Vu la requête, enregistrée le 19 septembre 2011, présentée pour la SCI La Sauvagie, dont le siège social est situé lieu-dit La Sauvagie à Porto-Vecchio (20137), représentée par son gérant en exercice, et M. B... A..., en sa qualité de gérant de la SCI La Sauvagie, demeurant..., par MeC... ;
La SCI La Sauvagie et M. A...demandent à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1100471 du 24 juin 2011 par lequel le président du tribunal administratif de Bastia, saisi par le préfet de la Corse-du-Sud du procès-verbal de contravention de grande voirie dressé à leur encontre, a condamné M.A..., d'une part, à payer à l'Etat une amende de 1 500 euros et, d'autre part, à remettre les lieux irrégulièrement occupés sur le domaine public maritime dans leur état naturel, sans délai à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 700 euros par jour de retard ;
2°) de relaxer M. A...des poursuites de contravention de grande voirie engagées à son encontre ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code général de la propriété des personnes publiques ;
Vu le code pénal ;
Vu le décret n° 2003-172 du 25 février 2003 relatif aux peines d'amende applicables aux infractions de grande voirie commises sur le domaine public maritime en dehors des ports ;
Vu le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 17 septembre 2013 :
- le rapport de M. Chanon, premier conseiller ;
- et les conclusions de M. Deliancourt, rapporteur public ;
1. Considérant que, à la suite d'un contrôle sur place, le 12 avril 2011, d'un agent assermenté, un procès-verbal de contravention de grande voirie a été dressé le 17 mai 2011 à l'encontre de la SCI La Sauvagie et M. A...à raison de l'installation sans autorisation sur le domaine public maritime, lieu-dit La Sauvagie sur le territoire de la commune de Porto-Vecchio, d'un enrochement sur une longueur d'environ 130 mètres, entravant le cheminement des usagers ; que, saisi de ce procès-verbal par le préfet de la Corse-du-Sud, le président du tribunal administratif de Bastia, par jugement du 24 juin 2011, a condamné M. A...à payer à l'Etat une amende de 1 500 euros et à remettre les lieux dans leur état naturel sans délais, sous astreinte de 700 euros par jour de retard ; que la SCI La Sauvagie et M. A...relèvent appel de ce dernier jugement ;
Sur la régularité du jugement :
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 774-4 du code de justice administrative, applicable aux contraventions de grande voirie : " Toute partie doit être avertie du jour où l'affaire sera appelée à l'audience. Cet avertissement est notifié dans la forme administrative. Il peut être donné par lettre recommandée avec demande d'avis de réception " ;
3. Considérant que les appelants soutiennent que les parties n'ont pas été averties de la date de l'audience, ce que l'administration admet d'ailleurs en défense ; que, si le jugement mentionne que les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience, ce qui fait foi jusqu'à preuve contraire, il ressort de la fiche d'instruction Sagace que les parties n'ont pas été convoquées à l'audience ; que, par suite, la SCI La Sauvagie et M. A...sont fondés à soutenir que le jugement est irrégulier et doit, pour ce motif, être annulé ;
4. Considérant qu'il y a lieu pour la Cour d'évoquer et de statuer immédiatement sur les poursuites diligentées à l'encontre de la SCI La Sauvagie et M.A... ;
Sur le bien-fondé des poursuites :
5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 2132-2 du code général de la propriété des personnes publiques : " Les contraventions de grande voirie sont instituées par la loi ou par décret, selon le montant de l'amende encourue, en vue de la répression des manquements aux textes qui ont pour objet, pour les dépendances du domaine public n'appartenant pas à la voirie routière, la protection (...) de l'intégrité ou de l'utilisation de ce domaine public (...) " : qu'aux termes de l'article L. 2132-3 de ce code : " Nul ne peut bâtir sur le domaine public maritime ou y réaliser quelque aménagement ou quelque ouvrage que ce soit sous peine de leur démolition, de confiscation des matériaux et d'amende (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 2132-27 du même: " Les contraventions définies par les textes mentionnés à l'article L. 