme de 1 000 € en application des dispositions de l'article L. 761-

1 du code de justice administrative ;

* de procéder à une réévaluation des chefs de pré...

Vu, I, enregistrée le 5 mai 2011 par télécopie et le 9 mai 2011 par courrier, sous le n° 11MA01755, la requête présentée pour la commune de Trans en Provence, par

Me G...D... ; La commune demande à la Cour :

* d'annuler le jugement n° 0902696 du tribunal administratif de Toulon en date du

25 mars 2011 par lequel elle a été condamnée à verser à M. E...la somme de 198 400 € en réparation des préjudices consécutifs à l'accident dont il a été victime le 17 juillet 2007 ainsi que la somme de 1 000 € en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

* de procéder à une réévaluation des chefs de préjudice de M.E... ;

* de mettre à la charge de M. E...le paiement d'une somme de 3 000 € en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient :

- qu'elle n'a commis aucune faute en ne faisant pas suivre à son agent une formation ; que M. E... n'a fait l'objet d'aucun changement de fonctions, ni de technique ni de matériel et n'a jamais demandé à bénéficier d'une formation ; qu'il était expérimenté ; qu'il encadrait une équipe ;

- que la responsabilité sans faute ne peut être mise en oeuvre dès lors que M. E...n'a pas été mis en présence de choses dangereuses, soumis à une activité dangereuse ni placé dans une situation dangereuse ;

- que M. E...a, lui-même, commis une faute en tournant le dos à l'arbre et en laissant tourner le moteur de sa tronçonneuse ; qu'il connaissait parfaitement la procédure pour abattre un arbre en toute sécurité ;

- que l'accident est dû à un cas de force majeure lié au fait que l'arbre a tourné sur lui-même ; qu'en n'exonérant la commune qu'à hauteur de 20%, le tribunal a sous-estimé la responsabilité de la victime dans la survenance du dommage ;

- qu'en l'absence de faute, les demandes afférentes aux préjudices patrimoniaux doivent être rejetées ; que celles relatives aux préjudices extrapatrimoniaux ont été surévaluées ;

Vu le jugement attaqué ;

Vu le mémoire en défense, enregistré le 20 octobre 2011, présenté pour

M. A...E...demeurant son encontre une faute de nature à exonérer la commune de sa responsabilité à hauteur de 20%par le cabinet HubertB... ; M. E...demande à la Cour :

* de réformer le jugement du tribunal administratif de Toulon en date du 25 mars 2011 ;

* de condamner la commune de Trans en Provence à l'indemniser intégralement des préjudices subis à hauteur de 1 451 801 € ;

* de mettre à la charge de la commune de Trans en Provence le paiement d'une somme de 4 000 € en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soutient :

- que la commune a commis une faute inexcusable en ne lui faisant suivre aucune formation, méconnaissant ainsi les dispositions des articles 1er de la loi du 12 juillet 1984, 6 du décret du

10 juin 1985 et R. 234-22 du code du travail ; que l'élagage des arbres ne constituait pas sa mission principale ; que son collègue, chargé d'assurer sa sécurité a fait reculer le tractopelle au lieu de l'avancer ; que son collègue également n'a pas suivi de formation adéquate ; que si une formation avait été dispensée, l'accident ne se serait pas produit ;

- qu'il n'a commis aucune faute dès lors qu'il n'avait pas été formé et que son collègue était censé pousser l'arbre dans la direction opposée ;

- que la chute d'un arbre et son retournement peuvent être prévus par un personnel qualifié ; que la force majeure ne peut donc être retenue ;

- qu'il sollicite le paiement d'une somme de 272 000 € au titre de son incapacité permanente partielle de 85%, de 50 000 € au titre des souffrances endurées, de 30 000 € au titre du préjudice esthétique, de 15 000 € au titre du préjudice sexuel et de 100 000 € au titre du préjudice d'agrément dans la mesure où il ne peut plus s'adonner aux activités de chasse, d'entretien des forêts, de randonnée, de voyages, d'apiculture (...) qui étaient les siennes auparavant ;

