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15/07/2013 | FRANCE | N°10MA03390

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 15 juillet 2013, 10MA03390


Vu la requête, enregistrée le 27 août 2010, présentée pour M. E...C...-B..., demeurant " ..., par la SCP J.F Boutet, avocat associé au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ; M. C...-B... demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 0604865 en date du 29 juin 2010 du tribunal administratif de Nice en tant qu'il n'a pas fait entièrement droit à ses conclusions tendant à la condamnation solidaire, conjointe ou l'un à défaut de l'autre, de la commune de Vallauris, de la SA du Nouveau Port de Vallauris Golfe-Juan, du département des Alpes-Maritimes, de la chambre d

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Vu la requête, enregistrée le 27 août 2010, présentée pour M. E...C...-B..., demeurant " ..., par la SCP J.F Boutet, avocat associé au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation ; M. C...-B... demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement n° 0604865 en date du 29 juin 2010 du tribunal administratif de Nice en tant qu'il n'a pas fait entièrement droit à ses conclusions tendant à la condamnation solidaire, conjointe ou l'un à défaut de l'autre, de la commune de Vallauris, de la SA du Nouveau Port de Vallauris Golfe-Juan, du département des Alpes-Maritimes, de la chambre de commerce et d'industrie de Nice-Côte d'Azur, du ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer et du ministre de la défense, à lui verser une somme de 90 160,94 euros au titre du préjudice subi suite à l'accident survenu le 2 juin 2003 à son voilier " Tico-Tico " ;

2°) de condamner solidairement, conjointement, ou l'un à défaut de l'autre, la commune de Vallauris, la SA du Nouveau Port de Vallauris Golfe-Juan, le département des Alpes-Maritimes, la chambre de commerce et d'industrie de Nice-Côte d'Azur, le ministre de l'équipement, des transports, du logement, du tourisme et de la mer et le ministre de la défense, à lui verser une somme de 90 160,94 euros au titre du préjudice subi suite à cet accident ;

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Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 24 juin 2013 :

- le rapport de M. Duchon-Doris, président-rapporteur,

- les conclusions de Mme Fedi, rapporteure publique,

- et les observations de Me D...pour la chambre de commerce et d'industrie de Nice, de Me A...du cabinet Rebuffat pour la société Covea Risks ;

1. Considérant que, dans le dernier état de ses écritures et tel que cela ressort du mémoire récapitulatif enregistré le 4 juin 2013 qu'il a adressé à la Cour, M. C...-B... doit être regardé comme interjetant appel du jugement en date du 29 juin 2010 du tribunal administratif de Nice en tant qu'il n'a pas fait entièrement droit à ses conclusions tendant à la condamnation de la SA du Nouveau Port de Vallauris Golfe-Juan à lui verser une somme de 90 160,94 euros au titre du préjudice subi suite à l'accident survenu le 2 juin 2003 à son voilier " Tico-Tico " ; que, par des conclusions incidentes, la SA du Nouveau Port de Vallauris Golfe-Juan demande également la réformation de ce jugement en tant qu'il l'a condamnée à verser à M. C...B...la somme de 6 301 euros ;

Sur l'intervention de la société Covea Risks :

2. Considérant que, dans les litiges de plein contentieux, sont seules recevables à former une intervention les personnes qui se prévalent d'un droit auquel la décision à rendre est susceptible de préjudicier ; qu'en se contentant de se prévaloir de sa qualité d'assureur responsabilité civile de la SA du Nouveau port de Vallauris Golfe Juan, la société Covea Risks ne justifie pas d'un droit de cette nature ; que, par suite, son intervention n'est pas recevable ;

Sur la régularité du jugement :

3. Considérant qu'en vertu de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, l'assuré social ou son ayant droit qui demande en justice la réparation d'un préjudice qu'il impute à un tiers doit indiquer sa qualité d'assuré social ; que cette obligation, sanctionnée par la possibilité reconnue aux caisses de sécurité sociale et au tiers responsable de demander pendant deux ans l'annulation du jugement prononcé sans que le tribunal ait été informé de la qualité d'assuré social du demandeur, a pour objet de permettre la mise en cause, à laquelle le juge administratif doit procéder d'office, des caisses de sécurité sociale dans les litiges opposant la victime et le tiers responsable de l'accident ; que, devant le tribunal administratif de Nice, M. C...-B... a notamment produit un bulletin d'hospitalisation faisant état de son affiliation à la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes ; qu'en ne communiquant pas la requête à cette caisse, le tribunal a entaché son jugement d'irrégularité ; qu'il y a donc lieu d'annuler ce jugement et, dans les circonstances de l'espèce, la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Martimes ayant été régulièrement mise en cause devant la Cour, d'évoquer et de statuer sur la demande de M. C...-B... dans la limite des conclusions d'appel;