2132-2, qui sanctionnent les occupants sans titre d'une dépendance du domaine public, se commettent chaque journée et peuvent donner lieu au prononcé d'une amende pour chaque jour où l'occupation est constatée, lorsque cette occupation sans titre compromet l'accès à cette dépendance, son exploitation ou sa sécurité " ; qu'aux termes de l'article 1er du décret du 25 février 2003 : " Toute infraction en matière de grande voirie commise sur le domaine public maritime en dehors des ports (...) est punie de la peine d'amende prévue par l'article 131-13 du code pénal pour les contraventions de 5ème classe " ; qu'aux termes de l'article 131-13 du code pénal : " Constituent des contraventions les infractions que la loi punit d'une amende n'excédant pas 3 000 euros. Le montant de l'amende est le suivant : (...) 5° 1 500 euros au plus pour les contraventions de la 5ème classe (...) " ;
6. Considérant que la personne qui peut être poursuivie pour contravention de grande voirie est, soit celle qui a commis ou pour le compte de laquelle a été commise l'action qui est à l'origine de l'infraction, soit celle sous la garde de laquelle se trouvait l'objet qui a été la cause de la contravention ; que, lorsque le juge administratif est saisi d'un procès-verbal de contravention de grande voirie, il ne peut légalement décharger le contrevenant de l'obligation de réparer les atteintes portées au domaine public qu'au cas où le contrevenant produit des éléments de nature à établir que le dommage est imputable, de façon exclusive, à un cas de force majeure ou à un fait de l'administration assimilable à un cas de force majeure ;
7. Considérant que les appelants reconnaissent en appel, comme M. A...l'avaient déjà fait lors du constat du 12 avril 2011, que la SCI La Sauvagie, par l'intermédiaire de son gérant, a procédé à l'installation des enrochements en cause ; que la seule circonstance, à la supposer établie, que l'enrochement n'aurait été réalisé qu'aux seules fins de préserver la propriété de la SCI La Sauvagie de l'érosion marine n'est pas constitutive d'un cas de force majeure ;
8. Considérant que les faits reprochés à la SCI La Sauvagie et son gérant sont constitutifs, en application des dispositions précitées du code général de la propriété des personnes publiques, d'une contravention de grande voirie ; que, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de condamner M.A..., pris en sa qualité de gérant de la SCI La Sauvagie, qui doit être regardé comme ayant la garde de l'ouvrage, à payer à l'Etat une amende de 1 500 euros et à remettre dans leur état naturel les dépendances du domaine public maritime occupées irrégulièrement, si ce n'est déjà fait, dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt sous peine d'une astreinte de 200 euros par jour de retard ; que l'administration pourra procéder d'office à la démolition des installations litigieuses aux frais du contrevenant en cas d'inexécution ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
9. Considérant qu'aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;
10. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie principalement perdante dans la présente instance, la somme que la SCI La Sauvagie et M. A...demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens ;
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Bastia du 24 juin 2011 est annulé.
Article 2 : M.A..., pris en sa qualité de gérant de la SCI La Sauvagie, est condamné à payer à l'Etat une amende de 1 500 (mille cinq cents) euros.
Article 3 : M.A..., pris en la même qualité, devra, sous le contrôle de l'Etat, remettre, s'il ne l'a déjà fait, les lieux dans leur état naturel dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt, sous peine d'une astreinte de 200 euros par jour de retard. L'administration pourra procéder d'office à la démolition des enrochements litigieux aux frais du contrevenant en cas d'inexécution.
Article 4 : Les conclusions de la SCI La Sauvagie et M. A...tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SCI La Sauvagie, à M. B... A...et au ministre de l'écologie, du développement durable et de l'énergie.
Copie en sera adressée au préfet de la Corse-du-Sud.
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N° 11MA03682
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