- qu'il est dans l'incapacité de reprendre une activité professionnelle ; que doivent dès lors être réparées ses pertes de revenus ; qu'il a besoin de l'assistance d'une tierce personne 112 heures par mois ; que doivent également lui être remboursés les frais médicaux restés à sa charge à hauteur de 5 000 €, les frais de logement adapté (75 000 €), de véhicule adapté (65 561 €) et diverses dépenses (5 000 €) ;

Vu le mémoire en réplique, enregistré le 8 décembre 2011, présenté pour la commune de Trans en Provence par Me G...D... ; Elle conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens et ajoute que si M.H..., chargé de la conduite du tractopelle, était responsable de l'accident, il s'agirait d'une faute personnelle de celui-ci non imputable à la commune ; que rien ne permet de confirmer la véracité des dires de M. E...quant à l'existence d'une éventuelle faute de M.H... ;

Vu le mémoire enregistré le 29 février 2012, présenté pour M.E..., par Me C...B... ; Il conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire enregistré le 13 avril 2012, présenté pour la commune de Trans en Provence par Me G...D... ; Elle conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens ;

Vu, en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, la lettre en date du 26 novembre 2012 par laquelle les parties ont été informées de la période à laquelle il était envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et de ce que l'instruction pourrait être close, au-delà du 28 février 2013, par l'émission d'une ordonnance de clôture ou d'un avis d'audience ;

Vu, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, la lettre en date du 4 mars 2013 par laquelle les parties ont été informées que la décision était susceptible d'être fondée sur un moyen relevé d'office ;

Vu l'ordonnance de clôture d'instruction immédiate en date du 9 avril 2013 ;

Vu, II, enregistrée sous le n° 11MA01818, la requête présentée pour M. A...E...demeurant son encontre une faute de nature à exonérer la commune de sa responsabilité à hauteur de 20%par le cabinet HubertB... ; Il demande à la Cour :

* de réformer le jugement du tribunal administratif de Toulon en date du 25 mars 2011 ;

* de condamner la commune de Trans en Provence à l'indemniser intégralement des préjudices subis à hauteur de 1 451 801 € ;

* de mettre à la charge de la commune de Trans en Provence le paiement d'une somme de 4 000 € en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Il soulève les mêmes moyens que ceux exposés dans le cadre de la requête n° 11MA01755 ;

Vu le mémoire enregistré le 20 octobre 2011, présenté pour M. A...E...par le cabinet HubertB... ; Il conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire en défense enregistré le 8 décembre 2011 présenté pour la commune de Trans en Provence, par Me G...D... ; Elle demande à la Cour :

* d'annuler le jugement n° 0902696 du tribunal administratif de Toulon en date du

25 mars 2011 par lequel elle a été condamnée à verser à M. E...la somme de 198 400 € en réparation des préjudices consécutifs à l'accident dont il a été victime le 17 juillet 2007 ainsi que la somme de 1 000 € en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

* de procéder à une réévaluation des chefs de préjudice de M.E... ;

* de mettre à la charge de M. E...le paiement d'une somme de 3 000 € en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soulève les mêmes moyens que ceux invoqués dans le cadre de la requête n° 11MA01755 ;

Vu le mémoire enregistré le 29 février 2012, présenté pour M.E..., par Me C...B... ; Il conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens ;

Vu le mémoire enregistré le 13 avril 2012, présenté pour la commune de

Trans en Provence par Me G...D... ; Elle conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens ;

Vu, en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, la lettre en date du 26 novembre 2012 par laquelle les parties ont été informées de la période à laquelle il était envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et de ce que l'instruction pourrait être close, au-delà du 28 février 2013, par l'émission d'une ordonnance de clôture ou d'un avis d'audience ;

Vu, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, la lettre en date du 4 mars 2013 par laquelle les parties ont été informées que la décision était susceptible d'être fondée sur un moyen relevé d'office ;

Vu l'ordonnance de clôture d'instruction immédiate en date du 9 avril 2013 ;

Vu la loi n° 84-594 du 12 juillet 1984 relative à la formation des agents de la fonction publique territoriale et complétant la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

Vu le décret n° 85-603 du 10 juin 1985 relatif à l'hygiène et à la sécurité au travail ainsi qu'à la médecine professionnelle et préventive dans la fonction publique territoriale ;

Vu le code des pensions civiles et militaires de retraite ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 30 avril 2013 :