Sur la responsabilité

4. Considérant, en premier lieu, qu'il est établi par les pièces du dossier et notamment par les attestations versées que, le 2 juin 2003, alors qu'il rentrait au port, le voilier de M. C... -B..., dénommé " Tico-Tico ", a heurté vers 6 heures 30 du matin un bloc rocheux, qui affleurait sous l'eau, juste après l'entrée du chenal d'accès commun à l'ancien port de pêche et au nouveau port de plaisance, dit port Camille Rayon, de la commune de Vallauris, lequel constitue un ouvrage public portuaire ; que ce bloc rocheux d'environ 20 tonnes, 2,5 mètres de haut, 3 mètres de large et 4 mètres de long, se trouvait à la base de l'extrémité de la digue sud, au niveau du phare, soit, selon le requérant, à environ 8 mètres de cette digue, et n'était pas signalé alors qu'il n'était pas visible et n'était pas mentionné sur la carte marine couvrant le port de Golfe-Juan ; qu'un courrier du maître du port de Vallauris en date du 13 février 2004, joint au dossier, atteste que la présence de ce rocher était ancienne puisque corrélative à l'ouverture du " nouveau port ", avait été initialement signalée mais ne l'était plus, son balisage étant " systématiquement emporté " par les flots durant l'hiver ; que la présence non signalée de ce rocher, échappé de l'enrochement de la digue sud, dans le chenal d'accès à ces ports, à moins de dix mètres de cette même digue, révèle un défaut d'entretien de l'ouvrage public qui engage la SA du Nouveau Port de Vallauris Golfe-Juan ;

5. Considérant, toutefois, en second lieu, que M. C...-B..., usager du " vieux port ", connaissait les lieux et était un marin qualifié ; que, dans ces conditions, le fait de ne pas avoir emprunté le chenal d'accès, large de 80 à 90 mètres, en son milieu, alors que rien ne l'en empêchait, l'accident ayant eu lieu vers 6 heures 30 du matin, et d'avoir " rasé " le bord de la digue alors que cette dernière, constituée d'un amoncellement pyramidal de blocs, n'est pas à bord franc et qu'il n'est pas contesté que la bathymétrie de la zone en cause était d'une profondeur de 1,60 m alors que le tirant d'eau du voilier du requérant était de 1,70 m, traduit une faute d'imprudence de M. C...-B... ; que cette faute du requérant est de nature à exonérer la société du Nouveau Port de Vallauris Golfe-Juan de la moitié de sa responsabilité ;

Sur les préjudices :

6. Considérant, en premier lieu, que, par les pièces produites au dossier, le requérant établit que le montant des frais de réparation de son voilier s'est élevé à 11 602,99 euros ;

7. Considérant, en deuxième lieu, que M. C...-B... n'établit pas que les autres frais dont il fait état correspondent à des charges qu'il aurait effectivement supportées et qui seraient directement liées à son accident ; qu'il ne produit aucun justificatif de frais de transport ou de stationnement du navire endommagé ; qu'en particulier, s'il soutient avoir été privé de la jouissance de son bateau durant 40 mois pour l'exercice de son activité de photographe marin, il n'établit, par les pièces du dossier, ni avoir dû louer un bateau, ni avoir perdu des rémunérations et n'explique ni n'établit la durée alléguée de la privation de jouissance de son voilier ;

8. Considérant, en troisième lieu, que M. C...-B... sollicite, au titre de son préjudice corporel, une indemnité de 2 500 euros en faisant valoir qu'il a été, d'une part, blessé à l'arcade sourcilière et a subi un traumatisme douloureux à la main gauche et, d'autre part, qu'il a subi des opérations à la main gauche en octobre et novembre 2003 puis en novembre 2007 en lien avec cet accident ; que s'il ressort notamment du certificat du docteur Pequignot, en date du 12 janvier 2004, que les opérations de 2003 tendant à réparer l'instabilité scapho-lunaire du poignet gauche du requérant sont en lien avec l'accident de juin 2003, cette seule circonstance ne peut suffire à regarder la totalité de la somme que réclame M. C...-B... au titre de la douleur et des désagréments qui en ont résulté comme justifiée ; qu'il en sera fait une juste appréciation en l'évaluant à 2 000 euros ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préjudice total indemnisable de M. C...-B... doit être arrêté à la somme de 13 602,99 euros ; que, compte tenu du partage de responsabilité susmentionné, la société du Nouveau Port de Vallauris Golfe-Juan doit être condamnée à verser à M. C...-B... la somme de 6 801,50 euros au titre de son accident survenu le 2 juin 2003 ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la SA du Nouveau Port de Vallauris Golfe-Juan qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. C...-B... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens ; qu'il n'y pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'accueillir les demandes présentées par les autres parties sur le même fondement ;

DECIDE :

Article 1er : L'intervention de la société Covea Risks n'est pas admise.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Nice est annulé en tant qu'il a statué sur les conclusions de M. C...-B... dirigées contre la société du Nouveau Port de Vallauris Golfe-Juan.

Article 3 : La société du Nouveau Port de Vallauris Golfe-Juan est condamnée à verser à M. E...C...-B... la somme de 6 801,50 euros en réparation des préjudices subis par ce dernier lors de son accident du 2 juin 2003.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. E...C...-B..., à la commune de Vallauris, à la société du Nouveau Port de Vallauris Golfe-Juan, au département des Alpes-Maritimes, à la chambre de commerce et d'industrie de Nice-Côte d'Azur, à la société Covea Risks, à la caisse primaire d'assurance maladie des Alpes-Maritimes, au ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de la mer, en charge des technologies vertes et des négociations sur le climat et au ministre de la défense.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 10MA03390
Date de la décision : 15/07/2013
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-01-02-01-03-02 Responsabilité de la puissance publique. Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité. Fondement de la responsabilité. Responsabilité sans faute. Responsabilité encourue du fait de l'exécution, de l'existence ou du fonctionnement de travaux ou d'ouvrages publics. Usagers des ouvrages publics.


Composition du Tribunal
Président : M. DUCHON-DORIS
Rapporteur ?: M. Jean-Christophe DUCHON-DORIS
Rapporteur public ?: Mme FEDI
Avocat(s) : ABEILLE et ASSOCIES - AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/07/2015
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2013-07-15;10ma03390 ?
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