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18/10/2013 | FRANCE | N°11MA04621

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre - formation à 3, 18 octobre 2013, 11MA04621


Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille le 16 décembre 2011, sous le n°11MA04621, présentée pour M. B...A..., demeurant..., par Me C...;

M. A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1103011 du 21 octobre 2011 du tribunal administratif de Nice qui a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté en date du 7 juillet 2011 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a rejeté sa demande de titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint

audit préfet de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale "...

Vu la requête, enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille le 16 décembre 2011, sous le n°11MA04621, présentée pour M. B...A..., demeurant..., par Me C...;

M. A...demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1103011 du 21 octobre 2011 du tribunal administratif de Nice qui a rejeté sa demande tendant, d'une part, à l'annulation de l'arrêté en date du 7 juillet 2011 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a rejeté sa demande de titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire et, d'autre part, à ce qu'il soit enjoint audit préfet de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale " dans le délai de trente jours à compter de la notification du jugement à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet précité portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

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Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Vu l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié ;

Vu la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures communes applicables aux Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;

Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 27 septembre 2013, le rapport de Mme Ciréfice, premier conseiller ;

1. Considérant que M.A..., de nationalité tunisienne, relève appel du jugement en date du 2 octobre 2011 du tribunal administratif de Nice qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 7 juillet 2011 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes a rejeté sa demande de titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant qu'à l'appui de sa demande, M. A...soutient notamment que les dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'étaient pas compatibles avec l'article 12 de la directive du 16 décembre 2008 susvisée ; que le tribunal a répondu à ce moyen en précisant que les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile selon lesquelles " I. - L'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation. " n'ont pas pour objet de dispenser de toute motivation l'obligation de quitter le territoire français mais seulement d'une motivation spécifique, que la motivation de la décision portant obligation de quitter le territoire français se confond avec celle portant refus de séjour dont elle découle nécessairement et n'implique pas, par conséquent, dès lors que ce refus est lui-même motivé et que les dispositions législatives qui permettent d'assortir ledit refus d'une obligation de quitter le territoire français ont été rappelées, une motivation en fait particulière ; qu'ainsi, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'une omission à statuer ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

3. Considérant d'une part, qu'aux termes du sixième considérant introductif de la directive du 16 décembre 2008, dite " directive retour " : " Les États membres devraient veiller à ce que, en mettant fin au séjour irrégulier de ressortissants de pays tiers, ils respectent une procédure équitable et transparente. Conformément aux principes généraux du droit de l'Union européenne, les décisions prises en vertu de la présente directive devraient l'être au cas par cas et tenir compte de critères objectifs, ce qui implique que l'on prenne en considération d'autres facteurs que le simple fait du séjour irrégulier. Lorsqu 'ils utilisent les formulaires types pour les décisions liées au retour, c'est-à-dire les décisions de retour et, le cas échéant, les décisions d'interdiction d'entrée ainsi que les décisions d'éloignement, les États membres devraient respecter ce principe et se conformer pleinement à l'ensemble des dispositions applicables de la présente directive " ; qu'aux termes de l'article 3 de cette directive : " Aux fins de la présente directive, on entend par : (...) 4) " décision de retour " : une décision ou un acte de nature administrative ou judiciaire déclarant illégal le séjour d'un ressortissant d'un pays tiers et imposant ou énonçant une obligation de retour ; 5) " éloignement " : l'exécution de l'obligation de retour, à savoir le transfert physique hors de l'Etat membre (...) " ; qu'aux termes de l'article 6, relatif à la fin du séjour irrégulier et à la décision de retour : " 1. Les États membres prennent une décision de retour à l'encontre de tout ressortissant d'un pays tiers en séjour irrégulier sur leur territoire, sans préjudice des exceptions visées aux paragraphes 2 à 5. / 2. Les ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier sur le territoire d'un État membre et titulaires d'un titre de séjour valable ou d'une autre autorisation conférant un droit de séjour délivrés par un autre État membre sont tenus de se rendre immédiatement sur le territoire de cet autre État membre. En cas de non-respect de cette obligation par le ressortissant concerné d'un pays tiers ou lorsque le départ immédiat du ressortissant d'un pays tiers est requis pour des motifs relevant de l'ordre public ou de la sécurité nationale, le paragraphe 1 s'applique. /