- le rapport de Mme Vincent-Dominguez, rapporteur,

- les conclusions de Mme Hogedez, rapporteur public,

- et les observations de Me F..., substituant MeD..., pour la commune de Trans en Provence ;

1. Considérant que les requêtes susvisées sont dirigées contre le même jugement et ont fait l'objet d'une instruction commune ; qu'il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt ;

2. Considérant que M.E..., agent de maîtrise titulaire de la commune de Trans en Provence, a été victime, le 17 juillet 2007, d'un accident de service alors qu'il était en train d'abattre un arbre ; qu'il a adressé, le 5 septembre 2008, une demande indemnitaire en réparation de l'ensemble des préjudices subis du fait dudit accident ; qu'un refus lui ayant été opposé, il a saisi le tribunal administratif de Toulon d'un recours de plein contentieux ; que, par un jugement en date du 25 mars 2011, ledit tribunal a, sur le fondement de la responsabilité sans faute, condamné la commune de Trans en Provence à verser à M. E...la somme de 198 400 € en réparation des préjudices extrapatrimoniaux subis par celui-ci du fait dudit accident ; que M. E... et la commune de Trans en Provence, par le biais d'un appel croisé, interjettent appel dudit jugement ;

Sur la responsabilité :

3. Considérant qu'en vertu des articles L. 27 et L. 28 du code des pensions civiles et militaires de retraite, les fonctionnaires civils de l'État qui se trouvent dans l'incapacité permanente de continuer leurs fonctions en raison d'infirmités résultant de blessures ou de maladies contractées ou aggravées en service peuvent être radiés des cadres par anticipation et ont droit au versement d'une rente viagère d'invalidité cumulable avec la pension rémunérant les services ; que les articles 30 et 31 du décret du 9 septembre 1965 relatif au régime de retraite des fonctionnaires affiliés à la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales prévoient, conformément aux prescriptions du II de l'article 119 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, des règles comparables au profit des agents tributaires de la caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales ;

4. Considérant que ces dispositions déterminent forfaitairement la réparation à laquelle un fonctionnaire victime d'un accident de service ou atteint d'une maladie professionnelle peut prétendre, au titre de l'atteinte qu'il a subie dans son intégrité physique, dans le cadre de l'obligation qui incombe aux collectivités publiques de garantir leurs agents contre les risques qu'ils peuvent courir dans l'exercice de leurs fonctions ; qu'elles ne font cependant obstacle ni à ce que le fonctionnaire qui a enduré, du fait de l'accident ou de la maladie, des souffrances physiques ou morales et des préjudices esthétiques ou d'agrément, obtienne de la collectivité qui l'emploie, même en l'absence de faute de celle-ci, une indemnité complémentaire réparant ces chefs de préjudice, distincts de l'atteinte à l'intégrité physique, ni à ce qu'une action de droit commun pouvant aboutir à la réparation intégrale de l'ensemble du dommage soit engagée contre la collectivité, dans le cas notamment où l'accident ou la maladie serait imputable à une faute de nature à engager la responsabilité de cette collectivité ou à l'état d'un ouvrage public dont l'entretien incombait à celle-ci ;

En ce qui concerne la faute de la commune de Trans en Provence :

5. Considérant, en premier lieu, que si M. E...fait valoir en appel que son collègue de travail, chargé d'assurer sa sécurité en faisant basculer l'arbre tronçonné dans le tractopelle, aurait reculé ledit engin au lieu de l'avancer, aucune des pièces du dossier ne permet d'établir la véracité de ces allégations ; que la faute ainsi soulevée n'est pas établie ;

6. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article 6 du décret susvisé du

10 juin 1985, dans sa rédaction alors applicable : " En application du 2° (b) de l'article 1er de la loi du 12 juillet 1984 précitée une formation pratique et appropriée en matière d'hygiène et de sécurité est organisée : 1° Lors de l'entrée en fonctions des agents ; 2° Lorsque par suite d'un changement de fonctions, de techniques, de matériel ou d'une transformation des locaux, les agents se trouvent exposés à des risques nouveaux ; 3° En cas d'accident de service grave ou de maladie professionnelle ou à caractère professionnel grave ayant entraîné mort d'homme, ou paraissant devoir entraîner une incapacité permanente, ou ayant révélé l'existence d'un danger grave, même si les conséquences ont pu en être évitées ; 4° En cas d'accident de service ou de maladie professionnelle ou à caractère professionnel présentant un caractère répété à un même poste de travail, ou à des postes de travail similaires, ou dans une même fonction, ou des fonctions similaires (...) " ;

7. Considérant que M. E...est fondé à soutenir qu'il aurait dû, en application des dispositions précitées, bénéficier, sans avoir à en faire nécessairement la demande, d'une formation adéquate à l'élagage des arbres dès son entrée en fonctions ; que la circonstance que M. E...aurait, par la suite, chaque année, élagué quelques arbres, alors que telle n'était pas son activité principale, et qu'il aurait encadré une équipe, n'est pas de nature à ôter à ces agissements leur caractère fautif dès lors que, en l'absence de formation initiale, M. E...a pu reproduire, d'année en année, les mêmes erreurs sans que, par chance, elles ne donnent lieu à un accident ; que cette absence de formation est donc constitutive d'une faute de nature à engager la responsabilité de la commune de Trans en Provence ;

8. Considérant que cette absence de formation doit être regardée, dans les circonstances de l'espèce, comme ayant été à l'origine directe du préjudice subi par

M.E... qui, s'il avait été correctement formé, aurait eu connaissance non seulement des risques intrinsèques liés au vrillage d'un arbre mais aussi des techniques permettant de se prémunir contre tout accident de cette nature ;

En ce qui concerne la cause exonératoire de responsabilité :

9. Considérant que si la commune de Trans en Provence soutient que le dommage résulterait d'une force majeure de nature à l'exonérer totalement de sa responsabilité, tel n'est pas le cas dès lors que la chute d'un arbre dans le cadre de travaux d'élagage ainsi que son retournement ne présentent aucun caractère imprévisible ;

10. Considérant, par ailleurs, que M.E..., qui n'avait suivi aucune formation et ne présentait donc pas les aptitudes requises pour exercer ce type d'activités très dangereuses, ne peut être regardé comme ayant commis une faute en tournant le dos à l'arbre qui a vrillé et en laissant sa tronçonneuse allumée un bref instant ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. E...est fondé à soutenir que c'est à tort que le jugement attaqué a, d'une part, écarté toute responsabilité pour faute de la commune et, d'autre part, retenu à... ; que ledit jugement doit, par suite, être annulé ; qu'il y a lieu, par l'effet dévolutif de l'appel, de statuer sur les préjudices subis par M.E... ;

Sur l'évaluation des préjudices de M.E... :

12. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. E...est fondé à prétendre à une indemnisation non seulement au titre des préjudices extrapatrimoniaux qu'il estime avoir subis du fait de l'accident dont il a été victime mais également au titre des préjudices patrimoniaux ;

En ce qui concerne les préjudices extrapatrimoniaux :

13. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de l'instruction que l'expert désigné par le président du tribunal administratif de Toulon par ordonnance du 9 février 2009 a évalué à 6/7 les souffrances physiques de M.E..., devenu paraplégique, eu égard aux nombreuses et lourdes interventions chirurgicales qu'il a dû subir et à leurs suites ; qu'il sera fait une juste évaluation du préjudice subi à ce titre par M. E...en l'estimant à la somme de 18 000 € ;

14. Considérant, en deuxième lieu, que l'expert a évalué à 5/7 le préjudice esthétique de M. E...compte tenu des modifications induites par la paraplégie et l'atteinte plexuelle des membres ; qu'il sera fait une juste évaluation du préjudice subi à ce titre par M. E...en l'estimant à la somme de 13 000 € ;

15. Considérant, en troisième lieu, que l'expert a évalué à 4/7 le préjudice sexuel de M. E... compte tenu du niveau de l'atteinte médullaire ; qu'il sera fait une juste évaluation du préjudice subi à ce titre par M. E...en l'estimant à la somme de 8 000 € ;

16. Considérant, enfin, que l'invalidité dont M.E..., qui présente une incapacité permanente partielle de 85%, reste définitivement atteint, lui interdit l'accomplissement de nombreux actes de la vie quotidienne et l'empêche désormais de s'adonner notamment à la chasse, la randonnée, l'apiculture, et la surveillance des forêts en période estivale et emporte de graves conséquences sur sa vie personnelle ; qu'au vu de l'ensemble de ces éléments, il sera fait une juste appréciation des troubles dans les conditions d'existence subis par l'intéressé en les évaluant à la somme de 200 000 € ;