3. Les État membres peuvent s'abstenir de prendre une décision de retour à l'encontre d'un ressortissant d'un pays tiers en séjour irrégulier sur leur territoire si le ressortissant concerné d'un pays tiers est repris par un autre État membre en vertu d'accords ou d'arrangements bilatéraux existant à la date d'entrée en vigueur de la présente directive. Dans ce cas, l'État membre qui a repris le ressortissant concerné d'un pays tiers applique le paragraphe 1. / 4. À tout moment, les États membres peuvent décider d'accorder un titre de séjour autonome ou une autre autorisation conférant un droit de séjour pour des motifs charitables, humanitaires ou autres à un ressortissant d'un pays tiers en séjour irrégulier sur leur territoire. Dans ce cas, aucune décision de retour n'est prise. Si une décision de retour a déjà été prise, elle est annulée ou suspendue pour la durée de validité du titre de séjour ou d'une autre autorisation conférant un droit de séjour. / 5. Si un ressortissant d'un pays tiers en séjour irrégulier sur le territoire d'un État membre fait l'objet d'une procédure en cours portant sur le renouvellement de son titre de séjour ou d'une autre autorisation lui conférant un droit de séjour, cet État membre examine s'il y a lieu de s'abstenir de prendre une décision de retour jusqu'à l'achèvement de la procédure en cours, sans préjudice du paragraphe 6. / 6. La présente directive n'empêche pas les États membres d'adopter une décision portant sur la fin du séjour régulier en même temps qu'une décision de retour et/ou une décision d'éloignement et/ou d'interdiction d'entrée dans le cadre d'une même décision ou d'un même acte de nature administrative ou judiciaire, conformément à leur législation nationale, sans préjudice des garanties procédurales offertes au titre du chapitre III ainsi que d'autres dispositions pertinentes du droit communautaire et du droit national " ; qu'aux termes de l'article 7 de cette directive, relatif au " départ volontaire " : " 1. La décision de retour prévoit un délai approprié allant de sept à trente jours pour le départ volontaire, sans préjudice des exceptions visées aux paragraphes 2 et 4. Les États membres peuvent prévoir dans leur législation nationale que ce délai n'est accordé qu'à la suite d'une demande du ressortissant concerné d'un pays tiers. Dans ce cas, les États membres informent les ressortissants concernés de pays tiers de la possibilité de présenter une telle demande. / Le délai prévu au premier alinéa n'exclut pas la possibilité, pour les ressortissants concernés de pays tiers, de partir plus tôt. / 2. Si nécessaire, les États membres prolongent le délai de départ volontaire d'une durée appropriée, en tenant compte des circonstances propres à chaque cas, telles que la durée de séjour, l'existence d'enfants scolarisés et d'autres liens familiaux et sociaux (...) " ; qu'aux termes de l'article 8, intitulé " éloignement " : " 1. Les États membres prennent toutes les mesures nécessaires pour exécuter la décision de retour si aucun délai n'a été accordé pour un départ volontaire conformément à l'article 7, paragraphe 4, ou si l'obligation de retour n'a pas été respectée dans le délai accordé pour le départ volontaire conformément à l'article 7. (...) / 3. Les États membres peuvent adopter une décision ou un acte distinct de nature administrative ou judiciaire ordonnant l'éloignement (...) " ; qu'enfin, aux termes de l'article 12 de la directive, paragraphe 1 : " Les décisions de retour (...) ainsi que les décisions d'éloignement sont rendues par écrit, indiquent leurs motifs de fait et de droit et comportent des informations relatives aux voies de recours disponibles " ;

4. Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 511-1 code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable à la date de la décision contestée : " I. L'autorité administrative qui refuse la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour à un étranger ou qui lui retire son titre de séjour, son récépissé de demande de carte de séjour ou son autorisation provisoire de séjour, pour un motif autre que l'existence d'une menace à l'ordre public, peut assortir sa décision d'une obligation de quitter le territoire français, laquelle fixe le pays à destination duquel l'étranger sera renvoyé s'il ne respecte pas le délai de départ volontaire prévu au troisième alinéa. L'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation. (...) L'étranger dispose, pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, d'un délai d'un mois à compter de sa notification. Passé ce délai, cette obligation peut être exécutée d'office par l'administration (...) " ;

5. Considérant que tout justiciable peut faire valoir, par voie d 'exception, qu'après l'expiration des délais impartis, les autorités nationales ne peuvent ni laisser subsister ni continuer de faire application des règles, écrites ou non écrites, de droit national qui ne seraient pas compatibles avec les objectifs définis par les directives communautaires ; qu'il peut également se prévaloir, à l'appui d'un recours dirigé contre un acte administratif non réglementaire, des dispositions précises et inconditionnelles d'une directive, lorsque l'Etat n'a pas pris, dans les délais impartis par celle-ci, les mesures de transposition nécessaires ; que, s'agissant de la directive du 16 décembre 2008, le délai imparti aux Etats membres pour la transposer expirait, en vertu du paragraphe 1 de son article 20, le 24 décembre 2010 ; que la loi du 16 juin 2011, procédant à ladite transposition, n'est entrée en vigueur que le 18 juillet 2011, soit postérieurement à la décision attaquée du 7 juillet 2011 ;

6. Considérant qu'une mesure portant obligation de quitter le territoire français constitue une décision de retour au sens des articles 3 et 6 de la directive du 16 décembre 2008 ; que les dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui prévoient que l'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation, sont incompatibles avec les objectifs définis par l'article 12 de la directive, disposant qu'une décision de retour doit être motivée en fait et en droit ; que ces dernières dispositions, précises et inconditionnelles, peuvent être utilement invoquées à l'appui de la contestation d'une obligation de quitter le territoire français ;

7. Considérant, toutefois, que, lorsqu'une obligation de quitter le territoire français assortit un refus de séjour, la motivation de cette mesure se confond avec celle du refus de titre de séjour dont elle découle nécessairement et n'implique pas, par conséquent, dès lors que ce refus est lui-même motivé, de mention spécifique pour respecter les exigences de l'article 12 de la directive ; qu'en l'espèce, le refus de séjour satisfait à l'obligation de motivation, ce qui n'est d'ailleurs pas contesté par M. A...; que, par suite, l'obligation de quitter le territoire français est suffisamment motivée ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. " ;

10. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse à M. A...la somme que celui-ci réclame au titre des frais qu'il a exposés et qui ne sont pas compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.

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N° 11MA04621

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 11MA04621
Date de la décision : 18/10/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. BOCQUET
Rapporteur ?: Mme Virginie CIREFICE
Rapporteur public ?: Mme MARZOUG
Avocat(s) : CABINET CICCOLINI AVOCATS ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2013-10-18;11ma04621 ?
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