En ce qui concerne les préjudices patrimoniaux :

S'agissant des dépenses de santé :

17. Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. E...a réglé des dépenses afférentes à l'achat d'alèses en 2008, d'un rouleau antidérapant, d'une barre de maintien, de gants jetables et d'un appui-dos dont il n'est pas contesté qu'elles n'ont pas été prises en charge par son employeur ; que ces frais sont justifiés à hauteur de 265,38 € ; qu'eu égard à la nécessité de remplacer certains des produits susmentionnés, la commune de Trans en Provence est condamnée à verser à ce titre à M. E...la somme de 500 € ;

S'agissant des frais liés au handicap :

Quant aux frais de logement adapté :

18. Considérant, en premier lieu, que la dépense relative à l'installation d'une plateforme monte-escalier d'un montant total, avec alimentation, de 11 990,82 €, est nécessaire au vu de l'état de santé de M.E... qui circule en fauteuil roulant ; que, toutefois, il résulte de l'instruction que l'intéressé pouvait prétendre, pour cette dépense, à une prestation de compensation du handicap de 10 000 € ; que, par suite, il n'y a lieu de condamner la commune de Trans en Provence qu'au versement du solde de la dépense, soit la somme de 1990,82 € ;

19. Considérant, en deuxième lieu, que la nécessité des travaux de surélévation de la terrasse n'est pas établie par M.E... ;

20. Considérant, en troisième lieu, que si M. E...a fait établir un devis pour fusionner deux chambres afin qu'il puisse circuler en fauteuil roulant, il résulte de l'instruction que lesdits travaux n'ont pas été réalisés et que l'intéressé a finalement opté pour l'agrandissement de l'ouverture de la porte entre les deux chambres et la pose d'une porte coulissante ; qu'il suit de là que seules ces dernières dépenses peuvent être indemnisées à hauteur de 435,94 € ;

21. Considérant, en quatrième lieu, qu'il résulte également de l'instruction que la salle de bains a dû être entièrement réaménagée en raison du handicap de M.E... : pose d'une porte coulissante (255,80 € et 99 €), nouveaux sanitaires (1 102,87 €), plâtre (45,93 €, 36,78 €, 40,33 €) carrelage (542,24 €), réfection de la plomberie (78,14 €, 13,29 €) ; qu'au vu des factures produites par le requérant, il y a lieu d'évaluer lesdits travaux à la somme de 2 214 € ; que ne sont comprises dans ce montant ni les factures insuffisamment précises pour permettre d'en déterminer l'objet et le lien avec les travaux précités, ni celles afférentes à la pose d'une fenêtre et de volets, la nécessité de ces travaux n'étant pas établie ;

22. Considérant, en cinquième lieu, qu'il ne résulte pas suffisamment de l'instruction que les travaux de goudronnage et de bordures seraient nécessaires eu égard au handicap dont reste atteint M.E... ; qu'il y a donc lieu de rejeter les conclusions présentées par ce dernier à ce titre ;

23. Considérant, en sixième lieu, que la dépense afférente à l'installation d'un portail automatique est justifiée dès lors que M. E...ne peut, en raison de son handicap, s'extraire facilement de son véhicule ; qu'il y a lieu, dès lors, de condamner la commune de

Trans en Provence à verser à ce titre à M. E...la somme de 5 408,99 € ;

24. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la commune de

Trans en Provence est condamnée à verser à M. E...au titre des frais d'adaptation de son logement la somme globale de 10 049,75 € ;

Quant aux frais de véhicule adapté :

25. Considérant, en premier lieu, que si M. E...a acquis, le 25 février 2009, un véhicule de marque Kia, il n'est pas établi que celui-ci aurait été spécifiquement adapté à son handicap ; que la commune de Trans en Provence ne peut donc être condamnée au remboursement de cette somme ; qu'il résulte, en revanche, des pièces du dossier, que les frais d'aménagement du véhicule, dont la nécessité ressort du rapport d'expertise, sont évalués à 4 635,71 € ; qu'eu égard à l'âge de M.E..., il y a lieu de prévoir, pour le même montant, un renouvellement dudit aménagement, lesdits frais, bien que futurs, présentant un caractère certain ; qu'en outre, M. E...a dû engager des frais d'auto-école pour la régularisation de son permis B à hauteur de 287,50 € ;

26. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune de Trans en Provence est condamnée à verser à M.E..., au titre des frais d'aménagement de son véhicule, la somme de 9 558, 92 € ;

Quant à l'assistance d'une tierce personne :

27. Considérant qu'il ressort du rapport d'expertise établi par le Dr Cordier que l'état de santé de M. E...requiert l'assistance d'un auxiliaire de vie, de loisirs et d'accompagnement à raison de 112 heures par mois ;

28. Considérant cependant qu'il y a lieu, avant dire-droit sur les conclusions présentées à ce titre par M.E..., d'ordonner à ce dernier, placé à la retraite pour invalidité depuis la fin de l'année 2009, de produire tous justificatifs quant à la perception éventuelle d'une majoration pour tierce personne ou, depuis le 1er mars 2013, d'une prestation complémentaire pour recours à tierce personne, dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt ;

S'agissant des pertes de revenus :

29. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 57 de la loi n° 84-53 du

26 janvier 1984 : " Le fonctionnaire en activité a droit (...) 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions.

Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. Le fonctionnaire conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial et de l'indemnité de résidence. / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident (...) A des congés de longue maladie d'une durée maximale de trois ans dans le cas où il est constaté que la maladie met l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions, rend nécessaires un traitement et des soins prolongés et présente un caractère invalidant et de gravité confirmée.

Le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement pendant un an ; le traitement est réduit de moitié pendant les deux années qui suivent. L'intéressé conserve, en outre, ses droits à la totalité du supplément familial de traitement et de l'indemnité de résidence. (...) Les dispositions des deuxième, troisième et quatrième alinéas du 2° du présent article sont applicables aux congés de longue maladie " ;

30. Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite : " Le fonctionnaire civil qui se trouve dans l'incapacité permanente de continuer ses fonctions en raison d'infirmités résultant de blessures ou de maladie contractées ou aggravées soit en service, soit en accomplissant un acte de dévouement dans un intérêt public, soit en exposant ses jours pour sauver la vie d'une ou plusieurs personnes et qui n'a pu être reclassé dans un autre corps en application de l'article 63 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 précitée peut être radié des cadres par anticipation soit sur sa demande, soit d'office à l'expiration d'un délai de douze mois à compter de sa mise en congé si cette dernière a été prononcée en application des 2° et 3° de l'article 34 de la même loi ou à la fin du congé qui lui a été accordé en application du 4° du même article " ; qu'aux termes de l'article 28 du même code : " Le fonctionnaire civil radié des cadres dans les conditions prévues à l'article L. 27 a droit à une rente viagère d'invalidité cumulable, selon les modalités définies à l'article L. 30 ter, avec la pension rémunérant les services (...) " ;

31. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M.E..., victime d'un accident de service, avait droit, pendant son congé de maladie ordinaire ou de longue maladie, au versement d'un traitement intégral et, après sa mise à la retraite pour invalidité, outre à la pension rémunérant ses services, au versement d'une rente d'accident du travail destinée à compenser ses pertes de gains professionnels et l'incidence professionnelle de l'incapacité dont il reste atteint ; que, dans ces conditions, il n'est pas établi que M. E...aurait, comme il le soutient, subi la moindre perte de revenus ; que les conclusions présentées à ce titre par M. E... ne peuvent, dès lors, qu'être rejetées ;

S'agissant des frais divers :

32. Considérant, en premier lieu, que les frais de téléphone allégués ainsi que la nécessité de l'achat de vêtements ne sont pas établis ;

33. Considérant, en deuxième lieu, que l'épouse du requérant justifie avoir exposé des frais d'essence pour se rendre au chevet de son mari lorsqu'il était hospitalisé ; qu'il y a lieu de faire une juste évaluation desdits frais, strictement nécessaires à cet effet, en les estimant à la somme de 1 000 € ; qu'il est également établi qu'ont été exposés, à hauteur de 733,70 €, des frais hôteliers lorsque M. E...était hospitalisé au centre hospitalier universitaire de la Timone en juillet 2008 ; que ne sont, en revanche, pas justifiés les frais de repas exposés ;

34. Considérant, en troisième lieu, que les frais de location d'une télévision exposés par M. E...du fait de sa longue hospitalisation sont justifiés à hauteur de 434,60 € ; que, toutefois, la nécessité de l'achat d'un poste de télévision n'est nullement établie ;

35. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune de Trans en Provence est condamnée à verser à M.E..., au titre de frais divers, la somme de 2 168,30 € ;

Sur les frais d'expertise :

36. Considérant que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon ne s'est pas prononcé sur la dévolution des frais d'expertise et a ainsi méconnu la règle, applicable même sans texte à toute juridiction administrative, qui lui impartit, sauf dans le cas où un incident de procédure y ferait obstacle, d'épuiser son pouvoir juridictionnel ; que, par suite, il y a lieu d'annuler dans cette mesure le jugement attaqué, d'évoquer l'affaire sur ce point et de statuer sur la charge des frais d'expertise ;

37. Considérant que les frais et honoraires d'expertise s'élevant à la somme de 2 012,20 € mis à la charge de M. E...par ordonnance du président du tribunal administratif de Toulon en date du 2 septembre 2009 doivent être mis définitivement à la charge de la commune de Trans en Provence ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

38. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;

39. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que M.E..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, soit condamné à payer à la commune de

Trans en Provence la somme qu'elle réclame au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de ladite commune le paiement de la somme de 2 000 € en application des mêmes dispositions ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 0902696 du tribunal administratif de Toulon en date du

25 mars 2011 est annulé.

Article 2 : La commune de Trans en Provence est condamnée à verser à M. E...la somme de 261 276,97 € (deux cent soixante et un mille deux cent soixante seize euros et quatre vingt dix sept centimes) au titre de l'ensemble des préjudices subis hormis celui afférent à l'assistance d'une tierce personne. De cette somme, sera déduite la somme le cas échéant versée par la commune de Trans en Provence à la suite du jugement attaqué.

Article 3 : Il sera, avant de statuer sur les conclusions tendant au versement d'un capital pour l'assistance d'une tierce personne, procédé à un supplément d'instruction auprès de M. E...auquel il est enjoint de produire à la Cour, dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, tous éléments d'information quant à la perception éventuelle de la majoration pour assistance d'une tierce personne ou de la prestation complémentaire pour recours à tierce personne.

Article 4 : Le surplus des conclusions de M.E..., hors assistance d'une tierce personne, est rejeté.

Article 5 : Les frais d'expertise taxés et liquidés à la somme de 2 012,20 € (deux mille douze euros et vingt centimes) par ordonnance du président du tribunal administratif de Toulon en date du 2 septembre 2009 sont définitivement mis à la charge de la commune de Trans en Provence.

Article 6 : La commune de Trans en Provence versera à M. E...la somme de 2 000 € (deux mille euros) en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 7 : Les conclusions présentées par la commune de Trans en Provence en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 8 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...E...et à la commune de Trans en Provence.

Copie en sera adressée au trésorier payeur général du Var.

Délibéré après l'audience du 30 avril 2013, à laquelle siégeaient :

- M. Gonzales, président de chambre,

- M. Renouf, président assesseur,

- Mme Vincent-Dominguez, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 28 mai 2013.

Le rapporteur,

A. VINCENT-DOMINGUEZLe président,

S. GONZALESLe greffier,

C. LAUDIGEOISLa République mande et ordonne au préfet du Var en ce qui le concerne et à tous les huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

Le greffier,

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N° 11MA01755-11MA018182


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 8ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11MA01755
Date de la décision : 29/10/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-05-04-01-03 Fonctionnaires et agents publics. Positions. Congés. Congés de maladie. Accidents de service.


Composition du Tribunal
Président : M. GONZALES
Rapporteur ?: Mme Aurélia VINCENT-DOMINGUEZ
Rapporteur public ?: Mme HOGEDEZ
Avocat(s) : LLC et ASSOCIES - AVOCATS ; LLC et ASSOCIES - AVOCATS ; SELARL CABINET HUBERT DREVET

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2013-10-29;11ma01755 ?
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